Page images
PDF
EPUB
[graphic][subsumed][subsumed][subsumed]

&

Madame,

A Sa Majesté

Reine des Français.

Les simples fragments de saint Cyprien, conte-. nus dans le quatrième volume de la Bibliothèque choisie des Pères de l'Eglise, avaient suffi à Votre Majesté pour lui inspirer la plus vive admiration et une estime toute particulière en faveur du saint et éloquent évêque de Carthage. Mais quelques traductions partielles étaient loin de satisfaire à l'ardente curiosité de connaître des écrits excellents, auxquels tous les siècles chrétiens ont décerné à l'envi les plus

ma

gnifiques éloges. Depuis longtemps Votre Majisté, Madame, désirait que la totalité des œuvres de saint Cyprien, publice en français, en rendit la connais

plus complète et plus populaire. Le vœu de Votre Majesté a été pour moi un ordre auquel je suis heureux d'obéir : il me répond des suffrages de tous les cœurs religieux. En me permettant de faire paraître cel ouvrage sous ses auspices, Votre Majesté m'a interdit le droit de parler d'un autre sentiment de celui de ma reconnaissance. Ce qu 'il ne m'est pas permis de proclamer ici sera supplée abondamment par tous les hommages de la vénération et de l'amour universel.

que

Je suis avec respect,

Madame,

De Votre Majesté,

Le très-humble et très-obéissant serviteur et sujet,

M. N. S. GUILLON,

ÉVÊQUE DE MAROC,

PRÉFACE.

Au moment où nous fimes connaître le dessein de publier notre Bibliothèque choisie des Pères grecs et latins, les circonstances étaient loin d'être favorables à la propagation d'un ouvrage de ce genre.. Quels lecteurs lui promettre au sein même de la famille à qui il semblait plus particulièrement destiné ? Le temps n'était plus où tous les ordres de citoyens s'empressaient de seconder, par les efforts et les sacrifices d'une généreuse émulation, chacune des entreprises marquées du sceau de la religion; où les noms vénérés des Pères de l'Eglise rappelaient à tous les souvenirs des productions dont le génie humain s'enorgueillissait; où un clergé nombreux et florissant, soutenant avec orgueil l'héritage qui lui fut légué par les Bossuet, les Fénelon, les Vincent de

Paul, recueillait en tous lieux les hommages que réclame l'union des vertus et des lumières. Tout avait disparu, englouti dans un vaste naufrage qui ne laissait apercevoir que des débris épars. Les monuments religieux ne se montraient aux regards que couverts encore d'un linceul funèbre. Dans le sanctuaire, des vides immenses, et dont on ne s'effrayait pas. Il est trop vrai : une léthargique indifférence s'était répan-. due dans tous les rangs de la société, et glaçait jusqu'à l'espérance elle-même. Les vétérans du sacerdoce, rentrés, après une si longue absence, au foyer domestique, y cherchaient en vain les nobles aliments. de leurs anciennes études; la patrie elle-même semblait être devenue pour eux une nouvelle terre d'exil. Le jeune sacerdoce qu'avait recruté la seule ambition du martyre, imbu de préventions que trop de faits récents légitimaient, paraissait ne reconnaître d'autres devoirs que celui de la piété et du zèle dont il donnait en tous. lieux les plus admirables exemples. Consacré tout entier à la cause des amis de la religion, il recherchait peu les moyens de la rendre respectable à ses ennemis.

Toutefois c'en était assez pour exciter les alarmes de l'incrédulité. Tandis que la philosophie moderne, décréditée par ses propres excès, se parait de tous les masques pour ressaisir le sceptre qu'elle avait traîné dans le sang, le sentiment religieux commençait à renaître au fond des cœurs. Réveillée de son engourdissement par les œuvres vraiment extraordinaires que la Providence seule avait opérées, la France entière attestait qu'il n'était pas au pouvoir des hommes qu'elle cessât d'être chrétienne et catholique.

« PreviousContinue »