fans en avoir de honte : parce qu'ils ne voyoient rien en eux qui ne fut l'ouvrage de Dieu, & par consequent trés-bon. Ils ne manquoient de rien, & ne souffroient aucune incommodité, n'étoient point sujets aux maladies, & ne devoient point mourir; pourvû qu'ils ne mangeassent point du fruit d'un arbre que Dieu leur avoit défendu, c'étoit la seule marque d'obéissance qu'il leur demandoit. Ils conversoient avec Dieu , & vivoient heureux. Dieu avoit aussi créé de purs esprits, qui Pf. viij, 6. font les anges, d'une nature plus excellente que l'homme. $ L y eut des anges qui ne fo.viij. 44 grace, où Dieu les avoit créez, mais qui se revolterent contre lui. Il ne leur par- 3. Per.th 4 donna point , mais il les envoya dans l'enfer, où ils sont privez éternellement de la vûë de Dieu, & tourmentez d'un feu éternel. Ce sont les demons ou les anges du diable , qui s'occupent continuellement à tenter les A poc xx.2. hommes, d'où vient qu'on donne aussi cen.iijo à leur chef le nom de fatan. Un de ces malins esprits , envicux du bonheur dont Adam & Eve jouissoient dans le paradis terrestre, prit le corps d'un erpent, s'approcha d'Eve, & lui dit: Pourquoi Dieu ne vous a-t-il pas permis de manger des fruits de tous les arbres de ce jardin? Il nous les a tous permis , dit la femme, hors le fruit de Parbre qui est au milieu du jardin, qu'il nous a défendu de toucher , sur peine de la vie. Vous n'en mourrez point, dit le ferpent; mais Dieu fait, que fi-tôt que vous en aurez mangé vous ouvrirez les yeux, & vous serez semblables à lui, connoissant le bien & le mal. La femme se laissa tenter par la beauté de l'arbre & du fruit : elle en prit , elle en mangea & en donna à son mary, qui en mangea , comme elle. Aufli - tôt ils ouvrirent les yeux & eurent honte de leur nudité : sentant une revolte en leur propre corps, qui n'étoit plus soumis à leur esprit, comme devant. Ils firent des ceintures de feuilles de figuier pour le couvrir : puis entendant la voix de Dieu , qui se montroit à eux sous une forme sensible, ils se cacherent ; & ; comme ils virent leur peché découvert, ils voulurent s'excuser, l'hommc sur la femme & la femme sur le ferpent. Alors Dieu maudit le ferpent, c'est-à-dire le démon qui s'en étoit fervi, pour tromper la femme, & declara qu'il mettroit une inimitié éternelle entr'eux, & que de la femme viendroit celui qui écraseroit la tête du serpent; c'est-à-dire le Sauveur du monde, qui devoit venir un jour détruire la puissance du démon, & naitre d'une femme sans cooperation de l'homme. Car Dieu le promit déslors, pour consoler Adam dans sa misere. Cependant il condamna la femme à accoucher avec douleur , & à être sujette à son mari ; & il condamna l'homme à labourer la terre, à manger fon pain à la sueur de son visage, & à travailler toute sa vie : jusqu'à ce qu'il retourna à la terre d'où il étoit tiré. Ensuite il les chaffa du paradis, & mit un cherubin armé d'un glaive de feu, pour en garder l'entrée. Adam par fon peché fut dépoüillé de la sainteté & de la justice originelle en laquelle il avoit été créé; il devint sujet à la colere de Dieu, & captif du démon, à qui il s'étoit foảmis. Il perdit tous les avan tages du corps & de l'ame, qu'il avoit auparavant: il fut exposé aux incommoditez des saisons, aux bêtes cruelles ou venimeuses;à la faim, à la pauvreté, aux maladies, & à la mort. Il tomba dans l'ignorance : il demeura plein de concupiscence, c'est-à-dire, de l'amour de lui-même, qui le détourna de Dieu, & le livra au defir des plaisirs fensibles & à toutes les autres passions, comme la colere, l'envie, la tristesse & la crainte ; & le rendit capable de faire toute sorte de mal, incapable de faire aucun bien utile au salut , & destiné aprés la mort à une autre mort éternelle, c'està-dire aux tourmens de l'enfer. *** |