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mois, et d'une amende de 16 fr. à 50 fr. Toutefois, aucune peine ne sera prononcée, s'ils n'étaient pas obligés de pourvoir gratuitement à la nourriture et à l'entretien de l'enfant et si personne n'y avait pourvu. >>

«< Ceux qui auront exposé ou délaissé en un lieu solitaire un enfant au-dessous de l'âge de sept ans accomplis; ceux qui auront donné l'ordre de l'exposer ainsi (si l'ordre a été exécuté ) seront, par ce seul fait, condamnés à un emprisonnement de six mois à deux ans, et à une amende de 16 fr. à 200 fr. (art. 349 du Code pénal).

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«< Ceux qui auront exposé et délaissé en un lieu non solitaire un enfant au-dessous de l'âge de sept ans accomplis seront punis d'un emprisonnement de trois mois à un an, et d'une amende de 16 fr. à 100 fr. »

«Est qualifié d'infanticide le meurtre d'un enfant nouveau-né (art. 300 du Code pénal). »

<«< Tout coupable d'infanticide sera puni de mort ( article 502 ). »

<<< La recherche de la paternité est interdite (art. 340 du Code civil). »

«La recherche de la maternité est admise (art. 541, id.) » Toutes ces dispositions sont actuellement suivies. Telles sont les variations par lesquelles a passé la législation française sur les enfans trouvés et abandonnés.

On aperçoit, dans ces diverses phases, le caractère dominant de chaque époque politique. La charité de saint Vincent-de-Paule et l'intention spéciale de prévenir l'infanticide ont présidé à la dernière réformation.

On ne peut méconnaître que, depuis l'application des mesures prescrites par le décret du 18 janvier 1811, et qui ont reçu chaque jour des améliorations nouvelles, le sort des enfans trouvés et abandonnés n'ait reçu tout le soulagement qu'il était possible de lui procurer.

Le nombre des infanticides devait nécessairement diminuer. En 1829, on ne comptait guère en France que

cent à cent vingt accusations annuelles pour ce crime. D'un autre côté, la mortalité des enfans trouvés, dans les hospices, est aujourd'hui dans une proportion beaucoup moins forte qu'elle n'était auparavant. En 1789, il périssait, à la première année de leur âge, quatre-vingts enfans sur cent, amenés à l'hospice de Paris. Ce nombre ne s'élève plus qu'à environ soixante-onze sur cent. Pour la totalité de la France, cette mortalité est de cinquante-sept sur cent; mais il est à remarquer que, pour l'enfance ordinaire, la proportion n'étant plus que de 30 pour 100 à Paris comme dans le reste du royaume, il meurt à Paris 41 pour cent d'enfans trouvés de plus que d'enfans légitimes, et, dans la généralité de la France, 27 pour 100. La mortalité des enfans trouvés est à peu près une fois aussi forte que celle de l'enfance ordinaire. Du reste, c'est sur la première année de la vie que porte cette différence (1),

Mais si la vie et la santé des enfans ont été mieux conservées, si les infanticides sont plus rares, d'un autre côté, l'exposition s'est accrue dans une proportion que l'on doit attribuer à la fois aux progrès de la misère et de l'immoralité et aux facilités accordées par la législation moderne aux mères légitimes ou illégitimes qui renoncent à remplir les devoirs prescrits par la nature et par la religion.

L'accroissement progressif du nombre des enfans trouvés, dans les hospices, est véritablement effrayant.

(1) Ces calculs sont extraits du mémoire de M.Benoiston de Châteauneuf sur les enfans trouvés : M. T. Duchâtel les a reproduits dans son ouvrage sur la charité. M. Dupin, maître des comptes, ancien préfet, dans son excellente histoire de l'administration des secours publics en France, où nous avons puisé de nombreux renseignemens, établit, d'après le mémoire publié en 1808, sur l'hospice de la maternité, que la mortalité des enfans trouvés est, dans le premier âge, de 500 sur 1,000; dans le second âge, de 87 sur 1,000; dans le troisième âge, de 28 sur 1,000; et dans le quatrième âge, de 13 sur 1,000. (Le premier âge comprend les douze premiers mois de la vie d'un enfant, le second âge commence avec la deuxième année et finit avec la sixième ; le troisième âge s'étend de sept à douze ans.)

A Paris, lors de l'établissement général en 1670, on comptait environ 312 enfans trouvés. De cette époque à la fin du siècle, le nombre s'augmenta jusqu'à 2,000. II. ne s'éleva guère au-dessus pendant les trente premières années du dix-huitième siècle. Mais de 1730 à 1750 on le vit monter jusqu'à 4,000. Quinze ans après, en 1763, il dépassait 5,000 et de là en 1780, il se porta à 6,000 et quelquefois même à sept mille.

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De 1780 à la révolution et quelques années après, il varia de 5,000 à 5,800. Depuis lors jusqu'à nos jours, il est redescendu et paraît se soutenir entre 4,000 et et 5,000.

Les grandes villes du royaume ont suivi la même progression que la capitale. En 1789, le terme moyen des enfans trouvés variait à Lyon entre 900 et 1,000. Aujourd'hui l'hospice général de cette ville en nourrit plus de 7,000.

Il faut remarquer qu'une partie des enfans trouvés existant dans les hospices de Paris, de Lyon et des autres villes considérables, sont apportés des provinces voisines. On évalue au huitième le nombre des enfans trouvés de Paris.

On ne comptait, en 1784, dans la généralité de la France, que 40,000 enfans trouvés. Voici l'augmentation constatée depuis cette époque.

En 1798, 51,000; en 1809, 69,000; en 1815, 84,500; en 1816, 87,700; en 1817, 92,000; en 1818, 98,000; en 1819, 99,500; en 1820, 102,100; en 1821, 106,400; en 1822, 109,300; en 1823, 111,800; en 1824, 116,700; en 1825, 119,900; en 1850, 125,000; dans les années 1831, 1852 et 1855, la progression a continué d'une manière encore plus remarquable (1).

Le rapport du nombre des enfans trouvés et abandonnés

(1) Les tableaux du nombre des enfans trouvés, pour ces années, n'ont pas encore été complétés au ministère de l'intérieur,

avec celui des naissances, suit à Paris, depuis un siècle, une proportion qui a été en 1720, de 9,73 sur 100; en 1780, de 35,6 sur 100; en 1820, de 22,88 sur 100.

On voit la proportion monter rapidement dans les dernières années de Louis XV, époque de dépravation gérérale elle diminua sous la convention, époque où les filles mères étaient honorées et récompensées. Elle augmenta de nouveau sous le gouvernement impérial, époque de guerre et de licence militaire; elle a été stationnaire pendant la restauration, époque d'ordre et d'amélioration morale(1).

En ce moment, la proportion des naissances d'enfans illégitimes à celui des enfans légitimes est de 1 sur environ 14.

La dépense annuelle du service des enfans trouvés s'élevait, en 1829, pour la totalité de la France, à environ 11,500,000 francs. Beaucoup de précautions ont été prises, beaucoup de moyens ont été mis en usage pour parvenir à diminuer une charge aussi onéreuse pour les hospices et les départemens, dont la majeure partie des ressources est ainsi absorbée au détriment des services les plus importans. Persuadé qu'un grand nombre d'enfans étaient placés dans les hospices par des mèrés légitimes ou illégitimes qui les reprenaient ensuite comme nourrices ou avaient l'espoir de les retirer un jour, le gouvernement a ordonné, en 1826, d'échanger les enfans trouvés d'un département à l'autre, afin de les dépayser, d'en faire perdre la trace et de forcer ainsi les mères à les réclamer avant que la transmigration ne fût opérée. Cette mesure avait produit des effets assez remarquables dans beaucoup de départemens où elle a été appliquée.

Mais ce remède ne pouvait être que momentané et souvent comminatoire. Le nombre des enfans trouvés a con

(1) Il est à remarquer que, de tous les départemens du royaume, celui de la Vendée est celui qui produit le moins d'enfans trouvés.

tinué d'augmenter avec la population, l'immoralité et la misère. Les conseils généraux des départemens sont unanimes pour solliciter des moyens plus efficaces de prévenir ou de diminuer ce funeste fléau. Plusieurs ont demandé qu'on rétablit les dispositions de l'édit de Henri II sur les déclarations de grossesse. Dans la suite de cet ouvrage, nous examinerons quelles sont les modifications qu'il serait possible d'apporter à la législation et aux mesures administratives qui concernent en France les enfans trouvés. Nous terminerons ce chapitre en appelant l'attention des autorités départementales et des administrateurs charitables sur les fraudes journellement commises pour faire admettre au nombre des enfans trouvés, des enfans légitimes abandonnés par des mères dénaturées et quelquefois par des parens aisés. Nous ne réclamons pas moins vivement leur sollicitude à l'égard de la conduite des agens chargés de la surveillance des enfans trouvés de la ville de Paris, dans les départemens voisins de la capitale. Des plaintes graves ont été maintes fois portées sur des exactions odieuses envers les nourrices, des transactions honteuses, et une basse cupidité qui exigent une surveillance sévère (1).

(1) En 1826 et 1827, un manufacturier établi dans un département voisin de la capitale, avait offert aux commissions administratives des hospices de plusieurs départemens de se charger des enfans trouvés des deux sexes, de l'âge de douze à quinze ans, qu'on consentirait à lui confier, et qu'il s'engageait à élever et à entretenir, jusqu'à vingt-un ans, époque à laquelle ils seraient maitres de choisir une autre profession ou de rentrer à l'hospice. Environ 300 enfans trouvés, la plupart expédiés des départemens de la Bretagne, lui furent remis, à ce titre. Un homme respectable nous a assuré que l'établissement industriel de ce manufacturier n'ayant pu se soutenir, les malheureux enfans furent vendus à un autre industriel lequel a été ensuite obligé de les renvoyer dans leur pays.

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