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AN. 1565.

LXXXIX.

Edit de Moulins pour ce qui concerne l'églife. Ordon. des rois

par Fontanon.

Mémoire du cler

B.12. p. 4.

falloit ôter les épices & vacations, en donnant des gages honnêtes & fuffifans aux juges. Sur ces propofitions qu'il détailla longuement, on délibéra avec encore plus de longueur. Enfin l'on rendit dans le mois de Février le célébre édit de Moulins, qui contient quatre-vingt- fix chefs, parmi lesquels il y a quelques reglemens très-utiles, pour foulager les peuples, & abréger les procez. L'article neuvieme conde Fr. recueillies serve aux ecclesiastiques leurs privileges, & n'y prétend déroger en aucune maniere. Dans le cinquantegé, t. 1. 2. c. 91. huitieme on regle la forme dans laquelle les procez criminels des gens d'églife doivent être inftruits & jugez. Dans la cinquante-cinquieme on ordonne que les preuves de tonfures & de profeffion monaftique feront reçuës par lettres & non par témoins. Dans le trenteneuvieme, que les procez criminels des délits, & cas privilégiez, feront inftruits & jugez par les juges royaux contre les ecclefiaftiques. Le foixante-quatorzieme enjoint de faire exécuter réellement les ordonnances faites pour interdire les confraires, afssemblées & feftins accoutumez, comme des occafions qui donnent lieu au trouble, à la débauche, aux difputes & aux monopoles. Le foixante-treizieme ordonne aux officiers royaux de faire obferver les édits concernant les hôpitaux, afin que les revenus foient dûëment employez au foulagement des pauvres. De plus, que pauvres de chaque ville, bourg & village feront nourris & entretenus par les habitans, fans qu'ils puiffent demander l'aumône, ailleurs que dans le lieu de leur domicile. Le foixante-quinzieme permet aux évêques d'examiner les graduez & de s'affurer de leur capacité, lorfqu'ils fe préfentent pour requerir quelque benefice.

les

Le foixante-dix-feptieme défend à toutes perfonnes AN. 1565 d'écrire, imprimer, ou expofer en vente aucuns livres, libelles ou écrits diffamatoires contre l'honneur & renommée des perfonnes, fous quelque prétexte que ce foit, à peine de punition extraordinaire. Le foixantedix-huitieme défend de même à toutes perfonnes d'imprimer ou faire imprimer aucuns livres ou traitez fans permission, & lettres de privilege de fa majesté, auquel cas il est enjoint à l'imprimeur d'y mettre & inférer fon nom, fon domicile, & ledit privilege, à peine de privation de biens & de punition corporelle. Enfin le quatre-vingt-sixieme défend tous blafphêmes & juremens du nom de Dieu, & veur que les jureurs & blafphémateurs foient punis non - feulement d'amende pécuniaire, mais de punition corporelle, dont on charge l'honneur & la confcience des juges.

XC.
Cet édit eft vérifié

Cet édit ayant été porté au parlement, & l'affaire mise en délibération, on fut d'avis de s'y oppofer à l'égard de quelques articles : mais le roi étant de re- en parlement, tour à Paris, envoya le dixieme de Juillet de nouvelles lettres dans lesquelles on répondoit aux difficultez. Ces lettres avec l'édit ayant été lûës le vingt- troisieme de Juillet, on le vérifia, en ajoutant feulement qu'eû égard à ces difficultez, on feroit de très-humbles remontrances au roi, Avant que la cour partît pour Moulins, les Colignis par ordre exprès de la majesté, se reconcilierent en apparence avec les Guifes. Cette reconciliation des qui fe fit entre Anne d'Eft, veuve du défunt duc de Guife, & le cardinal de Lorraine d'une part, & les Colignis de l'autre, avoit été le principal but de l'affemblée de Moulins. L'amiral jura folemnellement

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XCI. Réconciliation

Colignis & des

Guiles.
De Thou, hift.

39. hoc. anno

qu'il n'avoit point été l'auteur du meurtre du duc de

AN. 1566. Guife, qu'il n'y avoit jamais confenti. Après quoi le roi leur commanda d'être amis, & de vivre ensemble en bonne intelligence. Ils s'embrafferent en présence de fa majesté, & fe promirent réciproquement d'oublier le paffé.

XCII.

ris entre les Ca

reflans.

Belleforêt, l. 6.

F103.

Le roi de retour à Paris, fit faire en actions de graces une proceffion generale, de l'église de sainte Geneviéve à la cathédrale à laquelle il affista, accompagné de toute la cour. Dans le mois de Juillet fuivant, il y eut une conférence à Paris dans l'hôtel de Nevers, Conférence à Pa- entre les Catholiques & les Proteftans. Elle fut protholiques & Pro- curée par Louis de Bourbon duc de Montpenfier, De Thou hift. prince du fang, dans le deffein de ramener à la relilib. 39. hoc anno. gion catholique Françoise de Bourbon fa fille du premier lit, & Robert de la Mark duc de Bourbon fon mari, qui étoient Calviniftes. Dans cette conférence fe trouverent du côté des Catholiques Simon Vigor, depuis archevêque de Narbonne, & Claude de Saintes depuis évêque d'Evreux; & de l'autre côté deux ministres, fçavoir, Jean de l'Epine apoftat de l'ordre de faint Dominique, & Hugues Sureau du Rofier. On tira celui-ci exprès de prifon, où il avoit été mis, pour le punir d'un libelle qu'il avoit compofé, dans lequel entr'autres propofitions féditieufes, il avoit enfeigné cette maxime déteftable; qu'il eft permis de tuer un roi ou un prince contraire à la religion. Il y avoit aufsi deux notaires, & les actes en furent imprimez en François.

Cette conférence n'eut pas le fuccès qu'en espéroit le duc de Montpenfier pour la converfion de fa fille. Après une dispute affez longue & pleine d'animosité,

dans laquelle les miniftres furent reduits à ce point, AN. 1566.

d'aimer mieux nier la toute - puiffance de Dieu, ou du moins la refferrer extrêmement, que de confeffer la présence réelle du corps de Jefus-Chrift dans la sainte Euchariftie; l'on fe retira fans s'être accordé fur rien.

ХСІП.
Les Catholiques

en viennent aux

Peu de tems avant cette conférence, Robert Pellevé, évêque de Pamiers, ayant voulu empêcher les Proteftans de s'affembler conformément aux ordonnan- & les Proteftans ces, écrivit contr'eux en cour, & les déféra comme mains à Pamiers, violateurs des édits. En conféquence de cette dénon- De Thou, L. 39 ciation, le roi ne voulant point admettre de magiftrats heretiques, lorfqu'on lui préfenta les noms de ceux qui avoient été élus; défendit dans Pamiers tout autre exercice que celui de la religion catholique, & ordonna à Damville gouverneur du Languedoc, d'y tenir la main. Les Proteftans firent inutilement des remontrances contre ces ordres; & voyant qu'ils ne pouvoient les faire révoquer, ils prirent le parti de les violer. Ils s'affemblerent, non pas en public à la vérité, mais dans les maisons particulieres. Les Catholiques le fçurent, & s'y oppoferent autant qu'il fut en eux. La querelle s'échauffa: on en vint aux mains le dix-neuvieme de Mai. Les jours fuivans la fédition augmenta, & devint violente. Les Proteftans attaquerent la maifon d'un nommé la Brouffe, la pillerent & y mirent le feu. La Brousse fut tué le quinzieme de Juin, & plufieurs autres furent blessez. L'on pilla le couvent des Carmes, & l'on y tua quelques religieux. Le monaftere des Auguftins fut auffi forcé, l'on y renverfa les images. L'on fit la même chose dans l'église de faint François, & dans l'hôpital de la ville. Le fixieme on

attaqua l'églife des Dominiquains, qui fut auffi pillée. AN. 1566. Le comte de Joyeuse, lieutenant de roi dans la province, envoya à Pamiers Jean Nogaret de la Valette, qui, pour appaifer la fédition, propofa ces conditions aux Proteftans : que les prifonniers de Pamiers & de Foix feroient délivrez de part & d'autre ; que l'on congédieroit des deux côtez les gens de guerre, qu'on avoir reçu du dehors; qu'on ôteroit les armes aux particuliers, pour être dépofées dans la maison de ville; & qu'on s'abandonneroit pour le refte à la volonté du roi, dont on attendoit les ordres de jour en jour. Les Proteftans obéirent. Sur ces entrefaites le comte de Joyeuse arriva, & demanda à loger dans la ville, avec fufent l'entrée au trois compagnies de fantaffins. Les Proteftans prirent cette demande pour un acte d'hoftilité, & refuferent de recevoir le comte. Celui-ci envoya en cour pour s'en plaindre; les habitans y envoyerent auffi pour arrêter les fuites de cette affaire; les Calviniftes firent la même chose pour s'excuser.

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XCIV.

Les habitans re

comte Joyeuse,

Le roi y envoya Jacques d'Angennes de Rambouillet, avec qui les vicomtes de Rabat & de Caumont s'aboucherent; & il fut conclu qu'il y auroit une treve. Le vingt-troifieme d'Août on fit sortir la garnison de la ville: Elle étoit compofée de fix cens moufquetaires. Les coupables fe retirerent avec eux. Le lendemain d'Angennes entra dans la ville avec une troupe.

de gen's de guerre, tambour battant & enfeignes dé

ployées, & ne fit aucune peine aux habitans. De-là il fe rendit à Foix; & auffi-tôt Joyeuse vint à Pamiers, où il fut reçu honorablement, & avec soumission, du moins en apparence. Un président du parlement de Toulouse, accompagné de fix confeillers déléguez

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