avoient expliqué l'article de la cène, ils déclarerent cette explication hérétique, captieufe, & infuffifante : hérétique, parce qu'elle ne reconnoiffoit point la présence substantielle & proprement dite: captieufe, parcequ'en la niant, elle fembloit vouloir l'admettre: infuffifante, parcequ'elle ne faifoit point mention du miniftere des prêtres, de la force des paroles facramentelles, & du changement de fubftance qui en eft l'effet naturel. Les prélats oppoferent de leur côté aux ministres, une déclaration de leur foi, auffi parfaite & auffi précife, que celle des Calvinistes avoit été défectucuse & enveloppée. Beze la rapporte en ces termes : Nous croyons & confeffons qu'au faint facrement de l'autel, le vrai corps & le fang de Jefus-Chrift eft réellement & tranffubftantiellement fous les efpéces du pain & du vin, par la puiffance & la vertu de la divine parole prononcée par le prêtre, feul miniftre ordonné à cet effet, felon l'inftitution & le commandement de Notre Seigneur Jesus-Christ. Il n'y a rien-là d'équivoque ni de captieux; & Beze avoue que c'eft tout ce qu'on put tirer alors du clergé, pour appaiser les troubles de la religion; Les prélats, dit-il, s'étant rendu juges, au lieu de conferens amiables. Ce témoignage de Beze fuffit pour montrer que les évêques firent leur devoir, en expliquant nettement leur foi, en évitant les grands mots qui éblouiffent fans rien fignifier de net & de précis, & en refufant d'entrer dans aucune compofition fur ce qui regarde la foi. Une telle fimplicité n'étoit pas du goût des miniftres, (femblables en cela à tous les partifans de l'erreur;) & ainfi une fi grande affemblée se sépara fans rien avancer, Dieu confondit la politique & l'orgueil de ceux qui crurent par leur éloquence, par de petites adreffes & de foibles ménagemens, éteindre un feu qui étoit dans toute la force de l'embrafement, XIII. XXXV. Caractere de l'évêque de Va La réformation de la difcipline ne réuffit guères mieux, On fit de belles propofitions & de beaux difcours, dont on lence qui pro- ne vit que peu d'effet, L'évêque de Valence difcourut pola admirablement admirablement à fon ordinaire, contre les abus & fur les Par rapport aux Calviniftes, ils regarderent comme un mation dans le colloque. Hiftoire des variations. XXXVI. niftes refufent de figner tous confeffion d'Ausbourg. les articles de la d'Aufbourg. Ils crurent s'échapper en demandant de leur côté aux Catholiques, s'ils vouloient figner les autres articles. Mais c'étoit une subtilité & une vaine défaite : car les Catholiques ne se soucioient en aucune forte des Luthériens ni des défenfeurs de la confeffion d'Aufbourg: au lieu que c'étoit aux Calviniftes à les ménager & à les refpecter, pour ne point paroître condamner les premiers chefs de la prétendue réforme. Le cardinal n'en tira rien davantage; & il laiffa féparer l'affemblée, content d'avoir montré à toute la France, que ce parti de réformateurs qui paroiffoit audehors fi puiffant, étoit fi foible au-dedans par fes divifions. Antoine de Bourbon, roi de Navarre, & premier prince du fang, jufqu'alors affez favorable à la nouvelle fecte qu'il ne connoiffoit que fous le nom de Luther, s'en désabusa; & au lieu de la piété qu'il croyoit y régner, il commença dès-lors à n'y reconnoître qu'un zèle amer & un prodigieux entê tement. Au refte će ne fut pas un petit avantage pour la bonne caufe, d'avoir obligé les Calvinistes à recevoir de nouveau dans une telle affemblée toute la confeffion d'Aufbourg, quables de Cal- excepté le feul article de la cène. En effet ils renonçoient Aveux remar vin. Fin du colloque de Poifli. Boffuet. Ibid. par ce moyen à un grand nombre de points importans de leur doctrine. Beze en fit folemnellement la déclaration du confentement de tous fes collégues. Mais malgré cet aveu que la politique & le defir de s'appuyer autant qu'ils pou voient de la confeffion d'Aufbourg, tira de leur bouche, ils avoient toute autre chofe dans le cœur. On ne peut en douter quand on lit les lettres que Calvin écrivit à ceux de fes difciples qui affiftoient au colloque. Vous devez prendre garde, leur dit-il, de ne point paroître opiniâtres en voulant trop foutenir votre bon droit, & de ne point faire rejetter fur vous toute la caufe de la rupture. Vous favez que la confeffion d'Aufbourg eft le flambeau dont fe fervent vos furies, pour allumer le feu dont toute la France eft embrafée mais il faut bien voir pourquoi on vous presse tant de la recevoir. Sa molleffe a toujours déplu aux perfonnes fenfées. Mélanchton fon auteur s'eft fouvent repenti XXXVII. Etranges va riations des Proteftans. * de l'avoir dreflée, & enfin elle a été faite à l'ufage de l'Al- ARTICLE XI. Troifiéme convocation du concile de Trente. Ce qui s'y passe I. QUOIQUE le concile de Trente n'eût été que suspen- (g)[ Ou plutôt vingt & un : c'est-à-dire, 21 au lieu de 12. Voyez au tome fuivant art. XVIII. n. 26.] I. Motifs qui engagent le pape Pie IV. à convoquer de nouveau le concile de Trente. Cont. de Fl. tome XXX. l. cl. n. 88. & fuiv. de Passau, fi favorable aux Proteftans, dans la diete qu'il tint à Aufbourg en 1558. Paul IV. mourut en 1559. & on élut en fa place le cardinal de Medicis, qui prit le nom de Pie IV. Nous avons vû ce qui se passa de plus remarquable par rapport aux nouveaux hérétiques, pendant cette longue fufpenfion du concile. Les motifs que l'on avoit eus pour le convoquer, devenoient tous les jours plus puissans, & fembloient devoir en hâter le rétablissement. La cour de Rome qui avoit toujours été ennemie du concile, auroit bien voulu qu'il n'en fût plus queftion; mais l'empereur menaçoit d'avoir recours à des conférences publiques, & les François parloient d'un concile national. Le pape en fut tellement allarmé, que malgré fon oppofition pour le concile général, il se détermina à le rétablir à Trente. Il publia la bulle de convocation à la fin de Novembre 1560. Il y eut beaucoup de difficultés à éclaircir & d'obftacles à lever, mais dont le détail nous meneroit trop loin. C'étoit une fuite du trifte état où fe trouvoit alors l'Eglife. II. més pour pré tieme feffion. Le 18 de Janvier 1562. Contin. de Ft. XXXII. 1. clvi. n. 35. & fuiy Hercule de Gonzague, cardinal de Mantoue, fut nomLégats nom- mé premier légat. Il eut beaucoup de peine à accepter cette fider. Dix-fep- commiffion, dont le succès lui paroifloit très-douteux & le travail très-certain. Le pape lui donna pour collegue le cardinal Jacques Dupui, archevêque de Bari. Il étoit de Nice en Provence ; il paffoit pour excellent jurifconfulte, & étoit comme l'oracle de la cour de Rome. Le pape leur affocia enfuite les cardinaux Seripand, Napolitain, général des Augustins & archevêque de Salerne ; Hofius, Polonois [évêque de Culm, & enfuite de Warmie ], & Simonette [Milanois], évêque de Péfaro. Hercule de Mantoue & Seripand arriverent à Trente au mois d'Avril 1561. Les évêques & les théologiens s'y rendirent dans le cours de l'année; en forte qu'on fut en état de tenir la dix-feptieme feffion le dixhuitieme de Janvier 1562. [Le cardinal Dupui étant infirme le , pape avoit nommé pour fixiéme légat le cardinal d'Altemps fon neveu, évêque de Conftance ]. Tous les prélats, qui étoient au nombre de cent douze, & tous ceux qui avoient droit d'affifter au concile, s'affemblerent dans |