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y

I524.

Ib. 1. cxxix.

12. I.

AN. 1524.

dinal Laurent Campege, recommandable par fa vertu, fa la diete de Nu fcience & fa capacité dans les affaires. Le pape lui donna remberg de un pouvoir fans reftriction, qu'il réduifit en même prefque à rien, en lui défendant de rien accorder qui fût contraire aux ufages de la cour de Rome. Il lui recommanda de se conduire comme s'il ignoroit absolument les propofitions faites par la derniere diete à Adrien VI. fon prédéceffeur, & les réponses de ce pape; & comme s'il ne se fût rien passé en Allemagne au fujet de Luther, depuis qu'il avoit été condamné par Léon X. Il le chargea d'un bref pour l'électeur de Saxe, dans lequel il exhortoit ce prince à concourir à la paix de l'Allemagne & de l'Eglife. Campege arriva à Nuremberg au mois de Février, & il entra accompagné de tous les princes de l'empire qui étoient allés au-devant de lui; mais fans cérémonie ni aucune marque de fa dignité, parce que l'on craignoit qu'il ne fût infulté par le peuple qui étoit prefque tout Luthérien. C'étoit l'archiduc Ferdinand qui préfidoit à la diéte en l'absence de l'empereur fon frere. Le légat avant d'y paroître, crut devoir prendre quelque temps pour étudier dans des vifites & des conférences particulieres le caractère de ceux qui la compofoient. Comme l'électeur de Saxe étoit déja parti de Nuremberg, le légat lui envoya le bref du pape, & l'accompagna d'une lettre dans laquelle, après avoir témoigné le regret qu'il avoit de ne pouvoir s'entretenir avec lui, il ajoutoit que l'on faifoit courir le bruit qu'il favorifoit les nouvelles héréfies; mais que ni lui ni le pape ne pouvoient le croire, & que l'on étoit perfuadé qu'il ne voudroit pas dégénérer de la piété de fes ancêtres, qui avoient toujours été très-attachés à la foi de l'Eglife.

La diete ayant donné audience au légat, il y fit un assez long difcours, dans lequel il dit en fubftance, qu'il étoit étonnant que tant de princes & de députés fi prudens & fi fages, viffent tranquillement abolir la religion qu'ils avoient reçue de leurs de leurs peres aufsi-bien que leurs autres héritages, fans s'appercevoir que ces changemens qui com Tome VIII.

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XLVIII. Difcours du

légat. Réponde de l'affemblée.

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Ibid. n. S..

fuiv.

XLIX.

Le legat veut faire une efpéce de réforme. bid. n. 8.

& fury.

mençoient par le fpirituel, finiroient un jour par le temporel, parce qu'ils ne tendoient qu'à la révolte contre les fouverains & les magiftrats : que le pape n'avoit pu voir l'Empire accablé de tant de maux, fans envoyer un légat pour examiner de concert avec les fouverains d'Allemagne, les remedes que l'on pourroit y apporter. Après avoir infifté fur l'état de la religion, il parla du progrès que faifoient les Turcs, & de la néceffité de fecourir la Hongrie prête à tomber entre leurs mains. Les princes, après avoir remercié le légat des bonnes difpofitions du pape, répondirent qu'ils n'ignoroient pas les malheurs dont ils étoient menacés ; que c'étoit pour les prévenir qu'ils avoient envoyé l'année précédente un mémoire pour être préfenté au pape Adrien, & que Clément VII. devoit l'avoir entre les mains; que fi fon légat apportoit une réponse à ce mémoire, ils le prioient de leur en faire part, afin que l'on pût prendre quelque réfolution fur ce qu'il y auroit à faire. A l'égard de la guerre contre les Turcs, ils dirent qu'elle leur caufoit beaucoup d'inquiétude; mais qu'elle ne regardoit pas feulement l'Empire, & que tous les princes chrétiens y étoient intéreflés. On préfenta en même temps au légat les cent griefs de la nation, afin qu'il les examinât.

Le légat après avoir jetté les ieux deffus affez légerement, répliqua qu'il n'avoit point été informé que les princes euffent propofé ces moyens pour appaiser les disputes fur la religion, & qu'ils euffent été envoyés au fouverain pontife & aux cardinaux : qu'il favoit feulement qu'ils en avoient vu un exemplaire, qui étoit auffi tombé entre ses mains, & qui avoit été envoyé avec deux autres à quelques particuliers de Rome; mais que ni le pape ni le facré collége, n'avoient jamais pu fe perfuader que les princes de la diete euffent fait dreffer ces articles, & qu'ils les regardoient plutôt comme l'ouvrage de quelque ennemi fecret de la cour de Rome : qu'à la vérité il n'avoit point de commiffion particuliere au fujet de ce mémoire, mais qu'il avoit néanmoins un pouvoir fuffifant pour en traiter. Il ajouta que parmi ces griefs,il y en avoit qui dérogeoient à la

puiffance du pape & qui fentoient l'héréfie, & que pour ceux-là, il ne lui étoit pas poffible d'en parler. Il finit fa réplique en exhortant les princes de l'Empire à fournir de l'argent pour faire la guerre aux Turcs, & à fecourir promptement la Hongrie qui étoit fur le point de tomber entre les mains de ces infideles. Les princes nommerent des députés pour conférer avec le légat; mais ces conférences n'eurent pas un grand fuccès. On ne parla point des abus de la cour de Rome, & tout fe réduifit à quelques réglemens pour le clergé d'Allemagne. Campege les préfenta à la diete, prétendant qu'ils étoient fuffifans pour rétablir la pureté de la religion dans l'Empire. Mais les princes jugerent qu'ils n'étoient propres qu'à entretenir le mal, & à augmenter de plus en plus la puiffance de la cour de Rome & l'autorité des évêques, au préjudice des princes féculiers. D'ailleurs tout le monde regardoit cette efpece de réforme comme un jeu de la cour Romaine, pour amusfer l'Allemagne & la rendre plus dépendante. Ainfi quelques inftances que le légat fit à la dicte pour lui faire agréer ces ftatuts, il ne put rien obtenir : & lui de fon côté, pour rendre la pareille, rejetta toutes les propofitions que les députés lui firent de la part des princes.

Le dix-huitieme d'Avril, qui fut le dernier jour de la diete, elle publia un décret, qui portoit que le pape, du confentement de l'empereur, convoqueroit au plutôt un concile libre en Allemagne, pour y terminer les difputes que la doctrine de Luther avoit fait naître fur plufieurs points de religion; qu'en attendant, on tiendroit à la faint Martin une nouvelle affemblée à Spire, où après l'examen d'habiles docteurs, on déclareroit ce qui doit être crû & pratiqué jusqu'à la tenue du concile; que cependant les magistrats auroient foin de faire prêcher l'évangile felon la doctrine & l'interprétation des théologiens approuvés par l'Eglife; qu'on fupprimeroit tous les libelles diffamatoires contre la cour de Rome, auffi-bien que les peintures & les images qui avoient été faites en dérifion du pape & des évêques; que l'on traiteroit à Spire des cent griefs propofés

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contre la cour de Rome & le clergé d'Allemagne, pour voir fi on pourroit y apporter quelque tempérament; enfin que pour obéir à l'empereur, on exhorteroit les princes à faire exécuter l'édit de Vormes, autant qu'il leur feroit poffible: Que par rapport à la guerre contre le Turc, on délibéreroit dans la prochaine diete fur les fecours que l'on pourroit donner au roi de Hongrie. Ce décrét fut hautement contredit par le légat, fur ce fondement, que ce n'étoit point aux féculiers à fe mêler des matieres de religion. Luther de fon côté publia un écrit contre ce déoret, pour montrer qu'il renfermoit des contradictions groffieres, & qu'une partie détruifoit l'autre.

X XII

Campege n'ayant pû faire approuver fes articles de rés formation par les princes de la diete de Nuremberg, engagea l'archiduc Ferdinand, les deux ducs de la maifon de Baviere, quelques évêques & plufieurs députés, à s'affembler avec lui dans une autre ville pour les y faire autorifer. Ils choifirent Ratisbonne pour le lieu de leur affemblée. Les réglemens du légat y furent unanimement approuvés, & on fit un décret qui en ordonnoit l'exécution. Ils étoient dreffés en forme de conftitutions fynodales, avec une préface dans laquelle le légat montroit combien il étoit néceffaire, , pour déraciner l'héréfie de Luther, de réformer la vie & les mœurs des eccléfiaftiques. Il ajoutoit qu'il avoit fait ces ftatuts de l'avis des princes & des prélats affemblés à Ratisbonne, pour être observés dans tous les cercles de l'empire. La publication de ces réglemens offenfa les princes & les évêques, qui n'y avoient pas voulu confentir dans la diéte. Ils trouvoient fort mauvais que ce cardinal eût prétendu avec fi peu de personnes faire une loi pour toute l'Allemagne, & qu'un fi petit nombre de princes & d'évêques s'attribuât le droit & l'autorité d'obliger toute la nation, malgré tous les autres membres de l'Empire. Ils firent voir de plus, que le légat dans fon ftatut ne s'était amusé

qu'à des bagatelles, & avoit paffé fous filence les points les
plus importans & qui avoient le plus de besoin d'être ré-
formés; que ce n'étoit pas le clergé inférieur qui faifoit le
plus fouffrir l'Allemagne, mais les évêques par leurs usur-
pations, & plus encore la cour de Rome par fes exactions
continuelles; que le légat
le légat ne touchoit pas plus à ces abus
intolérables, que fi les prélats euffent été auffi réguliers que
dans la primitive Eglife.

le

Dès que l'empereur eut vû en Espagne le décret de la diete de Nuremberg, il en fut très-irrité. Il craignoit que pape ne lui imputât les défagrémens que fon legat avoit eus à cette diete; & que pour s'en venger, il ne favorisât les François contre les Efpagnols en Italie, où les forces de ces deux nations étoient alors égales, & où par conféquent les François auroient été bien-tôt les maîtres, fi Clément VII. s'étoit mis de leur côté. Il écrivit donc une lettre aux princes d'Allemagne, dans laquelle il fe plaignoit vivement de ce qu'on avoit limité fon édit de Vormes, en réduifant la défense de lire & de garder les ouvrages de Luther, aux feuls libelles diffamatoires de cet héréfiarque. Il les reprenoit encore plus fortement de leur décret pour la tenue d'un concile général en Allemagne, comme s'ils euffent été en droit de faire fans lui un réglement de cette importance: ajoutant que fi la convocation d'un concile étoit jugée néceffaire, c'étoit à lui à en faire la demande au pape. Enfin il proteftoit qu'il ne consentiroit jamais à l'assemblée de Spire, & qu'il mettroit au ban 'de l'Empire quiconque s'y trouveroit ou en perfonne ou par procureur. En conféquence de cette lettre de CharlesQuint, il n'y eut point à Spire de diete générale. Il ne s'y trouva que quelques membres de l'Empire, qui ne prirent point de réfolutions particulieres. Ils convinrent feulement entr'eux que jufqu'à la tenue du concile, ils fe gouverneroient comme ils jugeroient à propos, fans toutefois qu'on pût fe plaindre de leur conduite. Ceux qui fe trouvoient à cette affemblée étoient prefque tous Luthériens.

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