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II.

'excès de bouches, les danfes, les affemblées pro

phanes d'hommes & de femmes, la parure, & généralement l'amour de tous les plaisirs fenfiP. cxxxvIII. bles. Il nous eft donc commandé de vivre chaf tement, confidérant que Dieu nous voit toujours, & qu'il n'y a point de ténebres pour lui; que nos corps font les temples du Saint-Esprit, confacrés par le baptême & la confirmation, & encore plus par la fainte Euchariftie, & que nos mem1. Cor. VI. 1. bres font les membres de Jesus-Christ. Or, qu'y a-t-il de plus horrible, que de faire des membres de Jefus-Chrift, les membres d'une perfonne infâme, en devenant un même corps avec elle? Pour acquérir ou conferver la chasteté, Luc. IX. 23. nous devons mener une vie réglée, occupée, laborieuse, sobre & mortifiée, & nous fouvenir qu'il faut porter notre croix tous les jours, & que cette vie n'eft pas le temps du repos & de la joie, mais du travail. Le principal moyen pour obtenir de Dieu le don de continence, eft la priere.

Sap. VIII. 2.

LE

LEÇON XXVIII.

Du feptieme commandement.

E feptieme commandement defend le vol, le larcin, l'ufure, la concuffion, & généralement toute ufurpation du bien d'autrui, par fraude ou par violence. Car puifque les hommes font convenus du partage des biens & ont fait des loix pour régler la maniere de les acquérir & de les conferver, comme nous en profitons pour jouir de nos biens en fureté, il eft jufte d'obferver ces loix; & nous en devous auffi laisser jouir les autres, fans nous fervir de notre force ou de notre adreffe pour les en priver. Que fi quelque chofe nous manque, il faut nous appli

1

quer à l'acquérir par les voies légitimes, par le
travail, le trafic, le fervice. L'ufure eft le profit
que l'on tire d'un prêt, se faisant rendre plus que
l'on n'a prêté. La concussion est l'abus qu'une
perfonne puiflante fait de fon autorité, pour
ufurper ou retenir le bien d'autrui. Le larcin
domeftique eft le plus criminel, à caufe de la
confiance qu'il eft néceffaire d'avoir à ceux que
l'on tient dans fa maison; & il n'eft pas permis
de prendre fecrettement, fous prétexte, de fe ré-
compenfer du tort que l'on prétend avoir fouf-
fert. Il n'eft pas feulement défendu de prendre,
il eft ordonné de reftituer ce que l'on a mal ac-
quis ; & il faut le reftituer le plutôt que l'on peut,
parceque le garder injuftement, eft comme le
prendre de nouveau. Ce commandement oblige
auffi à payer exactement les journées des pauvres

mercenaires : les retenir, c'eft retenir leur fueur, Levit. XIX.13
leur fang & leur vie, & c'est un crime qui crie Pf. xXXVI. 214
vengeance devant Dieu. Ce commandement
oblige à payer toutes fes dettes, & défend par
conféquent de s'endetter, fi on ne voit comment
on pourra fatisfaire. De-là s'enfuit que chacun
doit ménager le bien que Dieu lui a donné, en
béniffant ion travail ou celui de fes peres, & le
conferver foigneufement, afin d'éviter l'indi-
gence, qui eft la fource ordina re de l'injuftice. Prov. xxvi
Mais d'un autre côté, il faut fuir l'avarice & le
defir d'acquérir toujours fans mefure; bannir le
luxe & modérer notre dépense, afin d'avoir de
quoi donner: car ce commandement nous oblige
encore à faire l'aumône à ceux qui n'ont pas le
néceffaire, principalement s'ils ne peuvent en
gagner. Que celui qui déroboit, dit S. Paul, ne Eph. 1v. 281
dérobe plus, mais plutôt qu'il travaille, faisant
de fes mains quelque chofe de bon, afin qu'il
ait de quoi donner à celui qui fouffre nécessité.

22.

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Des trois derniers commandemens.

LE huitieme commandement défend premierement le faux témoignage porté en justice pour faire condamner un innocent. Il défend aufli toute calomnie, c'est-à-dire, toute fauffe accufation, tout difcours par lequel on impose à quelqu'un ce qu'il n'a pas fait. De plus, toute médifance ou détraction, par laquelle on ruine ou on diminue la réputation du prochain, en publiant le mal qu'il a fait, mais qui n'étoit Levit.xx.16. pas connu, & fur-tout les mauvais rapports, Prov. XXVI. faux ou vrais, qui tendent à mettre la divifion entre les parens ou les amis. Il ne nous eft perEx. XXIII. 7. mis de parler du mal qu'a fait le prochain, que Bafil. regul. brevior. 25. lorfque la charité nous y oblige, ou pour procurer fa correction, ou pour la fureté de celui à qui il pourroit nuire; car nous devons plus à Eccl. vII. 24, l'innocent qu'au coupable. Il défend encore le mensonge, c'est-à-dire, toute parole dite à deffein de tromper, en faifant entendre le contraire de notre penfée. Il nous eft donc ordonné de dire toujours la vérité. Auffi fommes-nous les membres les uns des autres, qui par conféquent devons avoir une charité réciproque, & la parole n'eft inftituée que pour fignifier ce que nous penfons. Or, nous ne devons avoir des que penfées raifonnables, & par conféquent ne parler Prov. x. 19. que quand il eft à propos. La multitude des paMatth. x. roles n'eft point fans péché, & nous rendrons compte au jugement de Dieu, de toute parole oifenfe. Il faut donc aimer le filence. Nous devons encore procurer la concorde & l'union entre tous les hommes: car ceux qui procurent la paix, dit Jelus-Chrift, font appellés enfans de

Eph. IV. 25.

Phil. IV. 8.

86.

Dieu. Nous devons réparer, autant qu'il eft poffible, le tort que nous avons fait au prochain Matt. v. 6, par tous ces péchés de paroles; mais cette réparation eft très difficile. Enfin, nous devons éviter les jugemens téméraires, qui font la fource la plus ordinaire des médifances. Les Mart. vII. 12) deux derniers commandemens condamnent les mauvais defirs. Le neuvieme défend de défirer ce que le fixieme défend de commettre, c'està-dire, tout plaifir deshonnête, hors le feul cas, du mariage. Quiconque regarde une femme Matt. v. 2. pour la défirer, dit le Sauveur, a déja commis l'adultere dans fon cœur. Ce n'eft pas feulement le défir formé qui eft péché, c'est encore la penfée, quand on s'arrête volontairement à y prendre plaifir, ou que l'on néglige de s'en détourner. Il ne nous eft pas même permis de défirer la femme d'autrui, dans le cas où elle pourroit devenir la nôtre; comme fous l'ancienne loi, en cas de divorce, & à préfent, en cas de mort, parceque nourriffant ce défir, il feroit facile d'aller plus loin, & de défirer la mort du mari ou l'adultere. Le dixieme commandement fe rapporte au feptieme, & nous défend tout défir du bien d'autrui, de fa maison, de fa terre, de fes beftiaux, de ses meubles, & généralement de tout ce qu'il poffede, fi ce n'eft pour l'acquérir par des voies légitimes, & de fon confentement. Nous ne devons former autres deffeins fur les biens d'autrui, que ceux que nous trouverions bon que les autres formaflent fur nos biens,

LEÇON XXX.
Des défirs.

Les deux derniers commandemens affurent l'obfervation de tous les autres, coupant la racine de tous les péchés, qui eft la concupifcence. On ne fait mal que par le défir du plaifir, de l'argent ou de l'honneur. Le désir du bien d'autrui, ou le déplaifir de fa profpérité, cause l'envie qui nous porte à la médisance & à la calomnie; & il n'y a guères de faux témoins qui ne foient gagnés par argent. Ce qui fait ordinairement attenter fur la vie du prochain, c'est que nous voulons avoir fon bien ou ôter un obftacle à notre plaifir ou à notre gloire. Les mêmes raifons portent à méprifer le pere & la mere, & quelquefois à les hair ou à fouhaiter leur mort. C'est le défir du gain qui fait travailler le dimanche; & c'eft l'amour du plaifir qui empêche de l'employer faintement. C'est l'intérêt qui fait faire les faux fermens. Enfin, ce ne font que les paffions déréglées qui détournent du fervice de Dieu & qui éteignent la charité. Ainfi, ôtant de notre cœur les défirs que condamnent les deux derniers commandemens, nous nous mettons en état de pratiquer facilement tous les autres. Cr, nous ne défirons point les chofes impoffibles; & nous devons compter pour impoffible, tout ce qui eft contraire à la volonté de Dieu, quoique nous ayons la liberté de le faire, parcequ'il eft impoffible au moins d'éviter enfuite fa vengeance. Mais le meilleur moyen pour éviter le péché, eft de tendre, autant qu'il nous eft poffible, à acquérir les vertus & la perfection chrétienne. Soyez parfaits, dit Jefus-Chrift, Matt. v. 48. comme votre pere célefte eft parfait. Ce n'est

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