Depuis un siecle on étoit réduit à ordon- Capit. ner en plusieurs Conciles, que les Evê- art. 802. C. 25. ques et les Prêtres enseigneroient aux peu- Concil. ples du moins le Symbole et l'Oraison Do- Mogun. minicale. Par-là ils marquoient tout le Ca- Can. 45. téchisme. Expliquer ou donner le Sym bole, selon les Anciens, c'est catéchiser, parce que le Symbole est l'abrégé de toute la Doctrine. En effet, des Conciles veulent que l'on envoie les enfans aux écoles, pour recevoir cette instruction, ce qui seroit inutile s'il ne s'agissoit que de retenir par cœur ce peu de paroles; et ils veulent que les Fidelles apprennent le Symbole et l'Oraison au moins en leur langue vulgaire, afin qu'ils l'entendent, et en sorte qu'ils puissent l'enseigner aux autres. Depuis ce temps-là, c'est-à-dire, environ depuis le dixieme siecle, on s'est réduit à cette maniere d'instruction, et l'on a cru que pourvu que les Chrétiens entendissent médiocrement le Symbole, ils pouvoient se passer pour la plupart de la connoissance des faits que les Anciens étoient si soigneux de leur raconter. Cependant quand nous n'aurions pas l'autorité de l'Ecriture et les exemples de tant de siecles, il seroit aisé de voir que la narration et la déduction des faits est, géneralement parlant, la meilleure maniere d'enseigner la Religion. : On peut, à la vérité, prouver par des raisons convaincantes, qu'il y a un Dieu 813. créateur de toutes choses, qui les conserve et les gouverne par sa providence; que la nature humaine est corrompue; que l'ame est immortelle, et qu'elle ne peut trouver de bonheur en cette vie. Les peres l'ont fait quelquefois et le devoient, ayant à convertir des hommes en âge de raison, et souvent des Hérétiques ou des Philosophes. C'est de cette espece de Catéchisme que Saint Grégoire de Nysse nous a donné un excellent modele. Mais les enfans et la plupart des hommes grossiers et peu attentifs, ne sont point capables d'entendre et de suivre ces raissonnemens. Ceux même qui raisonnent le mieux, ne peuvent arriver à ce qui est au-dessus de la raison, comme la Trinité, l'Incarnation, la prédestination, en un mot les mysteres, dont toutefois la connoissance est nécessaire pour nous faire voir ce que nous devons à Dieu. C'est pourquoi Dieu, qui nous connoît parfaitement, à fondé la doctrine de sa Religion sur des preuves dont tous les hommes fussent capables, -c'est-à-dire , sur des faits évidens, illustres, sensibles, tels que sont la création du monde, le péché du premier homme, le déluge, la vocation d'Abraham, la sortie d'Egypte. - Afin que la vérité de ces faits ne pût être révoquée en doute par ceux qui ne les auroient pas vus, Dieu a de temps en temps rendu témoignage à ceux qui les racontoient, par d'autres faits extraordinaires, c'est-à-dire, par des miracles, tels que ceux de Moise et des Prophètes, et enfin, de Jesus-Christ et de ses Disciples. En sorte que pour croire à ceux que Dieu Joan. Ix. a envoyés, il n'a été besoin que de ce rai- 33. sonnement si facile: Il faut bien que ce soit Dieu qui nous parle par ces hommes, puisqu'en son nom ils ressuscitent des morts et font d'autres merveilles que lui seul peut faire. C'est ainsi que l'aveugle-né raissonnoit sur les miracles de Jesus Christ, et fai soit le même raisonnement que Nicode Joan. III. me, Docteur en İsraël, Cette manière d'instruire n'est pas seulement la plus sûre et la plus proportionnée à toutes sortes d'esprits, c'est encore la plus facile et la plus agréable. Tout le monde peut entendre et retenir une histoire où la suite des faits engage insen siblement, et où l'imagination se trouve prise; et quoique plusieurs se plaignent de leur mémoire, elle est toutefois moins rare que le jugement. De là vient la cur riosité pour les nouvelles, l'amour des ro mans et des fables. Sur-tout, ce sont les enfans qui en sont les plus avides, parce que tout a pour eux l'agrêment de la nouveauté; et, comme d'ailleurs les personnes âgées aiment naturellement à raconter les faits dont elles ont la mémoire pleine, rien ne seroit si facile que d'instruire les en C fans dans la Religion, si les perès et les mères en étoient bien instruits, et s'ils vouloient s'appliquer à raconter les merveilles de Dieu comme ils faisoient autrefois. Ceux qui ont composé nos Catéchismes modernes, ont bien vu cette utilité des faits, pour arrêter l'imagination des enfans, et pour leur rendre les instructions agréables: et plusieurs ont établi pour regle de leur méthode, de finir chaque leçon par une histoire. Mais comme ils n'ont pas trouvé dans l'Ecriture et dans les Livres de grande autorité, des histoires courtes qui s'ajustassent toujours à leurs leçons, ils en ont pris où ils ont pu, et souvent ils les ont tirées de la Fleur des exemples, du Pédagogue Chrétien, ou de quelques vies des Saints peu correctes; en sorte que la plupart de ces histoires contiennent des visions ou des miracles peu certains, ou même peu vraisemblables. On croit que tout est bon pour les enfans; mais ils deviendront hommes, et ces premières impressions peuvent les rendre trop crédules, ou leur donner du mépris pour tout ce qu'ils ont appris dans l'enfance sans distinguer le solide, De plus, le Catéchisme se fait en public et à la face des Autels: c'est la parole de Dieu, où il n'est pas permis de rien mêler qui ne puisse se soutenir devant les hommes les plus savans et les mieux sensés, et qui ne soit digne de la majesté de la Religion. Un autre moyen pour suppléer à la sécheresse des Catéchismes, bien plus approchant de l'ancienne métode, sont les abrégés de l'Histoire sainte de l'ancien et du nouveau Testament, accompagnés des tigures. L'invention en est excellente; les images sont trés-propres à frapper l'imagination des enfans et à fixer leur mémoire, et c'est l'écriture des ignorans. Mais il seroit à désirer que ceux qui ont fait ces abrégés, au moins ceux dont j'ai connoisance, y eussent observé plus de choix et plus de méthode. Ils ont mis bien plus au long les histoires de la Genèse, que des autres livres historiques: ils en ont mis plusieurs qui ne servent de rien à l'essence de la Religion, comme la punition d'Adonibezec et d'Agag, la révolte de Zambri et d'autres semblables; et ils en ont omis d'importantes, comme les promesses du Messie faites à David, la vie des Prophètes; sur-tout, il ne paroît pas qu'ils aient pris soin de faire voir la suite et le rapport de tous ces faits et véri tablement c'est ce que les enfans entendent le plus tard; mais c'est pourtant à quoi l'on doit toujours tendre. Enfin, les livres pleins de figures sont de trop grand prix pour être à l'usage des pauvres, qui ont le plus besoin de ces instructions; et de discours qui n'est fait que pour expliquer les figures, n'est plus si clair quand |