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L'AUTEUR a eu l'avantage de lire une

ébauche de ce Poëme à l'Académie française, dans la séance particulière de cette compagnie, du mardi 6 août 1816. L'Ouvrage ne pouvait que gagner aux observations critiques dont il a été honoré. L'Académie a cru pouvoir marquer aussi quelque indulgence pour les difficultés que l'Auteur avait à combattre dans un sujet absolument nouveau pour les Muses françaises, et qui n'a été qu'effleuré même par les Muses latines.

BOILEAU s'est contenté de dire dans l'Art poétique :

De figures sans nombre égayez votre ouvrage : Que tout y fasse aux yeux une riante image! mais il ne donne aucun détail sur les règles de ces figures et les sources de ces images.

Un professeur très-estimable (LASSERRE) a publié, en 1786, un Poëme de l'Elo

quence, en six chants. Le plan en est bien tracé; mais l'exécution en est faible. L'auteur tombe lui-même dans les défauts qu'il veut reprendre, lorsqu'il assure, par exemple,

Qu'on ne mettra jamais au rang des grands modèles Des écrits saupoudrés d'expressions nouvelles. LASSERRE ne parle non plus des Figures qu'en général.

Les poëtes latins modernes, et surtout les Italiens, avaient abordé de plus près cette matière, qu'ils jugeaient, avec raison, beaucoup plus importante qu'on ne le croit communément.

En 1489, MANCINELLI donna un poëme élémentaire sur les Tropes et les Figures ;, mais ce sont des vers détachés et rigoureusement techniques, comme les vers de DESPAUTÈRE 2.

› Carmen de tropis ac figuris. Il est à la Bibliothéque du roi.

2 MANCINELLI était plus grammairien que poëte. Ses Synonymes latins, intitulés Flores, offrent beaucoup

En 1520, VIDA s'est occupé plus spécialement de l'élocution, dans le troisième livre de son Art poétique, dont SCALIGER fesait grand cas. VIDA peint bien les avantages du style figuré, et se récrie aussi avec beaucoup de force contre l'abus des Métaphores; mais il n'en parle également que d'une manière générale.

Voici d'abord comme VIDA fait l'éloge des Métaphores:

<<< Tous les objets se plaisent à changer >> entre eux leurs décorations et leurs titres, >> à s'aider mutuellement et à se prêter leurs >> habillemens et leurs traits. Le lecteur >> ne se plaît pas moins à voir plusieurs >> images qui se présentent sous un même >> mot. Semblable au voyageur, qui, assis >> sur le rocher voisin, regarde l'onde claire >> et paisible, et dans l'onde les vertes fo» rêts, les prairies émaillées que le cristal >> liquide lui répète fidèlement; il est char de vers précis et ingénieux sur le même sujet qui a été traité en prose par M. GARDIN Dumesnil.

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» mé de cette variété; le poëte se fait de » même un plaisir, pour écarter l'ennui, » de porter l'esprit de son lecteur sur des objets divers. Il trouve le moyen d'expri>> mer les plus petites choses en les revêtant >> d'une lumière étrangère, qui tout à la fois » enrichit le discours, le relève et l'abrége1.» (Traduction de l'abbé BATTEUX.)

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Voici ensuite ce qu'il dit sur l'abus des

Figures :

I

Usque adeò passim sua res insignia lætæ
Permutantque juvantque vicissìm, et mutua sese
Altera in alterius transformat protinùs ora!
Tùm, specie capti, gaudent spectare legentes.
Nam diversa simul datur è re cernere eâdem
Multarum simulacra animos subeuntia rerum.
Ceu cùm fortè olim placidi liquidissima ponti
Equora vicina spectat de rupe viator,
Tantùm illi subjecta oculis est mobilis unda.
Ille autem sylvas, interque virentia prata
Inspiciens miratur, aquæ quæ purior humor
Cuncta refert, captosque eludit imagine visus.
Non aliter vates nunc hùc traducere mentes,
Nunc illùc, animisque legentum apponere gaudet
Diversas rerum species, dùm tædia vitat.
Res humiles ille intereà non seciùs effert
Splendore illustrans alieno, et lumine vestit,
Verborumque simul vitat dispendia parcus.

VID. III, V. 58-75.

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