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fes pouvoirs; mais qu'il nous remettoit les articles tranfcrits de fa main, afin que perfonne ne pût les ignorer, à condition toutefois que nous promettrons, comme nous venions de le promettre, que ces articles ne fortiroient point des mains des profeffeurs, & qu'ils ne les communiqueroient à perfonne, jusqu'à ce qu'il eût obtenu une plus ample permiffion de les communiquer. Il loüa fort la promptitude avec laquelle nous nous étions soumis aux ordres du fouverain pontife; mais il ajouta qu'il ne pouvoit se dispenser d'interdire la lecture des livres en queftion, ce point lui étant expreffément commandé. Sur quoi ayant renouvellé nos instances, & conjuré le grand vicaire de ne point pasfer outre, il repartit que tout ce qu'il pouvoit nous accorder, étoit de furfeoir la défense defdits livres, jusqu'à ce qu'il eût reçu une seconde jussion, à condition toutefois, que dès qu'elle nous feroit notifiée, nous y acquiefcerions tous fans aucun delai, & la faculté agréa ce tempérament; desquelles chofes ledit prévôt ayant demandé acte, nous lui avons accordé ces présentes, pour fervir de témoignage de ce qui a été fait ci-deffus, après y avoir mis le fceau de notre faculté, & figné par notre notaire. Fait à Louvain, étant assemblez dans la maifon de Joffe Raveftein de Tileto, profeffeur en écriture fainte, le lundi vingtneuf Decembre 1567. Signez les mêmes que def

fus.

AN. 1567.

La demande que faifoient les docteurs au grand vicaire, de leur délivrer une copie de la bulle, étoit jufte, puifqu'ils étoient chargez de la faire observer, & que d'ailleurs il pouvoit naître des contestations & des difputes au fujet de ces propofitions qu'on ne pouTome XXXIV. Iii

XLIX.
Le grand vicaire

de Malines fait
d'Heffels & de

faifir les livres

Baïus.

voit vuider qu'en les confrontant avec le texte de la AN. 1567. bulle: Il paroiffoit donc néceffaire d'en laiffer une copie à la faculté & les docteurs étoient bien fondez dans leur demande; mais Morillon fut ferme à la refufer. Il parut un peu plus indulgent fur l'autre demande qui concernoit les livres, dont les propofitions étoient extraites, il n'y eut point à la vérité d'ordonnance publique, pour fupprimer ces livres, & pour en défendre la lecture; inais au fortir de l'affemblée, il fit faifir chez les libraires tous les exemplaires des ouvrages d'Heffels & de Baïus, & les fit tranfporter dans fa maison. Il arrêta même l'impreffion d'un nouvel ouvrage qui étoit fous la preffe; ce qui mortifia Baïus. Mais comme ce docteur pour le bien de la paix s'étoit soumis humblement, il fupprima pour l'édification des fideles toutes les juftifications, & toutes les explications qu'il auroit pû donner. Cette affaire eut néanmoins de grande fuites, comme nous verrons dans les années fuivantes.

L.

Suite des affaires de la religlon en Flandres.

Strada de bello Belgico, l. 6.

De Thou, in hift.

Pendant qu'on s'oppofoit fi vivement aux progrès de la doctrine de Baïus, l'herefie en faifoit de fi confidérables dans la Flandre, que Philippe II. qui en étoit le fouverain, prit la réfolution d'y porter la fui temporis, l. 40. guerre, contre l'avis néanmoins de plufieurs, & de fon confeffeur même, qui effaya de l'en détourner. On a vu dans le livre précedent que les conféderez s'étant assemblez à Ruremonde dans le mois d'Octobre de 1566. ils se séparerent fans avoir pû s'accorder sur le fait de la religion.

versùs finem.

Le prince d'Orange étant paffé en Hollande, avoit laiffé Hocftrate dans Anvers, pour y commander en fa place: le comte d'Egmont s'en étoit retourné en Flan

AN. 1567.

dres, & les autres en différens endroits: Hocftrate s'oppofa avec beaucoup de vigueur à la populace mutinée; ce qui fit efperer à la gouvernante que les troubles pourroient s'appaifer, & elle commençoit déja à caresser les mécontens pour les gagner. D'Egmont avoit donné des marques de fon zele pour le service du roi; Hocftrate avoit contenu le peuple de Malines dans fon devoir & le prince d'Orange avoit fait punir quelques mutins à Utrecht; néanmoins les féditieux fe fouleverent à Bruges & à Valenciennes, & l'église de saint Vaaft fut abbatuë dans cette derniere ville. La gouvernante Marguerite de Parme en ayant eu avis, & se voyant affez forte pour user de fon pouvoir, manda à Philippe de faint Aldegonde feigneur de Norkerme, gouverneur du Hainaut, en la place du marquis de Bergh, qui étoit en Espagne, de mettre garnison dans cette derniere place, pour contenir les peuples. Norkerme exécuter ces ordres, ché de la ville, le magiftrat lui envoya des députez pour donne ordre d'afl'affurer que jufqu'à présent ils avoient été fideles au roi & à la gouvernante, & qu'ils le feroient dans la fuite, & pour le prier de ne faire entrer qu'un petit nombre de foldats. Mais le lendemain à l'heure même que les premiers députez avoient promis de laisser entrer la garnison, d'autres arriverent pour dire au comte, que les heretiques ayant couru toute la nuit dans la ville, avoient fait changer le peuple, & qu'on étoit réfolu de ne point recevoir de garnison, & d'en écrire les raisons à la gouvernante; ce qui irrita tellement cette princeffe qu'après avoir ordonné toutes les chofes néceffaires pour un fiege, elle remit à Norkerme une lettre écrite dans fa colere, avec ordre de

pour

s'étant

appro

LI.
La gouvernante

fiéger Valencien

nes.

De Thou, hift. 1. 4I. initio hoc

anno.

Belgico, l. 6.

Strada, de bello

Grotius in anna lib. de reb. Belgica

lib.

x. hoc anno.

a

la faire tenir au magiftrat, avant que d'inveftir la ville. AN. 1567. Cette lettre ordonnoit aux habitans, au nom du roi, de recevoir quatre compagnies de cavalerie, autant de fantaffins, & d'obéir à Norkerme gouverneur de la province; qu'autrement ils feroient réputez ennemis du roi & de la patrie; mais fur le refus des habitans, qui mépriserent ces ménaces, la gouvernante les déclara criminels par un édit, confisqua leurs biens, & en fit fçavoir les raisons aux provinces ; ce qui confterna les conféderez, d'autant que Norkerme avoit ordre de commencer à inveftir la place, quoique ce fût en hiver.

LII.

Pendant qu'on formoit le fiege de cette ville sur la Parti de confédé- fin de Decembre de 1566. quatre mille hommes de rez défait proche l'armée des conféderez parurent aux environs de TourStrada loco fu- nay fous la conduite de Jean Soreau, dans le dessein De Thou, ut de furprendre Lille, & de l'emporter par l'intelligence

Tournay.

prà l. 6.

fup. l. 4D.

qu'ils avoient avec quelques marchands heretiques des plus riches de la ville. Norkerme eut ordre de prévenir le deffein des ennemis avec une partie des troupes, qu'il avoit proche de Valenciennes, & d'en communiquer auparavant avec Jean de Raffinghem gouverneur de Lille, de Douai & d'Orchies. Ce gouverneur venoit de battre un parti des ennemis forti d'Armentieres au nombre de plus de trois cens, la plûpart jeunes foldats qui avoient pris honteufement la fuite, après en avoir laiffé deux cens trente fur la place. Cette défaite obligea les conféderez de s'éloigner de Lille, & de prendre leur marche vers Lanoy, dont on leur ferma les portes; ce qui donna à Norkerme le tems de les pourfuivre, & de les atteindre. Comme il étoit prêt de mettre fon armée en bataille, s'étant apperçu que

l'ennemi fe retiroit peu à peu dans des défilez d'un difficile accès, il envoya trois compagnies d'arquebufiers avec quelques piquiers, & fuivit lui-même avec fa cavalerie. Les conféderez firent paroître au commencement beaucoup de valeur, & tirerent quelques petites piéces de canon, qu'ils avoient mifes fur le paffage; mais ayant été forcez à coups de piques, la cavalerie vint fondre fur eux; & le défordre s'étant mis parmi eux, ils prirent la fuite. Soreau leur commandant fut blessé, & ne se sauva qu'avec peine. Norkerme ne perdit que fix des fiens, & fe rendit maître dans cette action de neuf drapeaux des ennemis, de vingt piéces de campagne, & de deux barils de poudre.

.

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Tournay de fe gou- Strada de bello Belgico, L. 6.

rendre & y entre.

ils

Voulant profiter de cette victoire, il fit approcher fon armée du côté de Tournay, & envoya un trompette pour ordonner aux habitans de la part de la vernante de recevoir garnifon, avec menaces de févir contr'eux, s'ils refufoient, mais la confternation où ils étoient, ne leur permettant pas de déliberer, se rendirent auffi-tôt à difcrétion; le vainqueur commença par défarmer le peuple, fit mettre en prifon les principaux auteurs de la revolte, rétablit l'évêque & le clergé, & après avoir entiérement diffipé les confiftoires, & toute l'affemblée, il réprima toute la faction' heretique, & punit de mort quelques miniftres, & quelques-uns des habitans qui étoient les plus opiniâtrement attachez à leur doctrine. Peu de tems après la gouvernante lui envoya un ordre pour prendre le gouvernement de Tournay en la place de Montigny, qui étoit en Efpagne, & pour laiffer dans la ville Jean de Croy, comte de Roux, & huit compagnies de gens de guerre, avec quatre cens cinquante hommes pour

De Thou, ut fup. l. 41.

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