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des articles en forme de profeffion de foi, qui contenoient
clairement & diftinctement ce qu'il falloit croire, & ce que
les prédicateurs devoient enseigner fur toutes les matieres
controverfées. Comme nous fommes obligés, eft-il dit dans
ce décret, à l'exemple de faint Paul, de confidérer les dan-
gers évidens qui menacent les Chrétiens, par la détestable
doctrine de quelques prédicateurs, qui ne rougiffent point
d'infpirer aux fideles par leurs difcours des erreurs perni-
cieufes : voulant remédier à un fi grand mal, autant qu'il
eft en nous, & fuivant les obligations de notre état, qui
nous engage
à maintenir la doctrine falutaire des faintes
écritures & de l'Eglife catholique; nous avons cru devoir
renfermer en abrégé fous certains titres quelques articles de
foi que tout Chrétien doit croire, afin qu'on connoiffe plus
facilement les opinions de chacun, & ce qu'il faut particu-
liérement prêcher au peuple dans le temps où nous fommes.
(Beau modele que donnent ici ces anciens docteurs de
Paris, pour
, pour les temps où il fe trouveroit dans l'Eglife des
prêtres qui enfeigneroient des erreurs foit dans leurs fer-
mons, foit ailleurs. Alors le devoir des théologiens eft d'éta-
blir clairement, fuivant la lumiere de l'écriture fainte & de
la tradition, les vérités qui font exposées à la contradiction,
que l'on voudroit anéantir; s'appliquer enfuite d'une ma-
niere particuliere à en inftruire les fideles, & les avertir fou-
vent de fe donner de garde de quiconque leur annonceroit
une doctrine différente, de quelque rang & dignité qu'il
pût être revêtu; fût-il même un ange du ciel.)

&

XXXV.

contraires aux nouvelles er

La faculté établit enfuite vingt-neuf articles, dont voici Articles de foi les principaux. Il faut croire fans aucun doute que le baptême eft néceffaire aux enfans pour être fauvés, & qu'il donne la grace du Saint-Efprit. L'homme a un libre arbitre, avec lequel il peut faire le bien & le mal. Les adultes coupables de péché mortel, ont befoin de la pénitence, qui confifte dans la contrition, dans la confeffion facramentelle qu'on doit faire à un prêtre, & dans la fatisfaction. Le pécheur n'eft pas justifié par la feule foi; les bonnes œuvres font néceffaires, & fans elles aucun adulte ne peut obté

reurs.

Ibid. n. 65.

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nir la vie éternelle. On doit croire fermement que le vrai corps de Jefus-Christ eft contenu dans le facrement de l'Euchariftie, le même qui eft né de la fainte Vierge, & qui a fouffert fur la croix. On doit croire avec la même foi, que dans la confécration il se fait une tranffubftantiation du pain dans le vrai Corps, & du vin dans le vrai Sang de JesusChrist. Le facrifice de la Mefle a été inftitué par Jesus Christ, & il eft utile aux vivans & aux morts. La communion fous les deux efpeces n'eft point néceffaire aux laïcs pour le safalut, & l'Eglise a fagement ordonné qu'on ne les communiât que fous une feule efpece. Jefus-Christ a donné aux prêtres ordonnés felon le rit de l'Eglife, la puiffance de confacrer fon vrai corps, & d'abfoudre des péchés dans le facrement de Pénitence. La Confirmation, le Mariage & l'Extrême-Onction, font de vrais facremens inftitués par Jefus-Chrift, qui conferent la grace du Saint-Efprit. C'est une chose très-agréable à Dieu, de prier les faints qui font dans le ciel. C'est une pratique louable de fléchir les genous dans la priere devant les images du Crucifix, de la fainte Vierge & des Saints. Il y a un purgatoire dans lequel les ames des fideles qui font morts font aidées par la priere, le jeûne, les aumônes, & d'autres bonnes œuvres, pour être plutôt délivrées de leurs peines. Chaque Chrétien eft obligé de croire qu'il y a une Eglise univerfelle, visible sur la terre, infaillible en ce qui regarde la foi & les mœurs, & à laquelle tous les fideles doivent obéir en ce qui regarde la foi & les mœurs. On doit croire plufieurs chofes qui ne font pas en termes exprès dans l'Ecriture, & que l'on fait par la tradition. Jesus Christ a donné immédiatement à l'Eglife la puiffance d'excommunier; elle eft de droit divin, & par conféquent on doit beaucoup craindre les cenfures eccléfiaftiques. Le concile général légitimement affemblé, représentant toute l'Eglife, ne peut fe tromper dans les décisions qui regardent la foi & les mœurs. Les Ordonnances de l'Eglife touchant le jeûne, l'abstinence, &c. obligent en confcience. On voit avec quelle précifion & quelle clarté cette favante faculté expofe dans ces articles ce qu'il falloit croire

touchant les points conteftés. Telle eft la vraie maniere d'inftruire les fideles dans les tems de troubles & de disputes. Et c'est celle aufi que ne manquent pas d'employer alors ceux qui défendent la doctrine de l'Eglife.

Paris. Nou

Peu de temps après, la même faculté renouvella fes cenfermeté du fures contre les principales erreurs des Luthériens. Ce fut Parlement de auffi par fon confeil, que le Parlement condamna au feu veau progrès en 1543 un grand nombre de livres hérétiques, & princidu Calvinim palement l'Institution chrétienne de Calvin, avec défenses à tous Libraires & Imprimeurs d'imprimer & de vendre de femblables livres, & à toutes perfonnes d'en avoir chez eux. Les autres livres condamnés au feu avec l'inftitution de Calvin, étoient entr'autres les Epigrammes de Dolet, les cinquante-deux Dimanches, compofés par le Févre d'Etaples, le Chevalier chrétien, les Heures de la compagnie des pénitens, les œuvres de Mélanchton, une Bible de Genève. Malgré le zèle de la faculté de théologie de Paris & la vigilance du parlement, les difciples de Calvin, quoique cachés, travailloient toujours à répandre leurs erreurs, & ils féduifoient un grand nombre de perfonnes. Ils commencerent en 1545 (y) à former à Paris une espece d'église, qui s'accrut avec le tems. Ils nommerent quelques-uns d'entr'eux à qui l'on pût s'adreffer, foit pour l'administration du baptême, foit pour les avis dont les partifans de la fecte auroient befoin. Celui qui fut choisi le premier, étoit un laïc de vingt-deux ans, nommé la Riviere. On dreffa quelques réglemens, on établit une espece de confiftoire, & l'on pourvut à la fûreté & au bon ordre, autant qu'on pouvoit le faire dans de fi foibles commencemens.

X V I.

XXXVII. Théodore de Béze s'attache Calvin.

Vers la fin de 1548, Calvin eut la fatisfaction de voir à Genève le fameux Théodore de Beze, qui a été un des plus Cont. de Fl. zèlés partisans de la nouvelle Réforme. Il naquit à Vezelai

tome

XXXVI.
Vigilance &

& fuiv.

AN. 1543.

AN. 1545.

1. cxlv. n. 110. & fuiv.

AN. 1548.

(y) [Le continuateur de M. Fleury différe cela jufqu'en 1555. tom. XXXI. I. clij, n. 62.1

>

en Bourgogne en 1519, d'une famille noble & fort riche. Un de fes oncles, Nicolas de Beze, confeiller au parlement de Paris, le fit venir auprès de lui & prit foin de fon éducation. Il l'envoya à l'âge de dix ans à Orléans, pour être inftruit par Wolmar, Allemand, qui avoit beaucoup de talens pour former la jeuneffe. Le jeune Beze y pafla fept ans, & fit de grands progrès dans les belles-lettres; mais il prit en même temps du goût pour la nouvelle doctrine, dont fon maître étoit infecté. Sa principale occupation étoit de lire les auteurs Grecs & Latins & de faire des vers. Il étoit fort aimé des gens de lettres, à caufe de son esprit & de fa politeffe. Après avoir fait fon droit à Orléans, & reçu le bonnet de Docteur à l'âge de vingt ans, il fuivit le penchant qu'il avoit pour la poefie, & compofa des pieces de vers latins, qui lui acquirent la qualité de bon poëte. Elles font écrites avec délicateffe ; mais il y en a de fi révoltantes par leur obfcénité, qu'elles feroient rougir un fage Païen. En 15 39 il vint à Paris, où fon oncle étoit mort depuis quelques années. Il fut quelque temps indécis fur le parti qu'il prendroit par rapport à la religion; mais fon efprit & fes amis le perdirent. Il renonça à la foi de ses peres; & en 1548. il fe retira à Genève auprès de Calvin, avec Jean Crifpin fon ami, le même qui a écrit le Martyrologe des Proteftans. L'année fuivante 1549. les habitans de Lauzane prierent Beze d'enseigner chez eux les lettres grecques; ce qu'il fit avec beaucoup de réputation pendant neuf ans. Ce fut alors qu'il travailla à la traduction en vers des Pleaumes de David, que Marot n'avoit pû achever. Il alloit à Genève pendant les vacances, pour y conférer avec Calvin, qui ne ceffoit de l'exhorter à confacrer fes talens au service de l'Eglife. On fait ce que fignifie un pareil langage dans la bouche de ce féducteur. Nous aurons occafion de parler encore plus d'une fois de Théodore de Beze. Cette même année Calvin eut à Zurich une conférence avec Bullinger qui avoit fuccédé à Zuingle. Après bien des difputes, dont l'euchariftie étoit l'objet, Calvin déclara qu'il n'avoit point d'autre fentiment que celui des Zuingliens. En confé

XXXVIII.

Mort de Bu

cer.

Cont. de Fl. 1. cxlvij. n.

tome XXX.

101.

AN. ISSI.

quence l'union entre Zurich & Genève devint plus forte qu'auparavant ; & elle fubfifte encore aujourd'hui.

XVII.

réta

Deux ans après, les Sacramentaires d'Allemagne perdirent un de leurs principaux docteurs en la perfonne de Martin Bucer, miniftre à Strasbourg. Cranmer alors archevêque de Cantorbéri l'avoit fait venir en Angleterre, pour travailler à y établir la religion proteftante, avec Pierre Martyr & Bernardin Ochin, général des Capucins, apoftat, qui avoient auffi été appellés pour commencer la réforme. Bucer mourut à Cantorbéri au commencement de l'an 1551, âgé de foixante-un ans. Il fut enterré fort honorablement; & plufieurs favans firent des épitaphes à fa louange. Mais quelques années après, fous le régne de Marie, fon corps fut déterré & brûlé. En 1560. la reine Elifabeth ayant bli les erreurs des Calvinistes en Angleterre, fit relever son tombeau & réhabiliter fa mémoire. Il gémiffoit, quelques jours avant fa mort, fur le déplorable état de l'Allemagne, & difoit qu'il étoit bien à craindre que les efforts de tant de gens de bien qui defiroient la réformation de l'Eglife, n'euffent point de fuccès. Il avoit raison. Des réformateurs diaboliques comme lui & fes femblables, mettoient le comble aux maux de l'Eglife, bien loin d'y apporter du reméde. Il a écrit un très-grand nombre d'ouvrages; & il n'y en a point parmi les Proteftans, qui ait été plus occupé des affaires de la réforme. Il eut plus de ménagement que Calvin pour l'ordre épifcopal; & il approuva la conduite des Anglois, qui le conferverent malgré l'oppofition de plufieurs de leur nation. Il y avoit encore d'autres articles fur lefquels ces deux héréfiarques n'étoient point d'accord. Bucer reprochoit à Calvin de ne juger que felon qu'il aimoit ou qu'il haïffoit, & de n'aimer & ne haïr que felon fa fantaisie. Ĉalvin ne laiffa pas d'être fort fenfible à fa mort; parce qu'il la regardoit comme une perte confidérable pour le parti de la réforme.

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