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ce qu'on vendait dans le temple était des bœufs, des brebis, des colombes, toutes choses qui servaient aux sacrifices, et néanmoins Jésus chasse tout. Non que ces ventes fussent mauvaises, mais parce que ce n'était pas le lieu de les faire. Que ferait-il des discours, des irrévérences et de tant de choses infâmes qu'on fait dans le temple? Remarquez encore qu'il parle en particulier à ceux qui vendent des colombes. Ce que les saints ont entendu des simoniaques qui vendent le Saint-Esprit et ses grâces, qui entrent par d'indignes commerces dans les emplois ecclésiastiques et spirituels, et qui, en quelque façon que ce soit, négocient pour avoir les voix de ceux qui les donnent Otez tout cela, dit le Sauveur. (BOSSUET.)

12. Celui qui me méprise et ne reçoit pas ma parole, il a pour juge la parole même que je vous ai dite; c'est elle qui le jugera au dernier jour.- Il est dit ici que la parole jugera, comme nous disons quelquefois que la loi condamne. On entend bien que ce n'est pas elle qui prononce la sentence; mais elle la dicte en quelque façon, en déclarant qu'une telle action est digne, ou sera punie de telle peine. Ainsi ce mot du Sauveur, Ma parole le jugera, bien loin d'exclure la personne du juge, la suppose au contraire, puisqu'il ne saurait y avoir de jugement, s'il n'y a, en outre de la loi, quelqu'un qui l'applique à telle action, à telle personne. Cetle parole qui jugera les Juifs incrédules, c'est la prédication de Jésus-Christ, en tant qu'elle était accompagnée de miracles qui en confirmaient la vérité. Ces miracles, qui prouvaient qu'elle venait de Dieu, prouveront également que ceux qui l'auront rejetée auront résisté à Dieu même. Cette même parole jugera encore ceux qui auront eu la foi, mais qui auront péché contre les préceptes moraux. Les voluptueux seront jugés par celle-ci : « Celui qui aura regardé une femme avec concupiscence a déjà commis l'adultère dans son cœur » ; et les vindicatifs par cette autre : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour ceux qui vous persécutent. » On opposera aux avares cette courte et énergique sentence: « Vous ne pouvez pas servir Dieu et l'argent ; » s'ils ont manqué de charité envers les pauvres, on leur ajoutera: « Le bien que vous n'avez pas fait au moindre de mes frères, c'est à moi que vous avez manqué de le faire. » On confondra les ambitieux par ce mot: « Si vous ne devenez comme de petits enfants, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux; » et ceux qui se laissent emporter aux injures graves, on leur répétera celui-ci : « Si quelqu'un appelle son frère insensé, il sera digne de la Géhenne du feu. » Que chacun se juge

donc dès à présent sur ces paroles, car les cieux et la terre passeront; mais ces paroles ne passeront point.

(DE LIGNY.)

16. Bien qu'il eût fait tant de miracles devant eux, ils ne croyaient point en lui. Lorsqu'une ame est ingrate, corrompue, et possédée par la passion de l'envie, il n'y a point de miracle qui puisse la guérir: comme au contraire lorsqu'elle est simple et reconnaissante, elle a peu besoin de miracles pour se rendre à Dieu. Ne demandez donc pas ici pourquoi les Juifs n'ont pas cru; mais plutôt considérez si Dieu n'a pas fait tout ce qui était nécessaire pour les ramener à croire. Car c'est ce qu'il dit souvent par son prophète, comme pour se consoler de la peine qu'il éprouvait en voyant ce peuple endurci s'obstiner à périr sous les coups d'une justice d'autant plus inexorable qu'elle a été plus longtemps provoquée; comme pour justifier sa bonté et sa providence des châtiments terribles qu'il allait infliger. Qu'ai-je dû faire pour ma vigne, s'écrie-t-il avec douleur, qu'ai-je dû faire et que je n'aie point fait? C'est là uniquement ce que nous devons ici considérer, et bientôt nous dirons nous-mêmes, avec le Sauveur du monde: Oui, si tous les miracles qui ont été opérés dans la Judée cussent été faits dans Sodome et dans Gomorrhe, ces villes malheureuses eussent fait pénitence et subsisteraient encore. (SAINT JEAN CHRYSOSTÔME.)

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19. Isaïe dit ces choses, lorsqu'il vit la gloire de Jésus-Christ, el qu'il parla de lui. Voici la vision d'Isaïe, à laquelle saint Jean fait ici allusion: <«< Dans l'année de la mort d'Osias, » nous dit le prophète, « je vis le Seigneur assis sur un trône élevé et sublime; les richesses qui étaient au-dessous de son trône remplissaient le temple. Debout près de lui étaient des séraphins; ils avaient chacun six ailes, deux avec lesquelles ils voilaient leur face, deux dont ils recouvraient leurs pieds, deux qui leur servaient pour voler. Et ils criaient l'un à l'autre, et disaient Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu des armées; toute la terre est pleine de sa gloire. A la voix de chacun d'eux, les portes el le seuil du temple furent ébranlés, et le temple fut rempli de fumée. Et j'ai dit: Malheur à moi, à cause de mon silence! mes lèvres sont impures, j'habite au milieu d'un peuple souillé, et j'ai vu de mes yeux le Roi suprême, le Seigneur des armées. Et l'un des séraphins vola vers moi; dans sa main était un charbon ardent qu'il avait pris à l'autel avec un instrument de fer. Et il en toucha ma bouche, et il dit: Voici que ce charbon a touché tes lèvres, ton iniquité disparaîtra, ton péché sera expié. Et j'entendis la voix du Seigneur, disant : Qui enverrai-je? qui ira pour nous? Et j'ai dit: Me voici, envoyez-moi. » (DANIEL, VI.)

20-21. Cependant plusieurs, même d'entre les chefs, crurent en lui; mais... ils ne faisaient rien paraître... mettant les considérations humaines avant la gloire d'être à Dieu. User de ces timides ménagements avec le monde, c'est n'être pas encore chrétien. Je sais qu'il est des bienséances inévitables, que la piété la plus attentive ne peut refuser aux usages; que la charité est prudente et prend différentes formes; qu'il faut savoir quelquefois être faible avec les faibles, et qu'il y a souvent de la vertu et du mérite à savoir être à propos, pour ainsi dire, moins vertueux et moins parfait. Mais je dis que tout ménagement qui ne tend qu'à persuader au monde que nous approuvons encore ses abus et ses maximes, et qu'à nous mettre à couvert de la réputation de serviteurs de Jésus-Christ, comme d'un titre de honte et d'infamie, et une dissimulation criminelle, injurieuse à la majesté de la religion, et moins digne d'excuse que le dérèglement ouvert et déclaré. Quoi! vous ne reconnaîtricz Jésus-Christ pour votre Dieu qu'en cachette! Vous affecteriez de le méconnaître devant les hommes ! Il ne serait plus que votre Divinité secrète, tandis que le monde aurait vos hommages et votre culte public et déclaré ! O homme! le Dieu du ciel et de la terre ne serait donc plus qu'un Dieu domestique; et, le confondant avec les idoles renfermées autrefois dans le foyer et dans l'enceinte de chaque famille, vous vous contenteriez, comme Rachel, de le cacher dans votre tente, et de l'adorer à l'insu de vos frères? Quoi! vous auriez honte d'être l'objet de la clémence et de la bonté divine! En outre, pourquoi dissimuler lâchement ce que vous êtes? Une âme née avec quelque élévation sait-elle ainsi se contrefaire? Si vous êtes ami de Jésus-Christ, pourquoi vous en cachez-vous? Quand même nous vivrions encore dans ces siècles infortunés où on le regardait comme un séducteur, et où les rois et les magistrats étaient soulevés contre lui et contre son culte, il serait si beau d'avoir le courage de se déclarer pour un ami persécuté et abandonné! et ici, où vous ne risquez rien, vous feignez de n'être point à lui ! (MASSILLON.)

24. Et les Princes des prêtres avec les Scribes et les chefs du peuple cherchaient à le faire mourir, car ils le craignaient. - Qu'avait fait le Sauveur pour encourir cette haine si acharnée? Il avait rendu la vue aux aveugles, l'ouïe aux sourds, la santé aux malades; il avait passé en faisant le bien, en répandant sans cesse autour de lui la lumière et la consolation; et ce jour-là encore, il venait de rétablir le respect pour le temple. Mais, en même temps qu'il rassemblait les

brebis dispersées de la maison d'lsraël, il dévoilait l'orgueil et l'hypocrisie de ceux qui s'en étaient constitués les pasteurs; il démasquait leurs fourberies; il ruinait leur autorité et leur fortune. Que fallait-il davantage? N'a-t-on pas vu de tout temps, et ne voyons-nous pas encore, dans les différents camps de l'hérésie, la même haine contre les pontifes de Rome, et quelquefois contre leurs collaborateurs? Ils font le bien, eux aussi; ils arrêtent, autant qu'il leur est possible, les progrès du mal; les méchants les craignent: de là cette haine et cette guerre. (B.)

ÉLÉVATION.

Vous seul, Seigneur, connaissez le moment où seront demandés à notre âme les fruits qui doivent apaiser votre faim : nous n'en saurions douter, vous avez faim de notre salut; c'est pourquoi vous voulez qu'incertains de l'heure où se fera la récolte, nous ne nous contentions pas de donner ce riche feuillage qui peut bien tromper l'œil de l'homme, mais que notre âme ait une abondante réserve des bonnes œuvres sans lesquelles nous ne devons attendre de vous que de terribles malédictions. Ne comprendrons-nous donc jamais nos seuls, nos véritables intérêts? Serons-nous toujours indifférents à un amour si persévérant et si désintéressé? Dieu n'a pas besoin de nous; c'est notre bonheur seul qu'il a en vue quand il nous presse de travailler pour l'éternité, de veiller et de prier sans cesse, puisque nous ne savons ni le jour ni l'heure de sa venue. Ouvrez nos yeux, bon Sauveur; que nos cœurs si faciles à émouvoir quand la voix de l'affection s'adresse à eux, comprennent enfin qu'aucun dévouement de la terre, quelque complet qu'on le suppose, ne saurait égaler celui qui vous a fait naître, vivre et mourir pour nous. Aujourd'hui que nous entendons votre parole, nous n'endurcirons plus nos cœurs, nous vous aimerons comme vous nous aimez, et nous travaillerons avec zèle et promptitude à réparer la perte d'un temps précieux que nous n'avons pas su employer à vous connaître et à vous aimer.

CHAPITRE LXXXVI.

9-21. Jésus revient

1-8. Figuier desséché, pouvoir de la foi et de la prière accompagnée de charité. au Temple, baptême de Jean, parabole des deux fils indociles (mardi saint, quatrième année de la vie publique du Sauveur).

MATH., XXI, 18-32; MARC, XI, 20-33; Luc, XX, 1-8.

Et cùm manè transirent, viderunt⚫ discipuli b ficum aridam factam à radicibus. (E)⚫ mirati sunt, dicentes : quomodò continuò aruit!

bEt recordatus Petrus, dixit ei: Rabbi, eccè

1. Et le matin qui suivit, les disciples, en passant, virent le figuier desséché jusque dans ses racines; et ils se disaient avec étonnement: Comme il a séché vite!

2. Et Pierre, se souvenant de la parole ficus, cui maledixisti, de Jésus, lui dit : Maître, voilà que le figuier que vous avez maudit, est mort.

aruit.

Et respondens Jesus ait illis: Habete fidem Dei.

Amen dico vob's, si habueritis fidem, et non hæsitaveritis, non solùm de ficulnea facietis; sed et si monti hnic dixe ritis: Tolle, et jacta te in mare, fiet.

Amen dico veris, quia quicumque dixerit huic monti: Tol'ere, et mittere in mare; et non hæsitaverit in corde suo, sed crediderit quia quodcumque dixerit, fiat, fiet ei.

3. Et Jésus leur dit: Ayez foi en Dieu.

4. Je vous le dis en vérité, si vous aviez assez de foi pour ne pas hésiter, non-seulement vous feriez ce que j'ai fait à l'égard de ce figuier, mais vous diriez à cette montagne, Enlève-toi et jette-toi dans la mer, qu'il en serait ainsi 2.

5. Oui, si quelqu'un dit à cette montagne, Enlève-toi, et va te jeter dans la mer 3, et qu'il n'hésite point dans son cœur, mais croie qu'il lui suffit de commander pour que la chose se fasse, elle se fera.

▲ † 1. C'est-à-dire, trois jours avant la Passion du Sauveur.

24. C'est une figure que le Fils de Dieu emploie pour graver plus profondément dans l'esprit de ses disciples cette vérité, qu'avec la foi on vient à bout des choses les plus difficiles en apparence.

ý 5. De l'endroit où était alors Jésus on devait apercevoir la mer Morte.

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