An. 1427. FRANÇOIS & les Vénitiens pour leur idole de liberté. Ils le prierent de leur permetFOSCARI, tre d'affembler le Confeil de ville, IXV. Doge l'affurant qu'ils avoient tout lieu d'ef de Venife. Propofitions de Milan. pérer qu'on ne lui refuferoit aucun des fecours dont il avoit befoin.. Le Confeil de ville s'affembla: on des Citoyens propofa d'accorder à Philippe des fubfides extraordinaires, afin de le mettre en état de rompre avec fuccès une paix déshonorante. Ceux qui vouloient faire paffer la propofition, repréfenterent que, fi l'on cédoit aux Vénitiens, il en feroit des Vifcontis comme des Carrares, qu'ils avoient immolés à leur ambition; que cette République étoit hardie dans fes atventats.& implacable dans fes haines; & qu'il falloit confidérer lequel convenoit mieux à la Noblesse du Milanois, d'obéir à fon Souverain, ou de devenir l'efclave des Nobles de Veni fe. Il fut arrêté, tout d'une voix, que la ville de Milan fe chargeroit de fou doyer un corps de vingt mille hom mes, moitié infanterie & moitié ca. valerie; & qu'on demanderoit à PhiLippe, pour toute grace, de laiffer au Confeil municipal la libre adminif tration des revenus & des deniers de la ville. An. 1427. FRANÇOIS Elle eft re jettée.. C'étoit bien peu de liberté, pour de Venife. un fi grand effort de zele; mais les courtifans de Philippe lui infinuerent qu'il étoit dangereux pour fon autorité de donner ce pouvoir aux Sujets de fa capitale; que la grace qu'ils demandoient, tiroit à des conféquences trop effentielles; que c'étoit vouloir fubftituer au gouvernement monarchique, le gouvernement républicain ; & que, puifque fes Sujets étoient en état de lui faire des offres fi confidérables, ils n'auroient point à se plaindre, quand on rempliroit le même objet par une augmentation d'impôts équivalente. Philippe donna trop de faveur à ce mauvais confeil: il refufa les offres de la ville de Milan, & y fuppléa par des taxes exorbitantes, dont il fit une répartition arbitraire. On obéit à la force, & le cœur du peuple fut aliéné.. Le Duc de Les Commandans des places du Milan refufe Breffan avoient reçu ordre de les re- d'exécuter les mettre entre les mains du Légat. Phi- articles de la: paix... lippe leur envoya un contre-ordre. An. 1427. Le Cardinal de Sainte-Croix vit qu'il FOSCARI, étoit joué, & fe retira à Bologne trèsLXV. Doge mécontent. Les Vénitiens, irrités de FRANÇOIS de Venife. Les Vénitiens renouvellent ce manque de foi, en firent au Papė les plaintes les plus vives, & il fallut recommencer la guerre à nouveaux frais. On renouvella l'alliance avec les la ligue con- Florentins, le Duc de Savoie, le tre Philippe. Marquis de Ferrare & le Seigneur de Mantoue on la fortifia par l'accef fion du Marquis de Montferrat & du Comte Roland Palavicin : on chercha à fe procurer des diverfions avantageufes, en fe liant plus particulierement avec le Roi Alfonfe & Thomas Frégofe. Carmagnole, qui, en récompenfe de fes fervices, avoit été fait noble Vénitien & Comte de Caftelnuovo, fut appellé au Confeil des cent Sages de la guerre; & on y régla, d'après les avis, le plan des opérations de la prochaine campagne. Operations Dès les premiers jours du prin temps une nouvelle flotte, aux ordres d'Etienne Contarini, fortit des Lagu nes pour pénétrer par les fleuves dans de la campa gne. de Venife. l'intérieur du Milanois, & l'armée de terre fe porta dans le Mantouan, d'où An. 1427. elle devoit tenter la conquête du Cré-FOSCARI, monois. Philippe mit fes troupes en LXV. Doge campagne avec la même promptitude. Il renforça les garnifons des places; il fit occuper les défilés des montagnes; il oppofa au Comte de Carmagnole une armée d'obfervation; il arma fur le Pô une flotte bien équipée, qu'il deftina à arrêter les progrès de celle des Vénitiens. Cafal-Mag Cette flotte partit de Pavie, defcendit jufqu'à Cafal-Maggior, & dé- gior affiégé barqua des troupes pour l'affiéger. Pi- par les trous pes de Milan fani, qui y commandoit, dépêcha un bateau de pofte à Etienne Contarini lequel s'étant avancé & ayant trouvé la flotte de l'ennemi fupérieure à ce qu'il attendoit, jetta un foible renfort dans la place, & fe retira. Les troupes de Milan commencerent auffi-tôt les attaques. L'art des fiéges confiftoit alors pour l'offenfive en efcalades réitérées, & pour la défenfive en pointes de fer femées dans le foflé, en eau bouillante & en feux d'artifice jettés du haut des remparts. FOSCARI, LXV. Doge An. 1427. On employa ces reffources pendant FRANÇOIS près de trois femaines, jufqu'à ce "qu'enfin les munitions manquant dans de Venife. la ville, & les affiégeans fe préparant à un dernier affaut, les bourgeois coururent chez Pifani, & le conju rerent, les larmes aux yeux, de leur en épargner les fuites. Il fit ce qu'il put pour les calmer; mais leur effroi étoit trop grand. Ils firent, malgré lui, leur accord avec l'ennemi, promettant de fe rendre fi dans trois jours' ils n'étoient pas fecourus. Le rendre. e obligé Pifani envoya demander du fecours au Comte de Carmagnole, qui avoit fon camp près de Mantoue; mais ce Général répondit qu'il lui étoit impoffible de fecourir la place en fi Exploits de de peu temps, qu'il connoiffoit la valeur de Cafal- Maggior, & que, quand il en feroit temps, il ne lui faudroit que trois jours pour le reprendre. Pifani fut donc forcé de capituler, & il obtint d'être conduit avec fa garaifon à Borgo-Fotté. La conduite d'Etienne Contarini François Bem-fut très-défapprouvée à Venife. On le rappella, & François Bembo, qui bo |