Mémoires sur la Bastille

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Librairie des bibliophiles, 1889 - 297 pages
 

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Page 193 - ... heures pour délibérer sur sa nomination. Il s'excusa, il remercia. Le marquis de La Salle fut, en sa place, nommé commandant général. Il accepte avec transport. Ce dévouement l'honore d'autant plus qu'à l'heure où il consentit à la place éminente qu'il a si bien remplie, peu d'autres auraient été tentés d'en briguer le dangereux honneur. Le nom du marquis de La Salle, nécessairement attaché à cette grande époque, ne saurait plus mourir. Quoique distraits par tant de soins, nous...
Page 198 - On fit dans le cours de cette journée bien d'autres méprises, et dont plusieurs furent sanglantes. Tandis que les uns croient avoir pris le gouverneur, d'autres, dans l'une des cours de la Bastille, s'emparent d'une jeune personne intéressante par sa grâce et sa candeur. L'ayant amenée auprès du premier pont : « C'est la fille de de Launay , s'écrient-ils ; qu'il rende la place , sinon qu'il voie expirer sa fille dans les flammes. » Et l'on allume une paillasse sur laquelle elle était évanouie....
Page 217 - ... supposé ; car ce n'est pas un conte que ce cachot fangeux, et si fétide que l'on s'y trouvait mal. Tout Paris a pu le voir, et j'y suis descendu le lendemain. Du centre d'une énorme pierre placée au milieu de ce cachot, partait une grosse chaîne propre à retenir, non pas seulement un homme, mais tel monstre que l'on puisse imaginer.
Page 179 - On amenait de toutes parts à l'Hôtel-de-Ville un nombre infini de voitures , de chariots , de charrettes, arrêtés aux portes de la ville et chargés de toutes sortes de provisions , de vaisselle , de meubles, de subsistances, etc.; de sorte que la place de Grève fut , pendant plusieurs jours , l'un des plus riches entrepôts de l'Europe , mais aussi le plus turbulent et le moins accessible. Le peuple, qui ne soupirait qu'après des armes et des munitions, car...
Page 171 - On voulait nous endormir par cette affiche insidieuse, et nous persuader, comme à de bons Gaulois, que le rassemblement des troupes dans les environs de Paris et de Versailles n'était qu'une simple précaution contre les brigands. Nous en...
Page 185 - Ces mâles et rustiques ornements apprendraient à nos derniers neveux que l'on ne doit pas plus compter sur des flatteurs à gages que sur les fausses ressources d'un luxe corrupteur. On nous a remerciés des piques ; mais on a cruellement reproché au prévôt des marchands d'avoir, sous quelque prétexte que ce fût, donné le change à de braves gens, qui n'ont pas pu le lui pardonner. En...
Page 88 - ... extérieurs que ce qu'ils ont de fâcheux; où, dans l'apparence d'une ombre de liberté, les sentinelles dont on est entouré, le silence universel, et l'aspect de l'horloge à laquelle seule il est permis de le rompre , ne rappellent que trop la servitude. C'est une remarque curieuse. L'horloge du château donne sur cette cour. On ya pratiqué un beau cadran : mais devinera-t-on quel en est l'ornement, quelle décoration l'on ya jointe ? Des fers parfaitement sculptés. 11 a pour support deux...
Page 181 - ... côtés. Nous avions déjà reçu les soixante districts, nous les avions entendus. Leur langage ne le cédait en énergie ni aux Grecs ni aux Romains des plus beaux siècles. En général, mettez les hommes dans les mêmes circonstances, surtout quand il s'agit de la liberté, dont le sentiment et le regret remuent jusqu'aux esclaves, ils parleront, ils agiront de même. Quoique...
Page 214 - ... en avait aussi été nommé commandant. Ces promotions soudaines, on le savait, ne devaient être que passagères ; elles enflammaient néanmoins tous les esprits. On n'était pas plutôt nommé qu'on demandait des ordres, qu'on voulait sans délai marcher à l'ennemi ; et cette impatience avait aussi ses risques. Quant à M. de la Barthe, M. Moreau de Saint-Méry. notre président, lui offrit une épée, en lui disant : « C'est la patrie qui vous la donne.
Page 212 - ... me prend, il me serre la main et la repousse. « Je lui dis deux mots , et il me conduisit dans un cachot. Ce fut là qu'après m'être déshabillé , j'ôtai l'uniforme de ce bon père, que je le revêtis de la redingote et le couvris du chapeau que j'avais apportés. Je lui attachai ensuite le tablier, et nous sortîmes sans être reconnus. Lequel de mon père ou de moi est le plus heureux? Je vous le demande, Messieurs n'est-ce pas moi?

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