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les plus propres à leur édification: leur faite lire quelques Actes des Martyrs, & quelques vies des Saints les plus cèrtaines & les mieux écrites. Dans l'explication des Sacremens, la lecture du Rituel & du Pontifical fera fort utile. Enfin il faut, autant qu'il eft poffible," faire voir au difciple la Doctrine dans les fources où nous l'avons prife, afin de le rendre capable d'enseigner à son tour" les autres.

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Car les meilleurs Catéchiftes feroient les peres de famille, fi chacun étoir bien inftruit & foigneux d'inftruire fes enfans & fes domestiques: ils feroient beaucoup plus de bien que ne peuvent faire les Prêtres & les Pasteurs. Nous ne patlóns aux enfans qu'à l'Eglife, à certains jours, pendant peu de temps: les enfans y font plufieurs enfemble, extrêmement diffipés par la compagnie, par les divers objets qui les frappent de tous côtés, & qui ne leur font pas familiers. Delà vient la peine que l'on a à les rendre attentifs, les interruptions" & les réprimandes, qui emportent la moitié du temps deftiné au Catéchifme. Pendant que vous êtes tourné d'un côté, l'autre fe dérange: fi vous vous appliquez à un enfant, dix autres badi

nent; c'est toujours à recommencer. Au contraire, dans la maifon les enfans font plus recueillis, parce qu'ils font plus libres; s'ils n'ont pas cette crainte, qui les rend quelquefois immobiles à l'Eglife, leurs penfées font plus tranquilles, ils ne voient rien qui leur foit nouveau. Un pere qui n'en a que deux ou trois, accoutumés à le refpecter, n'a pas de la peine à les tenir dans le devoir : il les a toujours auprès de lui; il peut prendre le temps où ils font plus dociles; il connoit la portée de leur efprit. leur génie, & leurs inclinations; il peut les inftruire tout à loifir, & y donner tout le temps néceffaire; & ce temps doit être long, car comme les enfans. ne peuvent s'appliquer beaucoup de fuite, il faut y revenir fouvent, & continuer l'Inftruction pendant plufieurs années, avançant à mesure que leur efprit & leurs mœurs fe forment. Ce que je dis des peres, doit s'entendre des meres à proportion, principalement à l'égard des filles; & je ne dis rien ici que je n'aie vu, & que je ne fache par expérience. Je connois un homme, entr'autres, qui eft paffablement inftruit de fa Religion, fans avoir jamais appris par : cœur les Catéchifmes ordinaires, sans

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avoir eu pendant l'enfance d'autre Maître que fon pere. Dès l'âge de trois ans, ce bon homme le prenoit fur fes genoux, le foir après s'être retiré, lui contoit familiérement, tantôt le Sacrifice d'Abraham, tantôt l'Hiftoire de Jofeph, ou quelqu'autre femblable; il le lui faifoit voir en même temps dans un Livre de Figures; & c'étoit un divertiffement dans la famille de répéter - ces Hiftoires. A fix ou fept ans, quand cet enfant commença à favoir un peu de latin, fon pere lui faifoit lire l'Evangile, & les Livres les plus faciles de P'Ancien Teftament, ayant foin de lui expliquer les difficultés. Il lui en eft refté toute la vie un grand refpect & > une grande affection pour l'Ecriture fain& pour tout ce qui regarde la Re

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Je fais bien qu'il y a peu de peres & de meres qui veuillent prendre cette peine. On trouve plus commode de mettre les filles en pension chez des Religieufes, & les garçons au Collège, ou de payer des Maîtres & des Maî treffes; mais il eft difficile que des étrangers faffent, par , par charité ou par intérêt, ce que des peres & des meres feroient par l'amour que Dieu leur donne na

turellement pour leurs enfans, s'ils favoient le bien appliquer. Quelque occupé que foit un pere, il a peu d'affaires auffi preffantes que celle-ci; & fes enfans gagneroient beaucoup, fi pour leur laiffer une meilleure éducation, il leur laiffoit moins d'argent. On ne voit que trop de peres, qui ne favent à quoi s'occuper, après avoir mis leurs enfans hors de chez eux, & qui ne les éloignent que pour n'en point avoir l'embarras & fe donner plus librement à leurs plaifirs. Il ne faut pas s'étonner fi ces enfans ont peu d'amitié, & même peu de refpect pour leurs parens; & c'eft un grand bonheur quand ils deviennent honnêtes gens & bons Chrétiens. Au contraire, on voit ordinairement réuffic ceux dont les peres font vertueux, pables & foigneux de les bien inftruire.

Tout le Catéchifme fe rapporte à 2 l'amour de Dieu. Racontez, dit Saint Auguftin, de telle forte que l'Auditcar croïe en écoutant, qu'il efpere en croyant, & qu'il aime en efpérant. Or l'amour de -Dieu, l'efpérance ou la crainte ne s'inf pite pas d'ordinaire, en difant feulement qu'il faut aimer, craindre ou ef-pérer, quoique l'on le répéte plufieurs fois, principalement fi on le dit d'une

maniere féche & défagréable. Il faut dire des chofes qui infpirent effectivement l'amour ou la crainte, foit que vous les nommiez ou non, puifqu'il importe bien plus au difciple de les avoir, que de les connoître. La crainte de Dieu entrera dans les efprits, fi l'on fait bien repréfenter la création, les miracles du défert, & les autres faits qui montrent fa grandeur & fa toutepuiffance: fi l'on raconte bien le DéJuge, l'embrafement de Sodome, lés plaies d'Egypte, la captivité de Babylone, & les autres effets de fa juftice. La feule déduction de ces faits rendra Dieu tertible, même fans dire qu'il le foit: Au contraire, on le fera voir aimable pour les biens qu'il a fait à Abraham par le foin qu'il a eu de fon peuple dans le défert, par fa fidélité à accomplir fes promeffes, par la profpérité de David & de Salomon, par le retour de Babylone; mais bien plus, fans comparaifon, par l'Incarnation de fon Fils, par la vie & la Paffion de J. C. après avoir raconté fidélement tout cela, quand même vous ne diriez point à vos Auditeurs qu'ils doivent aimer Dieu, ils l'aimeront, ou ils feront infenfibles. Mais tant qu'ils ne fauront point tous ces faits,

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