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vrent sa surface inférieure ne pourrait résister à l'action directe du soleil et des pluies.

Du laboratoire de la feuille, montons à la fleur, qui, par sa magnificence, présage des choses encore plus grandes. C'est là, en effet, que s'accomplit le miracle qui fait de la plante la moins vivace un être immortel, et d'une faible tige qui occupe à peine un pouce de terrain, un être capable de couvrir le globe de sa postérité.

Les fleurs sont males, femelles ou hermaphrodites. Parmi ces dernières, qui forment le grand nombre, prenons celle qui nous présente la structure la plus simple, par exemple, l'œillet. Nous voyons d'abord une enveloppe extérieure formée d'un ou de plusieurs rangs de folioles disposées en calice. Dans le calice, d'autres feuilles, appelées pétales, et richement colorées, se rangent circulairement, ayant soin d'alterner avec les folioles du calice, et forment une seconde enceinte d'une grande beauté, nommée corolle. Dans la corolle, qui est comme un réverbère destiné à seconder l'action du soleil, père des fleurs et des fruits, on distingue les deux organes de la reproduction: 1° l'étamine, filament un ou multiple, qui, sous l'action solaire, se remplit d'une poussière fécondante appelée pollen, et qui, à un moment donné, s'échappe par des ouvertures latérales ou placées à l'extrémité de l'étamine; 2o le pistil, un ou multiple, dans lequel on distingue trois choses: le stigmate, ou orifice par lequel entre le pollen; le style, ou tuyau conduisant le pollen à l'ovaire; enfin, un je ne sais quoi d'infiniment petit et d'infiniment grand que contient l'ovaire. Rien, en effet, de plus petit en apparence que ce que nous appelons germes, et rien en réalité de plus incommensurable, puisque, ainsi que je l'observais naguère, il n'y a pas de germe végétal qui ne puisse à la longue couvrir la terre de ses générations.

Voilà, certes, une étude bien superficielle; cependant, que de merveilleuses choses nous avons reconnues dans cette plante, qui choisit avec tant de sagesse dans le sol et

dans l'air les éléments appropriés à sa vie, qui les élabore et les transforme avec un art incomparable, et qui, par les ressources infinies qu'elle possède, défend sa frêle existence contre les causes de destruction qui brisent nos plus forts empires! Quelles profondes et vastes combinaisons ce résultat décèle, non-sculement dans l'organisation de la plante, mais dans la constitution de notre globe et de notre système planétaire, avec lesquels cette plante a des rapports incessants!

Demandons maintenant à l'athée, au matérialiste, où est l'esprit qui a coordonné les millions de choses nécessaires à la vie de cette plante. L'analyse de celle-ci ne donne au chimiste qu'un petit nombre de substances, les unes volatiles et gazeuses, répandues dans l'atmosphère, les autres fixes et appartenant au sol. Les premières s'envolant par la combustion, il ne reste qu'un peu de cendre, qui offre des milliers et des millions de molécules d'une ténuité extrême et divisibles à l'infini.

Prions donc ces messieurs de nous désigner celle de ces molécules inertes et sans vie, ou l'atome gazeux, qui a conçu le plan de notre cillet, le plan du sol qui le porte, le plan de l'atmosphère qui l'entoure, le plan des fleuves et des mers qui lui fournissent l'eau qu'il boit, le plan du soleil qui l'avive de ses feux, etc., etc.; qu'ils nous montrent l'adorable molécule ou le tout-puissant atome qui, après avoir conçu un tel plan dans sa sagesse, a pu se faire obéir en disant au soleil Tiens-toi à la distance voulue pour vivifier cette plante ;--à la terre : Règle si bien tes excursions autour du soleil, que jamais il ne brûle tes productions ni ne les livre au froid de la mort;—à la mer et aux fleuves: Envoyez aux nues une partie de vos eaux ;-enfin aux milliards de molécules végétales éparses dans l'air et le sol: Assemblez-vous pour former un rosier, un œillet, etc., qui ne meurent que pour revivre!

Croyez-vous que, à force d'analyser des végétaux, de brasser des gaz et des cendres, l'athée et le matérialiste

pourront y découvrir la cause suffisante des merveilles du règne végétal?

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D. S'ils faisaient cette belle découverte, nous serions en droit de leur dire Prosternez-vous donc devant ces cendres et ces fluides, car ils possèdent cette plénitude de sagesse et de puissance que tous les peuples adorent sous le nom de Dieu.

R. Vous auriez raison. En niant l'auteur de l'ordre universel, l'athée fait de tous les êtres autant de dieux; et, s'il était conséquent, il devrait imiter les fétichistes de l'Afrique et de l'Inde, qui adorent tout ce qui les impressionne, même la vermine qui les dévore.-Voyons maintenant si le brin d'herbe avec lequel nous avons réduit au silence les athées, ne pourrait pas confondre aussi leurs frères, les panthéistes.

Vous savez sans doute que les panthéistes affirment l'éternité du monde et nient, comme les athées, l'existence d'un Dieu personnel, indépendant, qui, après avoir conçu dans sa sagesse le plan de l'univers, l'aurait exécuté par une libre détermination de sa volonté et avec une conscience parfaite de ce qu'il faisait.

La différence, purement nominale, qui les sépare des athées, gît toute en ceci : l'athée, rejetant les mots de Dieu et de création, ne veut voir dans l'univers qu'un jeu du hasard, l'effet éternel d'une nécessité aveugle; le panthéiste y voit l'œuvre et la substance d'un ètre unique, partie esprit, partie matière, qui travaille à se développer, à prendre toutes les formes, pour arriver à la connaissance de lui-même. Ce Dieu-Univers, qu'il appelle aussi GrandTout, serait à la fois minéral, végétal, animal, sidéral. Pétrifié dans les couches solides du globe, végétant dans les plantes, vivant d'une vie supérieure dans les animaux, il commencerait à penser, à réfléchir, à raisonner dans l'homme, qui serait sa forme la plus élevée. Pleins de foi au progrès de l'esprit humain, les panthéistes ne doutent pas que, à force de raisonner en nous, le Dieu-Univers ne

finisse par débrouiller le chaos de sa pensée et ne puisse un jour savoir au juste ce qu'il est, ce qu'il a fait, ce qu'il veut.

Eh bien, je vous le demande, un Dieu de cette taille est-il capable d'imaginer et d'exécuter notre plante d'œillet, de trèfle ou de luzerne?

D. Le bon sens dit à tous qu'un Dieu qui n'en sait pas plus long que l'homme, est incapable de concevoir et de faire ce qui surpasse évidemment la portée humaine.

R. Maintenant que l'étude telle quelle d'une petite plante nous a démontré Dieu aussi bien qu'aurait pu le faire une légion de théologiens, tâchons de nous faire une idée du nombre de ces théologiennes.

Les catalogues actuels de la botanique portent à soixantequinze mille le chiffre des espèces végétales connues. Mettons un quart en sus pour les espèces inconnues, nous en aurons cent mille. S'il y a des espèces très-rares, il y en a par contre d'excessivement communes et dont les individus défient tout calcul; tel de nos prés, de médiocre étendue, en contient des millions. On n'exagérerait donc pas en élevant à un milliard la moyenne des individus de chaque famille végétale, depuis la plus petite mousse, qui s'attache aux cailloux, jusqu'aux arbres gigantesques des forêts de l'Amérique et de l'Asie. Voilà donc cent milliards de témoins qui ne cessent de protester contre l'aveuglement ou la mauvaise foi des athées, des matérialistes, des panthéistes et des sceptiques.

Passons à une école de théologie encore plus nombreuse, plus éloquente: le règne animal.

CHAPITRE III.

Théologie des animaux.

D. Croyez-vous réellement que le nombre des animaux surpasse celui des plantes?

R. Je serais même très-disposé à croire que chaque plante est un monde habité par de nombreuses familles d'animaux, et je ne pense pas que cette opinion puisse étonner ceux qui, sans faire une étude spéciale de la zoologie, ont suivi de loin les progrès de cette science.

Si vous avez lu l'auteur des Études de la nature, vous vous souviendrez peut-être de la description de l'incroyable variété de petites mouches qu'il observa sur un fraisier, venu par hasard sur sa fenêtre, au milieu des fumées de Paris (1). Bernardin de Saint-Pierre pensait avec raison que, outre cette population nomade, son fraisier devait nourrir un grand nombre de familles indigènes, et il citait à ce sujet les observations de Leeuwenhoek, de Robert Hook, etc., constatant l'existence de milliers d'animalcules dans une goutte de liquide de la grosseur d'un grain de millet.

Aujourd'hui que la carrière ouverte par les Leeuwenhoek, les Linné, les Réaumur, les Lyonnet, les Spallanzani, etc., est parcourue par une multitude de naturalistes armés d'instruments d'une grande puissance, il est démontré que les végétaux et les liquides fourmillent d'animaux vivants, et que ceux-ci, par leurs dépouilles, forment en majeure partie le sable des mers et un bon nombre de nos couches terrestres. Parmi les observations récentes les plus curieuses et les mieux constatées, je n'indiquerai que celles, en Allemagne, de M. Ehrenberg, professeur à Berlin, et de M. d'Orbigny, en France. Le premier a prouvé que la pierre siliceuse, connue sous le nom de tripoli (dont la (1) Voy. Etude première.

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