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M. DE CAMBROUZE.

Puisque c'est un médecin qui s'en mêle.

MADAME DE CAMBROUZE.

J'ai toujours la tête je ne sais où; vous avez raison.

SCÈNE XX.

M. DRAVEL, Mme DE VERSEUIL, M. ET Mme DE CAMBROUZE, Mme DE SELMAR, ARTHUR.

MADAME DE CAMBROUZE, à Mme de Selmar.

Avez-vous fait bonne recette, Madame?

MADAME DE SELMAR.

Mais non, mon oncle m'a porté malheur.

MADAME DE VERSEUIL.

Est-ce que M. Dravel ne vous a rien donné?

M. DRAVEL.

Non, Madame, je n'ai rien donné.

MADAME DE CAMBROUZE.

Comme il dit cela! Mais c'est que j'aurai aussi une quête jeudi; il faut vous y attendre, et je ne serai pas d'aussi bonne composition que Mme de Selmar. Tout le monde

donnera, je vous en avertis.

M. DRAVEL.

Si c'est une condition, je paierai ma place comme les

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M. Arthur prétend que c'est par économie que mon

oncle n'a pas assisté au sermon.

ARTHUR.

Ah! Madame, vous me faites parler.

M. DRAVEL.

Ne vous en défendez pas, monsieur Arthur; c'est la vérité.

SCÈNE XXI ET DERNIÈRE.

M. DRAVEL, Mme DE SELMAR, Mme DE VERSEUIL, ARTHUR, M. ET Mme DE CAMBROUZE, Mile VERDIER.

MADAME DE SELMAR, à Mile Verdier, qui n'ose pas entrer. Que voulez-vous, ma bonne?

MADEMOISELLE VERDIER, s'avançant.

Ah! Madame, je venais seulement dire à Monsieur (indiquant M. Dravel), que, s'il pouvait voir ce qui se passe en bas, ça l'amuserait bien.

MADAME DE SELMAR.

Que se passe-t-il donc en bas?

MADEMOISELLE VERDIER, ayant l'air d'interroger M. Dravel.

Je ne sais pas si je dois dire, Madame.

M. DRAVEL.

Dites tout ce que vous voudrez, mademoiselle Verdier, je ne fais jamais de secrets.

MADEMOISELLE VERDIER.

Aussi bien, ce serait inutile, puisqu'à l'heure qu'il est, toute la maison le sait. Monsieur a donc rendu au petit Joseph les cent vingt francs qu'il avait perdus. Ça a mis en goût tous les gens de Madame, et c'est à présent à qui lui donnera quelque chose. J'ai beau leur dire que ce n'est pas la peine de le récompenser de ce qu'on l'a volé; que Monsieur a fait la seule chose qu'il y avait à faire en lui remplaçant son argent: c'est égal, le branle est donné; on ne peut plus les retenir.

MADAME DE SELMAR.

Je reconnais enfin l'avarice de mon oncle.
MADAME DE CAMBROUZE.

Allons donc voir cela, Madame; comme elle le dit, ce doit être amusant.

ARTHUR.

Tous ces gens-là avaient-ils assisté au sermon seule

lement?

Pas un, Monsieur.

MADEMOISELLE VERDIER.

MADAME DE CAMBROUZE.

Cela n'en est que plus méritoire.

M. DE CAMBROUZE.

Qu'est-ce donc qui les a décidés alors?

MADAME DE VERSEUIL.

Le bon exemple que leur a donné M. Dravel. C'est désespérant pour les prédicateurs; mais les vrais sermons, c'est le bon exemple.

MADEMOISELLE VERDIER.

Oui, comme on disait de mon temps: les actes sont des mâles, et les paroles sont des femelles.

THÉODORE LECLERCQ.

LA DANSE

ET LES BALLETS,

DEPUIS BACCHUS

JUSQU'A MADEMOISELLE TAGLIONI.

Le ballet est un genre de spectacle plus ancien que l'opéra, même en adoptant l'opinion du savant orientaliste Morenas, qui fait remonter l'existence du drame lyrique, dans l'Inde, bien avant l'expédition d'Alexandre. M. Morenas a vu représenter des pièces chantées avec chœurs et symphonie dans plusieurs villes de ce vaste empire. Les Hindous n'inventent plus rien; ils ne sont point imitateurs, et leur indifférence abandonne de jour en jour les sciences et les arts, cultivés avec tant de succès sur les bords du Gange, à une époque où le voile de l'ignorance couvrait encore le reste du monde. Le drame chanté, l'espèce d'opéra qu'ils possèdent, est donc antérieur à tout ce que les autres nations ont produit en ce genre. La danse régulière n'a pu exister sans la musique, la mélodie a marqué la cadence, et les premiers pas du danseur ont été formés sur des chansons.

Les Grecs représentaient des actions en pantomime avant de réciter mélodieusement leur tragédie. Lors de la renaissance des arts, on a voulu rétablir le drame déclamé par des acteurs qui réglaient leur intonation sur l'accompagnement de la symphonie; on a voulu faire

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parler une foule de personnages en chœurs diversement caractérisés, comme Sophocle et Sénèque le firent jadis. Après avoir long-temps cherché la tragédie grecque, on trouva l'opéra vers 1475; nous devons nous applaudir de cette erreur, puisqu'elle a fait connaître un nouveau spectacle, bien supérieur à la tragédie, sous les rapports de la force d'exécution, de l'appareil et de la vérité dramatique. Les grands ballets à machines et décorations, dont les recits, parlés ou chantés, expliquaient ce que la danse n'aurait pas pu dire assez clairement aux spectateurs, étaient connus avant cette époque. Ces ballets ont beaucoup plus contribué à l'invention de l'opéra que les souvenirs de la tragédie ancienne, et l'imitation qu'on en voulait faire. Puisque les Grecs, les Romains, les Italiens, les Français, ont suivi une marche uniforme à l'égard du drame récité ou chanté, nous devons présumer que les Hindous en ont agi de même. Les bayadères dansaient et représentaient une action avec des gestes et des pas, avant que l'opéra sérieux ou comique eût déployé sa pompe et ses merveilles à Bénarès, à Calcutta. Bacchus avait été leur maître; ce dieu ne fit la conquête de l'Inde que pour apprendre à danser à ses habitans.

Les recherches des érudits n'ont pu nous donner encore des notions bien exactes sur la musique des anciens. Nous ne savons pas comment les Rubini, les Pasta, les Paganini, les Bohrer de la Grèce, gouvernaient leurs voix et leurs instrumens. Que dis-je? nous ignorons encore si l'harmonie, telle que nous l'entendons, et telle que nous la pratiquons, était en usage de leur temps? Et pourtant les Grecs écrivaient leur musique. Nous n'avons que des relations, souvent très-exagérées, sur les effets de cet art; ces effets merveilleux, pour la plupart du moins, ne prouvent pas que les artistes qui les ont produits fussent bien habiles. Les musiciens, les danseurs, les mimes de l'antiquité, faisaient des prodiges; il faut bien se fixer aux récits de l'histoire, puisque nous n'avons aucun monu

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