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résultat aussi contraire aux espérances des Jacobins et des régicides, que l'aversion générale attachée à leur nom, dont ils prétendaient faire un nom de gloire, d'amour et de bonheur pour le monde entier.

L'assemblée constituante publie, au nom du philosophisme et de la philanthropie, un décret qui défend les conquêtes. Ce pacifique décret est suivi de vingt-sept ans de guerre et de la conquête d'une partie de l'Europe, sans parler de l'Egypte, ni des belliqueuses et sanglantes fureurs des Américains, des Grecs et des Espagnols, sous les étendards philosophiques de la liberté.

La révolution faite, disait-on, en 1789 pour combler un déficit de 56 millions dans les finances, dévore plusieurs milliards des biens du clergé ainsi que des émigrés, fait banqueroute de 1800 millions en 1797, lève jusqu'à 12 et 1500 millions d'impôts, à la place des 500 millions payés sous Louis XVI, qui acquittait exactement les rentes que la banqueroute a supprimées.

Depuis 1789, beaucoup d'abbayes, d'églises, de couvents, de châteaux sont changés en fabriques, en magasins, en manufuctures, et le commerce est déchu de son ancienne splendeur.

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La révolution déclare l'argent marchandise, tégalise l'usure pour animer et enrichir le commerce, et depuis long-temps l'on n'entend parler que de commerçants ruinés, de banqueroutes, et de villes dans l'embarras. Nous'en connaissons une où il ne reste pas une seule de ses anciennes maisons de commerce, et parmi les nouveaux venus, nous y avons vu en- peu d'années cinq à six millions de banqueroutes.

Combien de millionnaires de la révolution dont la fortune et le sort furent souvent enviés et exaltés, sont déjà morts insolvables sans parler ni du genre de mort de plusieurs d'entre cux, ni de l'avenir réservé par la justice Divine et à ceux qui sont déjà dans le tombeau, et à ceux qui jouissent encore des fruits de l'iniquité.

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Le philosophisme s'agite depuis long-temps au nom de la liberté pour créer des hommes libres et heureux, des chefs-d'œuvre et des sages. Quel a été le résultat ? Chacun peut faire la réponse en citant les hommes vraiment libres et heureux, les chefs-d'œuvres et les sages, enfantés par la révolution dans son pays ou ailleurs. Trente ou quarante projets discordants sur l'éducation n'ont eu qu'un point commun, censure ou le mépris, et assez souvent la haine de l'ancienne éducation avec la promesse d'une éducation, sans préjugés, sans erreurs, sans vices, et sans superstitions. Quelle a été la suite de tant de fastueuses promesses? de conduire en général la jeunesse, de l'amabilité de son âge à une rudesse effrontée, de la candeur au mensonge, de la sagesse aux désordres les plus pernicieux, de l'obéissance à la révolte, de la modestie à la présomption, de la piété à l'ir religion, des bonnes études aux mauvais livres, de la vertu aux crimes, et trop souvent de la piété filiale envers les parents à la désobéissance, à l'insulte, aux outrages, et même au parricide. Depuis long-temps les prisons et les échafauds ne reçoivent pour ainsi dire que des. élèves de la révolution. Voilà sans contredit la plus dangereuse plaie de la France, celle qui sera la plus longue, et qui attirera sur elle le plus de malheurs, si la bonté divine ne vient à son secours par de nouveaux prodiges de miséricorde.

La révolution a voulu simplifier la législation française, et depuis 1789 sept mille législateurs ont fait environ trente mille lois.

La révolution n'a plus voulu que des républiques et elle les a détruites ou fait détruire presque toutes.

Sous son règne, surtout de 1790 à 1795, la liberté emprisonne, la fraternité égorge, l'égalité traîne dans la boue, l'ennemi de l'Evangile honore des prostituées, et le blasphémateur élève des autels à Marat.

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En trente ans huit constitutions mille lois, sept à huit millions de serments; deux rois, deux princes et deux princesses immolés, dix millions d'hommes sacrifiés cent victoires remportées, quinze milliards dépensés, et rien encore de bien certain que les destructions consommées et la crainte des destractions futures, si... Prions et espérons que le Tout-Puissant couronnera l'œuvre de sa miséricorde.

Les anciens trônes de France, d'Espagne, de Portugal, de Naples, de Sardaigne, d'Autriche, de Prusse, de Russie et même le trône pontifical, ébranlés ou détruits, mais relevés : les nouveaux souverains de France, d'Espagne, de Naples, du Piémont, de Rome, de Piombino, de Lombardie, de Hollande, et de Westphalie dispersés, captifs ou fusillés; voilà selon le monde des jeux de la fortune; mais aux yeux du chrétien, ce sont de grandes leçons données par la Providence aux rois et aux peuples, pour leur salut ou leur perte, selon l'usage qu'ils en feront; leçons dont l'étude suivie à travers le mouvement des siècles et les révoIntions des empires, faisait dire à l'immortel Bossuet: << Ne parlons plus de hasard ni de >> fortune, ou parlons-en seulement comme d'un >> nom dont nous couvrons notre ignorance. >> Ce qui est hasard à l'égard de nos conseils in.>> certains, est un dessein concerté dans un con>> seil plus haut, dans ce conseil éternel qui ren>> ferme toutes les causes et tous les effets dans » un même ordre. »

CHAPITRE V.

Contrastes à la mort de M. le Duc de Berri.

Si ces contrastes doivent nous frapper, que dirons-nous de ceux que nous offre la déplorable nuit du 13 février de cette année 1820?

Un Bourbon, l'espoir de la monarchie française, assassiné à quarante-deux ans par un vil scélérat.

Monseigneur le duc Berri, la ressource des malheureux, le modèle des braves et des bons cœurs, le père des pauvres, poignardé par un monstre qui dit l'ennemi des tyrans.

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Une jeune et vertueuse princesse teinte du sang d'un époux dont elle porte la plus précieuse image dans son sein; soignant elle-même cet époux chéri, et triomphant en présence de la mort, de l'excès de la douleur par l'héroïsme de la tendresse.

Les chants de musique et les danses de l'O

péra, à peine séparés des sanglots et des ombres de la mort qu'un régicide a réunis dans leur séjour. (Mgr. le duc de Berri fut frappé à la porte, et porté à l'instant dans une chambre de l'Opéra pendant le spectacle.)

Un pontife, un pasteur implorant, répandant et admirant en ces lieux plus que profanes les miséricordes de notre divin Sauveur sur un prince chéri, qui survit sept heures à la mort elle-même, pour mourir en héros chrétien.

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Un neveu de Louis XVI, expirant sous le fer d'un assassin aux yeux de l'auteur de ses jours, de son roi, Louis XVIII qui est pour lui un second père, d'un frère, d'une sœur d'une épouse, et des autres princes et princesses de l'auguste famille des Bourbons, tous en larmes et en prières auprès d'un Bourbon mourant en prince plein de foi, sur un lit d'emprunt, et dans un lieu qui n'appartient qu'aux fêtes et aux folles joies du monde.

Enfin, le petit fils de Saint-Louis qui souffre et meurt en pardonnant, et en demandant grâce, au moins de la vie, pour son assassin qui dit que Dieu n'est qu'un mot. Ne trouvet-on point ici les contrastes de l'héroïsme et de la scélératesse, de la charité et de l'athéisme, du ciel et de l'enfer?

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