MOZARABE. Esp. mozarabe, mustarabe, portug. mozarabe, musarabe. «Par ce nom on désignait les chrétiens qui vivaient au milieu des Maures, et en particulier ceux de Tolède, qui avaient dans cette ville six églises pour y exercer leur culte. Il dérive de مستعرب mosta'rib, arabisé, nom que les Arabes donnaient aux tribus étrangères qui vivaient au milieu d'eux.» (Engelmann, Glossaire, p. 321.) Muezzin. Esp. almuedano. De l'arabe موذن mouedhdhin ou mouezzin, celui qui appelle à la prière, dont la racine est اذن oudhn, oreille. MUFTI OU MUPHTI. Esp. et portug. mufti. De l'arabe مفتی moufti, jurisconsulte, celui qui donne un فتوی fetwa, interprétation de la loi. MULATRE. « On appelle مولد mouallad, celui qui est né d'un père arabe et d'une mère étrangère, ou d'un père esclave et d'une mère libre. C'est, je pense, de là et non de mulus que vient en espagnol et en portugais mulato, en italien mulatto, et en français mulâtre." Ainsi s'exprimait Silvestre de Sacy dans sa Chrestomathie arabe (t. II, p. 155). M. Defrémery 2 et M. Engelmann avaient adopté cette dérivation. Elle a été combattue par M. Dozy, dont on peut voir les raisons, p. 384 du Glossaire. MUSACÉES. Famille de plantes dont le bananier est le type. Les botanistes, prenant le nom arabe de la banane موز mauz,موزة mauza, l'ont latinisé sous la forme musa; NABAB. Esp. nabab, portug. nababo. C'est l'arabe نواب nowab, pluriel de نائب nailieutenant, vice-roi. Le mot nous vient de l'Inde. Le pluriel a été employé pour le singulier, ainsi que cela arrive souvent en hindoustani, pour les mots d'origine arabe. (Voy. Defrémery, Revue critique, décembre 1868, p. 410.) NABATHÉEN. Adjectif formé de نبط nabat plur. انباط an bāt, nom que les Arabes donnaient aux Nabathéens. NABCA. Fruit d'une espèce de jujubier. Chez nos botanistes, le mot s'écrit aussi nebca, nabqah, nabach, nареса, nabeca, nebbek. C'est l'arabe نبقة nabiga, nibga, Rhamnus nabeca, dans Freytag. N de là le nom de musacées. La feuille du bananier était connue chez nous avant le fruit, parce qu'on s'en servait en Orient pour envelopper les pains de sucre expédiés en Europe: «Musa vulgo dicta inter palmas videtur recenseri posse», écrit Jean Bauhin au commencement du xvn siècle; «oritur in Ægypto et Cypro; cujus folia in Italia visuntur sacchari panes convestientia 3. » Il est à peine besoin de dire que l'opinion mentionnée par M. Littré, d'après laquelle ce mot serait une allusion au nom de Musa, l'ami de Virgile et d'Horace, médecin de-l'empereur Auguste, n'a aucun fondement. Musa, qu'on trouve aussi sous la forme amusa, ne remonte guère, comme nom du bananier, au delà du xvı siècle ou de la fin du xv°. «Mauz seu muza dicta Ægyptiis", dit Prosper Alpin. Muse, nom donné à quelques figues d'Égypte plus douces que les autres (Littré), est évidemment le même mot mauz. Musc. L'espagnol almisque, almizcle et le portugais almiscar viennent assurément de l'arabe المسك al-misk, même signification; mais notre musc et l'italien musco, muschio, sont le latin muscum (qui est dans saint Jérôme). Celui-ci et le grec μόσχοs viennent d'ailleurs de l'Orient. L'arabe مسك misk est d'origine persane. MUSULMAN. Esp. musulman, portug. musulmano. De l'arabe مسلم muslim,pluriel مسلمين mouslimin, qui fait profession de l'islam. (Voy. ce mot.) L'espagnol moslemita, par contraction mollita, renégat, a la même origine, d'après M. Dozy 5; mais M. Defrémery aime mieux rattacher ce mot à moslimy, plur. mesalima, qui, d'après Ét. Quatremère (Sult. Mamel. t. II, 2o partie, p. 66), désignait, en Égypte, les chrétiens ou les juifs convertis à l'islam 6. NACAIRE. Ancien instrument de musique militaire, sorte de tambour ou de timbale. Ital. gnaccare (qui est le gnacare de Molière, dans la Pastorale comique); bas latin, nacara; bas grec, ἀνάκαρα. Ce n'est point, comme on l'a dit, l'arabe نير naqir ou ناقور nagor, qui signifient trompette, clairon, mais le persan نقارهen arabe نقارة nagara, timbale 7. Arabe ou persan, le mot a pénétré, en conservant sa signification, non-seulement en Europe, mais aussi dans une partie de l'Afrique, notamment en Abyssinie et chez les Latoukas des bords du Nil Blanc, au sud de Gondokoro, comme on peut le voir par les passages suivants : « Cependant la grande tymbale ou nagareet, qu'on appelle le Lion, fut portée devant le palais. » (Bruce, Voyage en Nubie, édit. Panckouke, t. III, p. 419). — lim, un mot muzlemo donné par Berganza avec le sens de barbaro, rustico; muza signifiant «sarraceno» est probablement une altération du même mot. 6 Rev. crit. décembre 1868, p. 410. 7 Bocthor, aux mots tambour et timbale, écrit نقارة par un double q naqqāra. Pauthier, dans son édition de Marco Polo (t. I, p. 245) compare naqāra au sanscrit anakah. la lettre venait de Pasey ou de Harau, elle était reçue avec tout l'appareil royal, tambour, flûte, trompette, nagāra." (Chedjarat Malayou, p. ۱۴۸ du texte malais publié par M. Dulaurier.) NADIR. Esp. portug. ital. nadir. C'est l'arabe نظیر dhīr, opposé à, en face de. Dans le langage astronomique, nadhīr se dit d'un point diamétralement opposé à un autre, ou, si l'on veut, séparé du premier par un arc de 180 degrés : أول السرطان ونظيره » la première étoile de l'Écrevisse et son nadir. Sur la sphère terrestre, nadhir serait synonyme d'antipode. On voit que notre nadir est une abréviation de نظير السمت nadhires-semt, opposé au zénith. NAFFE (Eau de). Eau distillée de fleurs d'oranger. Esp. nafa, nefa. «Flores decerpti etiam per maria in longinquas regiones perferuntur, et aqua quoque quam naffam vocant, fragrantissimo odore, ex iis parata arte distillatoria. » )Jean Bauhin 1.) De l'arabe نحة nafha, odeur 2. Le persan نانه nafeh, qui est peut-être le même mot, signifie vésicule de musc; de là vient nafé, fruit de la ketmie. (Voy. ABELMOSC.) NARGHILEH OU NARGUILÉ. Pipe orientale. D'après Ét. Quatreinère, du persan نارگیل narghilcocotier, noix de coco. «Il a pris ce nom parce que la capsule qui renferme le tabac est formée d'une noix de coco ou, du moins, en a la figure 3. Dans la pipe syrienne appelée chuchet, d'après M. SpoH 4, le flacon de cristal du narguilé est, en effet, remplacé par une noix de coco. NATRON. Esp. anatron. De l'arabe نطرون natron, avec l'article, an pour al, an-natroūn, soude carbonatée native, dont l'Égypte fournit une grande quantité. Les alchimistes écrivent aussi anaton, nalaron. NEBULASIT. Étoile 3 de la queue du Lion. C'est une forte altération du nom arabe ذنب الاسد dheneb el-asad (ou dhenebou'l-asad), la queue du Lion. On trouve encore les formes moins altérées deneb alecit, deneb aleced. NEMS. Nom donné par Buffon à l'ichneumon ou mangouste d'Égypte. C'est l'arabenims, même sens. niloufar ou نينوفر ninoufar, même sens. Freytag indique la prononciation nei ou lieu de ni pour la première syllabe. Etymologiquement, celle-ci est la meilleure, si, comme je le suppose,نیلوفر niloufar est un composé de نيل nil indigo et نوفر noufar, autre nom persan du nénufar, lequel, du reste, est aussi passé dans la langue de nos botanistes, nuphar jaune, nuphar luteum 5. Dans cette hypothèse, le niloufar (pour nil-noufar) aurait été, à l'origine, le nuphar bleu, sorte de nénuphar qu'on trouve en Egypte, en Perse et dans l'Inde, dont la racine est comestible, et dont les fleurs, d'un bleu tendre, servaient autrefois à faire des couronnes 6. C'est probablement au botaniste et médecin Otto Brunfels, mort en 1534, qu'on doit l'introduction du mot nenuphar dans notre terminologie botanique; ses contemporains ont conservé longtemps l'ancienne désignation latine nymphæa: «Nenuphar pro nymphæa capitur Arabiæ», dit un commentateur de Dioscoride 8. NESKHI. Transcription de l'arabe نسخى neskhinom de l'écriture ordinaire des Arabes. NICHAN. Décoration turque. Du persan نشان nichan, marque, signe, insigne. NIL-GAUT OU NYL-GHAUT. Quadrupède du genre antilope, dont la robe est d'un bleu d'ardoise. C'est le persan گاو nil-gaoformé de نيل nilindigo, bleu (voy. ANIL, NéNUPHARt de gobeuf,vache NIPA. Arbre des îles de la Sonde, type de la famille des nipacées. Du malais نیغه nipah, sorte de palmier à fruit comestible. NIZAM. Titre du roi du Décan, dans l'Hindoustan. De l'arabe نظام nidham, que les Persans et les Turcs prononcent nizām. Ce mot signifie proprement ordre, arrangement; chez les Persans, on qualifiait le grand vizir de نظام الملك nizām al-moulk, ordre du royaume. Dans l'empire ottoman, on appelle nizam les soldats qui composent la première levée, par opposition aux rédifs qui forment une espèce de landwehr. (Bouillet, Scienc.) Rédif est l'arabe redis qui vient après, qui vient à la suite. NIZERÉ. Essence de roses. «Quoique l'essence qui se fabrique au Levant soit aussi d'un grand usage, celle dite nizeré ou de roses blanches de Tunis, jouit d'une réputation supérieure." (Peuchet.) C'est l'arabe-persan نسرین nisrin, qui désigne la rose musquée 10. «Cette espèce croît NÉNUFAR. Esp. et ital. nenufar. De l'arabe-persan نیلوفر | spontanément dans le Levant... A Tunis, c'est avec sa 1 Hist. plant. univers. t. Ir, p. 99. 2 Defrémery, Journ. asiat. janvier 1862, p. 93. 3 Journ. des Sav. janvier 1848, p. 43. 4 Voyage au Liban, dans le Tour du Monde, 1 sem. 1861, p. 3, note. 5 M. Littré cite même un vers de Ronsard où ce terme est employé : Le blanc neufart à la longue racine. 6 Voy. Bosc, Dict. d'hist. nat. t. XXII, p. 497. - Nil, avec le sens de bleu, entre dans la composition de plusieurs autres mots orientaux qu'on trouve dans les dictionnaires. Tel est nīl-gaut ou nyl-ghaut (voy. plus loin). ' Leman, Dict. d'hist. nat. t. XXIII, p. 140. 8 Marcell. Vergilio. Dioscoridæ pharmacorum libri VIII, Strasbourg, 1529, fol. 16 verso. 9 Hist. philos. des établiss. et du commerce des Européens dans l'Afrique septentr. t. II, p. 22. 10 Voy. Bocthor et le Gazoph. ling. Pers. au mot rose. La traduction latine d'Avicenne (Bâle, 1556) donne aussi en note marginale, sur le mot نسرین rosa muschata (p. 276). fleur qu'on fait l'essence de roses; elle en contient une plus grande quantité que toutes les autres... On l'emploie aussi à fabriquer une excellente liqueur de table, le rossolis blanc.» (Du Tour1.) NORIA. Esp. noria, anoria, añoria; portug. nora 2; dans l'ancien espagnol, naora, alnagora. On n'a pas de peine à reconnaître l'arabe ناعورة na ora (avec l'article an-nā'ōra), qui désigne la même machine élévatoire. Le verbe نعر na'ar signifie laisser jaillir le sang par saccades, en parlant d'une veine; ce qui s'applique assez bien aux norias, formées d'une série de seaux en chapelet qui se remplissent au fond du réservoir et viennent se vider l'un après l'autre à l'extérieur. NUQUE. Esp. portug. ital. nuca; bas latin, nucha. C'est OCQUE OU OQUE. Poids usité en Turquie, en Égypte, etc. (1 kilog. 250). Duture اوته oqa, qui est l'arabe وقية ouqia, et ce dernier paraît identique, étymologiquement, avec le grec οὐγκία, en latin uncia, bien que la valeur actuelle de l'oque soit très-différente de celle de l'οὐγκία des Siciliens et de l'uncia des Romains. ODALISQUE. Femme attachée au service des dames du harem impérial. Boiste, Nodier et quelques autres lexicographes écrivent odalique, ce qui est plus conforme à l'étymologie : du turc اوده لق odaliq venant de اوده oda, chambre, logis 5. OLIBAN 6. Encens. Esp. et portug. olibano; bas latin (x1° siècle), olibanum. On a proposé comme étymologie le grec ὁ λίβανος, et le latin oleum libani, où oleum désignerait une gomme, une résine solide, fait sans exemple dans la terminologie pharmaceutique. Il est sans exemple aussi que l'article grec ὁ se soit accolé à son substantif pour passer dans une langue étrangère. Si ce fait est extrêmement fréquent pour l'arabe, c'est que l'article arabe est invariable et fait pour ainsi dire corps avec son substantif, tandis que l'article grec prend des formes très-différentes suivant les cas, ce qui ne permet pas à l'oreille d'un étranger de le considérer comme partie intégrante du nom. Il me semble plus raisonnable de regarder oliban comme représentant l'arabe اللبن al-louban, l'encens, dont l'article al ou el serait devenu ol. On a des exemples de chan 1 Dict. d'hist. nat. t. XXIX, p. 470. 2 Cette forme a été oubliée dans le Glossaire de M. Dozy. 3 « Filum album, quod decurrit a collo animalis, exit a cerebro et inde per totum corpus deducitur in plures ramos, dit l'auteur du Lexicon arabico-latinum. Il était si simple de dire medulla spinalis, qu'on se demande si Freytag a bien compris le sens de نخاع . Voici un exemple du mot, pris dans Razi, qui ne lui aurait laissé aucun doute : جعل الباري في اسفال التحف Le createur a place au bas du ثقبا واخرج فيها شيا من الدماغ وهو النخاع crâne une ouverture par laquelle il a fait sortir une portion de cervelle, qui est la nuque." (Man. déjà cité, fol. 7 recto.) Le médecin persan AlHoceïni appelle la nuque la queue de la cervelle : نخاع دنبال دماغست 0 Parabe نخاع noukhā', proposé par Bochart et rappelé par M. Defrémery. (Journ. asiat. août 1867, p. 182.) Noukha, ridiculement défini par Freytag3, désigne la moelle épinière. Et c'est là précisément l'ancienne signification de nuque, ainsi que le montrent les passages suivants pris dans le Dict. de M. Littré: «Spondille (vertèbre) est ung os percé au milieu, par lequel pertuis la nuque passen (Lanfranc). «La nuque vient de la cervelle, ainsi comme le ruisseau de la fontaine » (Ibid.). «La nucque ou medulle spinale» (Ambroise Paré). On peut joindre à ces exemples le tercet bien connu de Dante : E come'l pan per fame se manduca, (Inferno, cant. xxxII, terc. 43.) gements pareils dans olifant pour éléphant, olmafi à côté de almafil (voy. MARFIL), olinde pour alinde, et orcanète pour alkanète, si du moins ces deux dernières assimilations que je propose plus loin sont exactes. Du reste, louban est identique à λίβανος, ainsi que nous l'avons dit au mot BENJOIN. OLINDE. Sorte de lame d'épée, que les uns font venir d'Olinda (Brésil), les autres de Solingen (Allemagne). A mon sens, olinde n'est autre que l'espagnol alinde, alhinde, alfinde, qui signifiait autrefois acier, miroir métallique, et qui vient de l'arabe الهند al-hindles Hindous. On peut voir, dans le Glossaire de M. Dozy (p. 142), comment le nom des habitants de l'Inde est devenu synonyme d'acier. سيف الهند seif al-hind, sabre indien, est une expression fréquente dans les Aventures d'Antar, pour marquer une arme de qualité supérieure ;مهند mohannad, indianisé, signifie fabriqué avec du fer de l'Inde. Quant au changement de al en ol, voy. au mot OLIBAN. ORANGE. Esp. naranja, portug. laranja, ital. arancia, arancio (dialecte milanais, naranz, vénit. naranza), bas grec νεράντζιον. Les formes qui ont perdu le n initial l'ont sans doute laissé tomber par suite d'une fausse assimilation au n de une, una; une narange, una narancia, n'ont pas eu de peine à devenir une orange, una arancia. Tous ces mots viennent de l'arabe نارنج narandi persan نارنك nareng, même signification. Orange, autrefois orenge, a dû subir l'influence de or, (Man. no 339 du suppl. persan de la Bibliothèque nationale, fol. 6 verso). 4 Cette phrase n'est que la traduction de ce passage de Razi : ان الدماغ La cervelle est comme une بمنزلة عين ... والنخاع بمنزلة نهر عظيم يجرى منه fontaine..., et la nuque est comme un grand fleuve qui en coule.» (Ibid. q. supr. fol. 7 verso.) 5 Dans l'Asie Mineure, on appelle oda une construction grossière destinée à servir d'abri aux voyageurs. (Voyage de M. Dauzats dans l'Anatolie, Tour du Monde, 1 sem. 1861, p. 155.) • On trouve aussi olibane: «Prendre poix grecque, soulphre et olibane.» (L'Agriculture et Maison rustique, de M. Charles Estienne et Jean Liebault, docteurs en médecine, 1601, p. 73.) à cause de la couleur. (Voy. Littré.) On sait que le malum aureum de Virgile est le coing et non l'orange. ORANG-OUTAN. C'est l'expression اورغ هوتن orang-houtan par laquelle les Malais désignent cette espèce de singe; de ōrang, homme, et houtan, bois, homme des bois. C'est à tort que quelques personnes écrivent outang. ORCANÈTE. Plante tinctoriale originaire de l'Orient. J. Bauhin écrit orchanet1; on trouve aussi alkanet et alkana2. Enfin Bocthor traduit orcanète par حنا الغول hinna al-ghoul, ce que nous rendrions par le henné du diable. De tout cela résulte pour moi la conviction que orcanète PAGODE. Du persan بتکده boutkede ou poutkoudè, temple d'idoles, formé de بت bout ou pout, idole, et de كده kede ou koudè, maison. PANDANUS. Arbre des Indes; type de la famille des pandanées. Du malais قندن pandan. Les Malais aiment à mettre dans leurs cheveux les fleurs odorantes du ندن واغ شود pandan ouāngi poūdaq, aussi nommé رمتی rampei. PANGOLIN. Mammifère des Indes et de l'Afrique. C'est le malais تولغ penggoūling; et ce nom, qui signifie rouleau degouling rouler, enrouler), lui vient de l'habitude qu'il a, lorsqu'il est attaqué, de se rouler en boule, à la façon du hérisson. «Son corps se met en peloton, máis sa grosse et longue queue reste en dehors et entoure le corps roulé 4." PANTOUN. Genre de poésie chez les Malais. On écrit quelquefois pantoum par un m, mais à tort, car le mot malais est ثنتن pantoun. PAPEGAI OU PAPEGAUT. Perroquet. Esp. papagayo, portug. papagaio, ital. papagallo, pappagallo. On a donné de ce mot les étymologies les plus bizarres. Le célèbre naturaliste italien Aldrovande voyait dans papagallo une expression de la dignité et de l'excellence de cet oiseau que ses talents et sa beauté faisaient regarder comme le pape des oiseaux. Génin, dans ses trop spirituelles Récréations philologiques (t. Ir, p. 438), supposait que papegaut, orthographié papegault dans Amb. Paré, était formé d'un verbe paper, mâchonner, prendre avec la bouche, et de gault, bois, par allusion à l'habitude qu'a le perroquet de saisir les branches avec le bec pour monter ou descendre. M. Defrémery, écartant toutes ces imaginations singulières, a fait remarquer que papegai et ses congénères sont tout simplement l'arabe ببغا babagha ou babbaghā, perroquets. Meninski, dès le xvi° siècle, avait déjà suggéré indirec 1 Hist. plantar. unvers. t. III, p. 584. 2 Dict. d'hist. nat. de Déterville. 3 Stirpium icones, p. 41. Dict. d'hist. nat. de Déterville, t. XXIV, p. 458. P est le même mot arabe que henné. (Voy. ce terme.) Ajoutons que Chabré établitla synonymie des deux expressions alkanna, el-hanne3. Pour le changement de al en or, on remarquera que l'article al devient facilement ar dans les langues romanes, et quant au passage de ar à or, on peut comparer arcanson=orcanson (voy. Littré), armoire et ormoire, dans le langage du peuple, etc. OTTOMANE. Sorte de siége. De ottoman, nom de peuple, venant de عثمان othman, nom arabe du fondateur de la dynastie des Turcs ottomans. PAPOU. Espèce de manchot (Aptenodytes papua). Cet oiseau tire son nom du pays des Papous, d'où il est originaire. Papou est un mot malais قره papouah contraction de قوه pouah-pouah, qui signifie frisé, crépu, et qui a été appliqué aux habitants de la Papouasie اورغ قوه orang papoñah, hommes crépus. PÂQUE. Le latin pascha est la transcription de l'hébreu פֶּסַח pesha, dont le sens primitif est passage, la Pâque juive se célébrant en mémoire de la sortie d'Égypte. PARA. Petite monnaie turque valant environ 4 centimes. En turcپاره parah, qui est un mot persan signifiant pièce, morceau. PARSIS. Adorateurs du feu. En persan پارسی parsipersan, dont le pluriel پارسیان parsiyān s'emploie dans le même sens que notre parsis. Pārsī est l'adjectif de پارس pārs, la Perse. Aujourd'hui on écrit plus ordinairement فارس fars, par un f. PASTÈQUE. Esp. albudeca, portug. albudieca, pateca. Les termes albudeca, albudieca représentent assurément l'arabe البطيخة al-bittikha1, qui a le même sens, ou son diminutif al-bouteikha. (Voy. Engelmann, Gloss. p. 74.) Mais il y a quelque difficulté à tirer notre pastèque du même mot, à moins qu'on ne veuille voir dans st la représentation du double bt emphatique qui est dans l'arabe. (Compar. estragon=at-tarkhoūn.) Remarquez cependant plus loin pastar == patard. PATACHE. Esp. patache, portug. pataxo, patacho, ital. patagio, patacchia, patachio, patascia, patassa. Il y a apparemment identité entre ces mots et l'arabe بطسة batsa ou بطشة batcha, navis bellica»; et l'espagnol albatoza (portug. albetoça), sorte de navire, ne laisse guère de doute sur cette identification. Mais le mot est-il venu d'Asie en Europe, ou a-t-il été porté d'Europe en Asie? Il n'existe pas dans l'arabe ancien, et sans doute M. Dozy a raison d'en chercher l'origine dans le bastasia des Dalmates, cité par Du Cange. (Voy. Gloss. p. 70.) PATARD. Ancienne monnaie dont on trouve aussi le nom écrit patart, pastar; bas latin patarus, patardus. A côté de ces formes, on trouve les suivantes où ler est remplacé par c, q: fr. pactac, pataque, esp. pataca, patacon (d'où notre patagon au sens de monnaie), portug. pataca, patacão, ital. patacco, patacca, bas lat. patacus. Les formes en c sont celles qui conviennent le mieux à l'étymologie proposée par Müller, et d'après laquelle pataca est l'arabe بطاقة ba-tiga pour abou-tāqa, littéralement le père de la fenêtre. C'est ainsi en effet que les Arabes ont appelé les piastres espagnoles sur lesquelles étaient figurées les colonnes d'Hercule, ces colonnes représentant pour eux une fenêtre, tāqa. Dans Bocthor ريال ابو طاقة rial aboutīga est la «piastre (réal) avec une couronne de fleurs." Nous avons un exemple de dénomination analogue dans abouquel (mot qui n'est pas dans les dictionnaires): «En 1700, dit Tournefort2, les huiles après la récolte ne valaient que 36 ou 40 parats la mesure, ou tout au plus un abouquel, qui vaut 44 parats à la Canée, et 42 seulement à Retimo. » L'auteur ajoute en note: Abouquel, écu de Hollande qui répond à celui de France. L'abouquel s'appelle aussi aslani à cause de la figure du lion que les Turcs appellent aslan. L'étymologie d'abouquel a été donnée, voilà deux cents ans, par Chardin : « Les écus et les demi-écus sont la plupart au coin de Hollande. Les Turcs les appellent asani (lisez arslani ou aslam,comme qui diroit des lions, à cause que de chaque côté il y a un lion marqué dessus. Les Arabes, par sottise ou autrement3, ont pris ce lion pour un chien et ont nommé ces pièces abou-kelb, comme qui diroit des chiens.» Авойkelb ابو كلب signifie littéralement père du chien. On sait que le thaler autrichien, à l'effigie de MarieThérèse, sert encore aux transactions commerciales dans une partie de l'Afrique. D'après une communication récente de M. Richard André à la Société de géographie de Vienne, cette pièce de monnaie porte, au Bornou, le nom de butter. C'est là un autre exemple du même système d'appellation. Car butter, c'est-à-dire بو طير bou-tair signifie le père de l'oiseau, à cause de l'aigle à deux têtes qui figure sur le thaler. PÉRI. Bon génie, chez les Orientaux, correspondant à nos bonnes fées. Du persan پری perī. Nous avons fait le mot du féminin. En persan, où il n'y a pas de genres, le péri est indifféremment mâle ou femelle. Richardson fait remarquer l'analogie de ce mot avec l'anglais fairy, fée, which, from the ressemblance of the name and many other circumstances, was in all probability of eastern extraction. » En tout cas, notre mot féerie a une tout autre origine, comme on peut le voir dans le Dictionnaire de Littré. پری peri est suivant toute probabilité, un dérivé de per aile, et peut s'interpréter ailé, qui vole. PILAU. Mets au riz, chez les Turcs. Du persan پلاو pi laou, même sens. On dit aussi pilaf, d'après la prononciation turque. PIROGUE. Ce mot océanien doit être rapproché du malais راهو prahoen javanais prahou, bateau. (Voy. PRAO.) POTIRON. C'était autrefois un synonyme de champignon. C'est encore, dans quelques provinces, le cèpe ou agaric comestible; diverses espèces de bolet, autre champignon, s'appellent potiron blanc, potiron gris, potiron roux, etc.. Probablement de l'arabe فطر foutrou foutour, champignon. Le mot فطر est dans Razi 7, qui ne fait point l'éloge de ce comestible et le juge plus détestable que la truffe )كمة kamā); cependant il ressort de ses paroles que Freytag a eu tort de n'attribuer à فطر foutour d'autre sens que celui de «fungus terræ multum venenosus»; le mot s'applique à tous les champignons, comestibles ou vénéneux. PRAO OU PRO. Terme général, dans l'archipel Indien, pour désigner toute espèce d'embarcations. Du malais ترهو praho ou prão, que les Européens appliquent plus spécialement au كونتغ kounting batiment à voile latine. PUNCH. C'est l'orthographe anglaise du persan پنج pandj cinq (mot congénère de πέντε, quinque, cinq); et la boisson ainsi appelée doit cette dénomination aux cinq ingrédients qui la composent : thé, sucre, eau-de-vie, cannelle et citron. alloy», dit Richardson. Je crois que ni le mépris pour les chrétiens ni le bas aloi des pièces n'a rien à voir dans l'appellation. 4 Voy. en Perse, éd. Smith, p. 7. 5 Voy. la Presse du 8 juin 1875. Paulet, Traité des champignons, 1775. 7 Man. ar. déjà cité, fol. 42 recto. |