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XIII SIÈCLE.

Id., p. 947.

Id., p. 948.

Id. p. 960.

Id., p. 961.

« fuso tractatu per orbis distincta climata prænotavimus. Gervais a intercalé, dans cet épilogue, une longue description de la Terre-Sainte, d'après le diacre Théodose; « Sicut à Theo<< dosio diacono tractatu brevi notatum legimus. » Ce Théodose ne serait-il pas le même que celui qui, au IXe siècle, écrivit une lettre curieuse sur le siége de Syracuse par les Sarrasins? On le savait auteur de quelques poésies; mais on aurait ignoré qu'il eût composé une description de la Judée. Gervais a-t-il copié en partie cet opuscule, ou s'est-il contenté d'y puiser des connaissances sur la position et sur les distances des lieux? c'est ce que l'on ne peut décider. Dans tous les cas, on peut dire que ce chapitre de l'ouvrage de Gervais est d'une grande sécheresse, mais au moins qu'il est rédigé avec méthode.

L'épilogue est terminé par une histoire abrégée ou chronique des descendants de Noé, et des six premiers âges du monde, dans laquelle l'auteur n'a pas jeté le moindre intérêt; défaut qui n'est racheté ni par la précision, ni par l'exactitude.

La troisième partie ou Decisio, ne mérite pas de nous occuper long-temps. Elle traite des merveilles de chaque pays, et surtout de celles des provinces méridionales de la France; mais l'on y trouve peu d'observations vraies, et aucun raisonnement physique; elle est remplie des contes les plus absurdes. Aussi, avant d'entrer en matière, l'auteur a-t-il jugé à propos de s'assurer de la crédulité du lecteur, ou du moins de se prémunir, dans les termes suivants, contre son incrédulité, « Et quoniam humanæ mentis aviditas, dit-il, ad << audiendas ac hauriendas novitates semper acuitur; anti«quissima commutari necesse erit in nova, naturalia in mi<< rabilia, apud plerosque usitata in inaudita..... Mirabilia « verò dicimus, quæ nostræ cognitioni non subjacent, etiam «< cùm sint naturalia. Sed et mirabilia constituit ignorantia reddendæ rationis, quare sic fit. » Il donne ensuite plusieurs exemples de choses merveilleuses et extraordinaires, entre autres, de la salamandre qui ne peut vivre que dans le feu; de la chaux, que l'eau seule peut allumer et il ajoute : Nullus ergò fabulosa judicet, quæ scribimus.... Excedunt quippè vires mentis humanæ, ideòque æstimant falsa plerùmque, cùm de his etiam, quæ quotidiana videmus, ipsi reddere rationem non possint. »

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Nous nous abstiendrons de rapporter les prodiges de tous genres qu'il raconte, et auxquels il paraît ajouter en

tièrement foi. Parmi ces prodiges, quelques-uns peuvent s'attribuer à des causes fort naturelles, que les gens les moins instruits expliqueraient très-bien aujourd'hui, mais que l'ignorance qui dominait alors, ne permettait même pas aux plus savants de distinguer. Les autres, et c'est le plus grand nombre, sont de véritables contes populaires sur les propriétés soit des plantes, soit des métaux; sur les fées et les sorciers; sur les merveilles enfantées par la baguette des magiciens, au premier rang desquels il compte Virgile.

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Après avoir parlé, dans plusieurs endroits, de différents prodiges opérés par le savoir (arte mathematica) de ce poète, il raconte qu'au temps où Roger était roi de Sicile, un maître anglais de nation vint demander à ce prince les os du poète « ait regi se non solatia temporalia petere, sed potiùs, quod apud homines vile putatur: ossa videlicet Virgilii. Innuit rex, et magister, acceptis litteris regiis Neapolin venit, ubi Virgilius studia ingenii sui in multis «<exercuerat. Mais le peuple de Naples, craignant qu'il ne Jui arrivât quelque grand malheur, si on lui enlevait ce palladium, voulut éluder les ordres du roi, et on demanda à l'étranger ce qu'il voulait faire de ces ossements. << Respondit, se per conjurationes effecturum, quod ad ejus interrogationem ossa, omnem Virgilii artem ipsi panderent. » Il paraît que cette réponse ne rassura pas les esprits, et on ne lui laissa emporter que le livre de magie qu'on supposait avoir appartenu à ce poète, et sur lequel sa tête reposait. « Asportato ergò libro solo magister abiit, et nos quædam ex ipso libro per venerabilem Johannem Neapo«litanum cardinalem tempore papæ Alexandri per excerpta

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vidimus. »

XIII SIÈCLE.

Otia imp., P.

Naudé, dans son Apologie des Grands Hommes fausse- 1002. ment soupçonnés de magie, défend vivement le chantre de l'Eneide de cette inculpation: « Se pourroit-on jamais imaginer, dit-il, quelque caprice plus esloigné du sens commun et de toute raison, que de voir ce phoenix de la poësie latine accusé, non point de cette magie et fureur poëtique qui a charmé, par la perfection de ses œuvres, tous les plus beaux esprits à idolatrer ses vestiges......., mais de la Goëtique, superstitieuse et défendue, de laquelle toutesfois cet honneur du Parnasse n'eust esté aucunement soupçonné sans l'imprudence effrénée de ces potirons et fabulistes, etc...... » C'est

Pag. 607 et 608.

XIII SIÈCLE.

Gervais, continue Naudé, qui a été le premier auteur de ces réveries, « qu'il a consignées dans son livre intitulé Otia Imperatoris, qui est si rempli de choses absurdes, fabuleuses et du tout impossibles, que difficilement me pourrois-je persuader qu'il fust en son bon sens quand il le comId., p. 611. posait.

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Ce jugement embrasse l'ouvrage entier de Gervais sans distinction, mais trop sévère pour les deux premières parties, auxquelles il ne doit pas s'appliquer, il est extrêmement juste à l'égard de la troisième. En effet, elle est remplie de choses si absurdes et si fabuleuses, qu'on a lieu d'être surpris de voir tous ces contes copiés par tant d'auteurs, entre autres par le moine Hélinand, qui, dans sa chronique universelle, en adopte la plus grande partie. Il est encore aussi étonnant que, plus d'un siècle après, les préjugés ridicules, répandus par Gervais, au sujet de Virgile, avaient assez de force pour prévaloir contre le mérite réel et incontestable d'un homme aussi justement célèbre, que Pétrarque. Ses connaissances profondes et variées, les honneurs qu'on lui rendait excitèrent l'envie à tel point qu'on l'accusa de magie Vie de Pétrar- près du pape Innocent VI, et on parvint à prévenir contre que par le baron lui le pontife, en lui faisant entendre que ce poète était de la Bastie, Aca- adonné aux sciences occultes, ce qu'on croyait prouver en t. XVII, p. 435. alléguant son attachement à la lecture de Virgile.

démie des inscr.,

L'ouvrage de Gervais est terminé par une lettre, que nous avons citée au commencement de cet article, et qui est adressée ad magistrum Joannem Marcum Præpositum de Ildeneshem Secretarium Domini imperatoris, dans laquelle Gervais le prie de vouloir bien présenter, et faire agréer à l'empereur l'hommage qu'il lui fait de son travail.

Les nombreux passages que nous avons cités de ce livre, suffisent pour faire connaître la manière dont il est écrit, et ne laissent rien à ajouter à cet égard. Une lecture attentive et suivie de tout l'ouvrage pourra seule faire voir combien l'auteur avait peu de suite dans les idées. En effet, le style de Gervais, quoique assez facile, est lâche et décousu, coupé par de fréquentes et inutiles digressions, qui n'ont que peu et quelquefois même point de rapport avec le sujet qu'il traite, et qui jettent de l'obscurité dans certains endroits. Sa latinité se ressent de la barbarie du temps auquel il écrivait, mais elle n'est généralement pas mauvaise; et il faut avouer à sa louange, que bien que la langue dont il se sert

soit altérée dans ses mots et dans ses formes, on y reconnaît pourtant encore matériellement quelque chose des bons temps, et son néologisme est mieux latinisé, si l'on peut s'exprimer ainsi, que celui de la plupart des écrivains du même siècle; quelquefois même les expressions qu'il crée sont heureuses et ne manquent pas de hardiesse aussi Ducange le cite-t-il souvent, et c'est un des auteurs des bas âges, auquel il paraît avoir emprunté le plus de mots pour la composition de son Glossaire. Les fréquentes citations des anciens, que l'on trouve dans le livre que nous venons d'examiner, prouvent encore, à la louange de Gervais, qu'il appréciait et savait allier, dans ses écrits, plus qu'on ne le faisait de son temps, les auteurs sacrés et profanes.

Il est fàcheux qu'un ouvrage aussi recommandable sous tant de rapports, pour l'époque où il a été composé, soit rempli de tant de contes, et de fables si absurdes. Le seul moyen d'excuser notre auteur sur ce point, serait de dire que toutes ces fables existaient déjà chez les écrivains qui l'avaient précédé. Mais si cette excuse est tout au plus valable pour les contes relatifs aux apparitions, aux enchantements, aux géants, etc., que le pape Calixte II avait en quelque sorte accrédités, en décidant, l'an 1122, que l'ouvrage de Turpin était une histoire authentique; la même excuse n'est pas admissible pour justifier les inventions fabuleuses, les erreurs et les préjugés que l'on rencontre fréquemment dans l'ouvrage de Gervais; entre autres ce qu'il raconte de Virgile. Quelques écrivains prétendent aussi qu'il est le premier qui ait parlé de la papesse Jeanne.

XIII SIÈCLE.

Ginguené, Hist. littér., d'Italie,

t. IV. p. 135.

Oudin,De script.
Ecclésiast. t. III,
Jeanne, etc.

Bayle, papesse

Le livre de Otiis imperialibus n'a été imprimé qu'une seule fois en entier, et cela par les soins de Leibnitz, dans la collection des historiens de Brunswick. Maderus a publié, en 1678, une partie de la seconde decisio de cet ouvrage, sous le titre suivant: Gervasi Tilberiensis de imperio Romanorum, Gothorum, Longobardorum, Britonum, Gallorum, aliorumque regnis, commentatio, à Joachimo Madero edita: Helmstadii, 1673, in-4°. Cette publication partielle a induit en erreur les écrivains, qui ont pensé, qu'indépendamment du livre de Otiis imperialibus, Gervais avait encore composé une histoire des Romains, des Goths, des Lombards, etc. Le savant Vossius, entre autres, fait d'une manière peu exacte l'énumération des écrits de notre auteur. « Illustravit histo- p. 422. << riam britannicam Galfridi Monemutensis, dit-il; præterea

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Hist. Lai

XIII SIÈCLE.

Lelong, bibli.

de la Fran., t. I, p. 128; no 2380.

p. 216.

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« condidit historiam terræ sanctæ; item scripsit originem
Burgundionum et mirabilia orbis; præterea chronicon cui
«< titulus De otiis imperialibus. » Qui ne croirait, en lisant
cela, que
Gervais est auteur d'autant d'ouvrages différents,
tandis que ce ne sont réellement que différents chapitres d'un
seul et même ouvrage, et de celui que Vossius mentionne le
dernier?

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La bibliothèque du Roi possède plusieurs manuscrits des Otia imperialia, dont le plus ancien est du XIVe siècle; mais aucun ne mérite d'être cité. Il faut seulement rectifier une erreur grave de Fontette, relativement à l'un de ces manuscrits. « Il y a, dit-il, à la bibliothèque du Roi, no 4905. 3., autrefois Baluze, 209, un manuscrit des Otia imperialia qu'on croit de Gervais même, et qui est, surtout pour la troisième partie, plus exact que celui que Leibnitz a donné. Or, ce manuscrit, dont parle Fontette, étant d'une mauvaise écriture du XVIe siècle, ne peut avoir été écrit par Gervais. Il ne contient que la troisième partie seulement des Otia imperialia, et cette partie est, sinon plus exacte, du moins plus complète que celle qui a été imprimée par Leibnitz; mais tout porte à croire que les fables que l'on y trouve de plus, ont été surajoutées par le copiste, et qu'elles sont le fruit de son imagination.

par

La plupart des auteurs attribuent à Gervais un livre qui traite des lois et des coutumes de la cour de l'Echiquier d'Angleterre; mais rien n'est moins certain que ce fait, dont Not. ad Ead- Selden paraît douter, et dont l'authenticité est contestée meri historiam, Thomas Madox, qui a composé lui-même une histoire de l'Échiquier, et qui a publié en entier l'ouvrage attribué à Gervais. Ce livre est indiqué, en plusieurs endroits du catalogue des manuscrits anglais, sous le titre suivant: Gervasi Tilberiensis de necessariis Scaccarii observandis ou obserCatal. MSS. vantiis dialogus. Madox, dans son incertitude sur le véritable angl., p. 3, no auteur de ce livre, l'a publié, en 1711, sous le simple titre 1094; p. 4, nos de Antiquus dialogus de Scaccario, Gervasio de Tilbury 9605.. vulgò adscriptus, etc..., à la suite de son histoire de l'ÉchiThe hist. and quier. Il y a joint des variantes et des notes savantes, et il l'a antiquities of the fait, précéder d'une dissertation, en forme d'épître dédicaTh. Madox. Lon- toire, adressée à Charles Halifax, et dans laquelle il cherdon, 1711, in-f. che à prouver, comme on l'a dit précédemment, que Gervais de Tilbury n'est pas l'auteur de ce livre. Plusieurs circonstances viennent à l'appui de cette opinion; et d'abord il est

5699, 9350 et

Exchequer, by

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