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cultivent le champ du Seigneur de baptiser, pour la rémission des péchés, tous les enfants indifféremment, soit qu'ils soient nés de parents fidèles ou de parents infidèles. Qu'on demande aux jardiniers d'où vient que, l'olivier franc étant si différent de l'olivier sauvage, la semence de l'un et de l'autre ne produit que des sauvageons? Aucun d'eux ne pourra répondre à cette question. Mais ils ne laisseront pas pour cela de continuer à greffer indifféremment tous les oliviers; et si quelqu'un d'eux était assez simple pour s'imaginer que les arbrisseaux qui viennent d'oliviers francs sont aussi des oliviers francs, il serait bientôt payé de sa sotte vanité et de sa paresse en ne trouvant dans son champ qu'une affreuse stérilité et de vrais sauvageons dont il ne recueillerait que des fruits amers. (SAINT AUGUSTIN.)

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Tandis que

5. Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. vous admirez ce soleil qui se plonge sous les voûtes de l'occident, un autre observateur le regarde sortir des régions de l'aurore. Par quelle inconcevable magie ce vieil astre, qui s'endort fatigué et brûlant dans la poudre du soir, est-il, en ce moment même, ce jeune astre qui s'éveille, humide de rosée, dans les voiles blanchissants de l'aube? A chaque moment de la journée, le soleil se lève, brille à son zénith, et se couche sur le monde; ou plutôt, nos sens nous abusent, et il n'y a ni orient, ni midi, ni occident vrai. Tout se réduit à un point fixe, d'où le flambeau du jour fait éclater à la fois trois lumières en une seule substance. Cette triple splendeur est peut-être ce que la nature a de plus beau: car, en nous donnant l'idée de la perpétuelle magnificence et de la toute-présence de Dieu, elle nous montre aussi une image éclatante de sa glorieuse Trinité. (DE CHATEAUBRIAND.)

6. Et voilà que je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la consommation des siècles. Non-seulement le Fils de Dieu est toujours avec son Église, comme le chef est avec ses membres pour les vivifier et les conduire, mais il habite encore parmi nous dans le plus auguste de ses sacrements, pour être notre soutien, notre appui, notre force et notre consolation. Présence réelle et présence permanente de JésusChrist dans l'Eucharistie, deux dogmes qui se tiennent et qui sont l'âme même du catholicisme. Sans eux, toute l'économie de la religion est renversée, nos sanctuaires sont vides, nos temples déserts; des ténèbres épaisses et froides couvrent nos saints parvis, tout est glacé et sans vie: Dieu s'est éloigné. Avec eux, au contraire, tout prend un air de fête; Dieu, environné de ses légions d'anges, réside sur nos au

tels; la lumière et la chaleur se répandent à torrents, le tabernacle parle, le cœur s'enflamme, l'âme est ravie par la plus mystérieuse et la plus réelle de toutes les unions, et nous nous écrions avec bien plus de raison que Moïse : Non, il n'y a pas de nations qui aient des dieux aussi proches d'elles, ni plus attentifs à leurs hommages. Mais, comment les hommes ont-ils correspondu à cet excès de tendresse et de bonté? Dieu habite parmi nous, il fait ses délices d'être avec les enfants des hommes. Qui le dirait, à voir l'isolement où on le délaisse dans son tabernacle? Cette foule qui s'agite autour de nos temples, qui va, qui vient, tout empressée pour de misérables intérêts, songe-t-elle seulement à cette divine présence? Non, hélas! elle oublie son Dieu; elle oublie les adorations qui lui sont dues; elle ne répond à l'amour le plus merveilleux que par la plus coupable indifférence. (Mgr SIBOUR.)

6. Et voilà que je suis avec vous jusqu'à la consommation des siècles. Si Dieu se découvrait continuellement aux hommes, il n'y aurait point de mérite à le croire; et s'il ne se découvrait jamais, il y aurait peu de foi. Mais il se cache ordinairement, et se découvre rarement à ceux qu'il veut engager dans son service. Cet étrange secret dans lequel Dieu s'est retiré, impénétrable à la vue des hommes, est une grande leçon pour nous porter à la solitude loin de la vue des hommes. Il est demeuré caché sous le voile de la nature, qui nous le couvre, jusqu'à l'Incarnation; et quand il a fallu paraître, il s'est encore plus caché en se couvrant de l'humanité. Il était bien plus reconnaissable quand il était invisible que non pas quand il s'est rendu visible. Enfin quand il a voulu accomplir la promesse qu'il fit à ses apôtres de demeurer avec les hommes jusqu'à son dernier avénement, il a choisi d'y demeurer dans le plus étrange et le plus obscur secret de tous, savoir, sous les espèces de l'Eucharistie. C'est ce sacrement que saint Jean appelle dans l'Apocalypse, une manne cachée; et je crois qu'Isaïe le voyait en cet état, lorsqu'il dit en esprit de prophétie: Véritablement, tu es un Dieu caché. C'est là le dernier secret où il peut être. Le voile de la nature, qui couvre Dieu, a été pénétré par plusieurs infidèles, qui, comme dit saint Paul, ont reconnu un Dieu invisible par la nature visible. Beaucoup de chrétiens hérétiques l'ont reconnu à travers son humanité, et adorent Jésus-Christ, Dieu et homme. Mais pour nous, nous devons nous estimer heureux de ce que Dieu nous éclaire jusqu'à le reconnaître sous les espèces du pain et du vin.

(PASCAL.)

9. Prêchez l'Évangile. Que dirai-je de la prédication de la parole

divine, la plus sainte ou du moins la plus importante de toutes nos fonctions? Tous y aspirent aujourd'hui; tous se croient en état de l'exercer, les uns par un excès de présomption, les autres parce qu'ils n'en connaissent pas l'importance. J'admire la hardiesse, pour ne pas dire l'aveuglement des uns et des autres; car je n'ai jamais douté qu'il fallût un mérite au-dessus du vulgaire, et une rare habileté pour distribuer aux peuples le pain de la parole avec mesure et discernement, les instruire des vérités évangéliques avec la discrétion et la prudence qu'exigent leurs différents besoins. Il s'agit en effet de leur développer les grands principes sur lesquels repose la divine philosophie du christianisme; de leur expliquer ce qu'elle nous découvre de la création du monde visible et invisible, de la matière, de l'esprit, de l'excellence de l'âme, de ces pures intelligences qu'on appelle des anges ou des démons, de cette Providence qui embrasse et gouverne tout l'univers avec une sagesse infinie, et par des voies qui nous semblent tantôt conformes à notre raison, tantôt au-dessus de la portée de notre faible intelligence. Il faut leur apprendre ce qu'elle nous enseigne sur notre premier état d'innocence et sur notre réhabilitation; sur les anciennes figures et sur leur accomplissement, touchant les deux alliances; au sujet du premier et du second avénement de Jésus-Christ; sur son incarnation, sa passion, sa résurrection, son ascension; et encore touchant la fin de l'homme, le jugement dernier, la récompense des bons, et la punition des méchants. Mais il est surtout nécessaire de les instruire de ce qu'il faut croire sur la sainte Trinité, le premier de tous les mystères et le fondement de toute la religion; un mystère où ceux qui enseignent les peuples ont deux écueils à éviter... Un des plus grands fléaux que j'aie vu sous le soleil, disait Salomon, c'est un homme qui est sage à ses propres yeux. Il en est un plus funeste encore : c'est un pasteur aveugle qui ne soupçonne pas même son aveuglement, et qui entreprend de conduire et d'éclairer les autres. (SAINT JEAN-CHRYSOSTOME.)

22. Vous me rendrez témoignage dans Jérusalem. - Lorsque les douze apôtres, après avoir reçu par le Saint-Esprit le don de parler toutes les langues, partagèrent entre eux l'univers pour aller partout établir l'Évangile, saint Pierre, comme le chef du collége apostolique, fut destiné à la capitale de l'empire romain, afin que la lumière de la vérité qui commençait à briller pour le salut de toutes les nations se répandit plus aisément de la capitale dans toutes les parties du monde. Y avait-il alors sous le ciel une nation qui n'eût un de ses citoyens à

Rome? Et quel peuple pouvait ignorer ce que Rome avait appris? C'est donc là surtout qu'il fallait confondre l'orgueil des philosophes; c'est là qu'il fallait montrer la vanité de la sagesse humaine; c'est là qu'il fallait détruire le culte sacrilége des démons, faire cesser leurs sacrifices impies, et ruiner l'idolâtrie dans le lieu même où la superstition avait rassemblé les erreurs de l'univers entier. Vous ne craignez donc point, ô grand apôtre, d'entrer dans cette ville formidable? et tandis que Paul, votre glorieux collègue, est encore occupé du soin des autres églises, vous venez dans cette forêt remplie de toutes sortes de bêtes féroces, vous venez affronter ce profond Océan avec bien plus de courage que vous ne marchiez autrefois sur les eaux. Déjà vous aviez donné aux Juifs fidèles la connaissance de l'Évangile; déjà vous aviez fondé l'église d'Antioche, le berceau du nom chrétien; déjà le Pont, la Galatie, le Cappadoce, l'Asie, la Bithynie, se trouvaient soumis par vos travaux aux lois de l'Évangile; et maintenant, sans avoir le moindre doute sur le succès, et sans être arrêté par le peu de temps qui vous reste à vivre, vous portez le trophée de la croix de Jésus-Christ sur le Capitole, où la divine Providence avait placé dans ses conseils éternels et le théâtre de votre martyre et le siége de votre dignité. (SAINT LÉON.)

24. Et en les bénissant, il se sépara d'eux, s'élevant et montant au ciel en leur présence. Si la source de tous nos biens se trouve en la terre, à la bonne heure, attachons-nous à la terre: que si, au contraire, ce monde visible ne nous produit continuellement que des maux; si l'origine de notre bien, si le fondement de notre espérance, si la cause unique de notre salut est au ciel, soyons éternellement enflammés de désirs célestes; ne respirons désormais que le ciel, où Jésus notre avant-coureur est entré pour nous. Certes, il pouvait aller à son père, sans rendre ses apôtres témoins de son ascension triomphante; mais il lui plaît de les appeler, afin de leur apprendre à le suivre. Non, les saints disciples de notre Sauveur ne sont point aujourd'hui assemblés pour être seulement spectateurs: Jésus monte devant leurs yeux pour les inviter à le suivre. Comme l'aigle, dit Moïse, qui provoque ses petits à voler et voltige sur eux: ainsi Notre-Seigneur Jésus-Christ, cet aigle mystérieux, dont le vol est si ferme et si haut, assemble ses disciples comme ses aiglons, et, fendant les airs devant eux, il les incite par son exemple à percer les nues. Courage donc ! suivons cet aigle divin qui nous précède. Jésus-Christ ne vole pas seulement devant nous, il nous

prend, il nous élève, il nous soutient, il étend ses ailes sur nous et nous porte même sur ses épaules. Et partant, que la terre ne nous tienne plus; rompons les chaînes qui nous attachent, et jouissons, par un vol généreux, de la bienheureuse liberté à laquelle nos âmes aspirent. Notre chef est au ciel; notre avocat, notre médiateur, notre intercesseur est au ciel; notre joie, notre amour, notre espérance, notre héritage, notre patrie est au ciel; notre couronne, le lieu dé notre repos est au ciel: empressons-nous donc de suivre Jésus-Christ dans ce séjour à jamais désirable. (BossUET.)

ÉLÉVATION.

Les livres saints avaient annoncé que ce serait de Sion et de Jérusalem que partirait la loi à laquelle tous les peuples se soumettraient. C'est pourquoi, Seigneur, après avoir instruit vos apôtres et leur avoir recommandé d'attendre dans la capitale de la Judée le secours qu'ils recevraient d'en haut pour pouvoir annoncer avec succès à toutes les nations l'heureuse nouvelle, vous retournez avec eux auprès de cette ville pour mettre le sceau, par un grand miracle, à toutes les preuves que vous leur aviez données de votre divine puissance. O Seigneur ! il me semble que je vous accompagne avec vos disciples jusqu'à Béthanie; je vous vois vous élever vers les cieux du sommet de la montagne des Oliviers; comme eux je vous cherche encore vers l'endroit où ils vous ont vu disparaître, et j'entends les paroles qui leur sont adressées. Ces paroles sont aussi adressées à tous les chrétiens: elles nous présentent l'objet de notre foi, le motif de notre espérance, l'appui de notre faiblesse dans les épreuves de la vie. Nous vous disons, Seigneur, avec un de vos saints: «O Jésus! qui tenez toujours allumé dans le ciel le flambeau de la foi pour percer les nuages qui s'élèvent sans cesse sur cette mer orageuse, et nous conduire parmi tant d'écueils, ô Jésus! soyez vous-même le pilote de notre vaisseau, et que votre croix en soit le gouvernail, afin qu'il ne s'engloutisse pas dans les flots; dirigez-le vers les rivages délicieux de votre royaume : déjà, Seigneur, nous en apercevons la lumière, et nous la saluons avec les larmes de la joie et les tressaillements de l'espérance, en criant: Sauvez-nous, sauveznous! sans vous, nous périssons.

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