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autre passage de Plutarque : -«La partie de l'âme » passionnée, violente, déraisonnable, folle, est Typhon ou vient de Typhon, comme l'interpré>>tation même du mot égyptien l'indique; car ils appellent Typhon, Seth, qui vaut autant dire » comme supplantant, dominant, forçant'. »>

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Plutarque nous dit qu'on représentait Typhon sous la forme d'un crocodile; mais un autre auteur païen, le poëte Manilius, nous apprend qu'on le peignait aussi sous la figure d'un SERPENT monté sur des pieds avec des ailes aux épaules et exhalant la fureur :

Anguipedem alatis humeris Typhona furentem,

ce qui complète la similitude avec les traditions bibliques.

Si de la Perse et de l'Égypte nous allons dans les Indes, nous y trouverons les mêmes traditions.

Voltaire lui-même, dans le passage que nous avons déjà cité, avoue que les Brahmes en particulier croyaient l'homme déchu et dégénéré, et le

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Plutarque, De Isis et Osiris, nomb. XLVII.

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Manilius, Astronom. Iv, vers 580. Dans les dessins des monuments égyptiens qui accompagnent le grand ouvrage sur l'Égypte, et dont M. Lacour nous a donné quelques copies, nous retrouvons, en effet, le serpent bipède de Manilius; mais dans la planche que nous avons vue, il est déponrvu d'ailes. Il a des pieds et même des jambes humains. Le portrait qu'en fait Manilius ressemble davantage aux représentations de l'art chrétien :

alatis humeris Typhona furentem,

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savant historien et archéologue Maurice a prouvé, dans son ouvrage sur l'Indoustan, que l'histoire d'Adam et de sa chute, telle que Moïse la raconte, est confirmée par les monuments et les traditions des Indiens. Le roi des méchants, Assours ou démons, y est appelé le roi des SERPENTS'.- Les livres des Indous, au rapport d'un autre savant, parlent aussi d'un SERPENT nommé Kaly, qui a fait à la création de si grands maux qu'il faut une incarnation de Vichnou pour les réparer. Ce monstre est représenté moitié FEMME et moitié SERPENT'.

Les traditions chinoises ne sont pas moins remarquables. — Le philosophe Tchouangsé enseignait, conformément à la doctrine des King, ou livres sacrés des Chinois, « que dans l'état du » premier ciel l'homme était uni au dedans à la sou>> veraine raison, et qu'au dehors il pratiquait toutes » les œuvres de la justice. Le cœur se réjouissait » dans la vérité. Il n'y avait en lui aucun mélange » de fausseté. Alors les quatre saisons de l'année » suivaient un ordre réglé sans confusion. Rien ne »> nuisait à l'homme et l'homme ne nuisait à rien. » Une harmonie universelle régnait dans toute la na>>ture. » Mais, suivant la même tradition, «< ces >> colonnes du ciel furent rompues; la terre fut » ébranlée jusqu'aux fondements. L'homme s'étant » révolté contre le ciel, le système de l'univers fut

>>

1 Histoire de l'Indoustan, tome 1er, chap. xI.

2

Dubois, tome III, 3o part., p. 433. — Voyez aussi Annales de philosophie, tome vi, de l'Asie, p. 55.

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dérangé et l'harmonie générale troublée, les maux » et les crimes inondèrent la face de la terre 1. »

Tous ces maux sont venus, dit le livre Likyki, parce que « l'homme méprisa le souverain empire. » Il voulut disputer du vrai et du faux; et ces dis>> putes bannirent la raison éternelle. Il regarda en>> suite les objets terrestres et les aima trop; de là naquirent les passions.... Voilà la source de tous >> les crimes, et ce fut pour les punir que le ciel » envoya tous les maux 2. »

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Au surplus, les traditions chinoises comme les autres font remonter l'origine du mal à l'instigation d'une intelligence supérieure, révoltée contre Dieu et revêtue de la forme du serpent.- Selon ces traditions, le dragon superbe Tchi-Ieou fut le premier auteur de la révolte, et on trouve dans les caractères qui écrivent son nom, dit M. le chevalier de Paravey, les sens de mauvais, d'insecte, de FEMME et de SERPENT. Il est question, dans la même tradition, d'un personnage appelé Koug-Koug, qui offre en chinois la même idée que l'architecte de tout mal, et le livre Kouei-Tsang dit qu'il a le visage d'un homme et le corps du reptile, que Lopi appelle Dragon noir 3.

Au Japon, la tradition nous représente aussi le SERPENT ligué contre le créateur; et quand on y

Ramsay, Discours sur la mythologie, p. 146, 148.

2

ld.

id.

id.

p. 149-150.

3 Annales de philosophie, tome xv1, p. 355; Explications du chevalier de Paravey.

représente la création, l'on emploie la figure d'un gros arbre autour duquel se roule un horrible SERPENT 1.

Nous retrouvons d'autres traces de la tradition

mosaïque chez les Mongols.- « L'état de nos pre» miers pères, disent-ils, ne fut pas de longue » durée; ils virent bientôt s'échapper par leur faute » toutes les félicités qui avaient jusqu'alors embelli » leur existence. A la surface du sol croissait en >> abondance la plante du schima, blanche et douce » comme le sucre; son aspect séduisit un homme » qui en mangea, et tout fut consommé *. »

2

Les Scandinaves personnifient le terrible fils de Loke, le principe du mal, sous la forme d'un SERPENT énorme qui enveloppe le monde et le pénètre de son venin 3.

Les anciens Scythes se disaient aussi descendre d'une FEMME-SERPENT “.

Enfin, quel n'a pas été l'étonnement des savants qui ont étudié les traditions de l'Amérique, de cette terre qui apparut aux Européens comme une création improvisée en quelque sorte, et sans aucune relation avec la vieille terre d'Asie et d'Europe tant foulée par les humains, d'y trouver, plus vive peutêtre encore que partout ailleurs, l'empreinte de la

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vieille histoire qui a ouvert la porte à tous nos maux ! - MM. Noël et Humboldt ont constaté que, dans les plus reculées traditions des Mexicains, la première femme, appelée par eux la mère de notre chair, est toujours représentée en rapport avec un grand SERPENT; c'est ainsi qu'on la voit dans les nombreuses peintures hiéroglyphiques qui décorent les monuments de ces peuples, et cette femme est appelée par eux Cihua-Cohualt, qui veut dire, mot à mot, FEMME au serpent'.

Un monument a été découvert dernièrement près d'une ville de Pensylvanie, qui prouve aussi qu'une tradition analogue à l'histoire biblique d'Adam et d'Ève était répandue dans toute cette portion du continent américain. Le compte en est ainsi rendu dans une Revue savante : « L'automne dernier >> un violent orage éclata près de Brownsville, dans >> la partie occidentale de la Pensylvanie, et déra>> cina un chêne énorme, dont la chute laissa voir >> une surface en pierre d'environ seize pieds carrés, » sur laquelle sont gravées plusieurs figures, entre >> autres deux de forme humaine, représentant un » homme et une femme, séparés par un arbre, la der» nière tient des fruits à la main. Des cerfs, des » ours, et des oiseaux, sont sculptés sur le reste » de la pierre. Ce chêne avait au moins cinq ou six

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Noël, au mot serpent; de Humboldt, Vue des Cordillères et des monuments de l'Amérique, tome 1er, p. 237 et 274; tome 11, p. 198; - Annales de philosophie, iv,

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