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gir ne fe préfentent pas par ordre: & fi j'attends que j'aye exécuté tous les Commandemens de Dieu pour connoître les confeils, je ne les connoîtrai peutêtre de ma vie; quoiqu'ils foient donnés pour faciliter l'observation des Commandemens. La négligence à garder les préceptes que nous fçavons déja, ne nous donne donc pas droit d'ignorer les autres nous fommes obligés à les garder tous, & par confequent à les fçayoir tous.

Enfin la vraie Religion n'eft pas comme les fauffes, qui ne confiftent! qu'en un culte exterieur & en de vaines cérémoDeut. iv. nies. C'est une doctrine, une étude, une fcience. Les fideles étoient nomAct. xi. més difciples avant qu'ils cuffent reçû à Antioche le nom de Chrêtiens : les Evêques font nommés Docteurs chez tous les Anciens; & JESUS-CHRIST fondant fon Eglife dit aux Apôtres: Allez. inftruifez toutes les nations. Il est donc impoffible d'être Chrêtien & d'être entierement ignorant : & celui-là eft le meilleur Chrêtien, qui connoît le mieux

Matth. XXVIII.

pratique le mieux la Loi de Dieu. Or quoique l'on puiffe la connoître fans la pratiquer, il eft impoffible d'en pratiquer que ce que l'on en connoit.

Mais il faut avouer que les particuliers ne font pas feuls coupables de l'ignorance qui regne depuis long-temps

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dans l'Eglife: il y a bien de notre faute, je dis de nous autres Prêtres & de tous ceux qui font établis pour inftruire. Quoique l'on prêche très fouvent, & qu'il y ait une infinité de livres qui traitent de toutes les parties de la Religion; on peut dire qu'il n'y a pas affez d'inftructions pour les Chrétiens, même pour les mieux intentionnés. Les livres font de plufieurs fortes: des traités de Théologie, pleins de queftions curieuses, dont le commun des fideles n'a pas befoin; écrits en latin, & d'un ftile qui n'eft intelligible qu'à ceux qui ont frequenté les écoles: des commentaires fur l'Ecriture, la plupart fort longs & prefque tous en latin: des vies des Saints, qui ne vont qu'à montrer des exemples particuliers de vertu : des livres fpirituels, qui donnent de bonnes pratiques pour fortir du peché, & pour avancer dans la vertu & dans la perfection; mais qui fuppofent des Chrétiens fuffilamment inftruits de l'effentiel de la Religion : & qui par la longueur du file & la groffeur des volumes ne font pas à l'ufage des gens occupés ou peu attentifs. Il en eft de même des Sermons. On n'y traite que des fujets particuliers, détachés le plus fouvent les uns des autres, felon la Fête, l'Evangile, ou le deffein du Prédicateur : On y explique rarement les premiers prin

cipes, & les faits qui font les fondemens de tous les dogmes; on y parle des hiftoires contenues dans l'Ecriture fainte, comme de chofes connues de tout le monde.

De-là vient que les lectures publiques de l'Ecriture, qui font partie de l'Office de l'Eglife, fervent fi peu pour l'inftruction des Fideles, pour laquelle on les a inftituées. Tout le monde n'entend pas le Latin peu de gens fe fervent des traductions; & elles ne fuffifent pas, fi l'on ne connoît les livres faints, d'où les leçons font tirées, & fi l'on ne les y lit dans leur fuite. On devroit fuppléer à ce défaut par les Sermons: mais ce n'eft pas expliquer un Evangile que d'en prendre un mot pour texte, & y faire venir à propos tout ce que l'on veut. Ainfi on trouve par-tout de bonnes. gens, qui fréquentant les Eglifes depuis quarante ou cinquante ans & étant fort affidus aux Offices & aux Sermons, ignorent encore les premiers élemens Idu Chriftianifme.

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Il n'y a que les Catechifmes qui defcendent jufques à ces premieres inftructions fi neceffaires à tout le monde: mais il femble qu'ils ne font pas affez eftimés. La plupart croyent fçavoir le Catechifme, parce qu'ils l'ont appris en leur enfance, & ne s'apperçoivent pas qu'ils l'ont oublié, ou qu'ils ne l'ont jamais

bien entendu. D'autres ont honte d'avouer leur ignorance & leur mauvaise, éducation, & ne peuvent s'abaiffer jufques à ces inftructions, qui les remettroient ce leur femble, aux petites écoles. Les Ecclefiaftiques, je dis ceux qui cherchent leurs interêts plûtôt que ceux de Jesus-CHRIST, méprifent cet employ, parce qu'il eft penible, obfcur & infructueux. S'ils croyent avoir de grands talens, ils cherchent de la reputation par l'éloquence de la Chaire s'ils en ont moins, tls s'appliquent au confeffional & à la direction. Mais une des plus gran des difficultés de la Confeffion, eft l'ignorance des Chrêtiens ; & qui les inftruiroit bien, trancheroit beaucoup de pechés par la racine.

Il eft vrai-que la forme & le ftyle des Catechifmes a peu d'attrait pour ceux qui l'apprennent. Car pour ceux qui l'enfeignent, il ne faut pas elperer qu'ils prennent jamais grand plaifir à repeter fouvent des verités qui leur font familieres, trouvant toûjours de nouvelles difficultés de la part des Auditeurs : il n'y a que la charité qui puiffe en faire l'agrément. Mais pour les difciples, comme la plupart font des enfans qui ne peuvent voir l'utilité de ces inftructions, il feroit fort à fouhaiter qu'elles euffent quelque chofe de plus engageant, qu'elles n'en ont pour l'ordinaire. Car

il femble que ceux qui dans ces derniers temps, ont compofé des Catechilmes, n'ont pas eu cette vûe, ou n'ont pas crût qu'il fût poffible d'y rénffir. Ils ont feulement cherché à renfermer en peu de paroles le plus effentiel de la Doctrine Chrêtienne, à le diftribuer fuivant un certain ordre, & à le faire apprendre aux enfans, par des questions & des réponses, qui s'imprimaffent fortement dans leur memoire : & c'eft en effet le plus neceffaire. Auffi ces Catechifmes cnt-ils fait de très-grands fruits: & quelque ignorance qui refte parmi les Chrêtiens,elle n'eft pas comparable à celle qui regnoit il y a deux cens ans, avant que St Ignace & fes Difciples euffent rappellé la coûtume de catechiser les enfans.

Mais enfin on ne peut nier que le style des Catechifmes ne foit communément fort fec; & que les enfans n'ayent beaucoup de peine à les retenir, & encore plus à les entendre. Cependant les premieres impreffions font les plus fortes: & plufieurs confervent toute leur vie une averfion fecrette de ces inftructions qui les ont tant fatigués dans leur enfance. Tous les difcours de Religion leur paroiffent triftes & ennuyeux. S'ils écoutent des Sermons, s'ils lifent des livres de pieté; c'eft avec dégoût, & à contrecœur ; comme on prend des medecines falutaires, mais defagréables. La Reli

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