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Dieu veut liberté et combinaison de l'ensemble, selon des lois de justice géométrique; et nous adoptons un ordre familial où tout n'est qu'arbitraire, fausseté, injustice, désunion, oppression, contrariété des intérêts collectifs et individuels de chaque ménage. 41.

Autre vice radical dans le groupe de famille: il n'est point libre et les 3 autres le sont; l'on peut à volonté changer d'amis, de maîtresses, d'associés en intérêt; mais on ne peut rien changer au lien du sang, il est perpétuel, opposé au libre choix. C'est un vice qu'on n'a pas songé à remarquer, et qui est si grave que le régime d'harmonie lui opposera beaucoup de contre-poids absorbans, entre autres les adoptions industrielles et participations d'hoirie.

Ces indices vont nous servir à expliquer le règne du mal : de tout temps il a dominé, son empire s'est même accru de nos jours, par le triomphe de l'esprit mercantile qui a rendu les civilisés plus vils et plus faux qu'ils ne l'avaient été dès l'origine. Sur ce, les sophistes mettent en problème si l'homme est vicieux de sa nature, et la plupart opinent affirmativement c'est raisonner comme les fatalistes mahométans qui décident que la peste est un mal inévitable, parce qu'ils ne veulent pas prendre la peine d'établir des quarantaines sanitaires. Nos philosophes donnent dans le même travers: pour se dispenser de trouver le remède du mal, ils le déclarent destin inévitable, et pourtant ils publient des milliers de systêmes curatifs qui doivent perfectibiliser la civilisation par l'amour du commerce, et autres visions qu'ils donnent pour torrens de lumières et oracles de l'auguste vérité. Le moyen le plus sûr d'embrouiller une question ou une affaire, est d'y entre-mettre les beaux esprits. Jamais les chenilles n'ont tant pullulé dans certains cantons de la France, que depuis qu'elle a créé trois cents académies d'agriculture.

Les lois du mouvement universel démontreront que le mal ou ordre faux, intervient pour un huitième dans

le mécanisme de l'univers, que son règne embrasse le huitième des tems, des lieux et des choses; et comme tout est lié dans le système de la nature, il faut bien que le mal se lie à l'ensemble du système par quelque point où il ait sa racine; ce point en affaires sociales, ne peut être que le groupe de famille, assemblage le plus restreint et le plus contraint. Pourrait-on voir la source du mal dans l'un des 3 autres groupes? non, car ils tendent tous trois à la liberté et aux vastes combinaisons, aux liens très-étendus et variables à volonté. La morale même nous vante l'extension de ces liens, car elle veut que notre amitié s'étende philantropiquement à tous les humains transformés en une grande famille de frères, que notre ambition nous ligue avec les amis du commerce, partout le globe; l'amour de son côté, ne connaît pas bornes, dès qu'on le laisse aller à sa pente naturelle; un homme libre et opulent aura bientôt comme le sage Salomon, un millier de femmes, et une femme libre voudrait pareil assortiment d'hommes: cette pluralité d'amours est si naturelle que jamais on ne voit un sultan, même dans la caducité, se réduire à une seule femme; tous conservent leur sérail. L'amour tend donc comme les autres groupes, aux plus vastes combinaisons.

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Telle sera la marche du lien de famille, quand on saura et qu'on pourra l'élever du mode simple au mode composé, du mode forcé au mode libre, et procurer à chacun une famille aussi nombreuse que celle du sophi de Perse Feth-Ali-Schah; dans l'âge futur, après 3 ou 4 siècles d'harmonie, chaque vieillard quoique borné à peu près à deux ou trois enfans directs, aura en collatéraux et adoptifs plus de trois cents enfans, y compris ses petits fils et leurs rameaux. Alors les humains jouiront de tous les charmes de la paternité qu'ils cherchent en vain dans l'état actuel; notamment le charme d'unité d'intérêts, conciliant la cupidité avec les sentimens honorables, et amenant l'héritier à désirer, pour son propre bénéfice, la longévité du donateur. (Voyez la 10.onotice).

Les civilisés qui ne raisonnent que d'équilibre et contre-poids, auraient dû s'apercevoir que leur système familial est essentiellement dénué d'équilibre, car l'affection est toujours triple des ascendans aux descendans, et à peine tierce des descendans aux ascendans. C'est une vérité dont se plaignent amèrement tous les pères. Comment cette disproportion est-elle restée indifférente à nos équilibristes qui veulent tout balancer et pondérer; comment satisferont-ils les pères en leur procurant un retour d'amour filial, égal à la dose d'amour paternel ? La solution du problème est que l'amour filial doit provenir de 3 branches.

1.o Des consanguins ou fils et petits fils directs sur qui repose aujourd'hui tout le domaine du père en affection.

2.° Des adoptifs industriels ou héritiers des divers goûts du père, continuateurs de son industrie dans une trentaine de groupes et séries où ils ont été ses disciples.

3. Des sympathiques de double échelle; ceux en identité de caractère, et ceux en contraste de caractère. Nos rêveurs de sympathies, ignorent cette dualité obligée.

Ces classes 2. et 3.o qui obtiennent en harmonie une adoption et un legs, n'existent pas en civilisation, où l'on n'a point de continuateurs passionnés, et où l'on ne découvre point ses sympathiques d'un et d'autre genre, (identité et contraste), les caractères étant tous travestis par l'éducation morale qui les étouffe, ou par la grossièreté populaire : d'ailleurs les familles sont si égoïstes, si jalouses qu'elles ne souffriraient point de partage dans l'attachement du père. Forcé de s'en tenir à ses enfans, il ne rencontre souvent en eux que ses antipathiques de caractère, que les ennemis, les destructeurs de son ouvrage. On peut démontrer, par calcul régulier sur l'échelle des caractères, que lorsqu'un homme a 3 enfanset 3 petits enfans, total six descendans directs, il y a DEUX CENTS à parier contre UN, que sur les 6 il ne trouvera ni un sympathique de caractère ni un sympathique d'industrie ou continuateur passionné, surtout lorsque cette

industrie est bornée à un seul genre, comme il arrive en civilisation. Quelle triste perspective pour les pères civilisés, quel trébuchet que cet amour paternel!

En conséquence de tous ces vices inhérens au groupe de famille, le régime sociétaire lui enlève toute influence en affaires d'intérêt et de répartition où il n'introduirait que l'injustice et la rapine. Ce groupe doit être ABSORBE pour devenir apte aux accords généraux; on doit noyer l'égoïsme familial à force de ramifications et d'extension données aux 3 branches décrites plus haut. J'expliquerai cette methode à la notice des ralliemens.

Quelques lecteurs, par un scrupule déraisonnable, repousseront cette doctrine qui place le germe du mal dans le lien conjugal, s'il est l'arbre du mal, ce n'est pas à cause des vices qu'il engendre, II, 376, 382, 398; mais parce qu'étant le lien le moins nombreux possible, il est par cette raison, le plus anti-économique, le plus contraire aux vues d'un Dieu suprême économe: à ce titre, il ne peut pas adopter pour pivot de système, l'excès de complication et de morcellement, les 300 cabanes de familles hostiles entr'elles, au lieu d'un édifice de relations combinées. Lorsqu'on voit des sciences qui se disent économiques, préférer obstinément cette réunion la plus vicieuse qu'on puisse imaginer, n'est-ce pas le cas de dire avec Beaumarchais, «< que les gens d'esprit sont bétes ! » Mais répliquent-ils, on n'en connaît point d'autre : il fallait donc en chercher : quærite et invenietis; et il faut examiner la théorie du seul homme qui ait cherché et trouvé.

HUITIÈME NOTICE.

ACCORDS INTENTIONNELS SUR LA RÉPARTITION.

PRÉAMBULE. Nous approchons du problème de répartition, sur la solution duquel repose tout le mécanisme sociétaire. Si les accords faiblissaient sur ce point, on verrait bien vîte crouler tout l'édifice.

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La phalange d'épreuve serait dissoute au bout de sa 1.re campagne. Pour lui garantir l'accord de répartition, nous aurons deux moyens plus que suffisans; le 1. est la CUPIDITÉ qui ne manquera jamais chez les hommes; or si on trouve moyen de la transformer en gage de répartition équitable, on sera déjà assuré du règne de la justice. Le 2. moyen d'équilibre en répartition, sera la GÉNÉROSITÉ qui n'est pas praticable en civilisation; les civilisés ne jugeant que d'après leurs mœurs, pourraient la croire également impossible en harmonie; il est donc indispensable de leur décrire en abrégé ces accords de générosité, d'où résultera le concert intentionnel, avant même qu'on ne procède à la répartition. Cet examen sera le sujet de quatre petits tableaux distingués en accords matériels, affectueux, mécanisans et unitaires.

CHAP. XXIX. De l'accord intentionnel par

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jouissances matérielles.

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LA 1. voie d'accord en association, est l'enrichissement; aussi voit-on, dans toute compagnie de commerce, les associés se brouiller, se séparer quand l'entreprise ne donne pas de bénéfice. L'accord intentionnel ne pourra donc régner dans la phalange, qu'autant que chacun y verra, dans sa fortune et ses jouissances, un accroissement colossal, un revenu quadruple en effectif, trentuple et quarantuple en relatif. Démontrons cette propriété du régime sociétaire', déjà expliquée, Préf. Art. II. Je ne l'envisage ici qu'en parallèle de l'effectif au relatif.

Une famille vivant dans les bonnes provinces de France, Touraine, Anjou, est, quant à la vie animale, dix fois plus riche que si elle vivait à Londres. Elle aura dans les campagnes voisines de Tours et Saumur des fruits et des vins au 10. de ce qu'elle les paierait dans Londres; aussi voit-on beaucoup de familles anglaises habiter en Touraine, pour y faire des épargnes tout en vivant splendidement. Il est donc des circonstances qui

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