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Ibid. n. 115. quelle on lut un discours au nom des préfidens, pour ex& fuiv. horter les peres à ne rien négliger pour défendre l'Eglife catholique, & condamner les héréfies. On y releve la puiffance & l'autorité des conciles généraux, auxquels le SaintEfprit préfide. On ajoute que l'ufage d'affembler des conciles eft fondé fur l'exemple même des apôtres, & que leurs fucceffeurs ont toujours eu recours au même remede dans les temps fâcheux où la foi étoit en danger. On exhorte les peres à attirer l'affiftance divine par les larmes, les pricres & une vie irreprochable ; à fecourir l'Eglife qui paroiffoit prête à faire naufrage après avoir été agitée de tant de tempêtes, & à se souvenir qu'ils avoient Dieu pour fpectateur & pour juge. Après cette exhortation, le fecrétaire Maffarel lut quelques avis fur la maniere dont on devoit se comporter dans le concile. Enfuite l'évêque de Cagliari monta au jubé, & fit lecture du décret qui indiquoit la feffion fuivante à quarante jours. Le concile annonce dans ce décret, que l'on traitera dans cette feffion du facrement de la très-fainte euchariftie, & exhorte tous les prélats de travailler à appaiser Dieu par le jeûne & par la priere, afin qu'il daigne ramener les hommes à la vraie foi, à l'unité de l'Eglife & à la véritable regle des mœurs.

VII.

Lettre du roi

de France au concile.

Ibid. n. 119.

& 120.

Jacques Amyot, abbé de Bellofane, qui étoit alors à Venife avec le cardinal de Tournon, eut ordre de partir pour Trente, & d'y porter une lettre du roi de France au Concile. Pour entendre ce que renfermoir cette lettre, il faut favoir que Henri II. étoit alors en guerre avec le pape; & voici ce qui y avoit donné lieu. Octavio Farnèfe, neveu de Paul III. qui étoit maître de Parme, follicita l'empereur comme avoit fait fon oncle, de lui rendre Plaisance. Charles V. non-feulement refusa la demande de Farnèse, mais fit même connoître qu'il vouloit s'emparer de Parme. Il amufa le pape Jules III. & fut le mettre dans fes intérêts contre Farnèse, fe gardant bien de faire entrevoir où il en vouloit venir. Farnèle avoit cru que le pape le foutiendroit; mais n'espérant de lui aucun fecours, & voyant même qu'il fe laiffoit tromper par l'empereur, il eut recours au roi de

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France, qui lui promit fa protection, & bientôt après lui
envoya des
fe déclara auffi tôt contre la
troupes. Le pape
France, déclara Henri II. excommunié, dit qu'il mettroit
tout fon royaume en interdit, & menaça d'excommunica-
tion tous ceux qui oferoient foutenir Octavio Farnèse de
quelque maniere que ce fût. Le roi rappella auffi tôt tous
les évêques de France qui étoient à Rome, fit défenses à
tous ses sujets, fous de rigoureuses peines, d'y porter ou d'y
envoyer de l'argent, fous quelque prétexte que ce fût, &
d'y avoir recours pour des bénéfices, & ordonna de s'adref-
fer aux ordinaires pour toutes les affaires eccléfiaftiques.
Mais en même temps, , pour montrer que fes brouilleries
avec le pape ne diminuoient rien de fon zèle pour la reli-
gion, il fit un édit très-févere contre les Proteftans qui
étoient dans fon royaume, & donna à Jacques Amyot l'or-
dre dont nous venons de parler. Il parut au concile pen-
dant la feffion fans être attendu, & présenta au légat une
lettre du roi son maître adressée aux très-faints peres en Je-
fus-Chrift de l'affemblée de Trente. Les prélats Efpagnols
ne vouloient pas qu'on la lût, parce que dès le titre, Hen-
ri II. ne donnoit que le nom d'affemblée au concile. Amyot
s'efforça de perfuader que le terme conventus dont fon maî-
tre fe fervoit, ne devoit point être pris en mauvaise part;
que le fecrétaire avoit peut-être cru qu'il étoit plus latin
que concilium. Après une longue difpute, on convint de
Hire la lettre fans préjudice. Le roi y déclare en fubftance,
que la guerre qu'il a avec le pape & l'empereur l'empêche
d'envoyer aucun évêque à Trente; mais en même temps il
témoigne fon attachement à la foi catholique & fon zèle
contre les hérétiques. Sa lettre eft datée de Fontainebleau,
les Ides, c'est-à-dire, le treizieme d'Août 1551.

Après la lecture de la lettre, les peres entendirent celle de la proteftation, par laquelle le roi déclaroit que la guerre allumée depuis peu par le pape, ne pouvoit que nuire au concile & caufer des maux infinis dans toute l'Europe; qu'on ne pourroit attribuer tous ces malheurs qu'au fouverain pontife, s'il perfiftoit à entretenir la guerre; que tant qu'elle

VIII. Proteftation

de

ce prince. Ibid. n. 120.

& fuiv.

dureroit, il ne pourroit envoyer aucun évêque de fon royau-
me à Trente, & qu'ainfi le concile dont il fe voyoit exclus
malgré lui, ne pourroit par conféquent être regardé comme
œcuménique, mais comme un concile particulier; qu'ainfi
la France ne fe croiroit pas obligée de reconnoître un tel
concile, ni de fe foumettre à fes décrets. La protestation
ajoute que le roi aura recours aux mêmes remedes dont fes
prédéceffeurs fe font fervis en pareille occafion, & qu'il
n'aura rien plus à cœur, après la confervation de la foi, que
le maintien des libertés de l'Eglife Gallicane; que néanmoins
il est très-éloigné de manquer au refpect qu'il doit avoir pour
le faint fiége apoftolique, & qu'il fera voir de plus en plus
qu'il eft très-digne du nom de roi très chrétien, du titre de
fils aîné de l'Eglife & de protecteur de la foi. Cette protefta
tion n'eut d'autres fuites de la part du roi de France, que de
ne pas envoyer à Trente les évêques de fon royaume.

I V.

devoit

te.

On tint dans le cours du mois de Septembre plufieurs tions on congrégations, dans lefquelles on examina la question de examine ce qui l'euchariftie, qui devoit être décidée dans la prochaine traité dans la feffion. Le légat demanda que les décifions fuffent fi bien feffion fuivan mefurées, & que les termes en fuffent fi exactement choifis, Ibid. 1. cxlvij. qu'elles ne donnaflent aucune atteinte aux différens fentin, 1. & fuiy. mens de l'école, fur lefquels les théologiens catholiques étoient partagés. Il étoit en effet de la prudence des peres de ne pas expofer l'Eglife à de nouveaux troubles, par les difputes qui fe feroient élevées entre les docteurs catholiques, fi le concile avoit voulu difcuter & cenfurer leurs opinions. C'est ce que le pape avoit principalement recommandé, afin de réunir toutes les forces des Catholiques contre les nouvelles erreurs. Auffi peut-on dire que les peres ont été exacts prefque jufqu'au fcrupule, à chercher des expreffions qui ne bleffaffent les fentimens ni des uns ni des autres. Pendant que l'on difcutoit le dogme de l'euchariftie & tout ce qui y a rapport, on examinoit dans d'autres con

1X. Congréga

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grégations ce qui concernoit la réformation, & l'on com-
mença par la matiere de la jurifdiction épiscopale.

Quand tout fut difpofé pour la treizième feffion, on la
tint l'onzieme d'Octobre, qui étoit le jour auquel elle avoit
été indiquée. L'évêque de Majorque célébra la meffe, &
l'archevêque de Saffari fit le fermon, dont le fujet étoit l'ex-
cellence de l'euchariftie. L'archevêque de Cologne qui
étoit arrivé la veille, y affifta. Le décret de la doctrine ren-
ferme huit chapitres, dont voici la substance.

XI.
Décret fur
l'euchariftic.
Ibid. n. 17.

Le faint concile déclarant ici touchant l'auguste & divin
facrement de l'euchariftie, la doctrine pure que l'Eglife ca-
tholique a toujours enfeignée & qu'elle confervera jufqu'à la
fin des fiecles, confeffe & reconnoît, qu'après la confécra- & fuiv.
tion du pain & du vin, Notre Seigneur Jefus-Chrift vrai
Dieu & vrai homme, eft contenu véritablement, réellement
& fubftantiellement fous l'efpece de ces chofes fenfibles.
C'eft un crime & un attentat horrible, d'ofer détourner à un
fens métaphorique, les paroles par lefquelles Jefus-Chrift a
inftitué ce facrement. L'Eglife qui eft la colonne de la vérité,
déteste cette invention impie & diabolique, confervant
toujours la mémoire d'un bienfait qu'elle regarde comme le
plus excellent qu'elle ait reçu de Jefus-Christ. En effet, notre
Sauveur étant près de quitter ce monde pour aller à fon
Pere, inftitua ce facrement, dans lequel il répandit, pour
ainfi dire, toutes les richeffes de fon amour envers les hom-
mes, y renfermant le fouvenir de toutes fes merveilles. Il
nous recommanda d'annoncer fa mort en le recevant, &
voulut que ce facrement fût la nourriture fpirituelle de nos
ames, qui les fît vivre de fa propre vie, comme il le dit lui-
même: Celui qui me mange, vivra auffi pour moi. Il a voulu
de plus, qu'il fût le gage de notre bonheur éternel, & le
fymbole de l'unité de ce corps, dont il eft lui-même le chef.
La très-fainte euchariftie a cela de commun avec tous les
autres facremens, d'être un fymbole d'une chose fainte, &
un figne visible d'une grace invifible. Mais ce qu'elle a de
fingulier & d'excellent, eft que les autres facremens n'ont la
force & la vertu de fanctifier, que lorfqu'on les reçoit; au

X.
Treizieme

feffion. Le 11
Octobre 1551.

Ibid. n. 17.

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licu que dans l'euchariftie, l'auteur même de la fainteté y
eft, avant qu'on le reçoive. L'Eglife de Dieu a toujours cru,
qu'après la confécration, le véritable corps de Notre Sei-
gneur & fon véritable fang, avec fon ame & fa divinité,
font fous les efpeces du pain & du vin. Il est aussi très véri-
table que
l'une & l'autre efpece contient autant que toutes
les deux ensemble; car Jesus-Chrift est tout entier sous l'ef-
pece du pain, & fous la moindre partie de cette efpece,
comme auffi fous l'efpece du vin, & fous toutes les parties.
L'Eglife a de même toujours tenu pour conftant, & le faint
concile le déclare encore de nouveau, que par la confécra-
tion du pain & du vin, il fe fait une converfion & change-
ment de toute la substance du pain en la substance du corps
de Notre Seigneur, & de toute la substance du vin en la fub-
ftance de fon fang; lequel changement a été fort à propos
& très-proprement nommé par la fainte Eglife catholique,
tranffubftantiation. Tous les fidéles font donc obligés d'ho-
norer le faint Sacrement du culte de latrie qui eft dû au vrai
Dieu. Car nous y croyons préfent le même Dieu, que tous
les anges ont eu ordre d'adorer, lorsqu'il eft entré dans le
monde; le même que les
mages ont adoré en se profternant
à fes pieds; le même que les apôtres ont adoré en Galilée.
Le faint concile déclare de plus, qu'on a très-faintement

XII.
Suite du dé

cret fur l'eu- introduit dans l'Eglise la coutume de destiner une fête particuliere, pour honorer cet augufte & adorable facrement avec une vénération & une folemnité finguliere, & de le porter en proceffion avec refpect & avec pompe dans les rues & les places publiques. L'ufage de conferver dans un vafe facré la fainte euchariftic eft fi ancien, qu'il étoit connu dès le fiecle du concile de Nicée. Le faint concile ordonne de conferver la coutume fi fainte & fi néceffaire de porter ce facrement aux malades. Cette pratique eft jufte, raisonnable, & a été observée de tout temps dans l'Eglife. Plus ce facrement eft faint, plus un chrétien doit avoir foin de n'en approcher & de ne le recevoir qu'avec un profond refpe&t & une grande fainteté, se souvenant de ces terribles paroles 1. Cor.j. 28. de l'apôtre : Quiconque le mange & le boit indignement,

29.

chariftie.

Ibid. n. 22. & fuiv!

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