Page images
PDF
EPUB

II. LETTRE

(ENCORE PRÉLIMINAIRE).

Q

UEL charme je goûterois, mon Adèle, si je pouvois me flatter de vous faire atteindre ce bonheur que chacun cherche et que chacun fuit, n'ayant pas le talent ou le courage de le chercher dans la seule route où il se trouve. Oui! le bonheur, objet de tous les désirs des humains, est à leur disposition; il ne tient qu'à eux d'être heureux, d'être heureux même dans le malheur, tout au moins autant qu'il est donné à l'homme de l'être sur cette terre, qui n'est pour lui qu'un séjour passager, où il ne seroit pas de la bonté de Dieu de lui faire trouver la plénitude du bonheur. Ce sujet sera la matière de plus d'une lettre. Il faut voir en quoi consiste le bonheur, ce qu'il faut faire pour le trouver, et ce qu'il faut éviter comme contraire à sa nature. Le bonheur consiste

[ocr errors]

dans cette satisfaction que donne le contentement de soi-même, contentement qu'on ne peut obtenir que par l'habitude de consulter toujours sa conscience, et en prenant son Dieu pour guide de toutes ses actions; c'est-à-dire que le désir de lui plaire doit être le mobile de tout ce que nous faisons. Il est si bon qu'on peut, sans faire tort au respect qu'on lui doit, associer son idée à tous les intérêts de la vie: chacune de nos actions devient presque une bonne œuvre, si elle est faite dans une bonne intention. L'intention est tout ou presque tout; c'est à cela que Dieu regarde. Songez que Dieu est votre appui, votre appui le plus sûr. Faites-en votre ami, le confident de toutes vos pensées; prenez l'habitude de lui parler ; qu'il soit de cette manière toujours près de vous, toujours à votre portée : il est l'essence du bonheur, le bonheur lui-même ! Tout ce qui nous rapproche de lui nous fait trouver cette vraie félicité qui n'existe qu'en lui, et que nous chercherions vainement ailleurs.

Il faut bien se garder de confondre le

plaisir et le bonheur; ce sont deux choses bien différentes il faut chercher dans le bonheur son plaisir, et non le bonheur dans le plaisir. La jeunesse se fait souvent illusion, se laisse entraîner par ce dernier, et croit être heureuse quand elle s'amuse. Ce n'est point à dire, au reste, qu'on défende les récréations du monde, mais seulement il ne faut pas trop s'y livrer, et surtout ne pas se flatter d'y trouver la félicité,

III. LETTRE.

Sur l'importance de s'instruire dans la Religion Chrétienne.

LA vraie manière, mon Adèle, de se soutenir sans effort et sans trop de peine dans le chemin de la vertu, c'est de se pénétrer de la beauté de la religion chrétienne et de la bonté de Dieu, qui s'est fait si bien connoître à nous par la révélation. Jamais vous ne suivez un des préceptes de la religion chrétienne sans éprouver qu'elle est divine, sans reconnoître qu'en l'embrassant on prend le chemin du bonheur.

L'étude de la religion nous apprend à connoître les perfections de Dieu, nos devoirs envers lui, ceux envers nos semblables, envers nous-mêmes, et nous donne l'assurance d'une autre vie, choses qui toutes nous font immanquablement trouver le bonheur, si nous savons en tirer le profit que l'Ecriture nous indique. La piété sert à

tout, puisqu'elle a les promesses de la vie présente et de celle qui est à venir.

Je dis d'abord que la 'religion nous facilite la connoissance des perfections de Dieu; cette connoissance lorsqu'elle est acquise, fait naître chez nous un sentiment d'amour, parce que notre nature nous porte à aimer tout ce qui est bon, tout ce qui est parfait. Si ce sentiment étoit fortifié par de bonnes lectures, par de bonnes pensées et par de bons entretiens, il seroit seul une source de bonheur. Comme il est aussi de notre nature, de chercher à se faire aimer de ceux que nous aimons, et que le moyen de plaire à un être parfait est de chercher à lui ressembler en faisant tous nos efforts pour nous perfectionner. Vous verrez que lorsque ce sentiment d'amour pour l'Etre-Suprême sera bien établi dans votre cœur, il sera la source de mille vertus, je dirai même de toutes les vertus, et qu'il peut à lui seul nous faire remplir tous nos devoirs religieux; car Dieu né peut goûter que des sentimens et des actions digues de lui: dès qu'elles sont telles, elles nous assurent le ciel. Nous savons que

[ocr errors]
« PreviousContinue »