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Journal du Gard, du 6 février, un démenti formel à la Minerve, qui avoit représenté la ville de Nîmes comme ayant été en proie à des troubles et à des désordres, le 25 et le 26 décembre dernier, à l'occasion du changement de ministère. Il n'y a pas eu, dit le maire, la moiudre agitation, et les dates seules confondent la calomnie; car l'ordonnance qui change le ministère est du 29, et ne pouvoit apparemment être connue à Nîmes quatre jours auparavant.

--M. le marquis de Lons, gouverneur du château de Pau, y est mort, le 5 de ce mois, dans un âge avancé.

-M. Regnault de Saint-Jean d'Angely, dont la santé est, dit-on, assez mauvaise, a obtenu de rentrer en France.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Le 12 février, on reçoit un message de la chambre des pairs, qui annonce la résolution qu'elle a prise de supplier le Roi de proposer une loi portant abolition entière du droit d'aubaine et de détraction. M. Jobez fait un rapport sur plusieurs pétitions; la seule qui fut de quelque importance, et qui ait donné lieu à une discussion, est celle des membres de la Légion d'Honneur qui réclament contre la réduction de leur traitement. Le rapporteur exprime le vœu que leur demande soit prise en considération, et qu'on publie les comptes de l'administration de la Légion d'Honneur. M. de Chauvelin demande l'impression de ce rapport, qui est adopté. M. Dupont de l'Eure renouvelle les plaintes contre la même administration, et invoque la loi qui a créé la Légion d'Honneur, et la Charte qui a garanti les pensions; il est étonné que le grand chancelier règle tout tout seul, et ne rende aucun compte. Les pétitions des légionnaires seront envoyées au conseil des ministres, et des copies seront déposées au bureau des renseignemens. On passe à l'ordre du jour, qui est la discussion sur le changement de l'année financière. M. Legraverand propose de la commencer au mois d'octobre : la chambre actuelle ne voteroit le budjet que jusqu'à cette époque, et une nouvelle chambre seroit convoquée cet été, pour voter le budjet, à dater du er, octobre prochain. M. Ponsard vote pour le projet de loi. M. le duc de Gaëte, par l'organe de M. de Courval, n'approuve point le changement proposé, et émet un autre projet d'après lequel on voteroit les fonds dans une session pour l'année suivante; par exemple, cette année, 1819, pour 1820. M. Duvergier de Hauranne réfute les projets de MM. Legraverand et duc de Gaëte, et appuie le changement pésenté par les ministres. M. Mestadier, an contraire, trouve ce changement inconstitutionnel. M. Beugnot lui répond, et invoque l'esprit de la Charte et la loi de la nécessité, qui réclament contre le systéme provisoire soutenu jusqu'ici Après la séance publique, il y a eu un comité où M. de la Fayette a fait la proposition pour la convocation Immédiate des colleges électoraux; M. le garde des sceaux a dit qu'on

s'occupoit du travail préliminaire : M. de la Fayette a retiré sa prø~ position.

Le 13 février, M. Delaunay a fait un rapport sur des pétitions; deux seulement ont donné lieu à quelques discussions: l'une est de plusieurs hahitans d'Auxerre, qui réclament contre la distribution du service de la garde nationale; ils sont appuyés par M. de la Fayette, qui se plaint qu'on substitue des ordonnances et des réglemens particuliers à des lois positives. Des émigrés demandent la restitution de leurs rentes sur l'Etat; M. de Marcellus parle en leur faveur ; mais l'ordre du jour est adopté. La discussion reprend sur le changement de l'année financière, M. de la Bourdonnaye parle contre le projet de loi, il le croit contraire aux articles 37 et 49 de la Charte; il prétend que les deputés aujourd'hui assembles n'ont aucun droit de voter des fonds pour un temps où leurs pouvoirs sont expirés. Si on commence à modifier la Charte, où s'arrêtera-t-on ? On ne consolide pas la monarchie en sacrifiant à chaque pas les prérogatives de la couronne, en semant l'inquiétude dans la garde, la division dans l'armée, le trouble dans l'administration, et le désordre dans les finances. Après quelques autres observations de cette nature, l'auteur vote le rejet. M. de Saint-Aulaire défend le projet sous le rapport de la Charte. Il faut s'attacher, dit-il, à l'esprit, et non à la lettre. M. de Villèle croit, au contraire, qu'il faut voir dans la Charte ce qui s'y trouve; les députés de 1818 ne peuvent voter que le badjet de 1819, et non celui de 1820, comme dans le projet. Il seroit plus simple de hâter la convocation des sessions. Il se plaint qu'on se place hors de la Charte, et qu'on commence à l'attaquer, tantôt par des modifications, tantôt par des infractions positives, tantôt par des doctrines contraires. M. Roy invoque, la loi de nécessité, qui réclame l'exécution de changement; il combat le projet de M. de Villèle, comme peu clair et peu pratiquable; enfin, il trouve qu'il est urgent de sortir d'un provisoire, qui est la plus grande brèche que l'on puisse faire à la Charte. M. Cornet-d'Incourt parle contre le projet. Nous languissons depuis deux mois; et pour réparer le temps perdu, on nous propose d'allonger l'année; au lieu de traiter les affaires suivant la Charte et le temps, on trouve plus simple de changer l'année et la Charte, pour la commodité des affaires. Que les ministres se contentent des années telles que l'Auteur de la nature les a faites; elles seront toujours assez longues s'ils savent les employer, et trop longues s'ils les emploient mal. M. Soullier reproduit en faveur du projet l'urgence du besoin, et le vœu wanifesté déjà plusieurs fois dans la chambre.

Le 15, on a fait un rapport sur quelques pétitions, dont l'une a entraîné une longue discussion: c'est celle de quelques ministres prolestans, et de pères de famille de la même communjon, qui demandent L'établissement de colleges spéciaux pour les enfans de ce culte; ils parlent de leurs alarmes pour leurs enfans, dans les colléges catholiques. La commission est d'avis qu'il conviendroit de calmer les alar mes des protestans, alors même qu'elles seroient exagérées; mais elle espère que le nouveau projet de loi sur l'instruction publique consa crera la liberté de l'enseignement, avec la seule condition de surveil Jance qui appartient au gouverneinent. M. d'Argenson dit qu'il a préparé un travail sur cette matière; il avoue que le décret d'organisation

de l'Université accordé deux séminaires aux protestans, Puti à Strasbourg pour les luthésiens, l'autre à Montauban pour les calvinistes, mais nulle part il n'existe de coltégés destinés spécialement aux enfaus protestans. Ici M. d'Argenson a présenté une longue série de griefs ; ik s'est plaint du prosélytisne des prêtres catholiques, et il a eu même Fair de croire que célie causé'a contribué aux mouvemens qui ont ca lieu au college Louis-le-Grand. Il trouve mauvais qu'il n'y ait point dans les colleges des pasteurs protestans, et qu'on fasse des exercices sur les ravages de la philosophie. Au reste, M. d'Argenson n'a prẻsente les faits que sous cette formule dubitative: Est-il vrai que.....? Comment y répondra-t-on, s'est écrié M. de Ghanvelin? En les niant, a repris M. Reyer-Gollard. M. Dupont de l'Eure appuie la demande des petitionnantes, et est parti de-là pour se plaindre des missionnaires, des lois d'exception, de la servitude de la presse, du hannissement de plusieurs François; il propose de faire cesser enfin des mesures de circonstances, et d'exécuter la Charte. M. Royer Collard, président de la commission d'instruction publique, monte à la tribune; il n'est parvenu à la commission, dit-il, auenne plainte relative aux faits allégués, et qui tous sont dépourvus de preuves: je ne puis appliquer à chacun qu'une dénégation formelle, jusqu'à la preave contraire; cependant, parmi les faits articulés, il en est un dont l'exactiumle m'est personnellement connue : on a dit qu'an coltège de Montbéliard le reclear protestant avoit été remplacé par un catholique. M. d'Argenson a été mal informé ; le principal actuel est protestant, ainsi que les professeurs, à l'exception d'un. M. d'Argenson a l'air de trouver que c'est encore trop. M. Royer-Collard a continné en disant que les enfans protestans étoient reçus dans les colléges royaux comme les autres', et qu'il n'étoit parvenu encóré aucune plainte sur la manière dont ils sont traités. It remarque que s'il y a des inconvéniens à mélanger les deux communions dans les colleges, il n'en faut pas cher cher le remède dans le bruit et le scandale, et demande si, en élevant les catholiques et les protestans dans des colléges séparés, ce ne seroiz pas en quelque sorte les établir dans des camps opposés, et leur aps prendre dès l'enfance à aiguiser leurs armes. Ce discours a excité des marques réitérées d'approbation M. Dassumier-Fonbrune, député pros testant de Bordeaux, réclame la lecture dé la pétition. Elle n'articule aucun fait. M. le garde des sceaux dit que la plupart des faits énoncés. par M. d'Argenson sont dénués de preuves. M. de Chauvelin'appuie ła petition, et parle beaucoup des alarmes des protestans. M. de Mar cellus s'étonne que, lorsqu'il faudroit se réunir, on cherche à aigrir les esprits contre une religion et un ministère qui ne prêchent que há concorde; il se félicite de pouvoir professer så foi dans un moment où la religion paroît menacée de nouveaux orages. La pétition est 'rénvoyée au ministère de l'intérieur, mais non le discours de M. d'Argenson, comme il avoit été proposé d'abord. M. Corbières s'est élevé contre cette espèce de dénonciation à laquelle s'étoit livré ce préopinantį sous la formule d'interrogatoire. M. Je ministre des finances est vena apporter à la chambre deux projets de loi; l'un sur les comptes des finances des années précédentes, fixe les dépenses et les recettes défi nitives de 1815, 1816 et 1817, et, par approximation, celles de 1818,

L'autre projet tend à permettre les transferts de rentes dans les déparé us comme à Paris; il y auroit pour chaque département in extrait du grand-itvré, et les rentiers pourroient solduc leurs contributions avec le montant de leurs rentes. Ces projets seront examinés dans les bureaux. Oo reprend la discussion sur le changement de l'année financlève. M. de Lasiours parle contre le projet, et propose un autre mode; M. Admyrault soutient au contraire le changement sobcité par lễ gouvernement. M. Corbières voit plusieurs inconvéniens dans le projet, entre autres, celui de modifier la Charte; ce qui est un exemple dangereux. Il trouve le plan de M. de Villèle aussi simple que facile. M. le garde des sceaux répond aux objections, et particulièrement aux imputations dirigées contre le ministère dans les séances précédentés. La chambre ordonne la clôture de la discussion.

Deux journaus nous ont fait récemment l'honneur de n'ons'attaquer. L'un, fade et ennuyeux, et qui n'a rien de littéral et de moral que dans le titre, après avoir été long-temps sans couleur, essaie d'en prendre une, copie la Minerve, fronde tous les journaux, et espéré appas remment réveiller ses lecteurs avec un peu de scandale, et retárder så chute en faisant quelque Bruït; mais il a heaù s'agiter, ses injures mêmes soat innocentes, et ses malices sans sel n'accusent qué kr foiblesse, d'un malade qui tend à son agonie. L'autre journal në será ́pàs dat moins accusé de fadeur; car il devient chaque jour plus arrogant ét plus amer, et s'est toujours montré, sous les différens titres qu'il a portés, un défenseur ardent des doctrines révolutionnaires. Ce journal nous reprochoit, dans un article du 9 février, d'envoyer en enfer les hommes les plus recommandables; il en parloit apparemment par out dire, et ne nous avoit pas lu. Dien merci, nous n'envoyons personne en enfer; nous n'y envoyons point les morts, et encore moins les vivans. Nous signalons quelquefois de mauvaises doctrines, nous repoussons des attaques contre la religion, nous réfutons des écrivains dangereux; mais nous nous flattons de connoître trop bien l'esprit de la religion pour supposer la damnation de personné. Ce n'est pas le tat d'être liberal; il faudroit être encore poli et vrai, s'il étoit possible. Il est assez clair que cette tirade violente du journaliste n'étoit lä que pour amener un éloge pompeux de la Chron que. Assurément no trouvons tout simple que la Chronique soit louce dans le journal en quest tion; ces deux feuilles sortent des mêmes presses, les rédacteurs sont liés d'opinion, les intérêts sont communs. Mais ne pourroit-on servir ses amais sans calomnier ses adversaires, et quand nous serions des mons, tres d'intolérance, la Chronique en sera-t-elle plus douce et plus bénigne? Le journaliste du moins ne l'est guère. Dans plusieurs de ses derniers numéros, il attaque à tort et à travers les écrivains les plus distingués, il en veut surtout à l'auteur de l'Essai sur l'indifférence, Cet illustre écrivain s'est placé si haut, par son ouvrage qu'il est comme le point de mire de toute la tourbe philosophique. On tät fen sur lui de tous les côtés, comme dans un combat on tire sur un chef habile, pour jeter le désordre et la crainte dans les rangs opposés. Cependant il seroit bon de choisir ses armes, et de faire la "guekré

pas

avec quelque modération. Accuser l'auteur de l'Essai d'être un esprit superstitieux, cela ne fera pas fortune. Prétendre que la religion dont M. de la Mennais est l'apologiste n'est Pascal a défendue et que saint Vincent de Paul a honorée, c'est un la même que celle que sophisme qui n'est même pas spécieux. Qu'on veuille bien nous montrer en quoi la doctrine de l'Essai sur l'indifférence diffère de celle des Pensées sur la religion. Pascal ménage-t-il les esprits forts dans cet écrit? Humilie-t-il moins la raison humaine que M. de la Menmais? Se montre-t-il plus tolérant pour les mauvaises doctrines, plus facile à composer avec l'erreur, et quiconque aura comparé ces deux grands écrivains, ne trouvera-t-il pas, au contraire, qu'ils se ressemblent pour la croyance comme pour le génie? Les matérialistes du temps de Pascal le trouvoient sans doute aussi intolérant, et ceux qui exaltent aujourd'hui les droits de la raison n'ont qu'à voir avec quelle vigueur il châtie leur orgueil et sape leurs systêmes. Quant à saint Vincent de Paul, il n'est pas probable que ce grand homme eût eu davantage l'honneur de recueillir les suffrages de nos indifférens. Il étoit libéral, mais non pas à leur manière. Sa piété leur eût paru trop simple et son zèle trop ardent; car, il faut bien l'avouer, saint Vincent de Paul étoit missionnaire, et non-seulement il étoit missionnaire, il a même fondé une société de missionnaires; il tonnoit contre les vices de son temps, il étoit humble, désintéressé, soumis à l'autorité; il avoit en horreur toute innovation politique et religieuse. Nul doute que le journal auquel nous répondons ne l'eût accusé d'extravagance, el que la Minerve ne l'eût envoyé précher dans les déserts de l'Amérique. Leurs invectives contre les missionnaires de nos jours retombent donc en plein sur celui qui traça la route à ces généreux ouvriers, comme sur la religion qu'ils servent à son exemple. Le but de ces éternelles déclamations n'est pas équivoque. Il n'existe point de croisade contre la religion, dit le journaliste, et on ne cherche point à détruire ce maines. Voudroit-on bien nous expliquer alors à quoi tendent ces alferme appui de la morale et des sociétes hulusions plus ou moins directes dont ce même journal est plein, ces réflexions malignes, ces plaisanteries sur l'histoire de l'Eglise, sur les miracles, sur les mystères, sur les martyrs, ce systême suivi de détraction et de calomnie contre les prêtres, ces éloges des écrivains irréligieux, tant de passages enfin dont le sens est fort clair? Assurément les lecteurs du journal ne s'y trompent pas, et entendent trèsbien ce qu'on veut leur dire. Dernièrement on a fait imprimer un recueil d'articles extraits de cette même feuille, et tous dirigés contre la religion et les prêtres. Ces articles étoient de l'année dernière; mais les numéros de cette année pourroient former aussi un recueil assez complet en ce genre. Le ton en est encore pius âcre et plus hautain, témoin l'article de la feuille du 9 février, qui a donné lieu à nos observations. Le rédacteur trouve, en finissant, que ses reflexions sont modérées, et il appelle ses adversaires des furieux et des énergumènes. Que sera-ce quand il se fâchera, si ce sont là ses douceurs? Ces gens-là ont-ils entrepris de faire détester leur cause par leur orgueil, et de montrer combien leur libéralisme est dur, et leur tolérance exigeante? On le croiroit.

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