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se lève.) Lorsque la nuit dernière j'ai surpris votre conversation, je vous ai conseillé de fuir ensemble au plus vite, mais ce fut en vain. N'importe, me suis-je dit, tout n'est pas perdu pour Almansor, et j'ai conduit ici mes compagnons. Un seul signe de moi, et nous nous précipitons sur le château d'Aly, convives non attendus. Tu t'empares de ta fiancée, tu la portes vers notre navire mouillé près du rivage, nous cinglons vers l'Afrique, et là, tu pourras demeurer en sûreté avec ta proic, tandis que nous, reprenant la mer, nous pillerons les côtes et les vaisseaux de l'Espagne. Tu auras bientôt retrouvé l'amour de Zuleima.

ALMANSOR.

Ha ha ha! l'amour! l'amour! mot fade qu'un ange prononça un jour en bâillant, les yeux à demifermés par le sommeil. Il bâilla une seconde fois, et tout un monde de sots, jeunes et vieux, se mit à répéter en bâillant : « Amour! amour! » non, non, je ne suis plus un zéphire diaphane qui évente doucement les joues d'une jeune fille; je suis le vent du nord qui houspille sa chevelure, et, d'un élan furieux, entraîne avec lui sa fiancée éperdue. Je ne

suis plus le doux parfum d'encens qui chatouille délicatement le nez d'une vierge; je suis le souffle empoisonné qui l'étourdit, et, frémissant de volupté, pénètre dans tous ses sens. Je ne suis plus l'agneau qui se couche, doux et docile, aux pieds de sa bergère; je suis le tigre qui la saisit avec rage, et hurlant de délices, déchire la chair de son corps. C'est le corps de Zuleima que je demande à présent. Je veux être une brute heureuse, oui, une brute! et dans le tourbillon des plaisirs des sens, je veux oublier qu'il y a un ciel. (Saisissant vivement la main d'Hassan.) Je resterai près de toi, Hassan! nous fonderons un joyeux empire sur la mer sauvage. Le fier Espagnol nous paiera tribut; nous pillerons ses rivages et ses navires. Je combats sur le pont à tes côtés, mon cimeterre fend les crânes orgueilleux des enfants de l'Espagne; les chiens à la mer! le navire est à nous ! — puis, pour me délasser, je vole à la cajute où demeure Zuleima, je la presse entre mes bras sanglants, et sur sa blanche poitrine j'efface avec mes baisers les taches rouges... Ah! elle se débat encore? à mes pieds, esclave, lamente-toi à mes pieds, impuissante créature destinée à rafraîchir mes sens après l'ardeur sauvage de la ba

taille... Esclave, esclave, obéis: évente-moi, car je

brûle.

Ils sortent.

Une salle dans le château d'Aly. Chevaliers et dames, en habits de gala, sont assis à une table de festin. Aly, don Enrique, Zuleima, un abbé. Musiciens, domestiques portant des plats.

UN CHEVALIER, se levant, une coupe pleine à la main. Un beau nom résonne au fond de mon cœur : Vive Isabelle de Castille. (Il boit.)

UNE PARTIE DES CONVIVES.

Vive Isabelle de Castille!

Cliquetis de coupes et fanfares.

L'ABBÉ.

J'ai encore un nom à vous proposer : Vive Ximénès, archevêque de Tolède! (Il boit.)

UNE PARTIE DES CONVIVES.

Vive l'archevêque de Tolède!

Cliquetis de coupes et fanfares,

UN AUTRE CHEVALIER,

N'oublions pas les meilleurs noms! buvez avec moi Vive le noble couple de fiancés ! (I boit.)

TOUS.

Vivent doña Clara et Enrique!

Cliquetis de coupes et fanfares. Zuleima et Enrique s'inclinent.

Je vous remercie.

DON ENRIQUE.

SECOND CHEVALIER

Mais votre fiancée est muette.

DON ENRIQUE.

La gracieuse Clara, il est vrai, parle peu aujourd'hui ; mais aujourd'hui, je ne demande qu'un seul mot de sa bouche, un oui devant l'autel, et je serai heureux.

ZULEIMA.

Mon cœur est si troublé, señor.

TROISIÈME CHEVALIER.

Un mauvais signe, don Enrique, vous venez de renverser la salière.

QUATRIÈME CHEVALIER.

Ce serait un bien plus mauvais signe encore, si vous aviez renversé la coupe remplie de vin.

TROISIÈME CHEVALIER.

Don Carlos est un ivrogne.

QUATRIÈME CHEVALIER.

Oui, certes, grâce à Dieu! et non pas comme vous un esprit sombre, un homme né le dimanche, et pour qui le meilleur festin est gâté si quelqu'un, par mégarde, a renversé une salière. Oui, oui, le vin, c'est là mon élément! dans ses flots d'amour clairs et dorés, je veux, pour la guérir, baigner mon âme malade; et je ne puis m'empêcher de rire aux éclats quand je pense que le sobre prophète de la Mecque... Oui, señor, le vin, le vin, oui, oui, je voulais dire que le vin est bon....

ALY.

Pedrillo! écoute, Pedrillo!

PEDRILLO.

Gracieux maître?

ALY.

Fais entrer tous les bouffons, tous les bateleurs, tous les danseurs, et aussi le joueur de harpe, toute cette canaille de Barcelone.

PEDRILLO.

Je comprends, gracieux maître. (Il sort.)

CINQUIÈME CHEVALIER, causant avec une dame.

Je ne me marierai jamais, señora.

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