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obscurcis, tes passions l'aveuglent, un voile obscur est sur tes paupières, un affreux assoupissement les appesantit. O mon âme! Jésus en pleure et tu ne te pleures pas toi-même? Pleure, pleure, ô spirituelle Jérusalem! pleure ta perte du moins en ce jour que le Seigneur te visite d'une manière si admirable; si jusqu'ici tu as été insensible à ta propre perte, pleure aujourd'hui et tu vivras! Ne perds aucun moment de grâce, parce que tu ne sais jamais si ce ne sera pas le dernier qui sera donné. (Bossuet.)

22. Viendront pour toi des jours où tes ennemis l'environneront de tranchées; ils l'environneront et te presseront de tous côtés. - Titus, voyant qu'il serait difficile d'empêcher les sorties, attendu que son armée ne suffisait pas pour entourer toute la ville (Jérusalem), fut d'avis qu'on l'entourât comme d'un mur. Il commanda aux principaux chefs de partager ce travail entre les différentes légions; et l'on vit aussitôt dans toute l'armée une émulation qui semblait avoir quelque chose de surnaturel. Ce mur commençait au camp des Assyriens, où ce prince avait pris son quartier, continuait jusqu'à la nouvelle ville basse ; et, après avoir traversé la vallée de Cédron, allait gagner la montagne des Oliviers, qu'il enfermait du côté du midi jusqu'au rocher du Colombier, ainsi que la colline qui était au-dessus de la vallée de Siloë, d'où tournant vers l'orient il descendait dans cette vallée où est la fontaine qui en porte le nom. De là il allait gagner le sépulcre du grand sacrificateur Ananus, environnait la montagne où Pompée s'était autrefois campé, retournait ensuite vers le septentrion, allait jusqu'au bourg d'Érébinthon, enfermait le sépulcre d'Hérode du coté de l'orient, et de là regagnait le lieu où il avait commencé. Tout ce circuit était de trente-neuf stades, et il y avait treize forts dont le tour était de dix stades; mais ce qui paraît incroyable, et qui est digne des Romains, c'est que ce grand ouvrage, qui apparemment aurait eu besoin de trois mois pour s'exécuter, fut commencé et achevé en trois jours. (JOSÈPHE.)

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22. Et ils te renverseront dans la poussière, loi et les enfants qui seront dans tes murs. Les Juifs se voyant alors entièrement renfermés dans la ville, désespérèrent de leur salut. La famine, qui croissait toujours, dévorait des familles entières. Les maisons étaient pleines des corps morts des femmes et des enfants, et les rues de ceux des vieillards. Les jeunes, tout enflés et languissants, allaient en chancelant à chaque pas dans les places publiques: on les aurait plutôt pris pour des spectres que pour des personnes vivantes, et la moindre chose qu'ils

rencontraient les faisait tomber. Ainsi ils n'avaient pas la force d'enterrer les morts; et quand ils l'auraient eue, ils n'auraient pu s'y résoudre, tant à cause de leur trop grand nombre, que parce qu'ils ne savaient combien il leur restait encore à eux-mêmes de temps à vivre. Si quelques-uns s'efforçaient de rendre ce devoir de piété, ils expiraient presque tous en s'en acquittant; d'autres se traînaient comme ils pouvaient jusqu'au lieu de leur sépulture pour y attendre le moment de leur mort qui était si proche. Au milieu d'une si affreuse misère, on ne voyait point de pleurs, on n'entendait pas de gémissements, parce que cette horrible faim dont l'âme était entièrement occupée étouffait tous les autres scutiments. Ceux qui vivaient encore regardaient les morts avec des yeux secs, et leurs lèvres toutes enflées et toutes livides faisaient voir la mort peinte sur leurs visages. Le silence était aussi grand dans toute la ville que si elle eût été ensevelie dans une profonde nuit, ou qu'il n'y fût resté personne. Dans une telle misère, ces scélérats, qui en étaient la principale cause, plus cruels que la faim et que les bêtes les plus furieuses, entraient dans ces maisons devenues des sépulcres, y dépouillaient les morts, leur ôtaient jusqu'à leur dernier vêtement, et, ajoutant la moquerie à une si épouvantable inhumanité, perçaient de coups ceux qui respiraient encore, pour éprouver si leurs épées étaient bien tranchantes; mais en même temps, par une cruauté toute contraire, ils refusaient avec mépris de tuer ceux qui les en priaient, ou de leur prêter leurs épées pour se tuer eux-mêmes afin de se délivrer des maux que la famine leur faisait souffrir. Les mourants, en rendant l'âme, tournaient les yeux vers le temple. (JOSEPHE.)

22. Et ils ne laisseront pas de toi pierre sur pierre. La guerre avait tellement ravagé cette contrée autrefois si favorisée de Dieu, qu'il ne lui restait plus la moindre marque de son ancienne beauté, et que déjà l'on pouvait demander, dans Jérusalem même, où était Jérusalem. Les soldats, ayant pénétré dans la ville, tuaient sans distinction tous ceux qu'ils rencontraient et brûlaient toutes les maisons avec ceux qui y étaient restés. Ceux qui entraient dans quelques-unes pour piller les trouvaient pleines de cadavres que la mort y avait entassés. Le carnage cessait vers le soir, et l'embrasement augmentait durant la nuit. Lorsque l'armée romaine, qui ne se serait jamais lassée de tuer et de piller, ne trouva plus sur quoi continuer à exercer sa fureur, Titus commanda de ruiner toute la ville de Jérusalem jusque dans ses fondements, à la réserve du pan de mur qui regardait l'occi

dent, où il avait résolu de faire une citadelle, et des tours d'Hippicos, de Chazaël et de Marianne, parce que, surpassant toutes les autres en hauteur et en magnificence, il voulait les conserver pour faire connaître à la postérité combien il fallait que la valeur et la science des Romains dans la guerre fussent extraordinaires pour avoir pu se rendre maîtres de cette puissante ville qui s'était élevée à un tel comble de gloire. Cet ordre fut si exactement exécuté, qu'il ne parut plus aucune marque qu'il y eût eu des habitants. Telle fut la fin de Jérusalem. (JOSÈPHE.)

ÉLÈVATION.

Que ce chant de triomphe, cet hosanna mille fois répété par toutes ces multitudes qui se pressent au-devant du Seigneur, trouvent de retentissement dans le cœur du chrétien! Comme il s'associe par la pensée et par le désir à ces flots de peuple de tout âge, de tout sexe, accourus pour voir le Sauveur, et semant sur son passage les palmes de la victoire! Jésus, toujours plein de douceur et de compassion, s'avança lentement au milieu de ces populations empressées, accomplissant à la lettre les prophéties qui, longtemps avant sa venue, avaient amené ce jour de triomphe. Mais, mon Sauveur, pourquoi cette tristesse? Pourquoi ces larmes qu'on vous voit répandre quand tous se réjouissent autour de vous? Ah! c'est que vous connaissiez le fond des cœurs; c'est que vous saviez que cette foule mobile qui vous acclamait aujourd'hui comme son roi, ne tarderait pas, au jour de vos douleurs et de vos ignominies, à vous jeter l'insulte qu'on épargne au plus vil des malfaiteurs. Serons-nous assez malheureux et insensés pour nous rendre coupables d'un si funeste aveuglement? Après nous être dépouillés pour vous de nos vêtements, de ce vieil homme qui nous entraînait loin de vos voies, irons-nous les reprendre encore, et répondre à votre amour par le mépris de votre grâce, en foulant aux pieds vos divins enseignements? Notre désir de vous posséder et de vous suivre est sincère et ardent, mais vous seul, Seigneur, pouvez le rendre durable, et nous conduire à ce terme heureux où nous attendent le repos de l'âme, une parfaite liberté et le silence complet des passions.

CHAPITRE LXXXIV.

1-5 Jésus entre dans Jérusalem aux acclamations d'un peuple immense; il chasse du lieu saint les vendeurs qui le profanaient, et guérit les infirmes qu'on lui présente. — 6-15. Murmure des Phari. siens; des Gentils demandent à voir Jésus. — 16-26. Tandis qu'il instruit le peuple, une voix céleste se fait entendre; Jésus se retire à Béthanie (le dimanche, 5 jours avant ia Pâque, quatrième année de la vie publique du Sauveur).

MATH., XXI, 10-17; MARC, XI, 11; Luc, XIX, 45-46; JEAN, XII, 19-36.

Et cùm intrâsset Jero

solymam, commota est universa civitas, dicens : Quis est hic?

Populi autem dice

bant: Hic est Jesus pro

1. Lorsque Jésus entra dans Jérusalem, toute la ville fut émue, et l'on demandait: Qui est celui-ci ?

2. Et toute la foule disait : C'est Jésus,

pheta à Nazareth Gali- le prophète de Nazareth en Galilée 1.

Et intravit Jesus in templum Dei, et ejiciebat omnes vendentes et ementes in templo, et nummulario

mensas

rum, et cathedras vendentium columbas evertit;

Et dicit eis: Scriptum est: Domus mea domus orationis vocabitur; vos autem fecistis illam spe luncam latronum.

Et accesserunt ad eum cæci et claudi in templo: et sanavit eos.

3. Et Jésus entra dans le temple de Dieu, et se mit à chasser tous ceux qui vendaient et achetaient dans le lieu saint 2, et il renversa les tables des changeurs et les siéges de ceux qui vendaient des colombes 3;

4. Et il leur dit: Il est écrit: Ma maison est une maison de prière 4; mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs.

5. Et des aveugles et des boîteux s'approchèrent de lui dans le temple, et il les guérit.

4 * 2. Gr. οὗτος ἔστιν Ιησοῦς ὁ προφήτης ὁ ἀπὸ Ναζάρετ τῆς Γαλιλαίας, hic est Jesus ille propheta, ille à Nazareth Galilææ, celui-ci est Jésus le prophète (par excellence) le venant de Nazareth (du séjour de la sainteté) de Galilée. • Ici, nous

dit saint Jérôme, le mot á πpophons indique évidemment le prophète annoncé par Moïse dans le Deutéronome.

2 † 3. Gr. eis rò íepòv, in loco sancto, dans le lieu saint, dans une enceinte extérieure du temple.

3 3. Voir, au chapitre XV, la réflexion de saint Jérôme sur cet acte de puissance de la part du Sauveur.

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▲ 4. Donc, en aucun cas, et sous quelque prétexte que ce soit, la maison de Dieu ne peut être transformée en un lieu de trafic.

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6. Or, les Princes des prêtres et les Scribes, voyant les merveilles qu'il faisait, et les enfants qui criaient dans le temple: Hosanna au fils de David! en furent indi

gnés, et lui dirent: Entendez-vous ce que disent ceux-ci?

7. Jésus leur dit : Oui, je l'entends. N'avez-vous donc jamais lu cette parole, Vous avez mis la louange dans la bouche des enfants et de ceux qui sont à la mamelle 1? Et il les quitta.

8. Alors les Pharisiens se dirent entre eux: Vous voyez que nous ne gagnons rien; voilà que tout le monde court à sa suite.

9. Or, il y avait plusieurs païens 2 parmi ceux qui étaient montés au temple pour adorer au jour de la fête :

10. Ils s'approchèrent de Philippe, qui était de Bethsaïde en Galilée, et ils le priaient, disant: Seigneur, nous voudrions voir Jésus.

11. Philippe vint le dire à André; puis André et Philippe le dirent ensemble à Jé

sus.

12. Jésus leur répondit: L'heure est venue où le Fils de l'homme doit être glorifié.

17. Ces paroles se trouvent dans le psaume VIII; or, comme les psaumes étaient d'un usage quotidien chez les Juifs, c'était de la part de Jésus-Christ une réponse à laquelle on ne pouvait rien répliquer.

2 79. Gr. ἦσαν δέ τινες Ἕλληνες ἐκ τῶν ἀναβαινόντων, erant autem quidam Græci ex ascendentibus, or il y avait quelques Grecs parmi les montant (au temple). On voit souvent dans saint Paul le mot €λλŋves employé pour désigner les païens en général.

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