Page images
PDF
EPUB

On ne comprend point, dans le nombre des 163,453 indigens, 800 malades, 2,529 vieillards et 1,532 orphelins, formant un total de 4,667 individus entretenus dans les hospices, et dont la dépense annuelle s'élève à 1,780,831 fr. 31 c. (381 fr. 42 c. par individu). On n'y comprend pas non plus 3,000 enfans-trouvés qui donnent lieu à une dépense de 249,000 fr. (83 fr. par individu) prélevée sur les revenus des hospices, des communes et du département, lequel y contribue pour 137,000 fr. par an.

Les fonds consacrés par la charité publique aux indigens du département du Nord s'élèvent à la somme de 5,005,675 f., savoir:

::

[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

31

249,000

[ocr errors][merged small]

Hospices (malades, vieillards, orphelins). 1,780,831
Enfans trouvés .

[merged small][ocr errors]

D'après quelques données administratives, on peut classer ainsi la population indigente du département du Nord:

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Cette masse d'indigens se compose principalement, 1o d'ouvriers manufacturiers qui ne peuvent faire subsister leur famille au moyen de leurs salaires et se trouvent entièrement à la charge de la charité publique ou privée, en cas de maladie, de disette ou de fermeture d'ateliers; 2o d'ouvriers agricoles surchargés d'enfans, qui demeu

rent sans ressource pendant l'interruption des travaux de la campagne; 30 d'ouvriers sans instruction, sans prévoyance, sans économie, abrutis par la débauche ou énervés par les travaux manufacturiers, parvenus à l'âge mûr sans avoir fait aucune épargne et hors d'état de suffire complétement, par leur travail, à l'existence de leur famille presque toujours très nombreuse (1); 40 de vieillards prématurément caducs, abandonnés de leurs enfans, qui n'ont pu être admis dans les hospices et ne peuvent être qu'imparfaitement secourus par les bureaux de bienfaisance; 5o d'enfans et d'orphelins trop jeunes pour gagner leur vie par leur travail, et dont un grand nombre, atteints d'infirmités ou de difformités incurables, sont une charge permanente pour leurs parens et pour les communes; 6o enfin, d'un grand nombre de familles héréditairement indigentes ou mendiantes, sans instruction, sans intelligence, sans énergie physique ou morale, vivant dans les villes, entassées pêle-mêle dans des caves obscures et humides, ou dans des greniers exposées à toutes les rigueurs des saisons. La majeure partie, joignant, au triste cortége d'infirmités transmises des pères aux enfans, la plus dégoûtante immoralité.

La plupart de ces indigens se trouvent dans les villes, et particulièrement dans les villes de fabriques et de manufactures. On a remarqué que les cantons industriels ne peuvent, le plus souvent, fournir leur contingent annuel au recrutement militaire. Le nombre des réformes prononcées pour infirmités surpasse de plus d'un tiers celles qui ont lieu dans les cantons purement agricoles et ruraux.

On évalue à environ 224,320 le nombre des ouvriers industriels de toute espèce existant dans le département du Nord; la plus grande partie est attachée aux fabriques

(1) Cette race d'hommes a la plus grande analogie avec les canuts de Lyon, dont nous avons précédemment fait connaître la misérable situation. (Voir le chap. XI, liv. Ier.)

et principalement à celles qui manufacturent le coton. On a déjà vu que le département du Nord fournit la moitié du coton filé qui se fabrique en France.

Sur ces 224,320 ouvriers, on en compte environ 92,563 de 15 à 25 ans qu'on suppose n'être pas encore mariés et n'avoir pas d'enfans,

ci.

Mariés.

60,804 ménages. Chaque ménage supposé avoir 3 enfans, on peut établir qu'il existe dans la classe ouvrière.

92,563 121,667 formant

[ocr errors]

182,502 enfans.

Et par conséquent une population totale de 396,732 individus de laquelle déduisant les indigens, ci.

Il reste, en ouvriers non classés comme pauvres.

165,453
233,279

Ainsi, le rapport du nombre des ouvriers indigens à la masse générale des ouvriers serait environ de 1|2 2982. Mais comme on doit supposer que, sur la totalité des indigens, 16 (27,423) appartiennent à la classe agricole (1), le nombre des ouvriers classés comme non pauvres s'élèverait à 260,701 au lieu de 255,279, et le rapport des indigens ne serait plus que de 12 12 14.

Dans le département du Nord, la population agricole est à la population industrielle :: 3 : 2 352, c'est-à-dire que, sur 962,840 habitans, 568,116 appartiennent à l'agriculture, comme propriétaires ou cultivateurs, et 394,752 aux professions manufacturières. (En France, suivant M. de Sismondi, ce rapport moyen est de 4 à 1; en Angleterre, de 2 à 5; dans les Pays Bas de 2 à 5; en Suisse de 2 à 1.)

Lorsqu'on porte ses regards sur le nombre des malheureux classés au rang des indigens dans l'un des plus beaux et des plus riches pays de la France, il est difficile de se soustraire à de douloureuses réflexions. Combien il est

(1) Le rapport de la population indigente agricole à la population générale est de 1/35 1/2.

affligeant, en effet, de penser que dans cette contrée, si florissante en apparence, plus du sixième de la population gémit dans les privations et dans la misère, et que plus d'un tiers de la classe industrielle soit obligée de recevoir le pain de la charité publique!...

Dans les campagnes, cette proportion n'est guère que du 12 au 15; mais dans les villes et les populations agglomérées, elle s'élève souvent au quart de la population. Nous en citerons quelques exemples.

A Lille, ville peuplée de 70,000 habitans, on trouve 22,281 pauvres (1).

[blocks in formation]

En 1789, la population du département du Nord était de 808,147 individus ; on comptait à cette époque dans le département environ 120,000 indigens, c'est-à-dire les 1/6 23 de la population générale (2). Aujourd'hui cette population, portée, d'après le recensement de 1827, å 962,848 habitans, présente, comme on l'a vu, 15 78 d'indigens. Il en résulterait donc que depuis trente-huit ans la population se serait accrue de 153 24642|134701, ou de 154,701 habitans, et que, sur ce dernier nombre, se trouvent 43,453 indigens, ou 13 55. Ainsi, l'accroissement total des indigens, depuis 1789, serait de 16 140 193, et l'indigence aurait multiplié dans un rapport

(1) En 1828, on comptait à Lille 31,664 indigens. Une rectification rigoureuse des listes de pauvres, ordonnée par le préfet, a opéré une réduction de 9,383 individus admis abusivement aux secours annuels.

(2) Statistique de M. Dieudonné, premier préfet du département du Nord.

qui ne s'éloigne pas beaucoup du progrès de la population générale (1); mais il faut remarquer que le rapport de l'indigence nouvelle à la population nouvelle étant de 15 35, le paupérisme a marché bien plus rapidement encore que la population. Le rapport de ce double progrès est 13 35: 16 140193.

Les secours destinés par la charité publique au soulagement des indigens, s'élèvent, ainsi qu'on l'a vu dans le tableau précédent, à une somme évidemment très inférieure aux besoins, puisque le secours moyen annuel ne saurait être que de 5 fr. 42 cent. par individu. Il est superflu de dire que l'application en est faite d'après l'âge et les infirmités des pauvres, le nombre d'enfans, les charges de la famille, etc., de sorte que parmi les indigens inscrits sur les listes de l'administration il en est un grand nombre qui ne reçoivent absolument rien, et qui n'ont d'autre prérogative que d'être traités gratuitement par le médecin ou l'officier de santé attachés au service des pauvres, lorsqu'ils ne peuvent être admis dans les hôpitaux. Les secours qu'ils reçoivent d'ailleurs, et sans lesquels ils ne pourraient subsister, sont dus à la bienfaisance particulière. On ne peut guère évaluer à moins de 50 fr. le taux moyen du secours annuellement nécessaire à chaque indigent pour l'aider à subsister. La charité publique, accordant 3 fr. 42 c., il resterait à la charge de la charité privée 44 fr. 58 c. par individu, ce qui fait une somme annuelle de 6,732,912 fr. 74 cent.; mais quelque infatigable, quelque inépuisable que puisse être cette charité, on conçoit qu'elle ne peut subvenir à toutes les nécessités et soulager toutes les souffrances (2).

(1) La population du département du Nord s'est accrue chaque année, depuis 1816, de 1/138. Cet accroissement, pendant la même époque, n'a guère été que de 1/165 pour la généralité de la France.

(2) Nulle part la charité chrétienne ne s'exerce avec plus de zèle et de dévouement que dans la ville de Lille et le département du Nord. On y

« PreviousContinue »