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acquis, soyons fidèles aux devoirs de notre profession, ne reculons point en arrière contre le précepte de l'Évangile', ne cherchons point à nous relâcher et à tout nous perdre. (Bossuet.)

10. Par quelle puissance faites-vous ces choses, et qui vous en a donné le pouvoir? Ce n'est pas à Jésus-Christ, c'est aux choses elles-mêmes à répondre. Qu'ils descendent dans le fond de leur conscience, ces Juifs aveugles; qu'ils interrogent les forces de la nature: elles leur diront si les œuvres du Sauveur sont au pouvoir de l'humanité; si plutôt elles ne sont pas exclusivement l'œuvre du Dieu tout-puissant. Qu'ils aillent jusqu'aux bornes du possible, qu'ils épuisent et les expériences et les raisonnements. Qui a le pouvoir de ressusciter les morts, l'homme ou Dieu seul? Qui est capable de guérir les lépreux, de commander d'une simple parole aux maladies de s'éloigner, de repousser par le seul acte de sa volonté toutes les infirmités de l'âme et du corps? Est-il Dieu, n'est-il qu'un homme, celui qui, avec un peu de boue, rend la vue à un aveugle-né? Les faits parlent; pourquoi ne pas s'en tenir à leur pure déposition? Pourquoi aller audacieusement interroger l'auteur du miracle, pour savoir de lui de quel droit il l'opère ? Jésus-Christ ne répond que par le silence: les Juifs ne méritaient pas d'autre explication. (SAINT JEAN-CHRYSOSTOME.)

12. Le baptême de Jean, d'où était-il? Du ciel ou des hommes ?Est-il possible que le Sauveur doive tirer son témoignage de saint Jean-Baptiste qui n'était que son précurseur; qui n'était pas l'époux, mais l'ami de l'époux, comme il l'avait dit; qui n'était pas le Christ, mais celui qui lui devait préparer la voie ; qui pour tout dire, en un mot, n'était pas digne de lui délier les cordons de ses souliers ? Voilà ce qu'était Jean-Baptiste, et néanmoins Jésus-Christ se sert de son témoignage pour convaincre ceux qui ne voulaient pas croire au Christ lui-même. Cependant Jean n'avait fait aucun miracle, et Jésus en avait rempli toute la Judée ; Jean parlait comme le serviteur, et Jésus-Christ comme le Fils, disait ce qu'il avait vu dans le sein du Père. Telle est la faiblesse de nos yeux, dit saint Augustin: un flambeau nous accommode mieux que le soleil. Nous cherchons le soleil avec un flambeau. Jésus l'entendait bien aussi, et il avait dit : J'ai un témoignage plus grand que celui de Jean. Quand donc il se servait de ce témoignage, c'est qu'il approchait aux yeux malades une lumière plus proportionnée à leur faiblesse, et c'est ce qu'il fait encore en cette occasion. Profond aveuglement des homines, plus disposés à croire saint Jean que

Jésus-Christ même! Dieu! qui ne tremblerait? Mais qui ne vous demanderait en tremblant, d'où vient dans le cœur des Juifs une si étrange disposition? Ne se trouvera-t-il pas quelque chose de semblable en nous? Nous le pourrons chercher une autre fois : nous frapperons à la porte pour entendre ce secret, et peut-être nous sera-t-elle ouverte. Continuons cependant nos réflexions. (BOSSUET.)

13. Mais ils pensèrent en eux-mêmes, si nous répondons qu'il était du ciel, il nous dira: Pourquoi donc n'y avez-vous pas cru? S'ils avaient avoué la mission céleste de saint Jean-Baptiste, il leur aurait fermé la bouche par son témoignage. Que dire donc? Que le baptême de Jean ne venait pas de Dieu? Ils n'osaient le dire devant le peuple qui le tenait pour un prophète. Nous n'en savons rien, disent-ils. Et moi, ditil, je ne vous dis pas en quelle puissance j'agis. Gens de mauvaise foi, qui n'osez ni avouer ni nier la mission de saint Jean-Baptiste, vous ne méritez pas que je vous réponde. Avouez, niez, pensez ce que vous voudrez, vous êtes confondus, et il n'y a de parti pour vous que de vous taire. Il y en aurait un autre. Ce serait de croire en Jésus : mais vous ne pouvez, pour les raisons et à la manière que nous verrons en son lieu. Vous avez envoyé à Jean, et il a rendu témoignage à la vérité. Pour moi je ne reçois pas mon témoignage de l'homme, mais je parle ainsi (je vous allègue Jean à qui vous croyez), afin que vous soyez sauvé. Jean était un flambeau ardent et luisant, et vous avez voulu vous réjouir pour un peu de temps à sa lumière. Pour moi j'ai un témoignage plus grand que celui de Jean : les œuvres que mon Père m'a donné pouvoir de faire rendent assez témoignage que c'est lui qui m'a envoyé. C'est ainsi que Jésus-Christ se servait du témoignage de saint Jean-Baptiste, afin, dit-il, que vous soyez sauvés et pour vous convaincre par vous-mêmes. Voilà donc l'orgueil et l'hypocrisie de ces interrogateurs de mauvaise foi confondus. Ils ne méritaient pas que le Sauveur leur dît davantage ce qu'il leur avait dit cent fois, et que cent fois ils n'avaient pas voulu croire. Que sera-ce au dernier jour, lorsque la vérité manifestée dans toute sa force nous confondra éternellement devant tout l'univers? Où irons-nous, hélas? où nous cacherons-nous? Mais voyons comme Jésus confond les docteurs et les Pharisiens. (BOSSUET.)

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17. Un homme avait deux fils; s'adressant à l'aîné, il lui dit : Mon fils, allez aujourd'hui travailler à ma vigne. Cette parabole va convaincre les pontifes et les sénateurs d'une hypocrisie manifeste. Le Fils de Dieu nous y marque deux caractères dans ces deux fils : l'un

est celui d'une désobéissance manifeste; l'autre est celui d'une obéissance imparfaite, et plus apparente que solide, et il se trouve que ce dernier est le plus mauvais. Il y a des gens qui promettent tout, ou par faiblesse, parce qu'ils n'ont pas la hardiesse de résister en face, ou par légèreté, ou par tromperie. Ils n'osent vous dire qu'ils ne veulent pas se corriger; et quoique peu résolus à vous obéir, ils vous disent comme dans la parabole : Seigneur je m'en vais. Ils vous appellent Seigneur; ils ont un certain respect; ils sont en apparence prompts à obéir; ils ne disent pas, j'irai, mais je vais ; vous diriez qu'il va marcher, et que tout est fait. Cependant il n'obéit pas; il ne bouge pas de sa place; ou parce qu'il vous veut tromper; ou ce qui est pis, parce qu'il se trompe lui-même : il se croit plus de volonté et de courage qu'il n'en a. Il paraît que ce caractère est manifestement le plus mauvais ; ces faibles résolutions, et cet extérieur de piété fait qu'on s'imagine avoir de la religion; et on n'a point cette horreur de soi-même. et de son état qui fait qu'on le change; mais pour celui qui tranche le mot: Je ne veux pas; comme il résiste à Dieu par une manifeste désobéissance, et ne peut se flatter d'aucun bien; à la fin il a honte de. soi-même, et réveillé par son propre excès, il s'en repent. Touché de repentir il s'en alla à son devoir. Il obéit. Notre-Seigneur fait voir aux. pontifes que ce dernier caractère est le leur. Nourris dans la piété, ils ne parlent que de Dieu, que de religion, que de l'obéissance qu'on doit. à la loi ; et parce qu'ils en parlent souvent, ils se croient assez gens de bien, et ne se corrigent jamais. C'est pourquoi Jésus-Christ leur parle de cette manière terrible : Les publicains et les femmes de mauvaise vie arriveront plutôt que vous dans le royaume de Dieu. Parce que confus de leurs excès, ils en ont fait pénitence à la voix de Jean; et vous qui, par vos lumières et la dignité de vos charges, deviez donner l'exemple aux autres, non-seulement vous n'êtes pas venus les premiers, comme on avait raison de l'attendre, mais vous n'avez pas même su profiter de l'exemple des autres.. Plus endurcis dans le crime que les publicains et les femmes de mauvaise vie, vous les avez vus le commettre sans en être touchés. Double enfoncement dans le crime: premier, ne faire pas mieux que de telles gens, et ne leur point donner l'exemple; second, ne profiter pas même du leur. Jean est venu dans la voie de la justice, sans autre marque de sa mission que sa vie sainte et austère, et néanmoins les publicains et les femmes de mauvaise vie en ont été touchés. Et vous qui avez vu Jésus-Christ, qui non-seulement marchait comme Jean dans la voie de justice, puisqu'il a dit, non dans le désert, mais dans le milieu du monde : Qui me reprendra de péché?

Mais qui a fait de si grands miracles, qu'il y avait de quoi émouvoir les plus insensibles. Vous, dis-je, qui l'avez vu, et qui avez ouï sa voix, vous n'avez pas cru; quelle sera votre honte, et quel sera votre supplice? Vous, ô prêtres, religieux et religieuses, dont la vie ne répond pas à votre état, et vous tous, ô gens de bien en apparence, dévots de profession, appliquez-vous cette parabole. Ne vous lasserez-vous jamais de n'avoir qu'un vain titre de piété, à l'exemple des Pharisiens, des pontifes, et des sénateurs des Juifs? Rougissez, rougissez une bonne fois, humiliez-vous, confessez vos faiblesses, et les corrigez. C'est à vous que Jésus parle dans ce discours. (Bossuet.)

ÉLÉVATION.

Rien n'ennoblit plus l'homme que la foi : vous le savez bien, Seigneur, et c'est pour cela que vous reprochez si souvent à vos disciples leur hésitation et leur étonnement à la vue de vos prodiges. Est-il donc si difficile à la créature qui vit au milieu des merveilles de l'univers, merveille elle-même plus incompréhensible que tout ce qui l'entoure, de courber sa raison bornée devant la parole de celui qui est toute raison, tout intelligence et toute sagesse? Si rien n'est impossible à l'homme qui croit, rien non plus ne saurait l'élever davantage : cette adhésion ferme et entière de son esprit aux enseignements de la vérité elle-même, n'admet plus la variabilité ni l'incertitude, et lui donne quelque ressemblance avec la divinité, puisqu'il fait de la pensée de Dieu sa propre pensée, et que la foi lui communique des lumières qui le font pénétrer jusque dans les profondeurs des cieux. O flambeau mystérieux de la foi, sois mon appui, comme tu fais le charme de ma vie ! Avec toi, mon âme s'agrandit, elle s'élève et se rapproche de Dieu qu'elle aime d'autant plus qu'elle le connaît mieux. Mon Sauveur, conservez-nous la foi, augmentez-la en nous, et faites que nous n'oubliions jamais que pour être méritoire à vos yeux, elle doit être accompagnée des œuvres sans lesquelles ce n'est qu'une foi morte, inutile à notre salut.

19-32.

1-18. Jésus continue de parler au peuple dans le Temple, parabole des mauvais vignerons. Parabole d'un roi ordonnant un festin pour les noces de son fils (mardi saint, quatrième année de la vie publique du Sauveur).

MATH., XXI, 33-46, et XXII, 1-14; MARC, XII, 1-12; Luc, XX, 9-19.

Et cœpit dicere ad plebem: Aliam parabelam audite: Homo erat paterfamilias, qui plantavit vineam, et sepem circumdedit ei, et fodit in eâ torcular, el ædificavit turrim, et locavit eam agricolis, et peregrè profectus est.

bEt misit ad agricolas in tempore servum, ut ab agricolis acciperet de fructu vineæ.

Qui apprehensum eum ceciderunt, et dimiserunt vacuum.

Et iterùm misit ad illos alium servum

et

il'um in capite vulnera

verunt, et contumeliis

e

affecerunt et ejecerunt.

b El misit ad illos ter

tinm bservum; qui et illum vulnerantes ejecerunt bel occiderunt.

Iterùm misit alios servos plures prioribus,

et fecerunt illis similiter

1. Puis, Jésus dit à la foule : Écoutez une autre parabole. Un père de famille planta une vigne, l'entoura d'une haie, y creusa un pressoir et y bâtit une tour; et l'ayant louée à des vignerons, il s'en alla pour longtemps dans un pays éloigné.

2. Et au temps de la vendange il envoya aux vignerons un de ses serviteurs, pour recevoir d'eux le revenu de la vigne. 3. Les vignerons, ayant pris ce serviteur, le frappèrent, et le renvoyèrent, sans rien donner de ce qu'ils devaient.

4. Il leur envoya encore un autre serviteur, et ils le blessèrent à la tête, le chargèrent d'outrages, et le renvoyèrent égale

ment sans rien donner.

5. Il en envoya encore un troisième. Ils le blessèrent, le jetèrent dehors et le tuèrent.

6. Il envoya encore d'autres serviteurs en plus grand nombre que les premiers; et

11. C'est-à-dire une sorte de réservoir cimenté avec soin, où l'on foulait le raisin, et où le vin demeurait jusqu'à ce qu'on le mît dans des outres. La tour du gardien s'élevait ordinairement sur ce réservoir, auquel elle servait d'abri.

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