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& de la morale chrétienne, que Dieu a revelez à fon
églife, & que des hommes divins nous ont laiffé
écrit. Les heretiques ont compris cette injustice, quoi-
qu'ils ayent eu de la peine à l'avouer. Car après avoir
refufé d'obéir au légitime fucceffeur de faint Pierre,
pour qui Jesus-Chrift a prié, afin que fa foi ne man-
quât point, & qu'il confirmât fes freres après sa con-
verfion; après avoir animé les peuples à la revolte,
avoir ruiné des provinces par leurs féditions & par leurs
violences; ils ont été obligez d'établir des chefs de leurs
sectes, & de fonder de nouveaux pontificats à Wit-
temberg & à Genêve. Ils ont créé une nouvelle efpece
de magiftrats, dans je ne fçai quelles villes obfcures de
leur parti, de forte qu'ils cherchent dans leurs fyno-
des, qu'ils tiennent fans aucun droit, & fans aucune
forme ancienne, la même puissance qu'ils ne peuvent
fouffrir dans l'église catholique ; & ils reconnoissent
les Calvins, les Luthers, & quelques autres petits.
docteurs pour leurs maîtres, & pour les interprétes
de leur religion.

On a permis à tout le monde d'affister au con-
cile; on y a invité tout le monde en general & en
particulier; on a offert des fûretez publiques à tous
ceux qui voudroient ou difputer, ou s'éclaircir des
points de controverse, ou donner des avis, ou faire
même quelques plaintes ; & cependant les heretiques.
murmurent encore contre cette fainte affemblée. N'est-
ce pas une chofe injufte que de ne vouloir pas fe fou-
mettre ni aux decrets des papes, ni à ceux des con-
ciles, & de rejetter ce confentement & cette con-
formité de créance que toute l'antiquité a reverée ? Ce-
pendant ces gens qui n'écoutent que leurs passions,
Tome XXXIV,
Bb

AN. 1564.

& qui veulent vivre fans loix, fe couvrent du nom

AN. 1564. de l'écriture & de la parole de Dieu; ils fe retranchent là, comme dans leur fort; ils ne veulent point d'autre juge; ils fe moquent des jugemens des hommes fragiles, qui peuvent tromper & être trompez ; comme s'ils n'étoient pas hommes eux-mêmes, comme s'ils avoient le privilege d'être infaillibles, comme s'il n'y avoit rien de faint & de veritable, que ce qu'ils ont bien voulu s'imaginer; ou comme s'il n'y avoit point de jufte interprétation des écritures, que celle qu'ils trouvent conforme à leur fens.

Le nonce, après s'être fort étendu fur le mépris que les heretiques faifoient de l'autorité de l'église, à qui Dieu a promis qu'il feroit avec elle jufqu'à la confommation des fiecles, & que les portes de l'enfer ne prévaudroient point contre elle, représenta le renversement de plufieurs états, & les defordres qu'il avoit vûs lui-même dans fes derniers voyages. Il fit une peinture vive & naturelle des revoltes, des mouvemens, des meurtres, des pillages, des facrileges, des violences exercées contre les prêtres, des ruines des temples & des autels, des guerres civiles & des revolutions étranges, que ces nouvelles opinions avoient caufées. Il tomba fur les defordres de la Pologne. Il fit une comparaifon de la tranquillité ancienne de ce royaume, de fa religion, de cette union de fentimens qui fait la force & la fûreté des états, avec les troubles & les divifions présentes. Il exhorta les Polonois à maintenir l'honneur de leur nation & la gloire que leurs ancêtres leur avoient laiffée, d'être vaillans & d'être pieux; à recevoir les faints decrets d'un concile univerfel, qui remedioit à toutes les

maladies de l'état & des particuliers, & à renoncer à ces opinions fi incertaines, fi diverfes, fi contraires entre elles-mêmes, que la malice de quelques-uns avoit introduites, & que la legereté & le libertinage de plufieurs avoient entretenues. Il finit en protestant devant Dieu, qu'il les avoit avertis plufieurs fois en public & en particulier par l'ordre du pape ; & qu'au jour que les hommes feront présentez au redoutable tribunal de Jefus-Chrift avec tous leurs. vices & leurs fauffes vertus, il feroit des reproches aux obftinez, & rendroit temoignage contre

eux.

A

AN. 1564.

LXXXII. Combien le fénat

difcours.

Gratiani, vit.

Commend. I. 2. c.
Raynald,ad hune

II.

annum n. 54.

A ces mots le nonce présenta le livre au roi : il avoit parlé avec tant de gravité, de zele & d'efficace, parut touché de ce que non-feulement il toucha le fenat, & particulierement les anciens fenateurs qui fe fouvenoient de l'état paifible du royaume & de la naiffance des troubles, mais encore il étonna les heretiques. Gratiani, qui nous a donné la vie de Commendon, dit qu'il affifta à cette action, tenant le livre qu'on devoit préfenter, & qu'il peut affurer qu'il vit plufieurs perfonnes de l'affemblée qui fondoient en larmes. Après que le nonce eut achevé fon difcours, & présenté le livre, il voulut fortir du fenat pour laiffer deliberer : mais le roi l'arrêta, & lui dit en fouriant. Vous fçavez fi peu notre langue, que nous opine»rons devant vous auffi librement que fi vous étiez

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forti; & auffi-tôt on alla aux opinions. L'archevêque de Gnefne qui parla le premier, loua en termes magnifiques le zele du pape, & la fageffe des peres du concile, fuivant fon efprit ordinaire; & après tous ces éloges, il fut d'avis qu'on reçût le livre avec hon

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LXXXIII.

Le roi & le fénat

Trente.

neur, mais qu'on ne rendit aucune reponse positive, AN. 1564. qu'après que le roi l'auroit lû & examiné à loisir dans fon confeil. Il s'éleva un grand murmure du côté des évêques & des catholiques contre cet avis, qui fembloit foumettre les decrets du concile au jugement du roi & du fenat. Alors le roi fans attendre les avis de Pologne recoi- des autres, qu'il avoit affez compris par ce murmure, vent le concile de prit la parole & dit: que le nonce avoit parlé avec Gratiani, ut fur tant d'ordre, tant de jugement & tant de force, qu'il se sentoit perfuadé de fes raifons; d'autant plus qu'il n'avoit pas prévu qu'on lui dût donner une fi prompte audience, & qu'on pouvoit croire que ce difcours lui avoit été infpiré de Dieu. Que pour lui il fe croyoit obligé de recevoir les décrets du concile, & d'obéir, comme il étoit jufte, à toutes fes ordonnances. Le vice-chancelier, felon la coutume, rendit réponse à Commendon conformement à l'avis du roi, & ce prince écrivit au pape pour lui marquer avec quelle foumiffion il recevoit le concile. Sa lettre est datée du dix-huitieme d'Août.

Pallav. ut fup.l. 24. C. 13. 7. 3.

LXXXIV.
Le pape apprend

aux cardinaux cet

Pologne.

nal. hoc ann. n. 45.

Le pape annonça cette heureuse nouvelle au college des cardinaux dans un confiftoire tenu le fixieme te réception en d'Octobre, où il dit que le roi de Pologne dans l'afRaynald. in an- semblée de fes états, en préfence même des fenateurs heretiques, avoit reçu le livre des decisions du concile de Trente présenté par fon nonce, & qu'il lui promettoit d'employer fes foins pour en faire obferver les decrets dans fon royaume. Il ajouta que ce prince avoit publié plufieurs édits contre les heretiques, & fur-tout les étrangers qui répandoient leurs nouvelles erreurs, & qu'il les avoit obligez de fortir de fes états. Les lettres de ce roi furent lûes par le car

dinal de Gonzague, comme le dernier prêtre, parce AN. 1564. qu'il n'y avoit aucun cardinal diacre; & fa fainteté loua fort ce prince, qui ayant un royaume rempli d'heretiques, avoit néanmoins preferé l'acceptation & la publication du concile à tous les menagemens que la politique pouvoit lui infpirer de garder avec eux; exemple, dit-il, que tous les autres princes devroient fuivre & il ordonna aux cardinaux protecteurs de leur en écrire, & de leur propofer la conduite du roi de Pologne. L'édit de ce prince pour chasser les heretiques étrangers eft du feptieme du mois d'Août.

pas,

Pie IV. ne s'appliqua plus enfuite qu'à regler la difcipline de l'églife, conformement aux decrets du concile. Par une premiere bulle, il obligea à la refidence les évêques, & les autres beneficiers à charge d'ames, ordonnant que les biens de ceux qui ne résideroient seroient confifquez au profit de la chambre apoftolique. Il y en eut une feconde beaucoup plus rigoureuse fur la même obligation de la résidence; & par une troisieme il declara, que les graces qu'on accordoit à quelques beneficiers de recevoir les fruits fans refider, en faveur de leurs études, ne feroient d'aucune valeur fans le confentement des ordinaires. Par une autre, il condamnoit à des peines très-rigoureufes tous ceux qui poffedoient des benefices en confidence; & il publia la forme du ferment que tous les beneficiers feculiers & reguliers, tant les clercs que les laïcs qui étoient engagez dans quelque ordre militaire, devoient faire avant que d'entrer en poffeffion d'aucun benefice. Cette profeffion de foi fe trouve à la fin des actes du concile, & la bulle qui fut donnée

LXXXV.

Différentes bulles du pape pour la difcipline.

Ciacon. in vit.

Pontif. t. 3. pag.
Spond. hoc ann:

880. & 881.

n. 2.

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