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de nobilis matrona, constabularia flandrensis. Cet acte fut consenti et approuvé par son fils Michel de Harnes.

XIII SIÈCLE.

Gall. christ. et instrum. col. nov. t. III, p.451, 97 à l'an 1204.

Plus tard, en 1214, nous le trouvons à la bataille de Bouvines, où il fut dangereusement blessé. Voici comme les chroniques de Saint-Denis rapportent ce fait : « En cet estors fu ferus Micheaus de Harnes, d'une lance parmi l'escus et le << haubert, et parmi la cuisse, et fu cousuz aux auves de la << selle et au cheval, et fu trébuchié à terre et il et li chevaus. » t. XVII, p. 408. L'événement est raconté avec plus de détails, et très-poétiquement par Guillaume-le-Breton dans sa Philippide :

Jamque perhorruerat lituorum frangor, et omnes
Hinc atque indè acies commixtæ in fata ruebant :
Hainensis Michael clamanti funera francis
Obviat, et medium forat illius ægidis hasta.
Ast illum inferiùs Eustacius impetit, atque

Per sellam, per equi costas, agit improbus hastam,
Et domini per utrumque femur: cadit hic, ruit ille,
Vixque potest hastile suis evellere coxis.

At Michael, sociis tellure juvantibus ipsum

Se levat, et quamvis coxam gravet ejus utramque
Plaga duplex, commendat equo sua membra recenti
Invento ut multis aliis sessore carenti,

Cujus humi dominum prostraverat Hugo Malaunus.

A la suite de cette bataille, où il fut si cruellement atteint d'un coup de lance, Michel de Harnes s'engagea comme ôtage pour divers prisonniers faits par Philippe-Auguste, et s'établit leur caution pour d'assez fortes sommes. C'est du moins semble prouver une pièce conservée dans le recueil de Duchêne, sous ce titre: Nomina militum qui pro aliquibus prisionium se plegios aut hostagios ergà Philippum regem constituerunt. Le nom de Michel y est cité en trois endroits.

ce que

Plegi pro Petro de Mesnin : Michael de Harnes, de C. L.
Plegi Galteri de Guistèle: - Michael de Harnes, de C. L.
Plegii pro Geraldo de Grimberge : Michael de Harnes,

de CC. L.

L'époque de la mort de Michel de Harnes n'est point certaine. Tout ce que nous savons, c'est qu'il vivait encore en 1224, puisqu'il fut choisi pour arbitre dans une contestation qui durait depuis plusieurs années entre une Béatrice, comtesse de Guisnes, châtelaine de Broburg, et son fils Baudouin.

Hist. de Fr.,

Philippid., I. XI, v. 103–134.

Duchesne, histor. de France, t.V, p. 270.

Hist. de Fr t. XVII, p. 579.

XIII SIÈCLE.

Voici maintenant tout ce qu'il y a de littéraire dans la vie de ce chevalier. Il ne traduisit pas, mais il fit traduire en prose française la fabuleuse chronique de Turpin, d'où jusques-là on n'avait cessé de tirer une foule de Romans en vers: encore n'est-il pas, à ce qu'il semble, le premier qui ait eu l'idée d'un pareil travail. Une autre traduction du même livre, exécutée par les ordres de Renaud, comte de Boulogne, fut terminée en 1206, un an avant celle de Michel de Harnes, laquelle n'est que de 1207. Il existe à la Bibliothèque du roi, des manuscrits de chacune de ces traductions qui different par le style; mais nous ne saurious dire celle qui mérite la préférence. La plus ancienne en date (celle de 1206), porte le n° 8190; l'autre (celle de 1207), les n° 7534 et 7628.

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Nous nous occuperons d'abord de la première.

Voici ce que contient le prologue, ou la préface: «Voire est <<< que li plusor ont oi volentiers et oient encore de Charlemaine comment il conquist Espaigne et Galice. Mès quoi« que li autres aient osté et mis, ci poez oir la vérité d'Es«paigne selon le latin de l'estoire que li cuens Renaux de Boloigne, fit par grant estude cerchier et querre ès livres à «< monseigneur saint-Denis, et por estre et manoir ès cuers << des gens les œuvres et le nom del bon roy Phelippe-leNoble et Loeys son fils, la fist-il en romans translater del <«< latin as xic ans de l'incarnation, et vi. Et por ce que rime << se velt affaitier de mout conquestes hors de l'estoire, voust << li cuens que cist livre fust sans rime, selon le latin de l'esVoy. le même «toire que Turpins, l'archevêque de Reims récita et escrit si passage cité dans « com il le vit et oi. >>

les Mémoires de l'Acad. des Insc,

Ainsi, dans ce temps, on était encore convaincu de l'authenet Belles-Lettres, ticité des faits racontés par le prétendu archevêque de Reims. .XVII, p. 737. Mais ce qui étonne davantage, c'est de voir le comte Renaud chercher par grant étude, dans les archives de l'abbaye de Saint-Denis, un livre qui ne devait pas être rare, puisqu'il était la source féconde où puisaient tous les poètes romanciers, depuis près d'un siècle. Peut-être le comte Renaud ne voulait-il que se procurer un manuscrit plus exact: et, en effet, il en existait un à Saint-Denis, dès l'an 1160, qui, plus ancien que les autres, devait avoir subi de moins nombreuses altérations.

Le président Fauchet, dans ses Antiquités françaises, nous fait connaître celui qui traduisit la chronique de Turpin, pour le comte Renaud, et ajoute à ce renseignement des ré

XIII SI

flexions très-sensées. « Regnault, comte de Boulogne et de Dampmartin, dit-il, taut renommé du temps de Philippe Auguste, qui le tint longuement prisonnier, l'an mil deux « cent six, commanda à un M. Jehans, de recueillir les faits « de Charlemagne les plus véritables, et sans avoir égard aux << romans, qui lors estoient en grande vogue : ce bon M. Je<<han ayant trouvé en la librairie de Saint-Denis, l'histoire << fabuleuse de Turpin, pensant que la narration en fût vraye, << la translata de latin en françois, abusant ce vaillant prince; « là, où s'il eût mieux cherché, il eût pu trouver ce qu'avoit « écrit du même empereur, Éginard, son chancelier, ou Ad« mat (sic) et les annalistes du temps, pour faire un plus cer- ses, 1. VI. a tain et meilleur recueil. » Nous passerons maintenant à la seconde des traductions Paris 1610 françaises, celle de 1207.

«

La traduction de la chronique Turpin, faite par les soins de Michel de Harnes, est comme celle dont nous venons de parler, précédée d'un prologue presque entièrement semblable pour le style et les idées, à celui qu'on lit en tête de la traduction de messire Jehan, et que nous avons cité. Mais il y est dit ou à peu près, que ce fut sur le manuscrit qui avait servi à la traduction ordonnée par le comte Renaud, que fut faite la nouvelle traduction, laquelle ne parut qu'un an après l'autre. « Ici poez oir la vérité d'Espaigne, selon <«<le latin de l'estoire que Michels de Harnes fist par grande <«< estude cherkier et querre les livres Reinaud, le comte de Bologne; et por refrescir es cuers des gens les œuvres del « bon roy, la fit translater de latin en roman, à xi cens et << sept de l'incarnation de notre seignor Jhésus-Crist. »>

Fauchet tiquités fra

P. 212. (É

Voy. l'a

l'Acad. d

cript., t.

Ces deux traductions en prose française contribuèrent à Boeuf, M répandre encore plus dans le peuple, les fables que le faux Turpin avait consignées dans sa chronique. Toutes ces fables p. 737. sont bien connues par les romans en vers dont elles ont été l'origine, ou plutôt le germe,ce qui nous dispense d'en répéter aucune. Nous remarquerons seulement que dès ce temps, il paraît que l'on commençait à se dégoûter de ces énormes amas de vers ou plutôt de rimes qu'avait accumulés dans les librairies des couvents et des châteaux la fécondité du siècle précédent; et c'est ce qui détermina sans doute plus que tout autre motif, tant le comte Renaud que Michel de Harnes, à exiger que les traductions qu'ils demandaient de la chronique de Turpin fussent en prose.

XIII SIECLE.

Ce dégoût pour les vers ne se manifesta pourtant d'une manière très-sensible que vers le commencement du xive. siècle. C'est du moins notre opinion. Nous comptons dans le XIIIe siècle un trop grand nombre de poëtes, pour croire que, dans cette période, on en était venu à donner une préférence exclusive aux prosateurs. A. D.

MIIN

Quinta die sep tembris, Script.

24.

749.

471.

Thes. anecd.,

LOUIS VIII,

ROI DE FRANCE,

MORT EN 1226.

FILS de Philippe-Auguste et d'Isabelle de Hainaut, première épouse de ce monarque, Louis naquit à Paris, en 1 187, le 3 ou le 5 septembre, à onze heures du soir. En indiquant la deuxième de ces dates, Rigord, Guillaume-le-Breton, Alberic de Trois Fontaines, disent que c'était un lundi, feria secundá; Benoît rer. gallic. XVII, de Péterborough dit tertio nonas septembris, die Jovis, c'estNonis (5) sept. à-dire le jeudi 3 septembre. Mais en 1187, le 3 septembre était Ibid., 68. réellement un jeudi, et le 5 un samedi : pour retrouver un Ibid., XVIII, lundi, il faudrait remonter au 31 août, jour assigné en effet Ibid., XVII, à cette naissance, dans un monument généalogique, publié par dom Martène. Toutefois le 5 septembre est la date établie le plus grand nombre des témoignages ou des opinions. Louis, à l'âge de 4 ans, faillit mourir d'une dissenterie, et ce fut, selon les chroniqueurs, à des reliques de saint Denis qu'il dut sa guérison. Peu de mois après, on le déclara héritier des domaines d'Aire et de Saint-Omer, mais seulement pour en jouir au décès de Mathilde, veuve du comte de Flandre Philippe. Au lieu d'OEnora, princesse bretonne, qui lui avait été destinée en 1195, il épousa, en 1200, Blanche de Castille, nièce de Jean, roi d'Angleterre, qui, à l'occasion de ce mariage, céda au prince français le comté d'Évreux et d'autres territoires. En 1206, une maladie retint quelque temps Louis à Orléans: sa santé s'étant rétablie et fortifiée, son père l'arma chevalier, à Compiègne, le jour de la Pentecôte 1209, avec

III, 392.

par

XIII SIÈCLE.

Script. rer. gal

une solennité, une magnificence, dont jusqu'alors on n'avait pas vu d'exemple, à ce qu'assure Guillaume-le-Breton : « Cum « tantâ solemnitate et conventu magnatum regni et homi« num multitudine et largifluâ victualium et donorum abundantiâ, quanta ante diem illum non legitur visa fuisse. » Le nouveau chevalier conféra aussitôt l'ordre qu'il venait lic., XVII, 82. de recevoir, aux deux fils du comte de Dreux. Il ne fut pas couronné roi de France du vivant de son père; il est le mier roi capétien qui n'ait pas été associé au trône, avant de l'occuper seul. Ses droits semblaient assez établis, tant par la possession des huit rois dont il descendait, que par l'avantage d'être né d'une mère issue des derniers Carlovingiens : il parait qu'on attachait de l'importance à cette généalogie d'Isabelle de Hainaut.

pre

Philippe-Auguste, en 1212, envoya son fils à Vaucouleurs, pour conférer avec l'empereur Frédéric II, qui avait encore, dans Othon, un compétiteur redoutable. Dans le cours de cette même année et de la suivante, Louis, pour assurer ses droits aux domaines de Saint-Omer et d'Aire, prit les armes contre Ferrand, comte de Flandre. C'est le commencement de ses exploits militaires : bientôt après il obtint en Anjou et en Poitou des succès qui préludèrent à la victoire éclatante que remporta son père à Bouvines, en 1214. Nous avons eu occasion de parler ailleurs de ces évènements, ainsi que de la guerre contre les Albigeois, dans laquelle Louis ne tarda point à s'engager. Nous ne devons pas non plus revenir sur son entreprise pour s'emparer du trône de la Grande-Bretagne; les barons anglais l'y avaient appelé; mais après la mort de Jean-sans-Terre, ils se déclarèrent en faveur du jeune Henri III; et Louis, que Rome avait excommunié comme usurpateur, ne fut absous qu'en renonçant à ses prétentions. Rentré en France vers la fin de septembre 1217, il reprit les armes, en 1219, contre les malheureux Albigeois, et conclut l'année suivante une trève de quatre ans, entre son père et le monarque anglais. On le trouve en 1222 gouvernant le comté de Boulogne, au nom de son frère Philippe de Hurepel, né d'Agnès de Méranie, et non encore chevalier.

Ci-dessus, art. de Phil-Aug.

Guill. de Pod.

Faible de corps et d'esprit, Louis a été qualifié par son père homo delicatus et debilis; et l'on a peine à concevoir quel titre il pouvait avoir au surnom de Coeur-de-Lion, qui Laur., c. 34. lui est resté dans l'histoire: celui de Lion Pacifique, par lequel il est aussi quelquefois désigné, lui conviendrait un peu

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