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XXVI.

Ouverture

Pife.

Ibid. n. 37

& 38.

raifon. Nous croyons que tous les cardinaux bien intentionnés fe joindront à nous. Cette lettre eft du quatrieme de Septembre. Dans le même mois il parut une apologie du concile de Pife au nom des cardinaux, prélats & autres qui le compofoient. Ils répondent à quatorze griefs qu'on leur objectoit, & à toutes les raifons du pape. Ils démontrent que tous les canons qui portent que le pape doit convoquer le concile, doivent s'entendre felon la régle ordinaire; mais qu'il y a des cas où un concile peut être indiqué & affemblé fans le fouverain pontife. Ils établiffent la néceffité de la convocation du concile de Pife fur quatre motifs : le précepte de l'église, le ferment folemnel du pape, le ferment des cardinaux, & la néceffité de remédier à de très-grands fcandales. Ils terminent leur apologic en montrant la nullité des cenfures portées contre eux par le pape, la néceffité de tenir un concile libre pour rétablir l'églife dans fon efprit primitif, & travailler à une férieufe réformation.

Après avoir protesté contre tout ce qu'avoit fait le pape au du concile de préjudice de l'indiction du concile de Pife, les cardinaux chargerent deux perfonnes de fignifier au pape en leur nom un acte d'appel de fa citation, & de la défense qu'il leur avoit faite de tenir le concile, avec pouvoir de convenir d'un lieu libre. Ces procureurs étant arrivés à Rome,ne reçurent point d'autre réponse du pape, fi ce n'est qu'on leur accordoit un délai de huit jours pour comparoître, & qu'on leur faifoit de nouvelles défenfes de tenir le concile. Cela n'empêcha pas néanmoins que le concile ne s'ouvrît à Pife le premier de Novembre 1511. Dès le trentieme d'Octobre quatre cardinaux fe rendirent à Pife; favoir Bernardin de Carvajal évêque de Sabine [ du titre de Sainte-Croix ] & patriarche de Jérufalem; Guillaume Briçonnet évêque de Paleftrine & archevêque de Narbonne; René de Prié, du titre de Sainte-Sabine, évêque de Baïeux, & le cardinal d'Albret. Ils étoient chargés des procurations des cardinaux du Mans, de Cofence, & de S. Severin. Il s'y trouva auffi un nombre de prélats, les procureurs du roi de

France, le chancelier de l'église de Paris; l'archidiacre de Meaux & celui de Lifieux; les députés des univerfités de Toulouse & de Poitiers; quelques docteurs de celle de Paris, & un grand nombre d'autres personnes habiles.

X I.

Ils fe rendirent tous le premier de Novembre dans le couvent des Camaldules, & s'affemblerent dans l'églife. Après la Meffe & le Sermon, on lut la bulle pour la convocation du concile, & la premiere feffion fut indiquée pour le cinquieme du même mois. Elle fe tint dans la cathédrale le jour marqué. Après les prieres & les cérémonies, où l'on fuivit ce qui avoit été obfervé au concile de Conftance, il fut décidé que la convocation du concile de Pife pour la réforme de l'église dans fon chef & dans ses membres, étoit juste & légitime; & que tout ce qui avoit été ou feroit fait au préjudice, étoit nul. Le cardinal de Sainte-Croix fut nommé préfident du concile, & le feigneur de Lautrec prépofé pour fa garde. On y élut auffi des protonotaires [ & des notaires ], des avocats, des promoteurs, & d'autres officiers pour procéder dans le concile. La feconde feffion, tenue le feptieme du même mois, fut encore employée à ce qui regardoit la police de l'affemblée. On y lut un canon d'un concile de Toléde, qui preferit une grande modération & beaucoup de gravité à ceux qui affiftent à ces faintes affemblées. On y déclara que le rang que les prélats y prendroient, ne porteroit aucun préjudice aux droits de chaque particulier, que le concile ne feroit point cenfé féparé, quand même quelques prélats s'en retireroient. Le dixieme du même mois fe tint la troisieme feffion (c). On y fit un décret qui ordonnoit, entre autres chofes, que le concile ne pourroit être féparé, que l'église ne fût réformée dans fon chef &

&

(c) [Selon le Continuateur de M. Fleury, le lundi neuvieme, (ou plutôt,` dixieme du même mois, on s'affembla; on réfolut de preffer les feffions; & en con Lequence la troifieme fe tint le mercredi douzieme de ce mois. ]

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XXVIII.

dans fes membres; qu'il pourroit néanmoins être transféré dans un lieu sûr, fi l'on pouvoit en convenir avec le pape, pourvû que ce ne fût point la ville de Rome. On y renou. vella les décrets du concile de Conftance fur l'autorité des conciles généraux, & l'on y décida qu'un concile général légitimement convoqué ne tient fon autorité que de Jesus-Christ, & que toute forte de perfonnes, même le pape, doivent lui obéir dans les chofes qui appartiennent à la foi, à l'extinction des schismes & à la réformation de l'églife.

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XII.

Les embarras que Jules caufoit continuellement à l'af Tranflation femblée, la mirent dans la néceffité de prendre de nouMilan. velles précautions. Dès que le pape avoit vû le concile Ibid. n. 44 convoqué, & les quatre cardinaux qui l'avoient de

du concile à

&fuiv.

mandé, réfolus d'y aller, il les avoit excommuniés publiquement, & privés de leur dignité & de leurs bénéfices. La plus grande partie des cardinaux qui étoient à Rome, s'oppoferent d'abord à cette fentence du pape. Il y en eut même quelques-uns qui lui repréfenterent que leurs collégues qu'il traitoit avec tant de rigueur, n'avoient rien fait contre l'ordre en fouhaitant la convocation d'un concile dans un lieu sûr pour la réformation de l'églife dans fon chef & dans fes membres, & en travaillant à procurer ce concile. Mais ces raifons ne faifoient qu'aigrir fon efprit, & il regardoit tous les cardinaux comme fes ennemis. Tous ces chagrins joints à la vie qu'il menoit, le firent tomber au commencement du mois d'Août dans une grande maladie, qui le réduisit en quinze jours à la derniere extrémité. Dès qu'il fe vit hors de danger, il fongea à former de nouvelles intrigues contre la France, & à prendre des mefures pour traver fer le concile de Pife. Il fit une ligue avec le Roi d'Espagne & les Vénitiens contre la France; & il vouloit commencer la guerre par attaquer les Florentins, qui permettoient que l'on tînt contre lui un concile dans une

ville de leur dépendance. On l'en détourna; mais les Florentins qui avoient fenti le danger auquel le concile les expofoit, ne le fouffroient plus qu'avec beaucoup de peine. Les peres s'en apperçurent; & ce fut la principale raifon qui les détermina à transférer le concile à Milan, pour y être continué, jufqu'à ce qu'on fût convenu avec Le pape d'un lieu sûr & commode pour les uns & les autres. La résolution en fut prise à la fin de la troisieme session; & on ordonna en même-temps que la quatrieme fe tiendroit à Milan le treizieme de Décembre.

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Les Peres du concile s'y rendirent le 8, mais ils ne purent tenir la Seffion que le quatrième de Janvier 1512. Ils s'y trouverent en plus grand nombre qu'à Pife, les cardinaux de Saint-Severin & de Saint-Ange s'étant joints à eux avec plufieurs évêques & quelques abbés. Le cardinal de Baïeux célébra la Meffe folemnellement, & le difcours fut prononcé par le procureur-général de l'ordre des Prémontrés. Il parla de la néceffité indispensable de tenir un Concile, & du zèle avec lequel les Peres devoient travailler à rétablir l'Eglife qui tomboit en ruine, in collabentis Ecclefie reparationem. Il fit une longue énumération des défordres qui ravageoient la vigne du Seigneur, & qu'on ne pouvoit corriger que par un concile œcuménique. L'évêque de Lodève lut enfuite les décrets. Dans le premier, les Peres difoient en substance, qu'ils avoient fouvent prié pape de travailler lui-même à rendre la paix à l'Eglife, & à réformer les abus qui s'y étoient introduits; ou d'affembler un concile général, comme celui de Constance l'a ordonné; ou enfin de s'unir à eux dans le concile qu'ils avoient affemblé: Que le pape ayant conftamment refusé de fe rendre à des propofitions fi juftes & si raisonnables, ils lui avoient encore propofé, pour tâcher de le fléchir, de choisir lui-même une ville entre dix qu'ils lui nommoient, ou de nommer lui-même dix autres villes d'Italie qui ne fuffent point de fa domination ni de celle des Vénitiens, parmi lesquelles ils en choisiroient une, afin qu'il s'y trouvât avec eux, pour concourir ensemble au bien général

le

XXIX. Quatrième &

cinquième felfions à Milan. & fuiv.

Ibid. n. 56.

AN. 1521.

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de l'Eglife: Qu'enfin, voyant que Jules demeuroit toujours inflexible, ils ne lui accordoient pour tout délai que le terme de trente jours, pour fe déterminer fur les offres qu'ils lui avoient fait faire. Dans un autre décret les perés exhortoient le pape & les princes à fufpendre la guerre, afin qu'elle ne fût point un obftacle aux bons deffeins que l'on avoit de réformer l'Eglife. La cinquieme feffion fut tenue le onzième de Février. Le cardinal de Sainte-Croix y célébra la Meffe, & expliqua l'endroit de l'Evangile qui regarde la correction fraternelle. Après fon difcours on renouvella le décret du concile de Conftance, contre ceux qui maltraitoient les perfonnes qui venoient au concile ou qui s'en retiroient.

On tint la fixieme feffion le vingt-quatrieme de Mars. La Meffe y fut célébrée par François de Rohan, Archevêque de Lyon; & le difcours fut prononcé par Guillaume Duchefne, docteur en théologie & député de l'Université de Paris. Les promoteurs du concile demanderent que Jules fût cité de nouveau, & que faute à lui de comparoître, il fût déclaré contumace. On leur accorda leur demande, & auffi-tôt les évêques de Châlons [fur Marne ] & de SaintFlour en habits pontificaux, monterent fur les degrés du grand autel de l'églife, & dirent par trois fois : Le pape Jules II eft-il ici, ou s'y trouve-t-il quelqu'un de fa part? Enfuite s'avançant au milieu de la nef, ils firent la même citation, & la troifiéme fut faite à la porte de l'église. Personne n'ayant comparu, ils vinrent faire leur rapport au préfident du concile. On publia enfuite divers décrets ou réglemens de police. On y exhorte les membres du concile à la modeftie & à la gravité qui conviennent à des eccléfiaftiques; à mener une vie exemplaire ; à fe fouvenir qu'ils étoient le fel de la terre & la lumiere du monde, & qu'ils devoient employer la priere, les jeûnes & les aumônes, pour attirer fur le concile les bénédictions du ciel. On confirma & on approuva comme légitime la convocation & la tenue du concile. Par un autre décret, les peres mirent fous la protection du concile l'empereur Maximilien & le roi de Fran

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