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laquelle nous traitons avec quelque étendue l'importante et bien délicate question de l'inamovibilité des curés appelés improprement et anticanoniquement desservants, et des tribunaux ecclésiastiques connus sous le nom d'officialités qui en sont le corollaire et le contrepoids nécessaire, paraissait aussi un recueil intitulé le Bien social, recueil dans lequel quelques prêtres plus ignorants encore de la véritable science canonique, nous aimons à le croire, que mal disposés envers nos chefs hiérarchiques et nos pères dans la foi, prêchaient, sous le spécieux prétexte de l'inamovibilité, des doctrines désolantes et appelaient le clergé à l'indépendance et à la révolte, outrageaient de pieux et vénérables prélats, calomniaient leurs intentions les plus pures et les plus droites et présentaient leur conduite envers ceux qu'ils appellent leurs coopérateurs, comme entachée d'arbitraire et de despotisme, etc. Mgr l'archevêque de Sens et avec lui presque tous les évêques de France, dont plusieurs nous firent des observations à cet égard et dans le même sens, crurent qu'il était, sinon imprudent, du moins inopportun alors de traiter cette brûlante et délicate question qui, mal comprise et présentée comme elle l'était dans ce recueil, pouvait avoir des résultats très funestes. Sa Grandeur, dans cet état de choses, on le conçoit, ne pouvait guère approuver et adopter toutes nos opinions. Il fallait même que nous les eussions formulées d'une manière bien calme, bien modérée et surtout bien respectueuse, pour que Sa Grandeur se contentât de ne pas les adopter, car ne les condamnant pas dans une telle occurrence, c'était au fond les approuver.

Mais, comme les avis de nos savants et vénérables prélats ont toujours été pour nous d'un grand poids et d'une haute importance, nous avons craint de nous être laissé emporter à un sentiment généreux, et de nous être trompé dans notre dévouement à l'Église; inquiet donc d'avoir été peut-être un peu trop loin, dans notre appréciation et d'avoir exposé trop librement nos pensées, sachant du reste qu'il est facile de se faire illusion, nous prîmes le parti de consulter sur cette question si

épineuse le nonce apostolique à Paris, Mgr Fornari, aujourd'hui cardinal de la sainte Église romaine. Son Excellence daigna nous rassurer en nous disant que nous étions dans la bonne voie, que, dans un ouvrage grave et sérieux, nous avions dû traiter cette question canonique comme toutes les autres, que d'ailleurs l'amovibilité des curés desservants n'était que tolérée à Rome à cause du malheur des temps, et que, quand les circonstances deviendraient plus favorables, on reviendrait, en France comme ailleurs, à l'ancien droit à cet égard. C'était notre conviction intime et nous continuâmes à défendre avec toute la modération possible l'opinion bien réfléchie et bien étudiée que nous avions émise sur cette grave question.

Nous eûmes alors aussi de longues conférences avec Mgr Affre, de glorieuse mémoire, qui était très opposé et même très antipathique à notre sentiment. Il ne concevait pas, nous disait-il, avec ce ton de bonhomie admirable qui le caractérisait, comment, nous aussi, nous pouvions émettre une telle opinion, et il nous exposait alors toutes ses objections et tous les inconvénients qu'il voyait dans notre sentiment, s'il venait à être réalisé. Il écoutait avec beaucoup de sang-froid nos réponses, et, après y avoir sérieusement réfléchi, il finit par nous dire un jour qu'il pensait que nous pouvions avoir raison. Tout le monde sait quelle fut sa profession de foi à cet égard quelques jours à peine avant de terminer si courageusement et si héroïquement sa carrière, en mourant victime de son dévouement et de sa charité pour son peuple.

Enfin, nous le constatons avec une espèce de fierté, nos derniers conciles provinciaux, ainsi que nous l'avions prévu et formellement annoncé, ont reconnu la nécessité de la stabilité du pasteur dans sa paroisse, c'est-à-dire de l'inamovibilité. Celui d'Avignon, comme nous le disons en son lieu, a déclaré que le prêtre à charge d'âmes ne devait pas être arraché à sa paroisse malgré lui, à suâ parochiâ invitus amovebitur aut tolletur. Du reste la question, que nous n'avons jamais eu la prétention de

vouloir décider, puisque nous ne sommes rien dans l'Église de Jésus-Christ, est réservée au jugement suprême du Souverain Pontife.

Nous avons cru nécessaire de donner ces quelques mots d'explication à la réserve que Mgr l'archevêque de Sens a cru devoir mettre à l'approbation qu'il a daigné donner à notre livre. Nous savons d'ailleurs que Sa Grandeur accueille favorablement notre travail. Retenue par une indisposition, Elle nous faisait écrire tout récemment encore par l'un de ses vicaires généraux les paroles suivantes : «.... Mgr a été extrêmement reconnaissant de l'envoi que vous lui avez fait du premier volume de votre seconde édition du Cours de droit canon. Il avait été, vous le savez, très satisfait de la première édition, il le sera certainement encore plus de la seconde. Ses occupations et surtout sa santé ne lui permettront pas de faire une étude approfondie de votre savant ouvrage, mais il l'a confié à un homme capable qui doit lui en rendre un compte exact, et il s'empressera de vous transmettre les observations qu'aurait fait naître l'examen de ce premier volume. »

Nous ferons connaître ce nouveau jugement de notre Ordinaire et nous nous ferons un devoir de profiter des observations qui pourront nous être faites. Car nous aimons à déclarer de nouveau que nous ne voulons exprimer dans notre ouvrage que la pure doctrine de l'Église, notre mère, que nous reconnaissons humblement que nous pouvons nous tromper, car hélas! il est de la nature de l'homme, essentiellement faillible, de tomber de bonne foi dans l'erreur, mais nous espérons que, Dieu aidant, nous n'y persévérerons jamais, ce qui serait à nos yeux le comble de la folie et la preuve d'un orgueil satanique, Errare humanum est, diabolicum perseverare.

ALPHABETIQUE ET MÉTHODIQUE

DE DROIT CANON

MIS EN RAPPORT

AVEC LE DROIT CIVIL ECCLÉSIASTIQUE

ANCIEN ET MODERNE.

C

CHAPITRE.

Chapitre se prend en plusieurs sens : 1o pour le lieu où s'assemblent les chanoines; 20 pour le corps ou le collége même des chanoines; ce dernier sens est le plus ordinaire. Capitulum quandòque ponitur pro loco ubi canonici congregantur; quá significatione accipit Panormitanus in cap. In causis, de Elect., sed veriùs, ut et rei magis congruè, accipitur pro ipso canonicorum collegio, pro ipsis canonicis congregatis: sic accipitur in cap. Capitulum, de Rescriptis.

délibé

Dans la première acception de ce mot, on entend aussi l'assemblée que tiennent les religieux et les ordres militaires, pour rer de leurs affaires et régler leur discipline.

On entend aussi par chapitre une division d'un ouvrage ou d'un livre, inconnue des anciens, et introduite par les modernes, pour rendre les matières plus méthodiques et moins confuses. L'on voit, sous le mot DROIT CAÑON, que les auteurs des compilations qui composent le corps du droit canon ont usé de cette division, et on la suit dans la forme des citations de cet ouvrage; mais on donne plus souvent le nom de canons que de chapitres aux extraits insérés par Gratien dans son décret, sans doute parce qu'ils ont été tirés, pour la plupart, des réglements des conciles, auxquels on a toujours donné de préférence le nom de canons. Dans notre langue, plusieurs auteurs ne citent les chapitres des décrétales que sous la dénomination de capitules: nous disons pourquoi au mot DROIT CANON; mais le plus grand nombre emploie, comme nous dans ce livre, le mot de chapitre. Le terme de capitulaire vient de capitulum, en ce dernier

T. 1.

1

sens. (Voyez CAPITULAIRE.) On peut en dire autant de ces anciens règlements appelés capitula, que faisaient les évêques dans leurs diocèses, pour servir d'instructions aux ecclésiastiques qui leur étaient

soumis

Nous allons parler ici successivement des chapitres dans les deux premières acceptions, c'est-à-dire des chapitres composés de chanoines, et des chapitres formés par une assemblée de religieux.

On a mis en question si, sous la dénomination de chapitre, on devait comprendre les évêques, an appellatione capituli contineatur prælatus? Albéric de Rosat est pour la négative. Nous sommes du même avis.

§ I. Origine des CHAPITRES, leurs anciens et nouveaux droits en

général.

On ne sait pas bien quand est-ce que les chapitres ont commencé à prendre la forme où nous les voyons aujourd'hui; ce que nous disons au mot CHANOINE, peut servir au moins à le faire conjecturer, ainsi qu'à nous donner une idée de l'origine et de l'ancienne forme des chapitres. Nous n'userons donc pas à cet égard de répétition; il nous suffira de dire ici que tous les bons canonistes regardent les chapitres des églises cathédrales comme l'ancien conseil de l'évêque qui composait son presbyterium, sans l'avis duquel il ne faisait rien de considérable dans le gouvernement de son église, et qui remonte à l'origine du christianisme.

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Nous avons déjà remarqué, sous le mot CHANOINE, d'après Nardi, que les chapitres sont d'institution apostolique. Ce sentiment, à notre avis, le seul vrai, peut paraître étrange en France, où nos canonistes parlementaires et schismatiques n'ont cessé de dire, contrairement à toute la tradition et à la pratique constante de l'Église, que les chapitres sont un hors-d'œuvre dans l'Église et qu'elle a subsisté pendant plusieurs siècles sans ces établissements. C'est en enseignant de telles erreurs qu'ils ont amené le schisme en France Voici comment s'exprime à cet égard l'un des rédacteurs de la constitution civile du clergé (1): Si le chapitre de la cathédrale faisait partie de la prélature, si les chanoines en étaient membres, il faudrait conclure qu'il ne peut y avoir de prélature parfaite, ni de vraie dignité épiscopale sans un chapitre dans la forme actuelle; cependant qui oserait soutenir cette proposition? N'est-il pas évident que la dignité épiscopale est indépendante du chapitre cathédral, et qu'elle aurait toute sa perfection, quand, dans un diocèse, il n'y aurait point de chapitre? Quand l'église cathédrale ne serait composée que d'un clergé ordonné selon la forme des paroisses, comme elles l'étaient toutes dans leur origine, quel inconvénient y aurait-il? Des chanoines, c'est-à-dire des ecclésiastiques, uniquement occupés à chanter et célébrer l'office divin, ne sont point de l'institution primitive de l'Eglise. Les chapitres sont un hors-d'œuvre dans l'Église ;

(1) Durand de Maillane, Dictionnaire de droit canonique, tom. 1er, p. 458, 3e édit.

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