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regle du jeûne a toujours été de ne faire. qu'un repas par jour, & vers le foir, le retardant d'autant plus que le jeûne étoit plus rigoureux. A préfent l'ufage eft de manger à midi dans tous les jours de jeûne indifféremment, même on permet le foir une légere collation de pain & de fruit. Dans le jeûne on retranche les viandes qui font les plus nourriffantes, comme la viande de boucherie & la volaille, les eufs, les laitages fuivant la qualité des jeûnes & la coutume des Pays. Ces abftinences ne font fondées fur aucune fuperf tition qui nous faffe eftimer mauvaife les viandes dont nous nous abftenons, comme plufieurs hérétiques les eftimoient, mais feulement fur le befoin de châtier nos corps, & les réduire en fervitude. C'est pourquoi les repas maigres doivent être fort fimples, & ne pas être des feftins d'une autre efpece. Le jeûne pour être utile, doit être fait en vrai efprit de pénitence, & accompagné des autres bonnes œuvres, de la priere & de l'aumône! On devroit donner aux pauvres ce que l'on épargneroit en retranchant la nourriture. L'Eglife pour nous inviter à prier davantage ces jours-là, en a fait les Offices plus longs, afin qu'on paffât une grande partie du temps à pfalmodier en commun, lire l'Ecriture fainte, & écouter les

inftructions des Pafteurs. Pendant les jours de jeûne, on doit fuir tous les divertiffemens, fe priver des plaifirs, même permis. Modetons-nous, dit Saint Ambroile dans une hymne du Carême, dans le boire & le manger, le fammeil, les difcours, les railleries, & veillons fur nous plus exactement. L'ufage a déterminé l'âge où l'on eft obligé de jeûner, à vingt ans accomplis. On difpenfe du jeûne les enfans, les nourrices, les femmes groffes, les malades, ceux qui gagnent leur vie à des travaux fort pénibles, en un mot, tous ceux qui ne pourroient jeûner fans ruiner leur fanté, en quoi chacun doit bien prendre garde à ne fe pas flatter, puifqu'il n'y a perfonne qui n'ait befoin de pénitence. Les premiers Chrétiens jeûnoient fouvent, quelques-uns toute l'année, hors les Dimanches & le temps Pafchal; les premiers Moines fe firent une regle de ce jeûne perpétuel. L'abftinence étoit auffi plus rigoureufe: ils retranchoieut le vin & le poiffon, & plufieurs le réduifoient au pain & à l'eau. La charité commençant à fe refroidir, on a obligé les chrétiens à obferver au moins certains jours de jeûne, laiffant le furplus à leur dévotion.

LEÇON XXXV.

Des jours de jeuûne & d'abftinence en particulier.

E jeûne le plus folemnel eft celui du Lcarême, c'eft-à-dire, la quarantaine. Il eft d'inftitution apoftolique à l'exemple de Moïfe & d'Elie, & principalement de Jefus Chrift, qui paffa quarante jours dans le défert fans rien manger. On a placé ce jeûne immédiatement avant la Pâque, pour nous préparer à cette grande folemnité par une férieufe pénitence. Autrefois on jeûnoit en carême jufqu'à vêpres, c'eft-à-dire, vers fix heures du foir. Aujourd'hui le carême n'eft diftingué des autres jeûnes que par l'abftinence des œufs, & en quelque pays des laitages. Le jeûne des Quatre-Temps eft inftitué pour demander à Dieu la confervation des fruits de la terre en chacune des quatre faifons de l'année, & pour le prier, de donner à fon Eglife de bons Evêques, de bons Prêtres, & d'autres Miniftres dignes de la fervir, car c'est en ces jours que fe font les Ordinations: & toute l'Eglife fe met en prieres, afin qu'il plaife à Dieu d'envoyer des ouvriers dans fa moiffon. Les vigiles font des jeûnes pour nous pré

parer aux fêtes les plus folemnelles. On les a nommées vigiles ou veilles, parce qu'autrefois on paffoit fans dormir les nuits qui précédoient ces fêtes, on s'occupoit faintement dans les Eglifes. Il y a des vigiles que l'on ne jeûne plus, & qui ne font diftinguées que par l'Office. On jeûnoir auffi l'Avent & les Vendredis & Samedis où l'abftinence eft demeurée. C'eft le fixieme commandement de l'Eglife, d'observer tous les Vendredis & les Samedis l'abftinence de la chair, pour honorer la Paffion & la fépulture de Notre-Seigneur, & pour nous mieux préparer au Dimanche. D'autres Eglifes obfervent le Mercredi au lieu du Samedi; chacun doit fuivre de bonne foi la coutume de fon Pays. Il y a encore quelques autres jours d'abftinence fans jeûne; favoir, les trois jours des Rogations, nommés autrement les grandes Litanies, à caufe des Proceffions qui s'y font; & les petites Litanies le jour de faint Marc. Elles ont principalement pour but la confervation des fruits de la terre. Or, quoique dans les autres jours il y ait liberté de manger toutes fortes de viandes, les Chrétiens doivent toujours être fobres, & prendre garde que leurs cœurs ne foient appéfanis par les viandes & par le vin, comme

que

dit Notre-Seigneur. C'est pourquoi c'eft un grand abus de diftinguer le temps du carnaval l'on s'y la liberté par donne de boire & de manger avec excès; de jouer & de danfer plus qu'en tout autre temps de l'année. Cette coutume eft toute contraire à l'intention de l'Eglife, qui commence dès la Septuagé ime à nous exciter à la pénitence pour nous préparer au carême. Elle défend de faire des nôces pendant l'Avent & le Carême, & les Fêtes qui le fuivent, c'est-à-dire, jufques au lendemain de l'Epiphanie, & de l'Octave de Pâque; parce que, fuivant fon intention, l'ufage du Mariage eft interdit pendant ce temps, & généralement pendant tous les jours folemnels de priere ou de pénitence. Quelques-uns font un feptieme Commandement de l'Eglife, de cette défenfe des nôce, & y ajoutent celui d'éviter les Excommuniés, ce qui ne s'entend que de ceux qui font dénoncés nommément.

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