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les troupes ordinaires, deux cens mille pour les gar-
nifons, & cent cinquante mille pour les
magistrats, & l'administration des provinces.

les gages des

AN. 1565.

XLV. Philippe change

envoie de plus fe

veres.

De Thou hift. lib.

40. 1. 2.

Strada de bello Belgico lib. 4. ver

sui finem.

Le comte communiqua ces inftructions & ces lettres à la gouvernante; mais pendant que cette prin- fes ordres, & cu ceffe fe mettoit en devoir de les exécuter, le roi lui donna des ordres contraires, qui ne se reffentoient point de la douceur & de l'efprit de modération, qu'il paroiffoit fi néceffaire de confulter dans les tems difficiles où l'on fe trouvoit. Le comte qui ignoroit ces nouveaux ordres, & qui ne voïoit point qu'on exécutât les premiers,s'en plaignit amérement à la gouvernante, & demanda à fe retirer. La princeffe encore plus embarraffée, fit part de fes peines au roi d'Espagne, à qui elle écrivit à ce fujet ; & Philippe zelé pour l'établiffement du tribunal de l'inquifition, & prevenu de cette fauffe maxime, qu'il falloit agir avec la derniere rigueur envers les hérétiques,qui ne vouloient pas reconnoître l'autorité de l'églife catholique, confirma les ordres féveres qu'il avoit donnez, & ordonna à la gouvernante de les faire exécuter. La princeffe fut fâchée de cette inflexibilité, mais trop foible pour y résister: elle fit fçavoir les volontez du roi par l'édit suivant, qui fut envoïé dans les provinces. Voici les termes de cet édit.

XLVI. Edit de la Gouvernante pour fai

dres du roi d'Ef

Le roi n'aïant rien de plus cher que la tranquillité des Païs-Bas, & voulant prévenir tous ces grands maux, dont nous voïons tant de peuples miférable- re exécuter les orment affligez par le changement de religion, fa majefté commande que les ordonnances de fon pere & les fiennes, que les decrets du concile de Trente &

pagne.

Strada ut fup. lib. 4. verfus finem,

des finodes provinciaux foient exactement obferAN. 1565. vez. Qu'on prête toute forte de faveurs & d'affistances aux inquifiteurs de la foi, leur laiffant la connoiffance des héréfies, comme elle leur appartient par les loix divines & humaines. Telle eft la volonté du roi, qui veille pour le culte de Dieu & pour l'utilité des peuples. Nous avons voulu vous en avertir, afin que vous la fuiviez fans réserve; que vous en donniez avis aux magiftrats de votre province, & que vous preniez garde foigneufement qu'on n'en oublie aucune chofe, fous quelque prétexte que ce foit, fur les peines comprifes par les lettres, qui font au bas de cet édit. Mais afin que vous exécutiez plus facilement ces ordres, vous choisirez une perfonne dans les confeils, qui n'aura point d'autre emploi que de vifiter les Provinces, & d'obferver fi les magiftrats & les peuples obfervent religieufement les chofes qui leur font prefcrites. Vous nous en donnerez avis tous les trois mois, auffi bien que le confeiller que vous aurez choifi; & ainfi vous nous obligerez de reconnoître par toute forte de bienveillance le fervice que vous rendrez en cette occafion. Ce deffein qui fut fi pernicieux à la Flandre, & fi funefte au roi d'Efpage, hâta les nouveaux troubles qui éclaterent dans l'année suivante, par le soulevement des peuples.

XLVII. Baius fait im

L'impreffion des écrits de Baïus qui commenceprimer plufieurs rent à paroître dès la fin de 1564 ne fervit point à traitez de théolo pacifier les Païs-Bas. La qualité de théologien du part. roi, dont ce docteur étoit revêtu, le nombre de eper. Bais. Colon. fes amis & la grande réputation dont il joüissoit,

gic.

Bajana in 2.

an. 1696. p. 194.

n'empêcherent point qu'on ne s'élevât hautement

contre fa doctrine. Ses écrits au refte n'étoient pas en grand nombre; on n'en avoit encore que quatre entre les mains en 1563. fçavoir un traité du libre arbitre, un autre de la juftice, un troifiéme de la justification, & un quatrième du facrifice. Depuis cette année jusqu'à la fin de 1564. il ne fit rien paroître; & ce qu'il donna à la fin de cette année, fe réduit à quelques petits traitez du peché originel, des mérites des œuvres, de la premiere juftice de l'homme, des vertus des impies, des facremens cn général & de la forme du batême.

A N. 1565.

du

pag.

XLVIII. Traité de Baius

pechè originel.

Inter opera Baii

1. & suiv.

C. I.

c. 2.

Le traité du peché originel est divisé en dix-sept chapitres. Baïus après avoir examiné dans le premier en quoi confiftent les erreurs des Pélagiens fur ce fujet, recherche quelle eft l'effence du peché origignel, & il decide qu'il ne confifte point dans la fimple privation de la juftice; que ce n'eft point un peché d'omiffion, comme s'expriment les théologiens, mais un peché d'action ; qu'on ne doit point dire que c'eft une fimple privation; mais que c'est un acte vicieux & defordonné, avec lequel nous naiffons, qui eft comme endormi dans un enfant, mais qui fe fait fentir & fe produit au-dehors, à mesure qu'il avance en âge, & qui l'entraîne dans des maux fans nombre, fi la miféricorde de Dieu n'arrête le cours de fa cupidité. Il donne quatre parties à ce pe-30 ché, c'est-à-dire quatre effets particuliers qu'il produit en nous l'ignorance dans l'efprit, la malice dans la volonté, la defobéiffance des parties inferieures de l'ame à l'égard des fuperieures, & la rebellion des fens, ce qu'on appelle en deux mots, la loi du peché & la loi des membres. D'où il conclut

:

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e.s.

£. 6.

dans le quatrième chapitre que nous naissons tous AN. 1565 enfans de colere, & méritans la damnation éternelle. Il fe forme dans les chapitres fuivans plufieurs difficultez, qu'il tâche en même-temps de réfoudre. La premiere, pourquoi la concupifcence & la loi des membres font plûtôt une faute dans l'homme que dans les bêtes : il répond qu'il y a dans l'homme une raison qui doit gouverner tout ce qui se pasfe en lui, & que la bête en eft entierement dépourvuë; que cette raison eft un don du créateur, qui n'a été donné à l'homme que pour agir conformément à la fouveraine raifon qui eft Dieu, & que les bêtes n'ont rien de plus que leur nature. La deuxiéme difficulté, pourquoi le peché originel étant égal dans tous ceux qui naiffent, la concupifcence eft souvent fi differente: il répond, que le peché originel eft égal en ce qu'il nous rend tous également ennemis, & enfans de colere; mais que les fuites de ce peché font differentes, felon le temperamment des hommes, l'éducation qu'on leur donne les engagemens qu'ils contractent, les graces ils font prevenus, & que Dieu, qui ne doit rien à perfonne, leur refufe par juftice. La troifiéme difficulté, comment un enfant peut être coupable d'un. peché qu'il n'a point commis; Baïus répond', que tout ce qu'il faut fçavoir fur cette question, c'eft, qu'il eft de foi que nous naiffons tous dans le peché, que cette malediction a été prononcée fur toute la pofterité d'Adam, en même-temps qu'elle fut pro-, noncée fur ce premier des hommes pecheurs ; qu'il n'en eft pas moins réel, pour n'être pas volontaire en nous, & qu'il eft certain qu'il vit dans notre

C. 72

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dont

ame,

ame, en même-temps que l'être lui eft donné. Il fatisfait à peu près de même à la quatriéme difficulté, comment un enfant qui ne reçoit que fon corps de ses parens, peut avoir leurs défauts & leurs vices qui appartiennent à l'ame: le fait eft certain, dit-il, l'experiencee nous l'apprend. Comment cela fe faitil? Je l'apprendrai des autres, ajoute-t-il, plus volontiers que je ne le dirai, de peur que je ne tombe dans la témerité de dire ce que je ne fçai point. Après avoir ainfi répondu à ces difficultez,il enseigne en peu de mots dans les chapitres fuivans, comme autant de véritez: Que les enfans qui naiffent de parens chrétiens, naiffent comme les autres avec le peché originel: que ce que les théologiens appellent habitudes, c'est-à-dire, ce que l'on trouve en foi, fans l'avoir fait foi même, peut être un mérite ou un démerite, comme le peché originel qui eft en nous fans que nous aïons agi pour nous en rendre coupables, & qui ne nous en rend pas moins odieux aux yeux de Dieu, qui ne peut hair que le peché. Que les mauvaises qualitez nous rendent mauvais, lors même que nous n'agiffons pas; & par conféquent que les bonnes qualitez doivent avoir le mêine effet, parce que les unes & les autres ne peuvent produire que des effets qui leur reffemblent, & que ces effets font réellement produits, lorfque l'on paffe à l'acte. Que par cette raison la loi divine nous interdit les habitudes mauvaises, comme les mauvaifes actions: Que cependant la maxime, que Dieu n'a rien commandé d'impoffible eft vrai, mais qu'il faut l'expliquer differemment, felon les deux états de l'homme, celui de l'homme innocent & celui

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