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Depuis l'automne, je n'avais pas encore eu le loisir d'aller à Kiangtsounn. Un beau jour, le maître de l'école chrétienne, Lao ou (le vieux cinquième), m'envoie une première délégation de femmes. Je donnais alors la Mission à Tchenglao, à 3 lis au sud.

(- Pas moyen de vivre en paix, disent-elles en entrant... Nous sommes harcelées, dit l'une... persécutées, dit l'autre... Voyons, du calme, ne parlez pas toutes ensemble ! Père, connaissez-vous cette enfant et cette fille et ce petit garçon, et celui-ci et celui-là ?

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Eh bien? Nous avons suivi les conseils du Père..., nous les avons engagés à se faire chrétiens..., ils le deviennent, ils le sont presque... Le Père ne cesse de dire qu'il faut chercher des catéchumènes. En voilà! Le règne de Dieu arrive..., comme vous dites... ; mais..., mais..., les païens du village y mettent obstacle... Figurez-vous qu'ils appellent ces enfants-ci que nous venons d'entraîner dans la religion : « t'ou tsaize » (race de lièvres); oui, mon Père, ils les appelent race de lièvres » (1); n'est-ce pas une injure, ça ? Bon, bon, ne vous fâchez pas..., on verra..., allez un instant à l'église.

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A peine ce groupe de femmes est-il parti, voilà que le groupe des hommes, le catéchiste Lao ou, cinquième du nom, en tête, débouche dans ma cour ; ils ouvrent la bouche, c'est un feu croisé de paroles, je n'y comprends rien, j'en reste abasourdi. « Oui, oui..., s'écrient-ils, eux... nous..., le Père... » Bref, c'est le galimatias de l'avocat Patelin ! Allons, du calme! Que quelqu'un prenne la parole et s'explique ! »

Le catéchiste fait un pas en avant : « Plusieurs, dit-il, se sont déclarés catéchumènes dans le village de Kiangtsounn, et cela, les païens ne nous le pardonnent pas ! Il y a surtout un certain Tchenn qui nous en veut et cherche noise au maître et au directeur de l'école officielle; chrétiens et païens sont donc en désaccord. Un bon moyen d'apaiser ce différend, c'est que demain, dès la première heure, vous alliez faire une visite à Kiangtsounn..., vous ferez venir le fameux Tchenn, le meneur païen.

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térêt, et aussi avoir quelque renseignement sur l'origine du conflit; je prends donc mon manteau et je pars avec eux. Nous arrivons plus tôt qu'on ne pensait. Les chrétiens sont en train de balayer la chambre du Père, un nuage de poussière la remplit; force m'est donc de rester dehors. Qu'à cela ne tienne !... Appelez-moi M. Tchenn! dis-je. Et j'attends dans la cour son arrivée.

Au bout d'un quart d'heure, le catéchiste revient : « Pas moyen de le faire venir !, dit-il mélancoliquement. Repartez, Père, votre office est terminé. »>

BIBLIOGRAPHIE

(A suivre.) www

Abrégé de la Doctrine Chrétienne, cours moyen, par l'abbé A. BOULENGER, chanoine honoraire d'Arras. Un vol. gr. in-16 de 400 pages, illustré, cartonné. Prix, 12 fr. 60. Emmanuel Vitte, éditeur 3, place Bellecour, Lyon (2o); 5, rue Garancière, Paris (6o).

« Vrai chef-d'œuvre... Travail parfait... idéal de clarté » tels sont les termes que n'ont pas hésité à employer les critiques les plus autorisés au sujet des manuels du chanoine BOULENGER. De telles appréciations confirmées par un succès « à nul autre comparable » et de pressantes sollicitations ont déterminé ce maître dans l'art de l'enseignement à compléter son œuvre en étendant son champ d'action.

Cet Abrégé de la Doctrine Chrétienne n'est pas, comme on pourrait le supposer, un résumé du Cours supérieur, paru en 3 fascicules, sous le titre de « La Doctrine Catholique » ; c'est un livre absolument neuf qui, en raison dų but qu'il poursuit, diffère de ce dernier non seulement par la méthode mais aussi par la substance.

La Doctrine y est exposée avec les qualités remarquables d'ordre, de clarté et de précision qui ont fait le succès des précédents ouvrages de M. BOULENGER, les redites sont évitées avec grand soin et les termes trop techniques, impitoyablement écartés ou expliqués, quand il n'y a pas possibilité de les supprimer. Ajoutons que cet ensemble de qualités est admirablement mis en valeur par une présentation typographique des plus soignées et des plus judicieuses. Tout promet donc à ce nouvel ouvrage un succès au moins aussi éclatant que celui obtenu par ses aînés.

Actes de Benoît XV. Texte latin avec traduction française. Tome III et dernier (1920-1921). In-8° de 250 pages. Prix, 4 fr. ; port, 0 fr. 85.

Le troisième et dernier volume des Actes de Benoît XV est paru. Il contient avec le texte latin et la traduction française les principaux actes du Pontife, d'octobre 1920 à novembre 1921. On y trouvera notamment la Lettre Encyclique Principi Apostolorum proclamant saint Ephrem le Syrien docteur de l'Église, la Lettre Ubi primum au sujet du conflit anglo-irlandais, la Lettre Praeclara sur le sixième centenaire de Dante Alighieri, la Lettre Ex iis litteris concernant la ligne de conduite du clergé dans la situation actuelle de la Pologne, etc. Le tome III contient, en outre, la table analytique des trois volumes parus et une liste des documents les plus importants du pontificat de Benoît XV.

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MONGOLIE

Le Séminaire de Tatung

LETTRE DU R. P. DAEMS, DE LA CONGRÉGATION DE SCHEUT, SUPÉRIEUR DU SÉMINAIRE

Fondé il y a cinq ans seulement, le séminaire central de Tatung compte déjà 44 séminaristes. Huit de nos élèves ont été promus au sacerdoce et sont actuellement en activité dans leurs missions respectives où ils donnent pleine satisfaction. Un neuvième, retardé par la maladie, est au dehors, se préparant aussi à la prêtrise. A la fin de cette année scolaire, le séminaire pourra présenter huit nouveaux prêtres. Malgré leur départ, nous comptons avoir l'an prochain dix élèves de plus. Au reste le nombre normal prévu de 70 va être atteint incessamment et ira croissant toujours, mais d'un mouvement plus lent.

On peut donc bien dire que le bon Dieu a béni l'œuvre et que le séminaire deviendra, s'il ne l'est

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déjà, un point d'appui solide pour l'Eglise dans cette partie de la Chine, et ce, d'autant plus que l'esprit de nos jeunes gens se maintient et reste aussi bon qu'on le peut souhaiter.

Les troubles qui désolent actuellement la Chine n'ont pas épargné Tatung, et, durant les trois longs mois que dura le siège de la ville, le séminaire s'est trouvé au beau milieu d'un champ de bataille. Entièrement découvert et situé à deux bons kilomètres des remparts de la place, il se trouvait sous les canons des assiégés et entouré de troupes, de tranchées et de batteries ennemies.

Humainement nous ne pouvions nous tirer de là, et cependant nous sortimes absolument indemnes. Les environs du séminaire furent labourés par les obus; nous encaissions shrapnels et balles; deux obus de 75 ébréchèrent même le mur d'enceinte sud mais ni les personnes (on était de deux à trois cents) ni les bâtiments ne furent atteints.

La petite Sœur Thérèse était là et c'est bien elle qui nous a ainsi préservés. Tout le monde en avait clairement l'impression. Il s'agissait, il est vrai, de son séminaire à elle; le frontispice porte son nom gravé en lettres d'or. Tout le monde avait confiance en elle, confiance qui à certains moments devenait presque héroïque ! Enfin, pendant les péripéties du siège, on imprimait l'édition chinoise de son « Esprit », édition faite par nos élèves. Sous la canonnade nos jeunes gens travaillaient encore à la traduction latine du même ouvrage pour le mettre à la portée, si les circonstances le permettent, du clergé et des séminaristes indigènes de tout l'Extrême-Orient.

Dans ces conditions, nous pouvions pleinement compter sur l'intervention de notre Patronne, et en effet, elle ne nous a pas manqué. On a été rudement secoué, mais cette tourmente n'aura abouti qu'à faire pénétrer plus profondément aux cœurs de nos jeunes lévites l'esprit de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus, son esprit missionnaire et apostolique.

PETIT MOIS DE MARIE

DE

l'Euvre de la Propagation de la Foi

approuvé et béni par 90 Evêques

Pour le recevoir franco, il suffit d'en faire la demande à la Direction de l'Euvre, 12, rue Sala, Lyon-2e, et de joindre la somme de un franc en timbres, mandat-poste ou chèque postal (Compte-courant: Œuvre de la Propagation de la Foi, Lyon, 72-71).

SOUDAN FRANÇAIS

Les Bambaras de Moribabougou

« Pour qui connaît la tenacité des Bambaras à l'égard des rites superstitieux de leur grossier fétichisme, nous écrit Mgr Sauvant, Vicaire apostolique de Bamako, c'est une joie de constater que les efforts des missionnaires obtiennent quand même de-ci de-là des conversions. L'attitude énergique de certains néophytes et catéchumènes, leur foi courageuse en face des tracasseries, presque de la persécution des vieux païens, comme on va le voir, autorisent les meilleurs espoirs. Mais l'apostolat serait bien plus fructueux si les missionnaires étaient plus nombreux, et si des ressources plus abondantes permettaient de développer le petit séminaire de Kati, pépinière de catéchistes et de futurs prêtres. »

LETTRE DU R. P. MOLIN, DES PÈRES BLANCS

MISSIONNAIRE AU VICARIAT DE BAMAKO

Il y avait naguère, sur la rive droite du Baoulé, affluent du Sénégal, un assez gros village, du nom de Bougouba. La maladie vint s'abattre sur cette paisible population de cultivateurs Bambaras. Elle les éprouva durement beaucoup moururent, plusieurs devinrent aveugles, rachitiques, boiteux; les bras vigoureux se faisaient rares.

Après avoir épuisé toutes les vaines ressources de la sorcellerie, les vieux décidèrent de quitter les bords malsains du Baoulé, dont certain arbre, pensaient-ils, empoisonnait les eaux. Ils allèrent s'établir, il y a une vingtaine d'années, à quelque 20 kilomètres vers l'Est, près du gros village de Banko. Ils y fondèrent un petit village, qui prit le nom de Moribabougou ou « village de Moriba » (nom de leur chef).

De 1912 à 1915, à la suite de je ne sais quelles circonstances, évidemment providentielles, quatre chrétiens de la Mission de Kati leur firent de nombreuses visites, pour négocier le mariage de Gaston avec une jeune fille de leur village. Comme il s'agissait d'un mariage chrétien, on ne pouvait se borner à parler d'argent, de vaches et des multiples cadeaux d'usage; la question religieuse devait naturellement être agitée. Ces pauvres païens, qui n'avaient peutêtre jamais entendu parler de la religion catholique, écoutèrent les chrétiens avec curiosité d'abord, puis avec un vif intérêt. Leurs cœurs, préparés par l'épreuve, se laissèrent peu à peu toucher par la grâce. Les plus vaillants n'hésitèrent pas à faire un voyage de cent kilomètres, pour aller voir les Pères à Kati. Après la guerre, un Père put enfin se rendre de temps en temps à leur village. Malgré la distance, le mauvais état des sentiers et les nombreux marigots à traverser, les allées et venues se multiplièrent entre Kati et Moribabougou. Enfin, au printemps de 1923, le féticheur Diawey et une vingtaine d'hommes, de femmes

et d'enfants jetèrent leurs amulettes et prirent rang dans la catégorie des postulants.

Leur conversion était sincère. Ils le montrèrent bien par l'ardeur avec laquelle ils se mirent à prier et à s'instruire de la religion catholique. Non contents d'avoir renversé la case du nama (fétiche), ils se livrèrent même, vers la fin de 1925, à un excès de zèle, qui devait leur créer bien des ennuis. Dans le but de prouver aux païens de leur entourage l'inanité des fétiches, l'ancien féticheur converti prit son komo (autre fétiche) qu'il avait depuis longtemps relégué dans un coin, et se rendit avec d'autres catéchumènes dans un champ voisin. Là ils se divertirent bruyamment aux dépens de ce morceau de bois grossièrement sculpté, qui faisait autrefois leur ter

reur.

L'effet fut bien différent de celui qu'ils désiraient. Trois familles de leur village étaient restées païennes. Leurs chefs crient au scandale et déchaînent contre les catéchumènes une longue persécution, dont il me reste à vous conter quelques épisodes. Ils portent d'abord leurs doléances au chef de Banko, puis au chef du canton. Ce dernier réunit son conseil de vieux païens, et l'on décide que ces impies, qui ont osé se moquer publiquement du komo, devront quitter le canton!

En effet, une députation de catéchumènes vient bientôt m'annoncer, à Kati, que le chef du canton leur a envoyé l'ordre de déguerpir, pour retourner sur les bords du Baoulé. Au début de janvier 1926, je vais leur rendre visite, accompagné de notre brave catéchiste Marcel. Nous nous rendons d'abord chez le chef du canton, avec trois des principaux catéchumènes, dont un aveugle. Le chef nous reçoit dans le bolo (vestibule), où il rend la justice. Il me fait asseoir sur l'unique siège, réservé aux visiteurs honorables, et s'installe en face de moi sur sa peau d'antilope, symbole de l'autorité. Tous les autres s'assoient sur la terre nue: Marcel à ma droite, les trois catéchumènes à ma gauche ; de chaque côté du chef, les vieux qui forment son conseil. Après les multiples salutations d'usage, Marcel prend la parole en mon

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Quoique nous sachions bien que les fétiches ne sont rien, reprend Marcel, nous reconnaissons que nos kalandéou n'ont pas bien agi en se divertissant publiquement aux dépens du komo, parce que c'était vexer inutilement leurs voisins. >>

On arrive facilement à s'entendre les catéchumènes avouent leur tort et promettent de ne pas recommencer; d'autre part, le chef promet de les laisser tranquilles dans leur village et de ne pas les inquiéter pour motif de religion. Si leurs voisins païens ne peuvent pas souffrir leur présence, ils n'auront qu'à partir eux-mêmes.

L'affaire étant ainsi réglée, les trois chefs des familles païennes de Moribabougou, dont un aveugle, arrivent en fin et s'assoient à terre en face des trois catéchumènes. Après les salutations d'usage, ils exposent leurs doléances, que nous connaissons déjà. Il y a un moment pathétique, quand le frère aîné d'un des catéchumènes présents dit en concluant : « Celui-ci est mon jeune frère. »

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Comment! s'écrie le chef, stupéfait de l'indépendance du cadet à l'égard de son aîné, c'est ton jeune frère ! »

Cette saillie est suivie d'un instant de silence, chacun se livrant intérieurement à ses réflexions... Pour moi, je pense à la prédiction de Notre-Seigneur : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive... Le frère livrera son frère... »

Cependant les vieux prennent la parole à tour de rôle, pour inviter les frères, devenus ennemis à cause de la religion, à vivre en bonne intelligence, et pour faire accepter par les trois nouveaux venus la décision prise avant leur arrivée. Mais ceux-ci déclarent qu'ils n'en sont point satisfaits. L'un d'eux cherche à faire vibrer la corde sensible par ces paroles prononcées d'un ton ému: « Nous ne pouvons vivre près des kalandéou nos enfants vont avec leurs enfants et apprennent à mépriser les bassi (nom général des fétiches), que nos pères ont vénérés. »

Néanmoins le chef du canton tranche le débat, en imposant la solution précédemment adoptée. Je dis quelques paroles sur notre religion, qui prêche à tous la charité; sur le rôle des Missionnaires, qui ne sont pas venus au Soudan pour s'enrichir, mais pour faire du bien aux Noirs, et pour leur apprendre la vérité et le chemin du bonheur éternel; sur la charité fraternelle, qui doit régner entre tous les hommes, parce qu'ils sont tous fils d'Adam et d'Eve... La séance est levée : elle a duré trois heures.

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