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nébres. Ils font devenus ignorans & aveugles dans les Ecritures & par les Ecritures mêmes,en s'atribuant le nom de Sages & de Savans. Ils n'y ont plus vu ce qu'ils y voioient autrefois:ils n'y ont plus trouvé que les vifions de leur coeur:& pour avoir ainfi retenu la verité de Dieu dans l'injuftice,& l'avoir fait fervir à leurs paffions,à leur repos,à leur fortune,ils ont été privez de la verité,livrez à l'erreur,& abandonnez à l'illufion de leur propre efprit.

Puifque c'eft l'orgueil qui produit ces dernieres ténébres, il faut,pour s'en défendre & pour les prévenir,lire la parole de Dieu avec une profonde humilité, & ne s'en aprocher qu'en efprit d'adoration & de priere, comme un pauvre qui y vient chercher le pain de fon ame,dont il s'est rendu indigne.Il faut fe fouvenir, que ce Confill. Livre eft auffi inacceffible à l'orgueil des Sa- liv.3. ges du fiécle, qu'il eft au-deffus de la portée c.s. des enfans,comme parle S.Auguftin ; qu'il eft fimple en aparence, mais en effet infiniment relevésplein de mifteres,mais de mifteres voi lez, & qui ne fe découvrent qu'aux humbles &aux petits, à mesure qu'ils avancent. C'est encore par l'humilité & la priere que l'on conferve ce que l'on a aquis de connoif fance à la faveur de ces deux vertus.Mais

comme il y a un veritable orgueilà la ra porter à nous mêmes & à s'en vouloir faire honneur devant les hommes; il y a auffi une fauffe humilité à la laiffer inutile, quand ou nôtre état, ou des engagemens qui viennent de la Providence, ou la neceffité de la charité nous apellent à la S. Aug. communiquer au prochain. Car vous nous Conf. menavez, Seigneur,de nous priver de la veri lib.12. tésfi nous prétendons de ne l'avoir que pour nous.Et quiconque veut referver pour lui fenl ce que vous offrez à tout le monde, & faire Lon propre de ce qui apartient aux autres comme à lui, eft exclus de ce bien commun, qui n'eft autre que la verité, & reduit à ce qu'il peut trouver dans fon propre fonds,c'eft à-dire à l'erreur & au mensonge.

L'obscurité que nos défauts ordinaires nous peuvent faire trouver dans S.Paul & dans le refte de l'Ecriture,nous oblige de travailler à meriter la lumiere de Dieu par la pureté des mœurs. C'eft la vie Chrêtienne & evangelique qui eft la clef de l'Evangile de J. C. C'est par la pieté que l'on entre dans l'intelligence des Ecritu res:& la fcience de J.C.& de fes maximes, qui en font la fubftance & le fonds, eft plus l'affaire du cœur que de l'efprit.

Enfin l'obscurité qui vient du langage

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& du ftile,se peut vaincre par une lecture frequente & affidue. Quelque inconnue que foit une langue,on l'aprend à la fin en frequentant ceux qui la parlent,& en vivant avec eux familierement. Ainfi en se rendant S. Paul familier, on aprendra la langue de S. Paul. Ses manieres de parler ne nous feront plus inconnues. Nous les aurons toûjours prefentes à nôtre efprit, & gravées dans nôtre memoire: & aidez par les inftructions de l'Eglife,qui éclaircit en differentes rencontres ce que S.Pierre avoit remarqué de difficile dans ces Epîtres, nous pourrons trouver dans S. Paul,en fuivant fes principes,un fidele interprête de fes paroles & de fes penfées. C'eft fans doute le meilleur moien de prendre bien le fens de ce grand Docteur, & d'aprendre cette fublime Theologie qu'il enfeigne aux parfaits, non par des difcours d'une fcience humaine, mais par ceux qu'il avoit apris dans l'Ecole du S. Elprit.En effet,pour peu qu'on s'aplique à la lecture des Epîtres de S.Paul,quels tréfors! quelles richeffes! quelles merveilles n'y découvre-t'on point! On fe fent pénétré jufques au fond du cœur de la grandeur & de la majefté de Dieu,dont il parle d'une maniere fi digue & fi magnifi N. T. Tome I I.

que.La charité exceffive de J.C.pour les pecheurs, s'y trouve comme peinte avec les traits & le pinceau de la charité même; & tous les états & fes mifteres differens, les tréfors de fa fageffe & de sa science,la vertu de fa croix & la vertu de fa grace y font expliquées d'une maniere fi noble & fi élevée,fi vive & fi pénétrante, que l'ef prit d'un homme mortel eft trop borné pour recevoir tant de lumieres, & qu'un coeur ne fuffit pas pour porter tous les fentimens qu'elles y excitent & les impreffions qu'elles y font.Mais quelle estime & quel refpect n'infpirent-elles point pour la Religion Chrêtienne?Quel amour pour l'Eglife,quel zele pour la verité:quel mépris pour les chofes de la terre;quelle pasfion pour les biens du Ciel;quel attachement pour J. C. crucifié ; quel empreffement de fe reunir à lui; quelle haine du peché ; quelle vénération pour la vertu; quelle idée de la grace du Baptême;quelle foi pour le facrifice & pour les Sacremens de l'Eglife; quelle reconnoiffance

pour la mifericorde de Dieu; quelle conhance aux merites & à la grace de J. C. / quelle defiance de nous mêmes & de nos œuvres; quel goût pour la parole de Dieu; quelle joie dans la participation des fouf

frances du Sauveur? En un mot,quelle eftime & quel amour pour tout ce qui eft de la foi & de l'efprit du Chriftianifme, & pour toutes les chofes de Dieu ?

Il ne faut donc pas s'étonner fi les Epîtres de ce grand Apôtre ont toûjours fait l'ocupation & les delices des plus grands Docteurs. Saint Chrifoftome ne pouvoit Conf. ni les quiter, ni s'en raffafier. S. Auguf- Liv.7. tin commença par S. Paul à gouter les c.11. faintes Ecritures, quand il plût à Dieu de lui en ouvrir le fens.Ce fut par fes Epitres qu'il commença de découvrir & d'admirer les merveilles de la conduite de Dieu fur les hommes,& qu'il fe fentit pénétré du profond refpect qu'elles impriment.Par elles le Seigneur ataqua de tou- Làmême tes parts,& ébranla ce cœur qui fe défen-liv.8. doit encore contre la grace:& par elles enfin cette grace triompha de toutes les refiftances d'Auguftin. De forte que comme la priere de S.Etienne aquit S. Paul à l'Eglile,on peut dire que la lecture de S.Paul donna à l'Eglife S.Auguftin;& donna à S. Paul même le plus humble & le plus fidelle de fes difciples, le plus favant & le plus éclairé de fes interpretes,le plus zelé & le plus ardent défenfeur de fa doctrine.

Pour ce qui eft des autres Epîtres Ca

C.I.

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