ر ınanquent dans le Glossaire d'Engelmann et Dozy); lat. botaniq. doronicum. «On dit que c'est l'altération d'un nom arabe», dit Littré. Cinquante ans auparavant, Léman disait: «Selon quelques auteurs, ce nom est formé d'un mot arabe qui signifierait poison du léopard1. Le mot est en arabe en effet : darānedj, daranedj, daroūnedj, dans Bocthor; la dernière forme seule est dans Richardson; Freytag prononce douroundj. Quelle que soit l'origine première de ce vocable, il a été de bonne heure employé par les savants arabes, puisqu'on le lit dans Razi,الاغداء عاقلة للبطن ، »le dhorra est peu nourrissant et resqui mourut en 923 de notre ère. DOURA. Qu'on écrit à tort dourah par un h, sorte de millet. De l'arabe ذرة dhorra. Bocthor (aux mots maïs, mil( écrit درادرةdora dorā, par un seul r et par un 5 d sans point; Cherbonneau (au mot maïs) met aussi un d sans point, mais il double ler (dorra). Enfin Freytag et Richardson écrivent ذرة dhora avec le i dh et un seul r L'orthographe que j'ai adoptée est celle que je trouve dans Razi, qui parle du doura en ees termes : الذرة قليلة serre le ventre. >> Niebuhr, sans doute d'après la prononciation de la péninsule Arabique, double aussi l'r: «Les ১১ uniquement de durra, espèce de gros millet dont le petit peuple fait son pain"." DOUANE. Esp. aduana, ital. dogana. De l'arabe دیوان | champs dans ces montagnes (du Yémen) étaient semés dīouān, d'après Engelmann, qui explique ainsi l'étymologie: diouān, qui est d'origine persane (voy. DIVAN), signifie d'abord registre, puis l'endroit où se réunissent les employés qui tiennent les registres, conseil d'État, salle d'audience, et aussi bureau de douane, ainsi qu'il résulte d'un grand nombre de passages d'Ibn-Batouta, Ibn-Djobéir, Maccari, et surtout Ibn-Khaldoum. (Voy. Gloss. p. 47.) DOUAR. Esp. aduar. Notre mot français vient d'Algérie, o دوار donar signifie un village composé de tentes2, Mais l'espagnol aduar montre que الدوار ad-donar doit être ancien dans la langue arabe; et en effet, M. Dozy3 l'a relevé dans Edrici (Clim. I, sect. 8) et dans Ibn-Batouta )II( دوار est un singulier (faisant au pluriel ادوار chez Bocthor, دواوير dans Cherbonneau), qu'il ne faut pas confondre avec un pluriel de دار dar, habitation, bien qu'il y ait eu sans doute similitude à l'origine. Douar, en Orient, se dit d'un petit camp dont les tentes sont groupées en cercle; un camp plus considérable et dont les tentes sont rangées sur une ou plusieurs lignes droites se nomme nezel. (Voy. Voyage en Arabie, dans la collection Smith, t. XI, p. 309.) DOUME. Palmier de la Thébaïde, décrit dans le grand ouvrage de la commission de l'Institut d'Égypte 4. C'est l'arabe دوم daum ou doum. Dans les anciens ouvrages de botanique, le nom de cet arbre est Cuciphera thebaïda, que certain dictionnaire, par une singulière inadvertance, transforme en crucifère thébaïque, plante. Le fruit, dont on fait encore au Caire une grande consommation, a été en effet désigné sous le nom de cuci, mot qui est dans Pline, et auquel les dictionnaires latins attribuent une origine persane. DROGMAN OU DRAGOMAN. Ce mot et son équivalent truchement représentent l'arabe ترجمان tardjaman, tardjouman, tourdjouman. Esp. trujaman, ital. drogmano, dragomano, turcimanno; bas lat. dragumanus, drocmandus, turchimannus; bas grec δραγούμανος, vieux français (x1o et XIII° siècles) drughemant, drugement; on a dit truchement dès le xv° siècle. La racine sémitique du mot ترجمان tardjaman se retrouve dans le nom de targum qu'on donne à la paraphrase chaldaïque de la Bible et qui signifie interprétation 8. DUB. Sorte de lézard d'Afrique. De l'arabe ضب dabb. Le changement de a en u (ou) est dû à la prononciation emphatique du dou à l'influence des pluriels اب adobb doubban. DUGONG. Vache marine de la mer des Indes. Du malais دوي douyoung, nom qu'on retrouve dans les autres langues de l'archipel Indien sous la forme roudjong ou rouyong. DURION, DOURION OU DOURIAN. Fruit d'un arbre des Indes, le Durio zibethinus de Linné. «Le fruit est une baie solide, hérissée de fortes pointes pyramidales, et grosse comme un melon, dont elle a presque la formeo. » C'est le malais ” درین dourian, venant de دوری douri, épine. Le voyageur Linschot, parlant du dourion, appelle batan l'arbre qui le produit et buaa la fleur de cet arbre 10. Or batan et buaa sont deux mots malais, dont le premier,بات batang signifie simplement arbre, tronc d'arbre, et le second,بوه bouah, fruit; peut-être faut-il lire بوغ bounga, fleur. 5 Le grand ouvrage de la commission de l'Institut d'Égypte donne aussi ضوره dourah. (Hist. nat. t. II, p. 53.( • Man. de la Bibliothèque nationale, no 1005 du supplément arabe, fol. 35 recto. 7 Voy. en Arabie, édit. Smith, p. 302. 8 A vrai dire, le verbe chaldaïque תַּרְגַם targem,interpréter, ne paraît pas être d'origine sémitique, et récemment M. J. Halévy essayait de le rattacher au grec τριγμός. (Société de linguistique, séance du 18 mars 1876.) 9 Dict. d'hist. nat. de Déterville, t. IX, p. 612. 10 Ibid, t. III, p. 308. E EBLIS OU IBLIS, le démon. De l'arabe ابليس iblis qui paraît être une altération du grec διάβολος. ÉCHECS (Le jeu des). Portug. escaques, ital. scacchi. C'est de ce jeu que paraît venir notre substantif échec. Le nom du jeu serait lui-même une altération de الشاه ech chāh, le roi, formé de l'article arabe ech pour al et du persan chāh, roi. Le joueur qui met le roi sous le coup d'une prise avertit son adversaire en disant: ech-chāh, le roi! L'espagnol dit xaque! L'expression échec et mat est, dans le même ordre d'idées, une altération de l'arabe الشاه مات ech-chah māt, le roi est mort, en portugais xamate ou xaque mate, en espagnol xaque y mate, en italien scacco matto. La présence du qou duc dans ces mots s'expliquerait par la manière dont les Arabes faisaient sentir le 8 h persan final; on sait qu'ils rendent souvent cette lettre par un dj ou g dur, ce dont on peut voir un exemple plus loin au mot EMBLIC. Il est vrai qu'on trouve en vieux français eschas, escas, bas lat. scacatus; mais la forme actuelle échec ou eschec est encore plus ancienne et remonte au xí° siècle. Quant à songer à l'arabe شیخ cheikh comme employé pour chāh, l'a de eschas, xaque, scacco, etc. ne le permet pas. EFENDI OU EFFENDI. Titre turc correspondant à notre monsieur. Transcription du turc افندی efendi, mot corrompu, dit-on, du grec αὐθέντης (prononcé à la moderne afthendis), qui agit de sa propre autorité, seigneur1. ELÉMI. Résine qu'on tire du balsamier de Ceylan et du balsamier élémifère de l'Amérique du Sud. Esp. elemi, portug. gumileme. Bocthor traduit ce mot par صمغ لامی samagh lūmi, gomme de lami. J'ignore quelle est la provenance de ce līmi. Dans une liste de termes techniques de médecine et de thérapeuthique arabes, M. Sanguinetti a noté لامی lami gomme élémi. Mais l'ouvrage où il a recueilli ce terme est trop récent pour qu'on en puisse rien conclure sur la nationalité du mot3. ÉLIXIR. Esp. et portug. elixir, ital. elisire. C'est l'arabe الاكسير eliksir, terme par lequel les alchimistes désignent la pierre philosophale, la matière solide ou liquide qui doit servir à la transmutation des métaux, la poudre de projection: «In ipsis pulveribus qui a philosophis vocantur elixir. » (Opus mirabile de Mercurio ad ejus fixationem.) On trouve aussi alexir, «medicina alchymice præparata » (Ruland, Lexic. alchem.), xir, yxir et ysir. Le mot arabe lui-même n'est autre chose que la transcription du grec ξηρόν, sec, médicament sec. On a objecté 5 1 Littré, Dict. 2 Journ. asiat. mai 1866, p. 322. On peut voir aussi Dozy, Gloss. p. 259. 3 L'auteur, Alkalioubi, est mort en 1659. 4 Dans le man. lat. n° 7147, ancien fonds, de la Bibl. nat. p. 18 verso. Le même volume contient un traité intitulé Elixiris compositio vera; il semble traduit de l'hébreu et commence par ces mots : «In nomine Adonay." contre cette origine que les Arabes transcrivent le par سك sk et non parks; mais il existe d'autres exemples de cette dernière transcription ks ou qs, et M. Defrémery en a cité trois : بقسيس boqsis, buis = πύξος ; بقسماط bagsamāt, biscuit = παξαμάδιον et ابرکسيس abraksis = πρᾶξις. Dans la terminologie pharmaceutique, élixir a subi une déviation de sens analogue à celle d'alcool; le mot ne se dit plus aujourd'hui que de liqueurs résultant d'un mélange de certains sirops avec des alcoolats. EMBLIC, EMBLIQUE, AMBLIQUE. Terme de droguerie; espèce de myrobolan. Latin du moyen âge emblicus (voy. CHEBULE), «emblica Arabes embelgi vocant", dit Jean Bauhin, d'après Garcias (Histor. plantarum univers.). C'est en effet l'arabe ملح amled qui est le persan آمده amleh, venant lui-même du sanscrit amlakمج amledj est dans Razi. (Trait. III, ch. xxvnt, folio 47 recto du man. déjà cité.) La forme sanscrite est restée dans le malais ملاك ma lāka, emblic officinal, lequel, d'après les traditions malaises, a donné son nom à la presqu'île de Malacca". ÉMIR. Transcription de l'arabe امير emir ou amir, chef; le même mot qui a donné amiral. Dans certains pays musulmans, on dit mir; et de là vient le mirza میرزا fils d'émir, monsieur, des Persans. ENIF. Étoile e de la constellation de Pégase. C'est l'arabe انف anf nezانف الفرس anfal-faras, le nez du cheval. L'étoile est en effet placée sur le museau ou la bouche de Pégase. ÉPINARD. Vieux franç. espinard, espinace, espinoce, espinoche; esp. espinaca, portug. espinafre, ital. spinace, lat. mod. spinacium, spinachium, spinaceum, spanachium; grec mod. σπινάκιον. Les étymologistes (et M. Dozy est sans doute du nombre, puisque espinaca, espinafre manquent dans son Glossaire) s'accordent à dériver ces mots du latin spina, épine. Toutes les langues romanes se seraient donc entendues, le mot n'existant pas en latin, pour dénommer cette plante d'après un de ses caractères qui n'a rien de frappant, à savoir deux ou quatre petites pointes épineuses placées à la surface du calices; encore manquentelles dans le grand épinard. Mais la vérité est que le mot a une origine tout autre; il vient sans contredit de l'arabe-persan اسفاناج,اسفناج اسپناخ isfinadi, isfanādj, aspanākh. Richardson qui cite ces trois formes, les donne comme venant du grec σπινάκια, mais σπινάκια est moderne et n'existe pas dans la langue classique; c'est la dérivation inverse qui est vraie1. Jean Bauhin écrit σπανάχια, qui correspond à spanachium et à aspanakh, «sumpto nomine (dit-il) a raritate (σπάνιος signifiant rare), quod raro illo medici utuntur », ce qui rappelle la fameuse étymologie «aqua, a qua vivimus. » Du reste, le célèbre botaniste du xvi° siècle ajoute qu'on appelle aussi l'épinard hispaniensé ou hispanicum olus, légume d'Espagne, fortasse quod inde primum duxerit originem. >> Nous voilà bien loin de l'épine de nos étymologistes actuels. Nous n'avons pas besoin de dire que la prétendue qualification d'espagnol est due à une coïncidence fortuite de son. Jean Bauhin ajoute d'ailleurs que les anciens auteurs ne font aucune mention de l'épinard, sauf les Arabes qui le nomment hispanac2. Bauhin, en effet, avait pu relever le mot dans Razi qui, dès la fin du 1x siècle, faisait un grand éloge de ce légume3. «Les épinards ont été apportés d'Orient en Espagne», dit une phrase citée en exemple dans Littré; et les botanistes savent que cette plante, jadis inconnue en Europe, croît spontanément en Perse, ainsi que l'a constaté le voyageur Olivier4. Il ne peut donc rester de doute sur l'origine arabo-persane du mot épinard. ESCARPIN. Esp. escarpin, portug. escarpim, ital. scarpa, scarpino. L'étymologie de ces mots serait bien difficile, si l'on n'avait l'italien scappino et les vieilles formes françaises eschapin, eschappin, qui sont antérieures à toutes les autres. Joignez-y l'expression «mettre les souliers en escapine», c'est-à-dire en pantoufles (dans Du Cange). Il me semble impossible de ne pas rattacher ces formes sans r aux vieux mots: escafe, chaussure, et aussi coup de pied au jeu de ballon, escafilon, escafillon, escafignon, chaussure légère; escafínon, même sens; bas lat. scaffones, scuffones, scofoni5. Et maintenant, comment ne pas songer à l'arabe اسكف اسكان askaf, iskās (eskaft dans Bocthor(اسكوف ouskou سكان sakkaf, tous mots signifiant cordonnier? On peut joindre aux mots qui précèdent, comme ayant, suivant toute vraisemblance, une même origine : escoffraie, écoffrai, écofroi, boutique de marchand de cuirs; escoffier, bas lat. escofferius, marchand de cuirs, et peut-être escaupile, mot emprunté à l'espagnol, qu'on lit dans ce passage de Robertson: «Les armes des Mexicains ne pouvaient pénétrer ni les boucliers des Espagnols ni leurs corselets piqués appelés escaupiles.» (Hist. d'Amér. trad. t. II, p. 308.) Mais tous ces mots sont-ils d'origine orientale? C'est 1 Hermol. Barbaro, commentant le nom ἀτραφάξις dans Dioscoride, dit: Quibus porro atriplex idem videtur esse cum eo genere quod spinacia vulgo dicimus, et Græci recentiores spanachia, falluntur apertissime." (Dioscorida pharmac. lib. VIII, 1529, folio 121 verso.) 2 Histor. plantarum univers. t. II, p. 964. 3 Voici le passage, pour faire plaisir aux amateurs d'épinards : الاسفانا معتدل جيد للحلق والرية والمعدة والكبد يلين البطن وغذاوه جيد حميدا <<«Les épinards sont tempérés, bons pour la gorge, le poumon, l'estomac et le foie; ils adoucissent le ventre et constituent un excellent aliment." (Man. déjà cité, folio 42 recto.) G. A. Olivier, Voy. dans l'empire ottoman, l'Égypte et la Perse, 1802. bien douteux; car les langues germaniques ont schuh, soulier, en allemand; shoe, en anglais, et skoh, en gothique. Je laisse à de plus érudits la tâche d'élucider ce problème, dont j'ai seulement voulu rassembler quelques élé ments. ESTRAGON. Esp. estragon, taragona, portug. estragão, ital. targone. On a voulu tirer ces mots du latin draconem 6, draco étant supposé employé dans le sens de dracunculus, nom d'une plante dans Pline, «lequel, dit M. Littré, ne paraît pas avoir été donné à l'estragon, mais que les botanistes lui ont appliqué. >>> Sans parler de ce qu'il y a de bizarre dans cette dérivation, historiquement parlant, on trouvera assurément quelques difficultés phonétiques à tirer estragon de draconem. Ce serait le seul exemple de dr latin devenu tr en français. Aussi faut-il chercher ailleurs la vraie dérivation. Les formes taragona, targone, anc. fr. tragon", nous ramènent à l'arabe-persan طرخون tarkhoun, mot qu'on trouve dans Ibn-Beithar, dans Avicenne et même dans Razis. Le mot, légèrement modifié, était d'usage vulgaire à Chiraz, au commencement du xır° siècle; car, dans le grand ouvrage du médecin persan Al-Hoceini, tarkhoun dans le طرخون بشیرازی ترخونی گویند : on lit dialecte de Chiraz s'appelle terkhoūnī. On trouve aussi طرتون tarton Nos anciens botanistes écrivaient tarcon ou tarchon; cette dernière orthographe est celle de Gesner, qui a donné le nom de tarchon sauvage à l'Achillea ptarmica 10. Vaillant, un siècle et demi plus tard, a appelé tarchonante, tarchonanthus, un arbrisseau d'Afrique dont les fleurs ont quelque rapport avec celles de l'estragon (tarchon, ἄνθος). En dernière analyse, il peut se faire que tarkhoūn ait été emprunté par les Arabes au grec δράκων, et que, par suite, ceux qui tirent estragon de draconem ne se trompent qu'à moitié. Dans tous les cas, je signale le mot à l'attention de M. Dozy, qui ne l'a pas inséré dans son Glossaire. La syllabe initiale es dans estragon et estragão pourrait être l'article arabe el, et défiguré par suite de la prononciation emphatique du bt. EYALET. «Nom des gouvernements de la Turquie appelés aussi pachaliks." (Bescherelle.) C'est la prononciation turque de l'arabe ة ايالةyala, gouvernement, nom d'action du verbe آل al, etre à la tête de, se rattachant أول في awal, premier. 5 «Italis scofoni primo nihil aliud fuisse videntur nisi tegumenta pedum.» (Du Cange.) A. de Chevallet (Orig. de la lang. fr. t. II, p. 124 et note) dit dracuntium; mais ce mot, qui est le δρακόντιον de Dioscoride, n'a pu donner les formes romanes ci-dessus. 7 Dans Rabelais, Pantagr. liv. V, ch. xxix; et aussi dans les ouvrages d'agriculture: Targon, que les jardiniers nomment estragon.» (Agric. et maison rustique de Jean Liebault, 1601, p. 213.) 8 Man. ar. déjà cité, folio 42 reclo. 9 Man. de la Bibl. nat. no 33g du suppl. persan, p. 142. 10 Conrad Gesner connaissait les langues orientales; il a publié en 1542 à Lyon des extraits d'auteurs arabes relatifs à la médecine et à la botanique. FABRÈGUE. Plante dont les feuilles ressemblent à celles du serpolet. (Littré, Add. au Dict.) Esp. alfabega, alhabega, alabega, albahaca; portug. alfabaca (basilic ou autre herbe odorante). C'est l'arabe الحق al-habaq plante fort mal définie par les dictionnaires, car c'est tantôt le basilic, tantôt le pouliot, ou la marjolaine, la mélisse, la germandrée, l'armoise, la citronnelle, etc. Il faudrait bien se garder de rattacher à ces mots, comme étymologie, fabago ou fabagelle, plante africaine et asiatique ainsi nommée par le botaniste Dodonée, à cause d'une certaine analogie de structure avec la fève. Fabreguier, nom donné quelquefois au micocoulier, n'a non plus aucun rapport avec la fabrègue. FAGARIER. Genre de plantes de la famille des xanthoxylées, qui tire son nom du fagara. Le fagara, dans Avicenne )فاغرة faghara), est un fruit qui ressemble au pois chiche et au mahalep, et qu'on apporte, dit-il, de Sofala c'est-a-dire de quelque endroit de la ,( يحمل من السفالة ) mer des Indes. Le voyageur Linschot dit que ce mot désigne à Java le fagarier du Japon. La lettre f n'existant pas en javanais non plus qu'en malais, fagara ne peut être un terme de ces langues, où l'on trouve seulement اگر pagar, haie, qui paraît être étymologiquement le même mot. FALAQUE. Instrument de supplice usité au Maghreb. Portug. falaca. De l'arabe فلقة falaga. (Voy. Dozy, Gloss. p. 262.) FALQUE OU FARGUE. Petits panneaux placés sur les bords des bateaux pour les exhausser. Esp. falca, qui, d'après M. Dozy (Gloss. p. 263), est un dérivé de la racine arabe حلق halaq, entourer, d'où halq, clôture, mur d'enceinte, dans Ibn-Djobaïr. FANÈGUE. Mesure de capacité pour les liquides, dans la péninsule Hispanique. Esp. fanega, portug. fanga. De l'arabe فنية faniqa, grand sac. (Voy. Dozy, Gloss. p. 266.( FAQUIR OU FAKIR. Transcription de l'arabe فقیر far pauvre. On a proposé ce mot comme étymologie de l'italien facchino, portefaix, qui est notre faquin, esp. faquin, portug. faquino (balayeur de la Patriarchale de Lisbonne). Le changement deren nne ferait pas grande difficulté (voy. ANAFIN), mais nous manquons d'arguments à l'appui de cette conjecture. FARDE. Bordage d'un navire, est identique à falque ou fargue. Farde, balle de café moka pesant 185 kilogrammes, est le primitif de fardeau. (Voy. ce mot.) F FARDEAU. Esp. fardo, fardillo (ballot), fardel (havre-sac, besace); portug. fardo, fardel (même sens); ital. fardello (paquet), fardaggio (bagage). On voit que le vrai sens est ballot, paquet, et c'est aussi celui de notre vieux mot fardel, sens qui du reste a persisté jusqu'au dernier siècle, comme le montre, par exemple, un tarif de 1737 indiquant les droits de péage pour Bléré, sur le Cher: «Pour fardeau cordé de draps de laine, pesant 600 livres 12 deniers; pour fardeau cordé de feutres, pesant 600 livres, 20 sols; pour fardeau cordé de tapis, etc. 3. " 4 Fardel, fardeau est un diminutif de farde. Or, le mot farde, au sens général de ballot, est usité depuis longtemps dans tout l'Orient: Bocthor, le Gazophylacium ling. Pers. la Fabrica ling. arabic. traduisent ballot par فردة farda. II est vrai que S. de Sacy pense, sans donner ses raisons, que ce mot فردة farda, bien qu'employé par les Arabes, est étranger à leur langue. Et en effet, il semble au premier abord impossible de rattacher فردة ballot, à la racine فرد farad. Mais on va voir combien au contraire la relation est facile à établir. فرد fard signifie res una, pars paris altera, chacune des deux parties d'un objet unique, mais double, d'une feuille pliée en deux, par exemple, chacun des deux côtés de la mâchoire فردة farda, qui ne se trouve dans Freytag qu'avec le sens précité de ballot, sarcina mercium, marque de plus: chacun des deux battants d'une porte 5, chacune des deux étrivières d'une selle, chacun des deux arbalétriers d'une ferme (en espagnol alfarda"). Quoi de plus naturel que de voir le même mot signifier chacun des deux ballots formant la charge dun chameau»? La farde en effet est la demi-charge du chameau, comme on le voit dans ce passage du voyageur La Roque, cité par S. de Sacy: « C'est là que les Arabes de la campagne viennent apporter leur café dans de grands sacs de natte: ils en mettent deux sur chaque chameau. » Chacune de ces balles, ajoute l'illustre orientaliste, pèse un peu moins de 4 quintaux (400 livres), c'est-à-dire le poids cidessus indiqué pour la farde. Le mot فردة farda est donc arabe, non-seulement par l'usage, mais aussi par l'étymologie. Quant à farde, fardeau, et leurs correspondants des langues européennes, on n'a pu leur découvrir aucune étymologie sérieuse dans le latin, le grec ni le germanique. Tout prouve que nous avons emprunté ce mot à l'Orient, comme nombre d'autres termes de commerce. FARSANGE. Mesure itinéraire. Du persan فرسن ferseng en arabe farsakh, le même mot que parasange (παρασάγγης). FELLAH. Transcription de l'arabe فلاح fellāh, laboureur, 5 Dict. de Bocthor, à battant. • Cherbonneau, Journ. asiat. 1ot sem. 1849, p.546. 7 Voy. Dozy, Gloss. p. 109. 3 Chrest. arab. t. III, p. 378, 379. FELOUQUE. Petit navire à voiles et à rames. Esp. faluca, falua, falucho (petite barque); portug. falua; ital. feluca, filuca, filucca. Bocthor traduit ce mot par فلوكة falouka. La plupart des étymologistes rattachent tous ces termes à l'ancien arabe فلك foulk, navire. Mais M. Dozy affirme que cette étymologie doit être « rejetée immédiatement et sans réserve car فلك n'appartient pas à la langue qu'on parlait au moyen âge; c'est un vieux mot qu'on rencontre bien encore quelquefois chez les poëtes, parce que ceuxci recherchent précisément les termes surannés, mais jamais chez les prosateurs, ni dans la signification générale de navire, ni comme le nom d'une certaine espèce de vaisseau. Le peuple et les marins ne le connaissent pas; il ne peut donc avoir passé dans les langues romanes, car il va sans dire que tous les mots arabes qu'elles ont admis appartiennent à la langue telle qu'on la parlait 1.» Il est permis à un savant de la valeur et de la vaste érudition de M. Dozy d'être ainsi affirmatif; et nous n'avons qu'à nous incliner devant ce jugement sans appel. Je me con-tenterai de faire remarquer que les traducteurs de la Bible en arabe n'ont pas craint de choisir ce terme même فلك foulk ou folk pour désigner l'arche de Noé 2, et le P. Germain de Silésie a noté le mot avec ce sens dans son dictionnaire italien-arabe (1637). M. Dozy, rejetant tout rapport entre faluca, felouque. فلوكة et l'ancien فلك folk n'attribue pas moins à ces vocables une origine arabe. Il les regarde comme des altérations, «un peu fortes à la vérité, d'un autre mot حراقة harrāca, qui a signifié « une barque de dessus laquelle on pouvait lancer des matières incendiaires sur les vaisseaux ennemis. On peut voir son argumentation, p. 265 et 266 de son Glossaire. Mais j'ai bien peur que les étymologistes ne se laissent pas convaincre et persistent dans leur opinion première. FENNEC. En arabe فنك que les dictionnaires prononcent fanek, finek, ou même founk. Si ce petit animal ne nous est bien connu que depuis le Voyage de Bruce en Abyssinie3, le nom du moins a été porté longtemps auparavant en Europe; car on lit dans le testament d'Arnaud, archevêque de Narbonne (ann. 1149): «Laxo coopertorium martrinum et pelles meas de alfanex»; et plus loin: «coopertorium unum de alfanex"; et dans une charte espagnole de 10484: «una pelle alfanehe» (dans Du Cange). 1 Gloss. p. 264, 265. 2 Genèse, ch. v1, vers. 14 et suiv. 3 Tome V, dans l'édit. franç. de Panckouke. 4 Engelmann, qui emprunte à Du Cange la même citation, donne la date 1084; c'est une métathèse des deux derniers chiffres. 5 Chrest. ar. t. II, p. 17. 6 Voy. Tournefort, Voy. du Levant, t. III, p. 373. A propos de fouine, on lit dans d'Herbelot qu'après la mort du calife Vathek )واق (ne fouine lui rongea l'œil (Biblioth. orient, éd. de 1697, p. 912). Le Nigaristan, auquel l'auteur dit avoir emprunté l'anecdote,porte موشی mochi mot qui, je pense, ne peut s'appliquer à la fouine et désigne une espèce de rat. (Voy. man. suppl. persan, no 1080.) 7 Man. sup. ar. no 1005 de la Bibl. nat. fol. 45 verso حاصل est le plu riel de حوصلة haousala, nom d'un oiseau aquatique qui, dans l'histoire des Nos dictionnaires et les traducteurs d'écrivains arabes rendent فنك fanek par fouine. C'est la traduction adoptée par Silvestre de Sacy, dans la citation d'un curieux passage de Maçoudi sur les fourrures qui proviennent des environs du Volga5. Sans vouloir m'arrêter au rapport étymologique des deux mots, je ne suis pas éloigné de croire que dictionnaires et traducteurs ont eu raison dans un grand nombre de cas. Les fourrures dont les Orientaux se faisaient des vêtements et auxquelles ils attachaient un si grand prix, provenaient en grande partie de l'Europe. A la fin du xvn siècle, la dépouille des fouines de France avait encore un grand débit à Smyrne, en même temps que celle des fouines de Moscovie, d'Arménie, de Géorgie. A la fin du ix siècle ou au commencement du xo, le médecin Razi, dans son chapitre des vêtements, men السمور الثعالب الفنك القاتم : tionne cing sortes de fourrures الحواصل amartre-zibeline, le renard, le fanek, l'hermine et al-haouāşil1. Fanek est-il le véritable fennec? C'est, semble-t-il, l'opinion du tunisien Ibn al-Hachchâ, qui, dans son dictionnaire explicatif des termes employés par Razi, dit que le fanek est connu dans le Sahara d'Ifriqiya. Mais on peut voir, dans l'intéressant article alfaneque du Glossaire de M. Dozy, que le mot s'est dit certainement de la fourrure d'animaux tout autres que le petit quadrupède abyssinien o. Le double n que nous écrivons dans notre fennec est du fait de Bruce. C'est par un système orthographique analogue que le célèbre voyageur appelle Kennouz, par deux n, la peuplade africaine des Konouz 10 كنوز FETFA OU FETVA. C'est l'arabe فتوی feta, que les Turcs, de qui nous l'avons pris, prononcent fetva. Un fetva est la décision d'un jurisconsulte ou mufti (nom dérivé de la même racine). FEZ. La coiffure ainsi appelée tire son nom de la ville marocaine de Fez ou elle se fabrique. Le terme militaire féci ou phéci (képi) est un adjectif de même provenance, fecide Fez. Inutile de chercher fez, féci (ni même képi) dans le Dictionnaire français-arabe pour la conversation en Algérie, de M. Cherbonneau. FILALI. «Industrie particulière de la côte méditerranéenne de l'Afrique et dont le siége principal est Tafilet, dans le Maroc; elle a pour objet la préparation des cuirs et maroquins, la fabrication des chaussures, brides, selles, etc. On trouve des ouvriers en filali dans toute l'Algérie." animaux de Démıri, paraît être le cormoran, ainsi nommé à cause de la poche volumineuse placée sous son bec (en arabe haousala). V. Defrémery, Journ. des sav. septemb. 1871, p. 447. - On sait que le grèbe (voy. ce mot) sert encore à fabriquer certaines fourrures. 8 V. Dozy, Gloss. p. 104. L'affirmation d'Ibn al-Hachchâ a été récemment confirmée par M. Gaston Lemay, qui, en décembre 1875, rencontrait le fennec non loin de Ghadamès: «Le chamelier nous apporte... deux petits renards lilliputiens appelés fenek, de la grosseur d'un chat, qu'il a pris dans leur terrier de sable. (Le Rappel du 1 mars 1876.) er 9 D'après M. Pavet de Courteille (Dict. turc-oriental), les Persans appellent فنك fenek (voy. l'art. ci-dess. cité de M. Defrémery) le petit renard de Tartarie, désigné par les naturalistes sous le nom de canis corsak, en ture oriental قارساق qarsaq 10 Voy. S. de Sacy, Chrest. ar. t. II, p. 33, 33. |