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AN. 1569.

montrer le contraire de ce que vous avancez : puis ti-
rant de fa poche le commentaire de Luther fur l'é-
pître au Galates, il réfuta le Dominiquain avec tant
de force, que la populace fe jetta fur lui, & qu'il eut
beaucoup de peine de fe tirer de fes mains. L'inqui-
fition & l'évêque de Turin ayant été informez de
cette affaire, Curion fut arrêté; mais l'évêque qui
yoyoit qu'il avoit pour lui un parti confiderable, alla
à Rome, pour demander au pape ce qu'il avoit à faire.
Pendant ce tems-là on transfera Curion dans un lieu
plus fecret avec les fers aux pieds, & il y fut gardé à
vûe. Cependant il trouva moyen de se fauver pen-
dant la nuit ; il se retira à Salo dans le duché de Milan,
& enfuite à Pavie, d'où trois ans après il fut obligé
de se réfugier à Venife, parce que le pape avoit donné
ordre au fénat de Pavie de l'arrêter, fous peine d'ex-
communication. De Venife il alla fucceffivement à
Ferrare, à Lucques, à Laufane en Suiffe, où il fut fait
principal du college, & enfin à Bafle en 1547. Il y
profeffa l'éloquence & les belles lettres, pendant vingt-
deux ans, c'est-à-dire, jusqu'à sa mort. Il a fait un
grand nombre d'ouvrages, qui ont été imprimez pour
la plûpart. Un de ceux qui ont fait le plus de bruit,
est celui qu'il a intitulé de amplitudine beati regni
Dei : De l'étendue du bienheureux royaume de Dieu,
en deux livres imprimez à Bafle en 1554. Curion s'y
montre fort mauvais théologien. Il a prétendu prou-
ver dans cet ouvrage que le nombre des élus eft plus
grand que celui des réprouvez, ce qui contredit ou-
vertement l'évangile. Il appuye cet étonnant paradoxe
fur ces raisons auffi extravagantes, que fi le regne du
diable étoit plus étendu que celui de Dieu, fatan le

surpasseroit

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surpasseroit en puissance; que les livres facrez n'exalteroient point, comme ils font, les richeffes de la miféricorde de Dieu, s'il avoit réfolu de ne fauver qu'un petit nombre d'hommes, & s'il avoit destiné les autres aux peines éternelles ; que, quoique l'évangile n'ait pas été annoncé à plufieurs peuples, ils ne laifferont pas d'être fauvez, pourvû qu'ils ayent observé la loi naturelle. Il fut attaqué fur ce dernier article quatre ans après la publication de fon livre, par Piere-Paul Vergerio, qui dénonça fa doctrine comme erronée au fénat de Bafle; ce qui l'obligea à compofer fon apologie,

AN. 1569.

CI.

fecond concile à

Le cardinal Borromée archevêque de Milan, après S. Charles Borro avoir vifité les extrémitez de fon diocèfe, & réformé mée indique fon l'ordre des Humiliez dans l'année précédente, ne penfa Milan. plus qu'à tenir un fecond fynode de tout fon clergé, faint Charles, h

Giuffano, vie de

voulant fuivre exactement les ordonnances du concile 2. c. 18.
de Trente, qui enjoint aux métropolitains de célebrer
de trois en trois ans, le fynode de la province avec
les évêques fes fuffragans. Ainfi les trois années expi-
rées depuis fon premier concile, il se disposa à com-
mencer le fecond. Sa lettre d'indiction eft du feize
Mars de cette année, & fixe le jour de la tenue au
24. d'Avril. Il exhortoit tous les évêques de la province
de s'y trouver, à moins qu'ils n'euffent des excufes lé-
gitimes, & de s'y préparer par des prieres & par des
œuvres de charité, afin d'attirer les miféricordes du
Dieu de toute confolation, pour être aidez dans leurs
fonctions, & travailler dans la suite avec plus de zéle
au falut des ames. Il recommandoit auffi aux mêmes
évêques de députer chacun dans fon diocèse deux ec-
cléfiaftiques fçavans & de bonnes mœurs, pour recher-
Tome XXXIV.

Hhhh

cher tous les abus & défordres, afin de les lui rapAN. 1569. porter dans le tems du concile; il vouloit que les témoins fynodaux en fissent autant, afin que par le moyen de ses enquêtes il fût informé de l'état de chaque diocèfe, & qu'on pût faire des decrets qui remédiaffent à tous les abus. Enfin il ordonnoit que les peuples, le dimanche avant la célébration du concile, communiaffent & vifitaffent l'église métropolitaine, pour demander à Dieu un bon fuccès, & qu'il y eût à cet effet des proceffions dans les paroisses.

CII.

dans le concile fur

la difcipline.

conc. tom. 15. p.

338. & feq.

Les actes de ce concile confiftent premierement Reglemens faits dans le difcours que fit le faint archevêque pour fon ouverture. Enfuite on y lit trois titres ou chapitres, Labbe in collect, dont le premier compofé de vingt-neuf decrets, expofe ce qui eft néceffaire pour maintenir la foi, pour l'administration des facremens & les autres fonctions paftorales. On établit dans le premier l'obligation de dénoncer à l'évêque ou à l'inquifiteur les heretiques & ceux qui font fufpects d'herefie. Dans le fecond on enjoint aux évêques de faire imprimer un catéchisme, & aux curez d'apprendre aux enfans les premiers élémens de la foi. Dans le troifiéme on prefcrit des confrairies pour fervir à réprimer les blafphémateurs. Dans le quatriéme on défend de rien faire dans les exercices publics de ces confrairies qui foit contraire à la foi & à la piété. Dans le cinquiéme on ordonne que les évêques ayent foin de publier les bulles des papes, & d'en tenir un registre. Dans le fixiéme on prescrit que l'évêque ne prendra que des prêtres pour l'accompagner dans fa vifite. Dans le feptiéme qu'il ne fasse aucune fonction, bénédiction, confécration, fans expliquer aux peuples l'efprit de ces cérémonies.

AN 1569.

Dans le huitiéme qu'il ait foin que ceux qui deffer-
vent les cures jouiffent d'un revenu honnête pour leur
entretien. Dans le neuviéme qu'il tienne un registre
des paroisses ausquelles il faut envoyer les saintes hui-
les, & que celui qui les portera foit dans les ordres fa-
crez. Dans le dixiéme on parle du choix des parrains
& des marraines qui doivent être de bonnes mœurs,
& sçavoir leur religion. Dans le onziéme on permet
aux curez qui vont à la campagne communier des ma-
lades en viatique, de ne porter qu'une seule hostie,
& de revenir fans cérémonie ni furplis, ni étole. Dans
le douziéme on parle de la communion pafchale, &
l'on détermine ceux à qui l'on doit l'accorder. Dans
le treiziéme on interdit l'entrée de l'églife, & l'on
prive de la fépulture eccléfiaftique ceux qui n'auront
pas fatisfait à ce précepte. Dans le quatorziéme on
permet la communion aux mandians, après que l'évê-
que fe fera informé de leurs mœurs. Le quinziéme
décret ordonne au curé qui portera le viatique où
l'extrême-onction à un malade, de réciter en chemin
les fept pfeaumes, ou d'autres prieres. Le feiziéme dé-
fend d'établir des prieres de quarante heures dans une
églife, fans la permiffion de l'ordinaire. Le dix-sep-
tiéme renouvelle la défense de Pie V. faite aux mé-
decins de vifiter un malade après trois jours de ma,
ladie, s'il ne s'eft pas confeffé. Le dix-huitiéme inter-
dit la sépulture eccléfiaftique aux ufuriers publics, s'il
ne paroît évidemment qu'ils ont reftitué. Le dix-neu-
viéme condamne & défapprouve tout contrat ufuraire.
Le vingtiéme enjoint aux curez d'avertir ceux que
leurs infirmitez empêchent de faire abstinence en ca- ....
rême, d'ufer de cette indulgence en fecret & dans un

a

lieu feparé. Le vingt-uniéme regarde les excommuAN. 1569. niez, & veut que l'évêque après les avoir dénoncez, envoye leurs noms dans toutes les églifes, & les faffe afficher, afin qu'on les regarde comme tels, & qu'on les évite jufqu'à ce que le même évêque ait déclaré qu'ils font réconciliez. Le vingt-deuxième enjoint aux évêques de preparer par les jeûnes & par les prieres publiques ceux qui doivent être ordonnez aux quatretems. Le vingt-troifiéme recommande l'observation du statut du concile de Trente, de ne point ordonner les reguliers qui font beneficiers, qu'ils n'ayent auparavant fait profeffion. Le vingt-quatriéme veut qu'on attache à un titre dans l'églife ceux qui feront ordonnez, & qu'on les oblige à faire les fonctions de leurs ordres. Le vingt-cinquiéme défend de marier ceux qui font voifins des pays heretiques, fans en avoir informé l'évêque, & fans avoir publié leurs bans. Le vingt-fixiéme prefcrit des reglemens pour empêcher les mariages de ceux qui font vagabonds, & qui n'ont point de domicile fixe. Le vingt-feptiéme reserve à l'évêque l'abfolution de ceux qui ont commis le peché de fornication avant la célebration de leur mariage. Le vingt-huitiéme veut que le curé celebre le mariage dans fon église, à moins que l'évêque n'ait permis le contraire. Le vingt-neuviéme enfin veut qu'on excommunie les concubinaires, qui après avoir été avertis, ne renvoyent pas leurs concubines.

CIIL

cerne la meffe &

Que

Le fecond titre qui traite de la messe, des divins offices, & de tout ce qui concerne les ecclefiaftiques, les divins offices. contient trente-fix decrets qui ordonnent : 1o. conc. 1. 15. pag. les clercs ne paffent pas d'un diocèfe dans un autre fans permiffion de leur évêque. 2°. Qu'on renouvelle

Labbe in colle&t.

349. & feq

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