& Anne du Bourg parlerent hardiment pour les prétendus réformateurs. Les préfidens Chriftophe de Harlai & Pierre Seguier repréfenterent au roi, que le parlement s'étoit toujours fidelement acquitté de fes devoirs, & continueroit de les remplir pour la plus grande gloire de Dieu. Chrif tophe de Thou, pere du célebre historien de ce nom, dit que les gens du roi mériteroient d'être repris, librement chambres s'affemblerent ordre du roi faire le pro par pour cès à Spifame, évêque de Nevers, qui après s'être marié en fecret s'étoit retiré à Genève. III Toutes ces pourfuites du roi pour arrêter les progrès du Calvinifme, n'empêcherent pas les miniftres de s'affembler la même année 1559. dans le fauxbourg faint Germain à Paris. Leur fynode dura quatre jours, & l'on y fie plufieurs réglemens touchant la difcipline, la forme des fynodes, les élections, les devoirs des miniftres & des diacres, les cenfures, la maniere de contracter & diffoudre les mariages, l'excommunication, l'uniformité dans la doctrine. On croit communément que la confeffion de foi des prétendus Réformés fut compofée dans ce fynode, avec leur discipline, chacune en quarante articles: mais il eft plus probable que l'une & l'autre venoient de Genève, & qu'elles étoient l'ouvrage de Calvin qui vivoit encore. Cette confeffion de foi & cette difcipline ne fut rendue publique que fous les regnes fuivans. Calvin engagea les princes proteftans d'Allemagne à écrire au roi Henri II. pour le conjurer de ménager un peu ceux de leur religion, dont les prifons étoient remplies. Ils écrivirent au roi de leur propre main, & en par voyerent leurs lettres des amballadeurs. Ils prioient ce I V. VII. Mouvemens que les Calvi mort d'Henri II. & Le roi reçut les ambaffadeurs des princes proteftans avec bonté; & promit de leur répondre & de les fatisfaire. Mais il nomma en même temps des juges pour examiner l'affaire niftes excitent des confeillers qui étoient en prifon. Du Bourg, qui étoit après la mo prêtre, fut interrogé juridiquement; & ayant donné pour Ibid. n. 116. toute réponse une confeffion de foi hérétique, Eustache du fuiv. Bellai, évêque de Paris, le dégrada & l'abandonna au bras féculier. Henri II. mourut pendant que le procès de du Bourg se poursuivoit. Les Calviniftes crurent pouvoir former de nouvelles entreprises fous le règne de François II. Ce prince, pour arrêter leurs mouvemens, donna une déclaration qui fut enregistrée au parlement, par laquelle il défendoit toute affemblée nocturne, où, fous prétexte de religion, il fe commet, dit-il, des actions déteftables. Il voulut encore que l'on établit une chambre en chaque parlement, où l'on ne jugeroit que les crimes qui regardent la religion. On la nomma chambre ardente, parcequ'on y condamnoit au feu tous ceux qui perfiftoient dans l'héréfie. On reprochoit aux Calviniftes toutes fortes d'abominations; mais plufieurs perfonnes furent convaincues d'avoir rendu contre eux de faux témoignages. Les Calviniftes, au lieu de se renfermer dans les bornes d'une jufte défense fur les pré tendus crimes qu'on leur imputoit, répandirent un grand nombre de libelles diffamatoires contre l'autorité de la reine mere Catherine de Médicis, & des princes de Guife, prétendant qu'ils avoient ufurpé l'administration du royaume au préjudice des princes du fang. Les Guifes eurent recours à divers moyens pour empêcher l'effet que pouvoient produire ces écrits. Ils ajouterent des Italiens aux gardes ordinaires, plutôt pour leur propre fûreté que pour celle de la perfonne du roi. Mais comme l'autorité de la reine mere étoit attaquée dans les mêmes libelles, Jean du Tillet, greffier au parlement, très-favant dans le droit François, réfuta les raisons frivoles des hérétiques, en prouvant que les, rois après l'âge de quinze ans, pouvoient avoir des confeillers. de leur choix, & donner le gouvernement à ceux qu'ils en jugeoient les plus capables. Il s'éleve avec force contre les Proteftans, qu'il appelle les auteurs des troubles, & dit qu'on eft obligé de prendre les armes contre eux. VIE Du Bourg, Confeiller au parlement, condamné à Les princes de Guife, pour engager les Catholiques dans leur parti, prefferent le jugement d'Anne du Bourg & des autres confeillers qui étoient en prison. Un célébre avocat nommé Marillac qui lui fut donné pour confeil, l'engagea brûlé pour fon à faire une rétractation de fes erreurs. Mais les Calvinistes au Calvinifine. trouverent le moyen de faire entrer dans la prifon un miIbid. n. 136. niftre nommé Jean Malon qui avoit été carme, pour & fuiy, être pendu & attachement lui re préfenter qu'il ne devoit point abandonner la caufe de Dieu, ni montrer moins de courage que tant de perfonnes de la lic du peuple, qui l'avoient foutenue au milieu des feux fous le régne précédent; qu'il étoit prêt de recevoir la couronne qui la I X. ceux qui font mere, Moyens dont on fe fert en On examina enfuite l'affaire des autres confeillers, qui découvrir les Ibid. n. 14. Catholiques avouoient les abus ; & Henri II. & Philippe II. étoient convenus dans le traité de Câteau-Cambrefis, de faire affembler un concile général pour terminer les différends de la religion. Cependant du Faur fut condamné à demander pardon à Dieu, au roi & à la justice, à ne point paroître en parlement pendant cinq ans, & à une amende de cinq cens livres envers les pauvres. Des efprits turbulens ne ceffoient d'animer les Guises à traiter les hérétiques avec la derniere rigueur. Bourdin, procureur général, dit au roi, que les Calvinistes avoient deffein de mettre le feu à la ville, & de forcer les prifons pendant qu'on éteindroit l'incendie. Quoique ce fût peut-être un faux bruit, le roi ne laiffa pas d'expédier du château de Chambor où il étoit alors, des ordres au parlement pour juger & punir ceux qui étoient fufpects. L'on établit extraordinairement quatre chambres tirées de tout le corps du parlement pour exécuter ces ordres, & on condamna tous ceux que l'on foupçonnoit d'être favo rables à l'héréfie. Pour les difcerner, on s'avisa de mettre aux coins des rues dans toutes les villes, & fur-tout à Paris, des images de la fainte Vierge, que l'on ornoit, devant lefquelles on faifoit brûler de petits cierges, & où le petit peuple & les enfans chantoient des litanies & d'autres prieres. L'on n'avoit pas manqué d'y placer des troncs, où les paffans étoient obligés de mettre de l'argent; & fi quelqu'un refufoit de payer cette espèce de tribut, ou palloit fans fonger à faluer ces images, le peuple fe jettoit fur lui comme fufpect, & l'on s'eftimoit heureux lorfqu'on en étoit quitte pour être battu; ou lorfqu'après avoir été traîné dans la boue, on étoit conduit en prifon la vie fauve. Les eccléfiaftiques qui étoient inftruits, gémiffoient de ces abus, & plaçoient autant qu'ils le pouvoient, ces images dans les églifes. Mais le mal étoit trop grand pour être arrêté par un reméde auffi foible. L'exceflive rigueur avec laquelle on continuoit de traiter ceux qui étoient foupçonnés d'héréfie, ne fervit qu'à irriter davantage les Calviniftes. Ils en devinrent furieux, & ils ne fongerent plus qu'à augmenter les défordres où la France étoit déja plongée, |