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le même règne, un cahier où sont relatés les gages que le duc Eudes IV de Bourgogne alloua aux gens d'armes qu'il leva pour l'accompagner en Viennois. Nous y voyons la preuve que lorsqu'il s'agissait au moins de sortir de leur province, même pour une guerre de peu de durée, les ducs de Bourgogne à ce moment soldaient leurs vassaux. Le chevalier banneret, est-il dit en ce cahier, touche comme prêt, XXX sols tournois par jour; le chevalier simple, X sols tournois, et l'écuyer, VII sols tournois (1). Sous le roi Jean on appliqua plus que jamais le système des armées soldées. Nous rendons compte ici de l'ordonnance du 30 avril 1351 qui régit cette matière. Dans cette ordonnance, le roi déclare que, considérant la cherté des vivres et autres biens, qui existe en ce moment au royaume, la faiblesse des gages payés aux gens d'armes et gens de pied par ses prédécesseurs et par lui, il les augmente en cette saison, afin que ces gens de guerre le puissent servir loyalement, de cœur et de bonne volonté. Le

(1) Archives de la Côte-d'Or, B, 11733.

L'Aragon suivit l'exemple de la France et de l'Angleterre. Nous empruntons la citation suivante au Cours d'Histoire des Etats Européens de Max. Samson Fred. Schoell, tome IX", page 247: << Pierre IV fit, en 1376, la première tentative de changer le service féodal en une contribution en argent. Sa demande était nouvelle et inouïe, les Cortès en furent effarouchées, et le roi, voyant qu'elle avait produit un effet désagréable, la laissa tomber. Cependant la nation se familiarisa insensiblement avec une idée qui d'abord lui avait paru attentatoire à ses libertés, et sept ans plus tard, le même prince obtint, des représentants du peuple, une contribution en argent, à titre d'emprunt. Le premier pas était ainsi fait. Le second était d'obtenir des Cortès le don de l'avance; il n'éprouva pas de difficulté, et successivement la nation s'accoutuma au remplacement du service militaire par une contribution.>>

banneret, ajoute l'ordonnance, aura 40 sols tournois par jour; le simple chevalier, 20 sols tournois; l'écuyer, 10 sols, et le varlet armé de haubergeon, de bassinet, de gorgerette, de gantelets et de chape par dessus le haubergeon recevra 5 sols tournois. Tous les gens d'armes seront mis par grosses routes ou compagnies. La route, selon l'importance du capitaine, sera de 25, 30, 40, 50, 60, 70 et 80 hommes d'armes; en aucun cas elle ne devra avoir moins de 25 hommes d'armes (1). Le connétable, les maréchaux, le maître des arbalétriers, les maîtres d'hôtels et autres à qui il appartient de le faire, recevront les montres. S'ils ne le peuvent, ils délégueront des personnes convenables assez avisées pour reconnaître le défaut où il sera, et leur feront prêter serment de recevoir les montres loyalement, sans faveur pour personne. Les commissaires auront soin, lorsque les gens d'armes feront montre, que chacune des routes la fasse en particulier. Le capitaine y sera en personne; chaque chevalier, écuyer et valet armé s'y présentera sur son cheval d'armes. Chacun sera appelé en particulier devant les commissaires à la montre. Là sera écrit le nom et surnom du capitaine et des gens de sa compagnie, lė poil, la marque, la boutonneure et le prix du cheval de chacun. Le cheval sera prisé et marqué à la cuisse, d'un fer chaud, de tel signe qu'il plaira aux commissaires, et tous les chevaux de la route

(1) Nous savons que les chevaliers et écuyers sont seuls hommes d'armes.

seront marqués du même fer et du même signe. Nul cheval d'hommes d'armes ne sera reçu s'il n'est du prix de 30 livres tournois ou plus; nul cheval de valet, s'il n'est de 20 livres tournois ou plus. Le capitaine devra être prêt avec toute sa troupe à faire la montre armée toutes les fois qu'il en sera requis; alors cette montre doit être faite le plus rapidement possible par le seigneur ou capitaine de la route. Chacun sera appelé par son nom et surnom. Il sera bien regardé si le soldat monte le cheval inscrit à son nom, et s'il est armé suffisamment, comme il doit l'être. Ceux qui recevront la montre feront jurer aux gens d'armes et haubergeons que les chevaux et harnois présentés par eux leur appartiennent ou au moins qu'ils leur ont été confiés, de telle sorte qu'ils puissent s'en servir entièrement et sans fraude. Les montres devront avoir lieu souvent, armées ou désarmées, au moins deux fois par mois. L'ordre de faire montre doit être si soudain que nul ne puisse emprunter harnois ou cheval ne lui appartenant pas. Quand on trouvera un homme en défaut de quelque manière que ce soit, celui qui recevra ou fera faire la montre fera prélever et rabattre des gages du délinquant une amende proportionnée à sa faute, à moins que celui-ci ne fournisse une excuse légitime. Cette amende sera dénoncée au trésorier des guerres qui la rabattra en temps utile sur les gages de l'homme en défaut. Les gens d'armes jureront de ne pas quitter la compagnie de leur capitaine et de ne pas se mettre en une autre sans la volonté ou le congé du connétable, du maréchal, du maitre des arbalétriers ou de tel autre à qui il appar

tiendra de donner congé. Ceux qui obtiendront cette licence devront se faire casser au livre où leur montre aura été écrite. Les chefs de batailles (1) jureront qu'ils tiendront leurs gens d'armes et haubergeons armés, montés et armés comme au jour de la montre, à leur pouvoir et sans fraude; ils promettront de la même manière que si quelqu'un de leur compagnie est en défaut, ils le révéleront au connétable, au maréchal ou à qui il appartiendra. Les bannerets, qui sont sous les chefs de bataille, feront semblable serment, ainsi que les chevaliers bacheliers, écuyers et haubergeons, qui sont tous les bannerets. Les bannerets devront connaître par nom et surnom les gens d'armes et haubergeons de leur compagnie.

Haubergeons et gens d'armes feront semblables montre et serment. Si certains gens d'armes viennent par petites troupes, et n'ont point de chef ou capitaine, le connétable, les maréchaux, le maître des arbalétriers ou autres à qui il appartiendra, chercheront un chevalier capable qui leur convienne, et lui confieront une route de 25 ou 30 hommes d'armes. Il sera expressément recommandé aux gens de cette route d'obéir à ce chevalier et de marcher à sa suite, comme on le doit pour un capitaine. Ils feront

(1) Les batailles étaient les divisions d'une armée, les corps d'armée, le chef de bataille étant le commandant d'une division de l'armée, avant-garde, bataille, arrière-garde ou autre, le mot banneret qui vient après, est ici synonyme de capitaine de route. Ce capitaine était en effet presque ioujours un banueret, ou un assimilé à un banneret. Nous croyons donc devoir accepter cette opinion et adopter ces gradations, le chef de bataille, le capitaine ou banneret et ses soldats.

sous lui montre armée ou désarmée, ainsi qu'il a été dit plus haut, et ce chevalier devra prendre garde, selon son pouvoir, à ce qu'il ne se commette aucune faute en sa compagnie. Il aura pennoncel à queue avec ses armes, et touchera gages de banneret.

Le cheval qui sera marqué en la montre ne pourra être acheté ou échangé, donné ou aliéné autrement, sans volonté ou permission du connétable, maréchal ou autre à qui il appartiendra, durant le temps que son cavalier touchera des gages, et nul cheval ne pourra être marqué s'il n'a été reçu à montre. Si un homme d'armes ou haubergeon quittait son chef de bataille, de la volonté ou permission du connétable, du maréchal, du maître des arbalétriers ou autre ayant pouvoir à ce sujet, le banneret, chevalier ou écuyer dans la compagnie duquel cet homme avait été reçu, sera tenu de le dire ou de le signifier à ce chef de bataille. Si aucun cheval reçu à montre est blessé, meurt ou est perdu, celui à qui il appartient doit le faire savoir sans délai au connétable, ou au maréchal, ou au maitre des arbalétriers, ou à autre à qui il appartiendra, pour que ce cheval lui soit remplacé, afin que le cavalier puisse servir et n'ait pas occasion de toucher gages sans cause. L'arbalétrier à pied, pourvu d'une bonne arbalète, armé de plates (1), de cervelière, de gorgerette, d'épée, de couteau; pourvu de harnois de bras, en fer et en cuir, aura par jour trois sols tournois. Un

(1) Armure de lames de fer.

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