Page images
PDF
EPUB

s'aimer. Mais la nature devint beaucoup plus for ble depuis le déluge. Au lieu que les hommes vivoient près de mille ans, leur âge le réduisoit, petit à petit, à cent ou deux cents ans; & ils devinrent en ore plus méchan's que devant. Il fallut partager les biens & les terres, parce qu'ils ne pouvoient s'accorder à en jouir enfemble: de-là viorent les plages & les guerres, les fervitudes. Chacun ne cherchoit qu'à fe donner du plaifir, boie, manger & fatisfaire tous fes defirs, fans regle & fans mefure; & pour les contenter plus librement, mépriser l'autorité des peres & des anciens, & même s'aflujettir fes freres & fes égaux, ou par force ou par artifice. Au lieu d'honorer le vrai Dieu, ils adoroient des créatures foit les hommes les plus puiffans, foit les altres ou d'autres chofes vifibles. Ainfi commença l'idolâtrie. En tout cela ils faifoient contre leur confcience & contre la lumiere de la raison, qui dit à tous les hommes, qu'ils ne doivent rien adorer qui leur foit égal ou moindre qu'eux, mais feulement leur créateur; qu'ils doivent honorer leurs peres & leurs meres ; qu'ils doivent garder l'inftitution du mariage; ne le point nuire les uns aux autres, ni en leur perfonne, ni en leurs biens, ni en leur réputation; dire toujours la vérité, & modérer leurs defirs. La raifon dicte tout cela aux hommes qui la veulent couter, & c'est ce qui s'appelle la loi de nature. Il y eut toujours des Saints qui l'obferverent, comme Job, Melchifedech, & quelques autres marqués dans l'Ecriture, lans ceux que nous ne connoiffons pas. Job étoit un Prince fort riche & fort vertueux. Dieu permit que le démon lui ôtât tous les biens, fes enfans, fa fanté & 1 réduisît à la derniere mifere, pour donner un grand exemple de patience,

Ben. XII.

COMME

LEÇON V.

Du Patriarche Abraham.

OM ME le monde fe corrompit toujours de plus en plus, la vraie religion, c'eft-à-dire, la connoiffance de Dieu & l'obfervation de la loi de nature ne reftoit plus qu'en quelque peu de Jof.xxiv. faints perfonnages, principalement de la poftérité de Sem, & de la branche d'Heber. Mais l'idolâtrie gagnoit même cette famille, quand Dieu y choifit un homme, avec qui il fit une alliance particuliere, afin de s'en fervir pour conferver fur la terre la connoiflance de la vérité & la pratique de la vertu. Ce fut Abraham. Dieu lui commanda de quitter fes parens & le lieu de fa naiffance; de pafler l'Euphrate & de venir dans la terre de Chanaan, & lui promit de faire fortir de lui un grand peuple, dont la multitude feroit auffi innombrable que les étoiles du ciel & les grains de fable de la mer. En ta race, ajouta-t-il, feront bénites toutes les nations de la terre: ce qui fignifioit que de fa postérité, devoit naître le Sauveur du genre humain, ce fils de la femme, qui écraferoit la tête du serpent. Abraham crut aux promeffes de Dieu, & obéit à fes ordres. Auffi Dieu lui tint compte de fa foi, le protégea en toutes occafions, le combla de biens, & fit avec lui une alliance folemnelle, & Gen.xvu. lui réitéra plufieurs fois les mêmes promeffes:

Gen.xv.

16.

Pf. CIV.

14.

10.

que de lui viendroit un grand peuple, qui pofféderoit la terre de Chanaan, & que par lui la bénédiction & la grace fe répandroient fur toute la terre. Dieu lui ordonna la circoncilion, pour marque de fon alliance, parce que cette alliance étoit attachée au fang & à la génération. Enfin,

Gen.XX

Gen.xxii.

après que la foi d'Abraham eut été long-tems exercée, lorfqu'il avoit déjà cent ans, & que fa femme Sara étoit auffi hors de l'âge d'avoir des enfans, & naturellement ftérile, Dieu lui donna un fils qu'il nomma Ifaac, & fur qui Dieu lui déclara que tomberoit l'effet de fes promefles, & non pas fur Ifmael, qu'Abraham avoit déja eu d'une autre femme. Quand Ifaac fut devinu grand, pour éprouver davantage la foi d'Abraham, Dieu lui commanda de facrifier ce cher fils. Il obéit fans réplique, & il avoit déja le bras étendu pour l'égorger, quand un ange l'arrêta de la part de Dieu, lui déclarant qu'il étoit content de fon obéissance, & lui renouvellant toutes les pro- Gen. xiv. meffes. Du tems d'Abraham vivoit Melchifedech, 18. Roi de Salem, dont on ne fçait ni le pere ni la Heb.vri. famille, mais feulement qu'il étoit facrificateur du Dieu très-haut, & qu'Abraham revenant un jour victorieux d'une querre où il avoit défait quatre Rois, cet homme extraordinaire vint au-devant de lui, lui donna fa bénédiction, & offrit pour lui du pain & du vin. C'étoit une figure du Sauveur du monde, qui devoit être plus grand qu'Abraham, quoiqu'il dût naître de lui.

LEÇON IV.

De autres Patriarches.

ISAAC imita la foi & la vertu de fon pere, & Gen. xxt Dieu lui renouvella les mêmes promeffes. Il vé. z. cut paisiblement, dans une noble fimplicité. Il eut deux fils jumeaux, Elaü & Jacob, dont Dieu choifit le dernier, & le prit en affection, laiffant Efau dans la malédiction générale des enfans d'Adam: auffi fut-il méchant & impie ; Rom.1; Jacob au contraire fut fidele à Dieu, & vertueux

II.

laborieux, doux & patient. Son pere Ifaac luf donna fa bénédiction, à laquelle les promelles de Dieu étoient attachées. Il vouloit la donner à Efai; mais Jacob ufa d'artifice pour se l'attirer; & Ifaac, quoiqu'il eût été furpris, la confirma, après s'en être apperçu, voyant que c'étoit l'ordre de Dieu. Jacob ayant reçu cette bénédiction fi importante, le maria, & eut douze fils, qui font les douze Patriarches ; fçavoir, Ruben, Siméon, Lévi, Juda, lífachar, Zabulon, Dan, Nephtali, Gad, Afer, Jo'eph & Benjamin. On appelle auffi Patriarches, tous les anciens peres & tous les Saints qui vécurent fous la loi de naGenef. ture, comme Adam, Abel, Seth, Henoch, xvi. Noé, Sem, Abraham. Dieu fit encore à Jacob les mêmes promefles qu'il avoit faites a fon pere Xxx11.28. & à fon aïeul, & le nomma Ifraël. Jofeph lui étoit plus cher que tous les autres enfans. I's en XXXVII. furent envieux, & le vendirent à des marchands,

21.

Genef.

Genef.

XLIII.

Gen.XLIX

qui le menerent en Egypte, où Dieu prit foin de Ibid. 29. lui, &, par une aventure merveilleufe, le fit devenir favori du Koi, qui lui donna tour fon Royaume à gouverner. Ses freres furent contraints par la famine, de venir en Egypte chercher des Genef. vivres : & Jopteph, après les avoir mis en peine quelque temps, fe fit connoître à eux, leur pardonna leur crime, & les fit venir en Egypte, avec leur pere & toute leur famille, qui étoit de foxante & dix perfonnes. Jacob, en mourant, donna fa bénédiction à tous fes enfans, & leur prédir ce qui devoit arriver de plus confidérable à leur poftérité. Il dit à Juda, quil commanderoit à tous fes freres, & que le commandement demeureroit dans la race jufqu'à ce que vînt celui qui devoit être envoyé, & qui feroit l'attente des nations, c'est-à-dire le Sauveur du monde. Ainu on commença à connoître qu'il defcendroit

Gen. LIX.

bid. 10.

defcendroit non-feulement de la ace d'Abraham, par Ifaac & par Jacob, mais encore de la famille de Juda.

LEÇON VII.

De la fervitude d'Egyte.

XI. 6. 12.

DIEU n'accomplit les promeffes qu'il avoit A&. VII. faites a Abraham, qu'après plus de quatre cents 5. Hebr. ans: car, ni lui ni les autres Patriarches ne poffederent point de terre dans le pays de Chanaan; ils n'y vécurent que comme des paffagers, fous des tentes & des pavillons. Et quoique leurs enfans ne duffent pas demeurer en Egypte, ils y habiterent plus de deux cents ans. C'eft ainfi que Dieu exerçoit leur foi, & qu'eux-mêmes faifoient voir qu'ils attendoient un meilleur héritage que cette terre fenfible. Pendant ce féjour Ex. xxv d'Egypte, les enfans d'Ifrael multiplierent prodigieufement, comme Dieu l'avoit promis à Abraham. Le Roi d'Egypte craignit qu'ils ne fe rendiflent trop puiflans, Pour les affoiblir & les empêcher de rien entreprendre, il réfolut de les accabler de travaux ; il leur faifoit faire de la brique & d'autres ouvrages de terre fort pénibles; il les faifoit travailler à de grands bâtimens, & il avoit mis fur eux des Intendans qui ne leur donnoient point de relâche, & les maltraitoient cruellement: il voulut même faire périr tous les enfans mâles; & en fit jetter un grand nombre dans le fleuve du Nil. En cette mifere, ils eurent recours à Dieu, qui écouta leurs cris & leurs plaintes, & réfolur de les fecourir en mémoire de l'alliance qu'il avoit faite avec Abraham, Ifaac & Jacob. Cette fervitude étoit une image Ex. 11.29 de la fervitude du péché, où tout le genre hu

M

« PreviousContinue »