ancien que celui de Lorraine; perfuadé que celui-ci ne pourroit fouffrir qu'un cardinal de fa nation, qui lui étoit fi inférieur, le précédât dans le concile. Il manda en mêmetemps aux légats de finir le concile le plutôt qu'il feroit pof Ibid. n. 80. fible. Les légats qui étoient déja bien informés des intentions du pape, avoient fait diftribuer aux docteurs huit articles fur le facrement de l'ordre, afin qu'ils les examinaflent & diffent leur avis dans les congrégations. Et même afin que cet examen fe fit plus promptement, ils avoient partagé les théologiens en fix claffes, donnant à examiner un article à chacune de ces claffes, qui étoient compofées de quelques théologiens du pape & des autres princes; & ils avoient ordre de parler chacun feulement une demi-heure. Voici ces articles. 1. Si l'ordre eft un facrement inftitué par Jesus-Chrift, & non une fimple cérémonie, pour élire des miniftres de la parole de Dieu & des facremens. 2. Si l'ordre eft un feul & unique facrement, & fi les ordres inférieurs ne font pas feulement des degrés pour monter au facerdoce. 3. Si dans l'Eglife il y a une hiérarchie compofée d'évêques, de prêtres & d'autres miniftres. Si tous les chrétiens font également prêtres. Si la vocation & le confentement du peuple ou des magiftrats font néceffaires, & fi les prêtres peuvent devenir laïcs. 4. S'il y a dans le nouveau teftament un facerdoce visible, & un pouvoir de confacrer & d'offrir le corps & le fang de Jesus-Chrift & d'ab foudre des péchés; ou s'il n'y a qu'un fimple miniftere de prêcher l'évangile. 5. Si on reçoit le Saint-Efprit dans l'ordination, & fi ce facrement imprime quelque caractere. 6. Si l'onction & les autres cérémonies font néceffaires ou fuperflues dans l'ordination. 7. Si les évêques font fupérieurs aux prêtres ; fi le pouvoir qu'ils ont de conférer les ordres leur eft commun avec les prêtres, & s'ils n'ont pas un pouvoir fpécial de donner la confirmation. 8. Si les évêques appellés & ordonnés par l'autorité du font pape légitimes; & fi ceux qui le deviennent par une autre voie fans institution canonique, font de vrais évêques. Les théologiens & les canoniftes ayant examiné & dif XXV. articles fur le l'ordre. XXVI. titution des Ibid. n. 93. & fuiv. cuté ces articles, on nomma fix évêques pour former les vives fur l'inf chapitres & les canons. Ils s'acquitterent en huit jours de évêques. leur commiffion. On tint une congrégation le treizieme d'Octobre, pour examiner le décret qu'ils avoient dreffé. Il y avoit quatre chapitres & huit canons. Les légats s'étoient imaginés que tout fe pafferoit avec beaucoup de tranquillité: mais il s'éleva un orage qui fut fi violent, que peu s'en fallut, dit Pallavicin, que l'efpérance qu'on avoit conçue du rétabliffement de la république chrétienne ne se changeât en désespoir. Dans le feptieme de ces canons, on avoit employé la formule prescrite du temps du cardinal Crefcentio, qui préfidoit au concile fous Jules III. On y condamnoit cette erreur : Que les évêques ne font pas fupérieurs aux prêtres de droit divin; mais les légats retrancherent ces derniers mots, de droit divin, craignant qu'ils ne réveillaffent la dispute fur le droit de la réfidence. Quelques évêques Efpagnols qui fouhaitoient fort qu'on décidât cette queftion, fe plaignirent aux ambassadeurs de France de la fupercherie des légats; & de Lanfac avertit ceux-ci en ami, du murmure qu'excitoit le retranchement de ces deux mots. Dès qu'il fe fut retiré, on vit entrer les archevêques de Grenade, de Brague, de Messine, & l'évêque de Ségovie, qui demanderent pour quelle raifon on avoit retranché les mots de droit divin, des décrets qui avoient été autrefois propofés par le cardinal Crefcentio. Ils ajouterent qu'il étoit évident qu'on vouloit empêcher qu'on ne traitât la queftion de la réfidence, malgré toutes les promeffes qui avoient été faites de l'examiner. L'archevêque de Grenade qui portoit la parole, prit pour témoin de la vérité de ce qu'il difoit, l'évêque de Ségovie, qui étoit préfent, & qui avoit affifté aux congrégations du concile fous Jules III. Il foutint encore qu'on ne pouvoit éviter de décider ces deux points: Que les évêques font établis de droit divin; & qu'ils font auffi de droit divin fupérieurs aux prêtres; puifque les hérétiques nioient l'un & l'autre. Il cita plufieurs paffages des peres, & particulierement de faint Cy prien, qui dit que l'épiscopat n'eft qu'un dans tous les évê- XXVII. Les évêques leur jurifdic prouvent que tion eft de droit divin. Ibid. n. 109, & 110. Dans une autre congrégation qui fe tint auffi au mois d'Octobre, un grand nombre de prélats demanda qu'on ajoutât au canon qui regarde l'institution des évêques la clause qui exprime qu'elle eft de droit divin. Dom Barthelemi des Martyrs parla fur ce fujet avec beaucoup de dignité. Plufieurs autres prélats des plus diftingués ne montrerent pas moins de zèle. On prouva que comme le pape eft fucceffeur de S. Pierre, les évêques font les fucceffeurs des autres apôtres ; que l'épiscopat eft le premier des trois ordres hiérarchiques; que Jefus-Chrift étant l'auteur de la hiérarchie, eft auffi auteur de la jurisdiction qui en eft inféparable; que les évêques ont fuccédé aux apôtres, & quant à la puiffance d'ordre, & quant à celle de la jurisdiction; & qu'on devoit regarder cette vérité comme appartenant à la foi. L'évêque de Segna en Croatie, fur le golfe de Venife, après s'être range du côté de l'archevêque de Grenade, dit qu'il n'auroit jamais cru qu'on mît en question dans un concile, fi les évêques tiennent leur autorité de Jefus-Chrift. Si, dit-il, ils ne tiennent pas leur autorité de lui, le concile qui eft compofé d'évêques n'en tient tient donc pas auffi la fienne? Pourquoi donc demeurer à' VIII. Dans la congrégation du vingtieme d'Octobre au matin, Mmm XXVIII. Lainez, général des Jésuites cours où il fait un difconcentre toula hiérarchie Ibid. n. 111. dans le pape. ceux qui difoient que les apôtres avoient été ordonnés évêques par Jefus-Chrift, ajoutoient qu'il fit cette fois là l'office de faint Pierre, en donnant aux apôtres ce qu'ils devoient recevoir de leur collegue. Lainez néanmoins avoit déclaré dans fon exorde, qu'il ne fortiroit de fa bouche aucune parole de flatterie, & il avoit eu la témérité d'en prendre à témoin Dieu même, juge des vivans & des morts. On vient de voir avec quelle exactitude il tint fa promeffe. • XXIX. Il n'eft pas difficile, dit le continuateur de M. Fleuri, Soulevement de s'imaginer combien ce difcours dut plaire aux partifans des opinions ultramontaines. Mais les plus fenfés & les plus inftruits le trouverent plein de flatteries baffes & indignes d'un grave théologien. Eustache du Bellai, évêque de Paris, qui n'avoit pû entendre ce difcours de Lainez, parcequ'il s'étoit trouvé incommodé, ayant appris ce qu'il contenoit, en fut indigné, & dit que dans la premiere congrégation il vouloit parler contre cette doctrine, inouie dans Les fiecles paffés, inventée depuis cinquante ans par Cajetan, qui vouloit être cardinal, & dès-lors cenfurée par la Sorbonne. Il ajouta, que s'il n'y avoit qu'un feul évêque de droit divin & diftributeur de toute la puiffance des autres, comme le prétendoit Lainez, il s'enfuivroit qu'il n'y auroit qu'un feul évêque, & que les autres ne feroient que des vicaires que cet unique évêque pourroit deftituer: Qu'il vouloit exciter tous les peres à empêcher que l'autorité epifcopale, déja fi rabaiffée, ne fût entierement anéantie, pendant que toutes ces congrégations de réguliers qui pulluloient fi prodigieufement, lui donnoient de fi rudes fecouffes. Lorfque l'évêque de Paris parloit ainfi, la fociété des Jéfuites faifoit par toute la terre les progrès les plus furprenans, comme nous le verrons dans la fuite. Le difcours de Lainez avoit révolté beaucoup de perfonnes, & les ambaffadeurs de France témoignerent dans un repas qu'ils donnerent aux autres ambafladeurs, combien ils en étoient indignés. qu'excita ce difcours. Ibid. n. 112. [Le cardinal d'Altemps fe retira de Trente, &.fe démit feurs peres du de fa commiffion de légat. ] Les [ autres ]légats voyant quel XXX. Zèle de plu |