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inspiré un des contes de Boccace et le Tout est bien qui finit bien de Shakespeare. Comment la comtesse d'Artois reconquit son mari, s'en fit donner son diamant et son meilleur cheval sans qu'il s'en aperçut, c'est ce qu'il serait trop long de narrer, mais que M. Piaget résuma avec beaucoup d'humour et de

saveur.

Ce roman, copié pour la « librairie » du comte de Neuchâtel, illustré d'enluminures, a disparu de Neuchâtel; au début du XIXe siècle, il se trouvait à la Bibliothèque royale de Paris, où il fut volé par un membre de l'Institut qui aimait tant les livres qu'il avait imaginé ce moyen de s'en procurer... pour les vendre à des bibliophiles; un de ses clients, craignant une indiscrétion, s'empressa de passer ces trésors mal acquis à des collectionneurs anglais. Voilà pourquoi l'on vient de retrouver le précieux manuscrit neuchâtelois dans une caisse d'un bibliophile américain. La plus difficile sera de le faire revenir aux bords du lac de Neuchâtel.

Les Confréries du Saint-Esprit dans le canton de Vaud ont été étudiées par M. Maxime Reymond, archiviste cantonal à Lausanne, qui a constaté que chez nous ces associations paroissiales d'assistance aux pauvres sont distinctes de l'ordre hospitalier du Saint-Esprit. Il a relevé l'existence de ces confréries dans les diocèses de Lausanne, de Besançon, de Sion et de Genève; elles ne groupaient qu'une partie des paroissiens et les femmes y étaient admises; leurs statuts n'étaient pas rigides et se pliaient aux circonstances locales; leurs libéralités nous sont connues par les comptes que M. Reymond a eu la patience de dépouiller. Elles faisaient aux pauvres des distributions de pain et de viande, s'occupaient des malades, faisaient dire des offices et des messes et de temps à autre se réunissaient en de joyeuses agapes.

M. Reymond croit trouver dans ces confréries l'origine de nos Bourses des pauvres et il est bien probable qu'elles constituèrent l'embryon des organisations communales rurales.

Après un diner à l'Hôtel du Cerf, agrémenté de quelques discours intéressants et des productions de quelques jeunes gens et jeunes filles qui chantèrent et dansèrent quelques coraules locales, les assistants visitèrent le château, l'église du couvent des Dominicaines, etc.

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Le travail qu'on va lire a été communiqué à la Société vaudoise d'Histoire et d'Archéologie, dans sa séance du 22 août 1925, au Sentier. Dès lors, M. et Mme Ganty-Berney, à Château-d'Oex, propriétaires de différents documents relatifs à la vie de Philippe Berney (aïeul de Mme Ganty), ont bien voulu les mettre à ma disposition, ce dont je les remercie très vivement. C'est grâce à leur obligeance que je peux donner ici un portrait de ce patriote de 1798.

Le travail de M. Capt est basé essentiellement sur un Mémoire écrit en 1815 par Philippe Berney, pour répondre à différentes critiques. Grâce aux documents qui m'ont été confiés, je me permettrai d'ajouter trois notes explicatives au travail de M. Capt et de le faire suivre d'un supplément relatif à divers faits et incidents de la vie du patriote du Chenit.

Privilégié d'habiter la demeure où vécut Ph. Berney, je me permets de venir rappeler à ceux que cela peut intéresser, ce que fut ce grand patriote vaudois.

La famille Berney, originaire de Bioux, s'établit à l'Orient vers 1770.

Né et élevé1 paysan jusqu'à 16 ans, privé des ressources qu'offre l'éducation pour une imagination aussi ardente que la sienne, Philippe Berney, après avoir appris le métier de lapidaire avec son père, obtint de celui-ci l'autorisation de se rendre à Lyon puis à Paris, pour essayer le commerce des pierreries; comme ses ressources pécuniaires étaient très limitées, il fut convenu avec son père qu'il entrerait comme volontaire aux Gardes-Suisses avec l'appui de Monsieur le Capitaine de Loys; à côté d'un service facile il employait son temps à se procurer des connaissances utiles pour le petit commerce de pierreries qu'il faisait avec assez de succès; de même, il cherchait à perfectionner son instruction.

La Révolution française eut lieu pendant qu'il était au service militaire, mais il quitta le régiment sur l'ordre de son père peu de temps avant la fatale journée du 10 août 1792; il avait donc passé en France ses jeunes années pendant lesquelles il était entré en relations avec des compa

1 Voici l'extrait du registre des baptêmes de la paroisse de l'Abbaye: Philippe-Louis Berney, fils d'Abram-Siméon Berney, des Bioux, et d'Anne-Louise Rochat sa femme, né le 12 avril 1767 et batisé le 3 may. Parr.: Jean-Isaac, fils de Jean-Pierre Reymond, et Abram-Isaac, fils de Jean-Isaac Rochat, tous deux des Bioux. Marr.: Jeanne-Esther Reymond. A. Rochat, pasteur.

Je déclare en outre que le sus-nommé Philippe-Louis Berney a été admis à participer à notre Ste Communion le 10 avril 1783. ainsi qu'il conste par les registres de Communion et de réception des catéchumènes de susdites paroisse de l'Abbaye. A Rochat, past. A l'Abbaye, le 16 mars 1787. (Acte appartenant à M. GantyBerney.)

triotes vaudois, qui tous espéraient de la révolution de France, l'affranchissement de leur pays; il fit connaissance, en particulier, de Jean-Isaac Cart de l'Abbaye, expatrié par haine des Bernois.

En 1794, la commotion donnée par la Révolution française avait frappé l'imagination des peuples, les droits de l'homme ayant été proclamés, les souverains dont le pouvoir n'était pas fondé sur ces principes, tremblants, hésitaient sur les moyens de maintenir leur autorité, pendant que les sujets, profitant de cette stupeur et ralliés par le sentiment de la liberté si naturel à l'homme, employaient tous les moyens possibles pour la recouvrer ou la conquérir.

Les événements de l'époque avaient imbu Philippe Berney de ces grands principes de liberté et dès lors il était persuadé que les hommes pouvaient vivre libres de toute espèce de tyrannie, respecter, aimer et craindre les magistrats choisis par le peuple.

On peut concevoir pourquoi déjà à 20 ans, Ph. Berney ne se considérait pas comme un sujet des Bernois; il était si éloigné de les reconnaître pour souverains du Pays de Vaud, qu'il ne voyait en eux que des ennemis de sa patrie telle qu'il la désirait, et à laquelle il espérait appartenir un jour.

A ce moment là, beaucoup d'autres Vaudois instruits et énergiques, avaient les mêmes espoirs que Philippe Berney; une sage prudence les avait conduits à demander au Sénat de Berne, par très humble supplique, l'affranchissement du Pays de Vaud, en évitation d'une révolution ou d'une intervention étrangère.

Toutes ces tentatives inutiles n'avaient servi qu'à provoquer des arrestations, des détentions arbitraires et autres actes de fureur, auxquels se livre un gouvernement à l'agonie et tout espoir d'obtenir sans secousse une réforme heureuse fut déçu.

Les esprits étaient dans de telles dispositions (juin 1794), Corsque M. Jean-Isaac Cart vint en Suisse rendre visite à son ami Philippe Berney: il le trouva marié et toujours plus enflammé par les idées libérales; il l'instruisit des desseins d'un Comité de patriotes vaudois formé à Paris, dont il était membre; il lui apprit que le Comité de salut public de Paris. effrayé de la masse énorme de faux assignats qui étaient en circulation, faisait des recherches pour en découvrir la source; qu'on savait par des renseignements «qu'une fabrique anglaise existait en Suisse, sous l'agence de Mylord Fistehréald Sensé Ambassadeur à Berne: (que les Bernois donnaient la main à cette vile manœuvre ;) qu'enfin un grand plan était ainsi formé pour détruire le système des finances de France ».

A l'ouie de ces paroles, Philippe Berney saisit les fils de cette trame; il avait comme plusieurs de ses amis subi des pertes importantes sur les assignats; d'autre part, il avait incidemment rencontré et vu un Anglais nommé Schemild s'entretenir mystérieusement avec des émigrés français ; après des recherches minutieuses, il apprit bientôt que cette fabrication de faux assignats se faisait à Montherod, au dessus d'Aubonne et que le bailli en avait connaissance; en moins de huit jours tous les faussaires étaient dans ses filets.

Philippe Berney rassembla alors un petit comité de patriotes, où il fut décidé sans hésitation que la chose serait portée à la connaissance du Gouvernement français, dans l'espoir de tirer profit et avantage de ce fait en faveur du Pays de Vaud; chacun se félicitait du plaisir qu'il y aurait « à mettre le Sénat de Berne aux prises avec le Comité du salut public de Paris et de voir éclabousser cette bande de fripons », qui avait causé au commerce bien des pertes.

Philippe Berney fut désigné, soit qu'il fut trouvé le plus

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