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AN. 1566.

CIX.

ce d'Orange.

De Thou, hifa

hoc an. l. 49.

Les députez répondirent par écrit, que les ordres, qui avoient été envoyez n'avoient pas été observez, comme on devoit le faire. Que l'on n'y avoit eu prefque au- Leurs griefs qu'ils cun égard ni à Tournai, ni à Lille, ni à Mons, ni à Ai- propofent au prinre, ni à Ath, ni à Bruxelles; plufieurs ayant été faits prifonniers pour la religion Que quant à eux, ils avoient fait tous leurs efforts pour empêcher d'autres assemblées; mais qu'ils n'avoient pû rien obtenir du peuple, qui avoit conçu de violens foupçons de ce que la reponfe que la gouvernante avoit promis de donner dans deux mois, n'avoit pas encore paru, & n'étoit point venue d'Efpagne; outre qu'on ne parloit plus de l'affemblée générale des états de Flandres, qu'on avoit fait espérer. Que d'ailleurs les confédérez protestoient qu'ils ignoroient que les François euffent aucune part aux troubles, comme on le difoit : Que puisqu'on se plaifoit à les calomnier en leur imputant qu'ils avoient porté le peuple à s'affembler pour faire des prêches; ils étoient prêts à fe purger de cette calomnie, & du crime de rébellion : Qu'encore que la plupart d'entr'eux fuiviffent la doctrine des Proteftans, néanmoins la religion ne les empêcheroit jamais de garder au roi l'obéiffance & la fidelité qu'ils lui devoient: Qu'ils ne se défioient point de la clémence de ce prince, mais que les confédérez croyoient, que puifque leur confcience ne leur reprochoit aucun crime, ils n'avoient pas befoin de cet oubli des chofes paffées, que la gou vernante leur offroit, n'ayant rien commis qui méritât fon reffentiment. Ils ajouterent à cela d'autres plaintes.

Qu'on les déchiroit de tous côtez par les difcours. qu'on tenoit d'eux, comme s'ils étoient coupables & Tome XXXIV.

Y y

convaincus du crime de rebellion. Que les chevaAN. 1566. liers de la toifon d'or, les grands & les autres évitoient leur compagnie, fur le bruit que le roi arriveroit bientôt en Flandres, & les puniroit févérement; que fa majesté avoit déja demandé passage par la France, & que le duc de Savoye lui avoit offert pour cela fes fervices. De plus, que le clergé devoit donner une fomme confidérable d'argent pour les frais de la guerre. Qu'ils ne pouvoient diffimuler que s'appercevant qu'on ne vouloit point pourvoir à leur fûreté, ils n'euffent pour leur défenfe particuliere fait en Allemagne des amis, du fecours defquels ils fe ferviroient, quand il en feroit befoin: mais qu'ils proteftoient n'avoir fait aucune entreprise avec les François. Qu'ils demandoient donc que la gouvernante pourvût fuffisamment à la fûreté des confédérez; & qu'ils regarderoient comme une caution & une affurance pour eux, si elle recevoit dans fes confeils le prince d'Orange, le comte d'Egmond, & le comte de Horn, feigneurs confidérables par leur mérite & par leur fidélité; & qu'on n'ordonnât rien fur cette affaire, fans les y avoir appellez. Brederode avoit réduit cet écrit à neuf chefs, & en fut lui-même le porteur à fes compagnons qui l'attendoient à faint Tron.

CX.

des confédérez à la

gouvernante.

Srada ib.

Chacun jugea à propos d'envoyer à la gouvernante Autre requête Louis de Naffau accompagné de dix gentils-hommes, & de lui présenter une requête, qui comprenoit ces De Thou, 1.40. neuf articles. Mais ils ajoutoient fur la fin, que fi l'on ne rendoit à la patrie fon ancienne tranquillité, ils feroient contraints, malgré eux, d'aller chercher du fecours chez les étrangers, & qu'il pourroit arriver, que les François ennemis perpétuels des Pays-Bas, y

fuffent attirez par les troubles domeftiques. Cette menace du fecours des étrangers, mais principalement des François, intrigua fort la gouvernante, qui, après avoir fait lire cette requête dans le confeil, & entendu les opinions, répondit à Louis de Nassau, que les chevaliers de la toifon d'or devoient se rendre à Bruxelles le vingt-sixiéme d'Août, & qu'elle les confulteroit fur cette affaire.

AN. 1566.

CXI.

Le prince d'Oran

verneur d'Anvers,

Strada de bello

sBelgico, l. sa

CXII.

Ordres du roi d'Espagne modé

Cependant le prince d'Orange étant de retour à Anvers, où il trouva le trouble beaucoup augmenté, ge eft fait gouavertit la gouvernante que les habitans l'avoient fol- & y met garnifon. licité d'en prendre le gouvernement, & d'y mettre à sa volonté une garnison pour la défense & la sûreté de la ville. La gouvernante le lui ayant permis, il leva des gens demanda des gardes pour fa de guerre, perfonne, les obtint, & représenta avec plaifir le perfonnage de gouverneur d'Anvers, dans l'efpérance d'y représenter dans peu de tems celui de fouverain, s'il pouvoit y parvenir. Peu après le roi d'Espagne fentant enfin la néceffité de modérer fes édits, écrivit à la gouvernante qu'il lui permettoit de renvoyer les inquifiteurs éccléfiaftiques, pourvû qu'on donnât auparavant leurs fonctions aux évêques, parce qu'il ne vouloit pas, dit-il, priver la religion du fecours de ceux qui pouvoient connoître des causes de la foi, & de venger les injures qui lui feroient faites. Que de plus il trouvoit bon, que le confeil de Flandres apportât quelque tempérament aux ordonnances de Charles V. mais qu'il vouloit que le confeil d'Efpagne en eût connoiffance, & qu'il approuvât cette modération, avant qu'on la publiât dans les provinces. Qu'enfin on pouvoit pardonner aux conjurez &

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rez, qui viennent Strada.ut fuprà.

trop tard.

aux autres; mais qu'il falloit auparavant exécuter les AN. 1566. deux autres conditions.

CXIII.

tiques fur les égli

fes.

De Thou, hoc an. lib. 45.

Mais ce remede vint trop tard. C'étoit jetter de Fureur des héré l'eau après que l'incendie avoit presque tout confumé; la fureur des hérétiques étoit parvenue à un tel excès, qu'ils ne vouloient plus des demandes qu'ils avoient Strada, l. 5. faites eux-mêmes, & que tout leur deffein étoit d'affouvir leur paffion. Ces féditieux armez de bâtons, de coignées, de marteaux, d'échelles, de cordes, & de tout ce qui étoit plus propre à détruire qu'à combattre, fe jetterent avec cet appareil dans les bourgs, & dans les villages des environs de faint Omer; rompirent les portes des églises & des monafteres, renverferent les ftatues & les images, & commirent toute forte de défordrès. Ils firent la même chofe à Bailleul. Quelques-uns voulurent commettre les mêmes excès à Bruges, mais ils en furent empêchez par le penfionnaire de la ville, qui en fit fermer les portes. Dans la Gueldre, dont le compte de Megue étoit gouverneur, les premiers habitans de Nimegue offensez de l'audace d'un certain moine défroqué qui s'étoit fait Calvinifte, & qui avoit fait quelques prêches dans la ville au cimetierre des Juifs, s'affemblerent pour le chaffer, mais ils n'y purent réuffir: il étoit foutenu. La guerre qu'on déclara aux images, n'éclata en aucun endroit avec tant de fureur qu'à Anvers. L'image de la fainte Vierge, qu'on portoit en proceffion le jour de l'Affomption fut infulté par des artifans, & attaquée de paroles infolentes & impies: ils vouloient même y porter leurs mains facrileges, fi ceux qui conduifoient la proceffion, craignant que le crime n'allât plus avant, n'euffent fait promptement passer l'i

mage dans le chœur de l'église, au lieu de la mettre dans la nef felon la coutume. Le lendemain le défordre recommença : quelques-uns s'approcherent de l'autel, & demanderent par dérifion à cette image, quelle crainte l'avoit obligée de se retirer fi-tôt dans fa niche ; & les autres coururent par toute l'églife exerçant leur fureur fur tout ce qu'ils trouvoient fous leurs mains. Un d'entr'eux monta dans la chaire, & après avoir contrefait le prédicateur d'une maniere ridicule, il demanda l'écriture fainte, & défia les prêtres à la difpute. Un marinier catholique indigné de l'infolence de cet homme, monta de l'autre côté de la chaire, prit au corps ce bouffon facrilege, & le jetta du haut en bas ; les autres attaquerent aufli-tôt le marinier qui fut bleffé à la cuiffe en fe fauvant. Le vingtuniéme d'Août ces furieux en beaucoup plus grand nombre entrerent dans l'église cathédrale vers la fin de vêpres avec des armes cachées, & fe mirent tous à crier, Vivent les Gueux.

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Le magistrat de la ville qui y étoit accouru avec quelques archers pour appaifer le bruit, ne put les chaffer de l'églife; ils enfermerent les portes fur eux; & un d'entr'eux ayant commencé à chanter les pfeaumes de Marot : comme fi ce chant eût été le fignal, ils fe jetterent fur les images de Jesus-Christ, de la sainte Vierge & des faints; ils en renverferent quelques unes par terre, & les foulerent aux pieds; ils en percerent d'autres de leurs épées. Les femmes débauchées, qui accompagnoient ces malheureux, prirent les cierges qui étoient fur les autels & les torches qu'elles trouverent dans l'églife. Les orgues furent brisées, les ftatuës des faints mifes en pieces, & l'on n'épar-

AN: 1566.

CXIV. Ils fe rendent maîtres de la grande églife d'Anvers. Strada de bello

Belgico, l. 5.

01.10

De Thou, hif

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