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établis. Il diminua les tailles chaque année jufqu'à ce qu'elles fuffent réduites à la moitié, quoique les guerres qu'il avoit à foutenir l'obligeaffent de faire de très-grandes dépenfes. On l'a vû plus d'une fois répandre des larmes, lorfque la néceffité l'obligeoit d'impofer quelque léger fubfide. Aufsi jamais Prince ne fut plus tendrement aimé, ni plus universellement & plus fincerement regretté. On lui donna de fon vivant l'aimable titre de pere du peuple, qu'il méritoit fi bien par fa clémence & par fa bonté. Il fut inhumé à Saint-Denys, & on porta fon cœur aux Céleftins de Paris dans la chapelle d'Orléans. Nous rapporterons ici le jugement que porte de ce prince un des plus grands hommes de notre temps." Louis XII. dit-il, fi juftement appellé le M. Duguet » pere du peuple, touché des maux de l'églife dont ceux prince,+part. de l'état font inféparables, eut assez de lumiere & de ferpour oser résister aux abus que la domination arbitraire des papes avoit introduits, & rétablir les élec

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,, tions, en faifant publier de nouveau la pragmatique-fanction. Mais ce zèle éclairé excita contre lui, non-feule,, ment d'injuftes cenfures, mais une guerre ouverte de la papes, qui ne firent jamais paroître tant de pafque contre ce prince, ami de la paix, mais ennemi de l'injustice. „

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part des

fion

VIII.

Le comte d'Angoulême, duc de Valois, fuccéda à Louis XII. & prit le nom de François I. Il étoit né à Cognac en Angoumois le quatorze (e) de Septembre 1494. & avoit par conféquent près de vingt-un ans lorsqu'il monta fur le trône. Il defcendoit du roi Charles V. par Louis de France duc d'Orléans, fecond fils de Charles V. avoit pour aïeul Jean d'Orléans comte d'Angoulême,troifieme fils de Louis, & pour pere Charles comte d'Angoulême, coufin germain de Louis XII. François I. fut facré à Reims le vingt-cinquieme de Janvier par l'archevêque Robert de Lenon(e) [Ou le douzieme, comme le difent M. Fleury & M. le préfident Hénault.]

Inftit. d'un

ch. s.art. vI.

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XX.

Le pape en

France. Il est

commoder

I.

Ibid. n. 39.

& fuiy.

court, & prit le titre de duc de Milan, parce que ce duché lui appartenoit à caufe de Valentine de Milan sa bifaïeule, femme de Louis duc d'Orléans qui fut tué à Paris en 1407. De Reims il alla à Saint-Denys, pour rendre graces à Dieu de fon avénement à la couronne, & lui demander fon fecours pour bien gouverner fes fujets. Il s'appliqua d'abord à rechercher l'alliance & l'amitié des Princes voifins. Il fit avec le roi d'Angleterre un nouveau traité de paix semblable à celui que fon prédéceffeur venoit de faire. Il en fit auffi un prefque dans le même tems avec l'archiduc [Charles] prince d'Espagne & fouverain des Pays-Bas. Il voulut enfuite négocier une alliance avec l'empereur & Ferdinand roi d'Arragon, mais ce fut fans fuccès: & alors il se détermina à renouveller la ligue qui avoit été faite entre Louis XII. & les Vénitiens.

Léon X.étoit fort intrigué des négociations dont on vient tre dans une li- de parler. François I. qui n'ignoroit pas fes inquiétudes, le que contre la fit prier de demeurer au moins neutre entre lui & Maxiforcé de s'ac-milien Sforce, ufurpateur du duché de Milan, jufqu'à ce avec François que les armes en euffent décidé. Le pape le promit, & en même-temps il résolut de prendre des mefures pour fe liguer avec Ferdinand, & empêcher les François de venir en Italie.. Il entra en effet quelque temps après dans la ligue que fit ce Prince contre la France avec l'empereur & les Suiffes. Mais afin de tromper François I. il voulut que fon acceffion au traité demeurât fecrette. Il s'engagea avec fes alliés à contribuer plus du tiers pour les frais de la guerre, & fit préfent au roi d'Espagne des fommes qui avoient été levées pour la croifade contre les Turcs, employant ainfi contre les François l'argent que les chrétiens n'avoient donné que pour faire la guerre aux infidéles. La réunion de tant d'ennemis puiffans ne fit point abandonner à François I. le deffein qu'il avoit de rentrer en poffef fion de fon Duché de Milan. Comme il avoit befoin d'argent pour une fi grande entreprise, le chancelier du Prat lui fuggéra de rendre vénales les charges de judicature, d'augmenter les tailles, & d'établir de nouveaux impôts

fans attendre le confentement des états, ce qui étoit contraire aux loix & aux ufages du royaume. Le roi ayant formé une armée d'environ quarante mille hommes, fe mit à la tête, & paffa les Alpes vers la fin du mois d'Août, malgré les précautions que les Suiffes & l'armée du pape avoient prifes pour l'en empêcher. Pendant que l'armée Françoise achevoit de s'affembler dans le marquifat de Saluces, un détachement de quelques troupes, conduit conduit par la Palice, s'avança jufqu'à Villefranche en Piémont, où étoit la cavalerie du pape, commandée par Profper Colonne. Les François obligerent ce général de fe rendre prifonnier de guerre avec tous fes foldats, & prirent tout le bagage avec environ mille chevaux de fervice. Dès que le pape en eut appris la nouvelle, il fongea à faire fa paix avec François I. mais bientôt après il en fut détourné par Jules de Médicis fon coufin germain. Le roi avoit tout lieu de fe promettre les plus grands fuccès, & cependant il n'étoit pas éloigné de fe prêter à un accommodement raisonnable. Peu s'en fallut même qu'il n'en conclût un à Verceil avec les Suiffes, ce qui auroit infailliblement terminé la guerre : mais fur la nouvelle qu'ils reçurent qu'il leur venoit de leur pays un renfort de dix mille hommes, ils ne voulurent plus entendre parler de négociation. Le roi fe trouva donc forcé d'aller en avant. Comme toutes les villes venoient fe rendre d'elles-mêmes, fon armée vint en quelques jours camper près de Marignan, petite ville qui n'eft qu'à une bonne lieue de Milan. Les Suiffes l'attaquerent le treize de Septembre à deux heures après midi.

Jamais combat ne fut plus furieux ni plus opiniâtre. La nuit l'interrompit, mais ne le termina point. Le roi, accablé de fatigue, la paffa tout armé fur un affut de canon, n'étant éloigné que de cinquante pas du plus gros bataillon des Suiffes. Le lendemain dès le matin le combat recommença avec la même valeur de part & d'autre ; mais enfin les Suiffes perdirent courage, abandonnerent le champ de bataille qu'ils laifferent couvert d'environ quinze mille des leurs, & prirent la route de leur que le pape

pays. Dès

I.

Entrevue de

François I. Le

pragmatique

roi y confent.

eut appris cette fâcheufe nouvelle, il envoya ordre à fon nonce en France, de conclure au plutôt fon accommodement avec François I. Le nonce fit tant d'inftances, que le roi convint de faire un traité, dont la premiere condition étoit que le pape lui rendroit les villes de Parme & de Plaifance. Le roi l'ayant figné, le nonce le porta au pape, afin qu'il le ratifiât. Mais comme il fe flattoit que les Suiffes enverroient inceffamment un puiffant fecours en Italie, il héfita long-temps, & ne fe détermina que fur la nouvelle de la prise du château de Milan par les François. Ce détail que nous avons abrégé le plus qu'il nous a été poffible, a paru nécessaire pour la fuite de l'hiftoire, & pour faire connoître Léon X. Ce pape avoit fait roître jufqu'alors fes grands talens pour la conduite des affaires les plus difficiles. On verra dans l'article fuivant le chef-d'œuvre de fa rufe & de fa politique.

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Concordat entre le pape Léon X, & le roi de France

François I.

I.

pa

LEON X. n'eut pas plutôt fait la paix avec François I. Léon X avec qu'il chercha les moyens d'en tirer quelque avantage, qui pape preffe le pût le confoler du rétablissement des François en Italie, roi d'abolir la & le dédommager des places qu'il avoit été obligé de leur fanction, & le rendre. Il ne doutoit point que s'il pouvoit s'entretenir Cont. de Fl, avec le roi, il n'en obtînt plusieurs chofes qu'il avoit fort tome XXV. à cœur. Il lui fit donc demander une entrevûe par fon nonce; & ce prince la lui accorda volontiers, tant pour jouir du plaifir de voir la cour de Rome, & de lui faire voir la fienne, que pour travailler à réconcilier avec le pape les princes d'Italie déclarés pour la France. Ils fe rendirent tous les deux à Bologne, qui avoit été choisie pour le lieu de l'entrevûe ; & le roi y arriva le onzieme de

1. cxxiv.n.76.

& fuiv.

AN. 1515.

Décembre, & y demeura trois jours, pendant lefquels il eut avec le pape plufieurs conférences. Léon X. avoit un talent merveilleux pour manier les efprits; & ce talent étoit foutenu d'une grande expérience dans les négociations, & d'une politique extrêmement rafinée. François I. au contraire n'avoit que de l'efprit, de la politeffe & de la droiture. Auffi donna-t-il dans tous les piéges que ce rufé politique voulut lui tendre. Après qu'ils eurent traité de différentes affaires temporelles, le pape propofa au roi d'abolir la pragmatique-fanction, & il le fit avec tout l'artifice dont il étoit. capable.

En établiflant la pragmatique, on n'avoit eu d'autre 'deffein que de maintenir en France l'ancienne difcipline, fondée fur les maximes des peres & fur les décrets des conciles les plus refpectables. Mais la cour de Rome, qui avoit fubftitué les décretales des papes aux anciens canons, ne pouvoit fouffrir qu'on eût borné en France l'exercice de fa jurifdiction, tandis qu'elle étoit abfolue dans la plupart des états de l'Europe. Elle regardoit la pragmatique comme un ouvrage de ténebres formé dans le fchifme, pour empêcher les papes d'étendre leur pouvoir. De-là vinrent les efforts que firent Pie II. fous Louis XI. Alexandre VI. fous Charles VIII. & Jules II. fous Louis XII. pour abolir cette loi importante. François I. allarmé de la propofition de Leon X. le fupplia de confirmer la pragmatique au lieu d'en poursuivre l'abolition. Mais ce pape employa tout ce qu'il avoit d'habileté & d'adreffe pour prouver qu'il falloit absolument l'abolir. Le chancelier du Prat, qui s'entendoit avec lui, donna l'idée d'un concordat qui feroit fubftitué la Pragmatique; & le pape fit beaucoup valoir les prétendus avantages que le roi trouveroit dans ce nouveau réglement, fans dire un mot du danger bien plus réel & prefque inévitable où fon falut feroit expofé. En lui promettant le droit de nommer aux évêchés & aux abbayes, il lui fit fentir que par ce moyen les eccléfiaftiques deviendroient auffi dépendans de lui que fes autres fujets ; que leur fortune & leur élévation étant en fa main, ils ne pouvoient

à

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