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Enfin, après un affez long intervalle, où il ne s'étoit rien paffé de memorable pour la Religion, on écrivit l'hiftoire de Judas Machabée & de fes freres, qui l'avoient défendue fi vaillamment contre les Infideles acharnés à la détruire & à faire périr les livres facrés. Et cette hiftoire nous mene fort proche du temps du Meffie. Cependant l'Ecriture ne nuifoit pas à la tradition, elle ne fervoit qu'à la rendre plus certaine : & les Hideles n'avoient pas moins de foin que dans les premiers temps de raconter à leurs enfans & à leurs petits enfans, ce qu'ils avoient appris de leurs peres & de leurs ayeux; & de leur recommander de Pfalm. le faire paffer à leur pofterité. Ce devoir. XLIII eft marqué dans tous les livres de moLXXVII. rale, & particulierement dans les Pfeaumes. Il est donc vrai que pendant tout Prov. 1. l'ancien Teftament, la Religion s'eft Eccl. confervée par les narrations & par les hiftoires.

3. &c.

8. IV. I.

III. &c.

I.

La publication de la nouvelle alliance n'a rien changé à cette methode: on a feulement ajoûté à l'hiftoire des anciennes merveilles celle des nouvelles encore plus grandes. La naiffance & la vie de JESUS-CHRIST, fes difcours, fes miracles, fa refurrection, l'établiffement de At, vi fon Eglife; & Dieu a fait écrire ces prodiges nouveaux, comme les anciens, XVII. 22. par ceux qui en étoient témoins ocu

10. 37.

XIII. 17.

laires.

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laires. Le fermon de St Etienne & la plupart de ceux des Apôtres que l'Ecriture nous rapporte, font voir que leurs difputes contre les Juifs, & les inftructions qu'ils donnoient aux Payens, étoient toûjours fondées fur la déduction des faits. Il falloit faire fouvenir les Juifs de ce que Dieu avoit fait pour leurs Peres, & de ce qu'il leur avoit promis, pour leur en montrer l'accompliffement: & il falloit enfeigner aux infideles que Dieu avoit créé le monde qu'il le gouvernoit par fa providence & qu'il avoit envoyé un homme extraordinaire pour le juger.

Nous voyons la même conduite dans les fiecles fuivans Entre les ouvrages des Peres, nous avons grand nombre d'inftructions pour ceux qui fe vouloient faire Chrêtiens: elles font la plupart fondées fur les faits, & le corps du difcours eft d'ordinaire une narration " de tout ce que Dieu a fait pour le genre humain, depuis l'origine du monde jufques à la publication de l'Evangile. Devera Rien n'eft plus clair que ce que St Auguftin en a écrit dans le livre de la vraie Religion, & dans celui qu'il a compofé Catech exprès de la maniere dont on devoit Rudib, catechifer les ignorans Il parle toûjours de narration il fuppofe toûjours que Tinftruction doit fe faire en racontant des faits, & les étendant plus ou moins

b

relig.c.7.

n. 13. de

felon leur importance & la capacité du difciple: Et le modele de Catechiime qu'il donne lui-même à la fin de ce Traité, eft un Abregé de toute l'hif toire de la Religion, mêlé de diverles réflexions. Il cft vrai qu'il ne parle que de l'inftruction des perfonnes raifonnables, qui ayant paffé une partie de leur vie hors de l'Eglife, demandoient à être inftruits de la Religion Chrêtienne: il ne parle point des enfans baptifés; & ni dans ce Pere, ni dans aucun autre, rous ne voyons point de Catechifme pour eux. Cela vient de ce que ceux qui étoient baptifés en enfance, étoient enfans de Chrêtiens, qui avoient été euxmêmes bien inftruits avant que d'être baptifés; & qui enfuite avoient grand foin d'inftruire leurs enfans chez eux & de les mener à l'Eglife, où ils affiftoient aux Catechifmes de ceux qui demandoient le Baptême. Ainfi l'hiftoire de la Religion, & toute la Doctrine Chrêtienne leur étoit tant de fois repetée, & en public & en particulier, qu'ils ne pouvoient manquer de la bien fçavoir, pour peu qu'ils y euffent d'affection. H ne faut pas douter néanmoins, que l'inf truction des enfans baptifés, n'ait toûjours commencé d'une autre maniere que celle des Catechumenes plus âgés. Avant que de donner le Symbole à ces derniers & leur expliquer les myfteres,

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il falloit les préparer par plufieurs difcours pour s'afsûrer de leur converfion : & pour leur infpirer la foûmiffion qui eft dûe à l'autorité de l'Eglife: en forte qu'ils fuflent prêts à recevoir fans examen toutes les verités qu'elle leur propoferoit à croire. Les enfans' baptifésn'avoient pas befoin de ces préparations, Ils avoient déjà la foi: ils avoient la docilité, non feulement par la credulité naturelle à leur âge, qui n'eût produit tout au plus qu'une foi humaine; mais par la grace du Baptême, qui leur avoit imprimé dans l'efprit l'autorité de Dieu. & de fon Eglife. Ainfi on leur enfeignoit dabord le Symbole comme nous faifons encore: mais on étoit bien plus foigneux que nous ne fommes de le leur expliquer; & de fortifier leur foi par toutes les inftructions que j'ai marquées, & dans les maifons & à l'Eglife.

Ileft à croire que cette maniere d'inf truire a duré tant que l'ancienne difcipline de l'Eglife s'eft confervée; c'est-àdire, jufques vers le neuvième ficcle: puifque l'on voit durer jufques-là l'u fage de catechifer & d'examiner plu fieurs fois pendant le Carême ceux que l'on devoit baptifer à Pâques. Mais enfin, comme on ne baptifoit prefque plus que des enfans, ces inftruétions publiques dégenererent en formalités ; & la mifere des temps ayant introduit une

grande ignorance, même dans le Clergé, l'inftruction effective fut fort negligée, l'on fut réduit à ordonner en plufieurs

Capit Conciles, que les Evêques & les Prêtres an 802. enfeigneroient aux peuples du moins le Concil. Symbole & l'Oraifon Dominicale. ParMogunt.là ils marquoient tout le Catechifme.

C. IS

an

813. Expliquer ou donner le Symbole felon Can. 45. les Anciens, c'eft catechifer, parce que

le Symbole eft l'abregé de toute la Doctrine. En effet, ces Conciles veulent, que l'on envoye les enfans aux écoles pour recevoir cette inftruction: ce qui feroit inutile, s'il ne s'agiffoit que de retenir par cœur ce peu de paroles : & ils veulent que les Fideles apprennentle Symbole & l'Oraifon au moins en leur langue vulgaire, afin qu'ils l'entendent; & en forte qu'ils puiffent l'enfeigner aux autres. Depuis ce temps-là, c'est-à-dire, environ depuis le dixième fiecle, on s'eft réduit à cette maniere d'inftruction & l'on a crû, que pourvâ que les Chrêtiens entendiffent mediocrement le Symbole, ils pouvoient fe paffer, pour la plupart, de la Connoiffance des faits que les anciens étoient fi foigneux de leur raconter. Cependant, quand nous n'aurions pas l'autorité de l'Ecriture, & les exemples de tant de fiecles, il feroit aifé de voir, que la narration & la déduction des faits, eft géneralement parlant, la meil

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