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Foi reli- Que l'homme ne s’imagine donc pas qu'il remgieuse, base de l'ordre. plit sa tâche, lorsque , sans jamais réfléchir sur

la nature et la fin de son être, et sans penser jamais à cet avenir où les jours ne se compteront plus, il s'abandonne à des joies trompeuses et passagères, et consume sa vie dans des travaux multipliés, dans des agitations continuelles , pour parvenir aux honneurs et aux dignités, ou pour amasser des richesses ! Sans doute il faut qu'il s'acquitte des devoirs que lui imposent ses rapports avec ses semblables ; il est à la fois, fils, époux , père, ami, citoyen ; et c'est pour lui une obligation sacrée , de bien gouverner sa famille, d'être utile à la société et de servir la patrie; il appartient même à l'homme doué d'une ame généreuse de chercher à dominer par la supériorité des talens. Mais le soin des intérêts humains doit-il l'absorber tout entier? Aura-t-il toujours le cæur appesanti vers la terre? Non, non,

l'homme a encore une plus haute destination ; il est essentiellement fait pour connoître et pour aimer la vérité, ou plutôt ce Dieu en qui réside toute vérité. Il a été créé à son image afin de chercher à se rapprocher de lui, en imitant les perfections adorables de sa nature , sources et types de toutes les vertus. De cette émulation sublime excitée

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dans l'homme par la plus sainte croyance, doit nécessairement résulter tout ce qui est propre à maintenir l'ordre, et à assurer le bonheur de la société humaine (1), c'est-à-dire l'amour du bien, l'horreur du mal et la sanction des jugemens de la conscience.

Après avoir fait remarquer toute la dignité de l'homme, après avoir montré cette noble créature, parvenue à la connoissance de Dieu; une question s'élève naturellement : Ne doit-elle rien à ce Dieu qui lui prodigue tant de bienfaits? Les sentimens de reconnoissance, que ne peut manquer de lui inspirer une préférence si éclatante, demeureront-ils concentrés dans son ame? ou n'est-il pas de son devoir de les manifester? Ecoutons! c'est Fénélon qui va répondre : « Dieu, » dit-il, a mis les hommes ensemble dans une » société où ils doivent s'aimer et s'entre-secou» rir, comme les enfans d'une même famille qui » ont un père commun. Chaque nation n'est » qu'une branche de cette famille nombreuse » qui est répandue sur la face de toute la terre. » L'amour de ce père commun doit être sensible,

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(1) Voyez les premiers chapitres du Traité des Lois civiles, par Domat, dans lesquels cette vérité est admirablement développée.

MOR. DE LA BIB. I.

5

Nécessité

d'un culte.

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» manifeste, et inviolablement régnant dans toute » cette société de ses enfans bien-aimés. Chacun » d'eux ne doit jamais manquer de dire à ceux

qui naissent de lui : Connoissez le Seigneur qui » est votre père. Ces enfans de Dieu doivent pu» blier ses bienfaits, chanter ses louanges, l'an» noncer à ceux qui l'ignorent, en rappeler le » souvenir à ceux qui l'oublient. Ils ne sont sur » la terre que pour connoître sa perfection et » accomplir sa volonté, que pour se communi» quer les uns aux autres cette science et cet » amour céleste. Que seroit - ce si cette famille » étoit en société sur tout le reste , sans y être » pour le culte d'un si bon père ? Il faut done

qu'il y ait entre eux une société de culte de » Dieu ; c'est ce qu'on nomme religion : c'est-àw dire, que tous ces hommes doivent s'instruire, » s'édifier, s'aimer les uns les autres, pour aimer ».et servir le Père commun. Le fond de cette resligion ne consiste dans aucune cérémonie exté» rieure; car elle consiste toute entière dans » l'intelligence du vrai et dans l'amour du bien

souverain : mais ces sentimens intérieurs ne » peuvent être sincères', sans être mis, comme » en société, parmi les hommes par des signes v certains et sensibles. Il ne suffit pas de connoi

»

» tre Dieu , il faut montrer qu'on le connoit, et » faire en sorte qu'aucun de nos frères n'ait le » malheur de l'ignorer, de l'oublier. Ces signes » sensibles du culte sont ce qu'on appelle les cé» rémonies de la religion. Ces cérémonies ne sont » que des marques par lesquelles les hommes sont » convenus de s'édifier mutuellement, et de ré» veiller les uns dans les autres le souvenir de ce » culte qui est au dedans. De plus, les hommes » foibles et légers ont souvent besoin de ces si» gnes sensibles pour se rappeler eux-mêmes la pré» sence de ce Dieu invisible qu'ils doivent aimer. » Ces signes ont été institués avec une certaine

majesté, afin de représenter mieux la gran» deur du Père céleste. La plupart des hommes, » dominés par leur imagination volage, et entraî» nés par leurs passions, ont un pressant besoin » que la majesté de ces signes, institués pour » le culte commun de Dieu , frappe et saisisse » leur imagination, afin que toutes leurs passions » soient ralenties et suspendues. Voilà donc ce

qu'on nomme religion , cérémonies sacrées 's culte public du Dieu qui nous a créés. Le genre » humain ne sauroit reconnoître et aimer son » Créateur, sans montrer qu'il l'aime, sans vou» loir le faire aimer, sans exprimer cet amour

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» avec une magnificence proportionnée à celui » qu'il aime, enfin sans s'exciter à l'amour par » les signes de l'amour même. Voilà la religion

qui est inséparable de la croyance du Créa» teur (1) ».

II.

EXAMEN DES RELIGIONS.'

Examen des Ainsi en acquérant la conviction qu'il est un religions.

Dieu , et que notre ame ne meurt point, nous
sommes forcés de reconnoître la nécessité d'un
culte public et solennel. Il nous reste maintenant
à examiner les diverses croyances des hommes
sur la nature de Dieu, et sur ses rapports avec
l'homme lui-même. Quatre religions partagent
les peuples de la terre. Les uns adorent les créa-
tures ; d'autres suivent la loi de Moïse; ceux-ci
sont sectateurs de Mahomet; ceux-là, disciples de
Jésus-Christ (2). Tous les cultes sont-ils également
bons? En est-il un qui mérite la préférence? Dieu
a-t-il à cet égard manifesté sa volonté; et peut-on-

(1) Lettre sur l'exist. de Dieu et sur la Religion , ch. iv.

(2) Je ne parlerai ici ni des sectes particulières qui appartiennent toujours à l'une ou à l'autre de ces religions, ni des Déistes qui, en reconnoissant un Etre suprême , rejettent tout culte public.

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